| BRICOLE, subst. fém. I.− HIST. DES ARMES. Machine de guerre, sorte de catapulte* composée d'une poutre à cheval entre deux montants, et d'un long ressort que l'on tend au moyen d'une corde ou d'une courroie attachée à une de ses extrémités : 1. Quatre machines nommées bricoles, probablement des espèces de catapultes, portées sur des roues, étaient sur le rivage [de Barcelone].
Mérimée, Histoire de Don Pèdre Ier, roi de Castille,1848, p. 261. − Au fig. [Cette machine de guerre permettant de lancer des projectiles à l'abri et à l'insu de l'ennemi] Vx. Ruse, moyen détourné. II.− P. anal. A.− [P. réf. au balancement, au mouvement de va-et-vient de la poutre] 1. Fam., cour. Besogne, travail intermittent d'une technique sans garantie et de faible rendement : 2. Il y a un tas de bricoles à faire qui me prendront la journée et la matinée du jour suivant.
Ponson du Terrail, Rocambole,t. 1, L'Héritage mystérieux, 1859, p. 389. − P. méton. Résultat du travail intermittent; objet sans importance : 3. Il ne vient ici que les jours de pluie. Les autres jours, il vend des bricoles, à la sauvette.
G. Duhamel, Confession de Minuit,1920, p. 143. 4. Léon, à ce moment-là, voulait vendre aussi un lot de bricoles : porcelaines dépareillées, vieux pots à fleurs, chenêts, ferraille de toute sorte.
Montherlant, Les Célibataires,1934, p. 828. − Arg. ,,Louage et réparation de voitures`` (Esn. 1966). ♦ Travailler à la bricole. ,,Travailler chez un petit joueur`` (A. Simonin, J. Bazin, Voilà taxi! 1935, p. 214). 2. MAR. ,,Balancement imprimé à un navire par une diminution de stabilité due à un excès de poids dans les hauts`` (Jal2). B.− [P. réf. à la corde qui sert à lancer le projectile] 1. TECHNOLOGIE a) BOURRELLERIE − Lanière de cuir que l'on passe autour du cou pour porter des fardeaux, tirer une voiture à bras, etc. Un tambour, au milieu du banc, laissait pendre sa bricole (Flaubert, L'Éducation sentimentale,t. 2, 1869, p. 145): 5. Il voulut que le déménagement s'effectuât sans retard. (...), emprunta une petite charrette, et, avec l'aide de ses amis, il la combla de meubles, s'attela à la bricole...
Huysmans, Les Sœurs Vatard,1879, p. 241. 6. Penché en avant, il pesait de tout son maigre corps sur la bricole qui lui sciait les épaules.
G. Duhamel, Confession de Minuit,1920, p. 97. ♦ ,,Sangle qui sert à soulever les glaces d'un carrosse`` (Chesn. 1857). − ,,Partie du harnais d'un cheval de trait contre laquelle s'appuie son poitrail lorsqu'il marche en avant`` (Chesn. 1857) : 7. Un homme crasseux, barbu, le « palefrin », apparaît, portant des bricoles. Il harnache les chevaux, les pousse dans les brancards.
Dabit, L'Hôtel du Nord,1929, p. 76. ♦ P. métaph. : 8. ... si les vrais représentants de la nation, les honnêtes gens de l'Assemblée et les patriotes avaient laissé faire ces vendus, ils nous auraient déjà remis la bricole; nous pourrions travailler, peiner et souffrir pour eux, comme avant la convocation des États Généraux.
Erckmann-Chatrian, Histoire d'un paysan,t. 1, 1870, p. 342. b) CHASSE. Filet de petites cordes ou de fil d'archal en forme de bourse, servant à prendre les grands animaux (d'apr. Baudr. Chasses 1834). c) PÊCHE. Longues lignes terminées par un ou plusieurs haims amorcés (d'apr. Baudr. Pêches 1827). 2. Arg. ,,Double courroie pour immobiliser les bras, non les mains, des malfaiteurs capturés`` (Esn. 1966). C.− [P. réf. au bond que fait le projectile lancé et au mouvement en zigzag qui en résulte] − JEUX. (Au jeu de paume).,,Bond que fait la balle qui touche la muraille`` (Mots rares 1965). (Au billard).,,Coup par lequel une bille touche l'une des bandes avant de frapper l'autre bille`` (Mots rares 1965). PRONONC. ET ORTH. − 1. Forme phon. : [bʀikɔl]. 2. Forme graph. − Ac. Compl. 1842, Besch. 1845 et Lar. 19erappellent l'anc. orth. briccole. Pour le terme de pêche, Ac. Compl. 1842 donne la forme bricolle. Cette forme est mentionnée à côté de bricole pour le terme de pêche dans Besch. 1845, Lar. 19e(et Nouv. Lar. ill.) ainsi que dans Guérin 1892. ÉTYMOL. ET HIST. − A.− 1. 1360 brigole « espèce de catapulte (lancée grâce à un balancement du fléau) » (Arch. admin. de Reims, 3, 169 dans Quem.); 1372 bricole (Guillaume de Machault, La Prise d'Alexandrie, éd. M. L. de Mas Latrie, 1804); l'engin est considéré comme anc. dep. Cotgr. 1611; 1440-42 fig. mettre en la bricole « tromper » (Lefranc, Champ. des Dam., Ars. 3121, fo104ddans Gdf. Compl.); 1536 « moyen détourné, habile » (R. de Colleyre, Dialogue des Abusez, pp. 97-98 dans Hug.); 2. 1583 « zigzag, ricochet » (P. de Cornu,
Œuv. Poét., p. 192, ibid.); d'où 1611 terme du jeu de paume (Cotgr.); 1694 de billard (Ac.); 3. 1616 [publ. en 1633] « bagatelle » (Montluc, Comédie des proverbes dans Anc. Th. Franç., ix, 63 d'apr. Barb. Misc. 15, no10); 4. 1752 p. anal. avec notion de balancement, mar. (Trév.). B.− 1578 « partie du harnais » (Lespinasse, Statuts des bourreliers dans Métiers de Paris, iii, 474 dans Barb., op. et loc. cit.); 1680 « courroie, sangle » (Rich.); a) 1601, juin chasse « espèce de rets ou de filets pour prendre des cerfs et des daims » (Ordonnance d'Henri IV, Art. IX dans Trév. 1771); b) 1721 pêche (L. Liger, Nouvelle Maison Rust., Paris, 3eéd., t. 2, p. 488).
A 1 empr. à l'ital. briccola « catapulte », attesté par le lat. médiév. de Gênes aux xiie-xiiies. (Annales Ianuenses, III, p. 100, 13 dans Mittellat. W. s.v., 1582, 9; v. aussi Du Cange t. 1, p. 749a) et seulement fin xives.-1remoitié du xves. en toscan (G. Morelli dans Batt.), prob. issu (avec substitution du suff. -il par le suff. ital. inaccentué -ola) du longobard *brihhil « celui qui casse, qui rompt » [la catapulte était destinée à démolir les murailles] que l'on peut déduire du m. h. all. brëchel-, de même sens, seulement employé comme élément de compos. (Lexer), dér. du verbe brëchen « casser », h. all. mod. brechen. A 2 déverbal de bricoler* étymol. 1; A 3 déverbal de bricoler* étymol. 3; B « courroie », issu de A, la catapulte lançant des pierres à l'aide de cordes et autres éléments. STAT. − Fréq. abs. littér. : 60. BBG. − Barb. Misc. 15 1936, p. 176. − De Poerck (G.). L'Artillerie à ressorts mediév. Notes lexicol. et étymol. Arch. Lat. Med. Aev. 1944, t. 18, p. 40. − Hope 1971, p. 30. − Kohlm. 1901, p. 15. − Wind 1928, p. 39. |