| BOURDONNER, verbe. I.− Emploi intrans. A.− Émettre un bourdonnement. 1. [En parlant d'insectes et de petits oiseaux] Faire entendre un bruit sourd et monotone en battant des ailes : 1. Les taons tournaient et bourdonnaient à la porte de l'écurie.
Ramuz, Aimé Pache, peintre vaudois,1911, p. 138. 2. P. anal. a) [En parlant d'un poêle, d'un moteur] Émettre un bruit plus ou moins fort allant du ronronnement au vrombissement. Le poêle bourdonnait au milieu des perruques et des pommades (Flaubert, Madame Bovary, t. 2, 1857, p. 115): 2. Dans la salle à manger bourdonnait un ventilateur qui brassait l'air tiède...
Green, Journal,1941, p. 140. − Au fig. Le souvenir acharné de Madeleine bourdonnait au fond de mes soi-disant ambitions (Fromentin, Dominique,1863, p. 247). b) [En parlant de pers. gén. en groupe] Murmurer de façon continue des paroles indistinctes. Une multitude endimanchée venait de se répandre hors de l'église, et bourdonnait dans le cimetière (O. Feuillet, Histoire de Sibylle,1863, p. 1). − Spéc. [Dans un endroit de travail (bureau, chantier)] ♦ Donner l'apparence d'une grande activité un peu fébrile : 3. Cependant, la matinée s'avançait, les bureaux bourdonnaient au loin; des pas rapides traversaient les pièces voisines; des portes s'ouvraient, se fermaient...
Zola, Son Excellence E. Rougon,1876, p. 222. ♦ Péj. S'agiter, faire du bruit, sans être très efficace. Bourdonner autour du pouvoir (Mmede Staël, Considérations sur les princ. événements de la Révolution fr.,t. 2, 1817, p. 430): 4. Pourquoi condamner si obstinément ma porte aux fâcheux (...) et à tous ces gens indispensables et superflus qui, d'ordinaire, gravitent et bourdonnent autour de moi?
A. Arnoux, Zulma l'infidèle,1960, p. 87. ♦ S'affairer de manière indiscrète, moucharder. ... un arrêté d'expulsion contre cette guêpe exotique, que je soupçonne fort de bourdonner dans les chancelleries étrangères (G. Macé, La Police parisienne dansFrance 1907). B.− Emplois techn. 1. MUS. [En parlant de certains instruments] Émettre un ton de basse continue. La jeune fille continuait à faire bourdonner les cordes de la mandore (T. Gautier, Le Roman de la momie,1858, p. 253). − Spéc., CHANT. Chanter en bourdon (cf. bourdon2II A) : 5. Gilbert, qui a une jolie voix, chante les romances, mezza voce, et toutes les voix bourdonnent au refrain.
Dorgelès, Les Croix de bois,1919, p. 128. − [En parlant de grosses cloches] Résonner. Les cloches bourdonnaient, les voitures passaient (Ch. Guérin, Le Cœur solitaire,1904, p. 34). 2. MÉD. Oreilles, tempes, tête qui bourdonnent. Subir la sensation d'un bruit permanent (cf. bourdonnement B 2). Mes mains sont moites, mes oreilles bourdonnent, j'étouffe (Du Camp, Mémoires d'un suicidé,1853, p. 261). II.− Emploi trans. A.− Rare. Bourdonner un air, une chanson. Fredonner, chantonner à mi-voix, entre les dents. Je le [mon père] surprenais à ces moments où il bourdonnait pour lui-même une interminable chanson monotone (Giono, L'Eau vive,1943, p. 323). − Spéc. lang. d'écolier. Bourdonner un professeur, un directeur : 6. Ils conviennent qu'ils devront bourdonner le Directeur à la première occasion, c'est-à-dire enfler les joues et imiter avec les lèvres le vol des bourdons pour marquer leur mécontentement.
Renard, Poil de Carotte,1894, p. 143. B.− Au fig., fam., péj. Extérioriser ses préoccupations en importunant son entourage. Que venez-vous nous bourdonner sans cesse? (Ac.1798-1932).Bourdonner ses peines (Littré, Rob.).Bourdonner sa fureur (F. Fabre, Lucifer,1884, p. 249). C.− MUS. Mouvoir le battant d'une cloche de façon à la faire résonner sans la mettre en branle. Prononc. ET ORTH. : [buʀdɔne], (je) bourdonne [buʀdɔn]. Fér. Crit. t. 1 1787 propose la graph. bourdoner avec un seul n. Étymol. ET HIST. − 1. Ca 1200 bordoner « faire entendre un bruit continu, grave et sourd » (Renaut de Montauban, p. 175 dans Gdf. Compl.); 1390 bourdonner (Evr. de Conty, Probl. d'Arist., B.N. 210, fo229 ro, ibid.); 1579 « id. (d'un insecte) » (Paré, Anim., 25 dans Littré); 2. 1648 « murmurer » (Scarr., V[irgile] t[ravesti], t. 1, 2089 dans Dub.-Lag.) av. 1696 p. ext. trans. (Sév., 393 dans Littré); 3. 1606 (Nicot : Bourdonner [...] rendre le son [...] du gros tuyau de la cornemuse), attest. isolée; 1863 (Littré : Bourdonner [...] Mouvoir le battant de la cloche pour frapper des deux côtés).
Dér. de bourdon2*; dés. -er. STAT. − Fréq. abs. littér. : 621. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 742, b) 1 135; xxes. : a) 968, b) 765. DÉR. Bourdonneur, adj. et subst.Qui bourdonne. Synon. bourdonnant.Oiseau bourdonneur (Ac. Compl. 1842). Un bourdonneur (Ac. Compl. 1842). − [buʀdɔnœ:ʀ], fém. [-ø:z]. − 1reattest. 1495 mousches bourdonneresses (J. de Vignay, Mir. hist., 18, 71 [1531] dans Hug.); 1606 bourdonneur (Nicot) − 1611 (Cotgr.), repris par Ac. Compl. 1842; dér. de bourdonner, suff. -eur2*. BBG. − Mat. Louis-Philippe 1951, p. 201. − Teppe (J.). Cris d'animaux. Vie Lang. 1961, p. 207. |