| BOUCLE, subst. fém. I.− [Désigne un obj., sans idée de mouvement] A.− Anneau de forme et de dimension variables, généralement métallique, muni d'un ou de plusieurs ardillons, fixé à l'extrémité d'une courroie ou d'une ceinture pour en assurer et en régler le serrage. Dans la carlingue, tous ont mis la main gauche à la boucle de leur parachute (Malraux, L'Espoir,1937, p. 664): 1. Le Matamore, soigneux de sa maigreur, semblait enchanté, car il venait de resserrer son ceinturon d'un point, et l'ardillon de la boucle claquait librement dans le trou du cuir.
T. Gautier, Le Capitaine Fracasse,1863, p. 63. PARAD. et SYNT. a) Agrafe, anneau, attache, fermail, œil. b) Boucle d'une ceinture, d'un ceinturon, d'une courroie, d'un harnais, d'une jarretière, d'un pantalon; chapeau, nœud, ruban, soulier à boucle(s); boucle d'acier, d'argent, de cuivre, de laiton, d'or; boucle carrée, ovale, plate, ronde; agrafer, fermer, serrer une boucle. − Expr. fig. et fam. Se serrer la boucle. S'obliger à des restrictions (cf. se serrer la ceinture). B.− P. ext. Objet en forme d'anneau ouvert ou fermé. 1. BIJOUT. Boucle d'oreille. Anneau traversant le lobe de l'oreille généralement porté par les femmes comme ornement. − P. ext. Tout bijou porté à l'oreille. 2. MAR. Boucle de quai. Anneau de fer de grande dimension scellé dans le mur du quai et servant à amarrer les navires. Boucles d'amarrage. ♦ Boucle de pont. Anneau de fer fixé sur le pont d'un navire et destiné à recevoir une poulie ou des cordages. 3. MÉD. Boucle de Lippes. Stérilet ayant la forme de deux S successifs, prolongé par deux fils de nylon dans sa partie inférieure. 4. Vocab. des prisons (jusqu'au xixes.). Anneau par lequel un prisonnier était enchaîné à la paroi de sa geôle : 2. Il était enchaîné par de pesantes mailles
À d'énormes anneaux scellés dans les murailles;
Une ceinture aux flancs, à la nuque un collier,
Le rattachaient encore aux boucles du pilier; ...
Lamartine, La Chute d'un ange,1838, p. 1023. 5. SERR. Boucle de heurtoir. Anneau le plus souvent en fer, fixé au milieu d'une porte et servant à actionner un heurtoir. 6. ZOOL. Anneau passé dans le groin d'un porc pour l'empêcher de creuser la terre. a) Anneau placé au nez d'un bovin. b) Anneau placé à la vulve d'une femelle. 7. Autres emplois techn. a) ARCHIT. Motif d'ornement constitué par une série d'anneaux enlacés, peints ou sculptés avec quelquefois au centre une petite rosace. b) ICHTYOL. Écaille osseuse circulaire surmontée d'un aiguillon que possèdent certains poissons cartilagineux comme la raie : 3. Dans la raie bouclée, les boucles ou aiguillons sont des pointes recourbées, de substance osseuse et transparente.
Cuvier, Leçons d'anat. comp.,t. 2, 1805, p. 622. II.− P. anal. [Désigne la forme que peut prendre ou décrire un objet naturel ou fabriqué] A.− [En parlant des cheveux] Boucle de cheveux. Mèche de cheveux recourbée : 4. Sur un front d'une forme pure et régulièrement dessiné, s'élève une sorte de petit nuage de cheveux blonds légèrement poudrés, rejetés en arrière, retombant en flots et en boucles abondantes sur le col et les épaules.
Vigny, Mémoires inédits,1863, p. 20. 5. Une boucle de cheveux très noirs, repassait par-dessus la bride et, dès qu'elle baissait la tête, revenait en avant cacher la tempe.
Gide, Isabelle,1911, p. 654. − P. ell. Les boucles. La chevelure. Une fillette aux boucles brunes l'appelle, langoureuse et moqueuse (R. Rolland, Jean-Christophe,L'Aube, 1904, p. 68). SYNT. Boucle(s) blondes, brunes, noires; boucles angéliques, épaisses, floconneuses, flottantes, fluides, légères, neigeuses, soyeuses; touffe de boucles; agiter, secouer ses boucles; ruisseler, tirer, tomber en boucles. B.− [En parlant d'inanimés concr.] 1. Boucle d'une corde; boucle de fil, de lacet : 6. Puis il rassemblait les boucles de la corde, qu'il évitait de fouler du pied, comme il eût ramassé et roulé une chaîne précieuse.
Peyré, Matterhorn,1939, p. 166. 2. Boucle d'un fleuve, d'une route. Synon. courbe.Les boucles de la Seine, du Doubs : 7. À cet endroit, la route faisait une boucle à flanc de coteau, et pénétrait dans le bois durant deux ou trois hectomètres, ...
Romains, Les Hommes de bonne volonté,Verdun, 1938, p. 78. 3. SPORT a) SP. CYCLISTE. La grande Boucle. Le tour de France cycliste. b) SP. AÉRIEN. Cercle décrit par un avion dans un plan vertical (cf. looping). III.− P. métaph. ou au fig. [Avec l'idée d'un mouvement circulaire] A.− Processus scientifique ou montage technique évoquant un cercle. 1. INFORMAT. Boucle de programme. Groupe d'instructions qui peuvent être répétées jusqu'à ce qu'on obtienne le résultat désiré. 2. TECHNIQUES AUDIO-VISUELLES. Boucle magnétique, boucle sonore, boucle visuelle. Montage de caméras, haut-parleurs, téléphone, télévision en circuit fermé. 3. TECHNOL. (NUCL.). Boucle de réacteur. Circuit de refroidissement dans un réacteur. B.− Domaine de la pensée abstr.Démarche ou discussion intellectuelle ou morale décrivant une courbe revenant à son point de départ. Boucler la boucle : 8. − Je savais bien que nous nous retrouverions un jour, me dit-il avec placidité.
− Oui, tu vois, chacun de nous a bouclé sa boucle tout seul, dis-je un peu triste, et à la fin on est quand même ensemble...
Abellio, Heureux les pacifiques,1946, p. 395. Rem. gén. Il eût été concevable de pousser la distinction des part. I et II jusqu'à la dichotomie en 2 entrées, comme on l'a fait pour les dér. Cependant l'oppos. est, dans le plan du subst., beaucoup moins nette, les points de convergence sém. l'emportant sur les divergences; d'où l'entrée unique, et preuve sans doute de la réalité et d'une certaine autonomie des part. du discours. PRONONC. : [bukl̥]. Enq. : /bukl/. ÉTYMOL. ET HIST. − 1. Ca 1100 « partie centrale du bouclier » (Roland, éd. J. Bédier, 1283) − xiiies., Joufrois, 3028 dans T.-L.; 2. 1160-90 « sorte d'anneau muni d'un ou plusieurs ardillons et servant d'attache » (M. de France, Lais, Guigemar, 573 dans T.-L.); 3. a) 1453 « objet recourbé en forme d'anneau » (D. Lottin, Rech. hist. sur la ville d'Orléans, I, 308 dans IGLF Techn.); b) 1671 boucle d'oreille (Pomey); c) 1671 boucle de cheveux (Ibid.).
Du lat. buccula, dimin. de bucca « joue » (Plaute dans TLL s.v. bucca, 2225, 66) attesté dep. Tite-Live au sens 1 « bosse de bouclier » (ibid., 2229, 75); le sens 2 est dér. du sens 1, l'attache servant à tenir le bouclier étant fixée au niveau de la bosse; l'emploi de buccula pour désigner la mentonnière du casque (Juvénal, ibid., 77) pourrait aussi être à l'orig. du sens 2. STAT. − Fréq. abs. littér. : 1 112. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 131, b) 2 056; xxes. : a) 1 816, b) 1 565. BBG. − Goug. Mots. t. 1 1962, p. 249. − Rommel (A.). Die Entstehung des klassischen französischen Gartens im Spiegel der Sprache. Berlin. 1954, p. 57. − Sain. Arg. 1972 [1907], p. 87. − Sain. Lang. par. 1920, p. 132. − Termes techn. fr. Essai d'orientation de la terminol. établi par le Comité d'ét. des termes techn. fr. Paris, 1972, p. 5, 85. |