| BLÊMIR, verbe. A.− Devenir blême. ... sa face blêmie par l'air du cabinet reprend quelque apparence de vie (Musset, Le Temps,1831, p. 124).Remontant l'escalier, Rieux revoyait son visage, blêmi par les fatigues et les privations (Camus, La Peste,1947, p. 1449): 1. Ô paysan! Tu m'épouvantes;
Est-ce que tu n'as plus de cœur?
Ainsi que les pâles servantes,
Ne sais-tu que blêmir de peur?
Glatigny, Le Fer rouge,1870, p. 58. 2. ... le matin de l'arrivée à Paris, des marins, avec lesquels il faisait le voyage, le voyant blêmir, lui firent boire un peu de l'eau-de-vie de leur gourde.
E. et J. de Goncourt, Journal,1886, p. 604. SYNT. Blêmir de crainte, d'effroi, de frayeur, de rage, de saisissement. − P. ext. [En parlant gén. de la lumière] Devenir terne, pâle; s'affaiblir : 3. C'était un de ces sinistres soleils couchants où le soleil semble s'abîmer pour jamais dans l'ombre, écrasé sous des nuages de granit, informe et nageant dans une immense mare de sang. Je montais lentement à cette lueur. Peu à peu, elle blêmit, puis s'effaça.
Hugo, Le Rhin,1842, p. 315. B.− Vx, inus. ,,Offenser, léser, porter atteinte`` (Guérin 1892). Mais votre regard est humide, / Mais qui peut ainsi vous blêmir? (P. Borel, Rhapsodies,1831, p. 147). Prononc. ET ORTH. : [blεmi:ʀ] ou [ble-]. [ε] ouvert dans Passy 1914 et Barbeau-Rodhe 1930 (cf. aussi DG); [e] dans Pt Rob. (cf. aussi Fér. 1768, Fér. Crit. t. 1 1787, Land. 1834, Fél. 1851 et Littré). Warn. 1968 réserve la prononc. avec [ε] ouvert au lang. soutenu, celle avec [e] fermé au lang. cour. À ce sujet cf. aussi Buben 1935, § 25. Ac. 1798 et Besch. 1845 écrivent blémir. Le reste des dict. écrit blêmir. Étymol. ET HIST. − 1. 1100 « rendre livide en blessant » (Roland, 590 dans T.-L.) − xiiies. dans T.-L.; 2. 1174-77 « rendre blême, pâlir, flétrir » (Chr. de Troyes, Chevalier à la charrette, 4210, ibid.).
De l'a. b. frq. *blesmjan, issu de *blasmjan (à rattacher au m.h. all. blas « dégarni, faible, mince », all. blass, Lexer; Kluge20) dér. de l'a. b. frq. *blasmi « couleur pâle » (à rattacher à l'a. nord. blàmi « couleur sombre », De Vries Anord.), hyp. de EWFS2, reprise par FEW t. 15, 1, p. 157; v. aussi Gam. Rom.2, p. 334. Le recours à un croisement avec le verbe blesser pour expliquer les formes en -s- en l'hyp. d'un étymon germ. blām- « couleur bleuâtre » (REW3, no1147) est à écarter car l'a. fr. ne connaît que la forme blecier. STAT. − Fréq. abs. littér. : 228. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 83, b) 443; xxes. : a) 642, b) 271. |