| BECQUÉE, subst. fém. A.− Quantité de nourriture qu'un oiseau peut prendre dans son bec, soit pour se nourrir, soit pour la porter à ses petits. Donner la becquée, porter la becquée (Ac. 1798-1932); nourrir un oiseau à la becquée (en lui introduisant la nourriture dans le bec); une becquée de grains (DG) : 1. Vous êtes-vous jamais arrêté devant une volière à la campagne pour observer les idées d'un chardonneret qui saute, qui gazouille, qui mange, (...)? « (...) J'ai faim, mangeons un grain de mil. Non, une miette de pain est meilleure. Non, une becquée d'eau me rafraîchirait. (...) ».
Taine, Notes sur Paris,Vie et opinions de M. F.-T. Graindorge, 1867, p. 132. − Action d'un oiseau donnant la pâture à ses petits : 2. Chez les canaris, la femelle abandonne au mâle le monopole de l'éducation primaire et l'office de la becquée.
Toussenel (Lar. 19e,1866et Guérin 1892). − P. métaph. : 3. ... qui de nous n'a sa chimère? qui de nous ne donne la becquée à de naissantes espérances?
Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe,t. 4, 1848, p. 475. B.− P. anal. Nourriture que l'on donne à un enfant ou à une personne incapable de subvenir à ses besoins. Donner la becquée à qqn : 4. Jack était père de famille. Quatre gosses attendaient la becquée de lui.
Peisson, Parti de Liverpool,1932, p. 73. − P. ext., fam. Bouchée. Encore une becquée, mon petit! (Lar. 19e-20e). PRONONC. ET ORTH. − 1. Forme phon. : [bεke] ou [be-]. Passy 1914, Barbeau-Rodhe 1930 et Pt Lar. 1968 transcrivent [ε] ouvert (cf. aussi Littré). Dub. et Pt Rob. donnent [e] fermé (cf. aussi Fér. Crit. t. 1, 1787, Land. 1834, Gattel 1841, Fél. 1851 et DG); Warn. 1968 note les 2 possibilités de prononc., [ε] ouvert pour le lang. soutenu, [e] fermé pour le lang. cour. (Nod. 1844 admet également les 2 possibilités de prononc.). 2. Forme graph. − Ac. 1798, 1835 et 1878 admettent becquée ou béquée (cf. aussi Lar. 19e, Nouv. Lar. ill., Pt Lar. 1906 et Lar. 20e, ainsi que Littré, Guérin 1892 et Rob.). Ac. 1932 adopte uniquement becquée avec cq (cf. aussi Lar. encyclop. et Dub.). DG enregistre béquée seulement. Besch. 1845 souligne, s.v. becquée : ,,On disait autrefois béchée`` (pour cette indication cf. aussi Littré et Guérin 1892). La répartition graph. entre -cq- et -q- dans le mot à travers les dict. vaut aussi pour be(c)queter. Pour N. Catach, J. Golfand, R. Denux (Orth. et lexicogr., Paris, Didier, t. 1, 1971, p. 89), dans l'hésitation graph. entre cq et q ou c (becquet, béquet; becqueter, bèqueter; jacquier, jaquier; jacquot, jaquot, jaco, etc.) cq doit être considéré comme une véritable consonne double, reliquat d'une notation anc., et non comme une redondance du syst. actuel. ÉTYMOL. ET HIST. − 1. Fin xives. bechie « quantité de nourriture contenue dans le bec d'un oiseau » (Modus et Ratio, éd. G. Tilander, 92, 96) forme attestée jusqu'au xvies., dans Littré; 1543 becquée (L'aigle qui fait la poulle devant le coq dans R. Hist. litt. Fr., t. 5, p. 287); p. ext. 2. 1866 fam. becquée « bouchée » (Lar. 19e).
Dér. de bec* étymol. 1 et 2; suff. -ée*. Parallèlement en fauconn. on emploie le mot beccade (1751, Encyclop. t. 2 : Beccade. Les fauconniers disent faire prendre la beccade à l'oiseau, pour dire lui donner à manger) attesté au xvies. au sens de « coup de bec » (Les Differents des Chapons et des Coqs... dans Var. hist. et litt., t. 4, p. 279) mentionné par Besch. 1845, Lar. 19eet Lar. 20equi le considèrent comme anc., ce terme est prob. empr. au prov. becado « becquée » (Mistral), béarnais becado « coup de bec » (Palay). STAT. − Fréq. abs. littér. : 44. |