| BAUME1, subst. masc. A.− BOT. Plante odoriférante, notamment menthe. Baume des champs, des jardins : 1. Ce fut la moisson des plantes odorantes, les citronnelles, les menthes, les verveines, dont elle emplissait sa jupe. Elle rencontra une bordure de baume et n'en laissa pas une feuille.
Zola, La Faute de l'Abbé Mouret,1875, p. 1514. B.− Substance résineuse sécrétée par certaines plantes contenant des acides aromatiques (benzoïque et cinnamique), servant à divers usages : 2. Nous n'avons rien à craindre mais beaucoup à apprendre de la tribu vigoureuse et pacifique des arbres qui produit sans cesse pour nous des essences fortifiantes, des baumes calmants, et dans la gracieuse compagnie desquels nous passons tant d'heures fraîches, silencieuses et closes.
Proust, Les Plaisirs et les jours,1896, p. 233. 1. MÉD., PHARM. Médicament à base de cette substance résineuse naturelle ou, abusivement, préparation à base de teintures alcooliques, huiles, etc., servant comme résolutif, analgésique, etc. Une fiole de baume tranquille, un flacon de baume à la térébenthine : 3. ... Saint-Ernest s'était fait empirique et charlatan, marchand de panacées, d'onguent pour la brûlure. Autrefois, les industriels de cette espèce endossaient l'habit rouge à galons d'or, se coiffaient du chapeau à panache, montaient dans une calèche en compagnie d'une grosse caisse et d'une clarinette, et allaient offrir leur baume, leur élixir sur les places publiques.
Reybaud, Jérôme Paturot,1842, p. 87. − P. métaph. Ce qui adoucit, guérit les maux de l'âme : 4. J'ai trouvé dans les paroles d'un prêtre (encore un ami de Maurice!) un secours inespéré, un apaisement, un calme, un baume religieux qui me fait sentir la foi dans ce qu'elle a de plus doux et de plus fort, la puissance de consolation. De moi-même souvent je ne puis pas y atteindre. Ce sont des efforts qui me fatiguent, me brisent. Nous sommes trop petits pour les choses du ciel.
E. de Guérin, Journal,1839, p. 309. 5. ... ô ma fille au beau manteau.
Toi qui verses le repos et l'oubli. Toi qui verses le baume, et le silence, et l'ombre
Ô ma nuit étoilée je t'ai créée la première.
...
Toi qui répands de tes mains, toi qui verses sur terre
Une première paix
Avant-coureur de la paix éternelle.
Un premier repos
Avant-coureur du repos éternel.
Un premier baume, si frais, une première béatitude
Avant-coureur de la béatitude éternelle.
Toi qui apaises, toi qui embaumes, toi qui consoles.
Toi qui bandes les blessures et les membres meurtris.
Toi qui endors les cœurs, toi qui endors les corps
Les cœurs endoloris, les corps endoloris,
Courbaturés,
Les membres rompus, les reins brisés
De fatigue, de soucis, des inquiétudes
Mortelles,
Des peines,
Toi qui verses le baume aux gorges déchirées d'amertume
Si frais
...
Péguy, Le Porche du mystère de la 2evertu,1911, pp. 304-305. SYNT. Baume bienfaisant, consolateur, divin, rafraîchissant, restaurateur, salutaire; distiller, jeter, mettre, répandre du baume sur (les plaies, les blessures, etc.). Fam. Mettre du baume au/dans le cœur/sang. − PARAD. a) (Quasi-) synon. adoucissement, calmant, dictame, douceur, palliatif, réconfort, remède, soulagement. b) (Quasi-) anton. fiel, poison, venin. 2. RELIG. Saint baume ou baume. Baume qui entre dans la composition du saint chrême : 6. Je vous conjure par le Dieu de Majesté, par l'huile et le saint-chrème, par le baume et le sel, par tout ce que Dieu a fait et consacré, je vous conjure de me saluer.
Barrès, Mes cahiers,t. 10, 1914, p. 249. 3. TECHNOL. Substance résineuse utilisée dans la préparation des vernis, en optique, etc. : 7. Comme ce vernis coûte cher, on y ajoute parfois des résines inférieures, baumes, ...
Moreau-Vauthier, La Peint.,1933, p. 177. Rem. Empl. aussi pour la préparation des momies : 8. ... les Égyptiens employaient des sucs et des résines tirés de la myrrhe, du nard, du cinnamome et du baume même : d'où est venue l'expression d'embaumer. Ils sont parvenus, par ces moyens, à préserver de la corruption les corps de leurs aïeux, et à en faire des momies qui ont la solidité et la dureté des rochers.
Bernardin de Saint-Pierre, Harmonies de la nature,1814, p. 100. C.− P. méton. Parfum extrait du baume. Fleurer (ou flairer) comme baume : 9. Il manipulait tout cet attirail, autrefois acheté sur les instances d'une maîtresse qui se pâmait sous l'influence de certains aromates et de certains baumes, une femme, détraquée et nerveuse, aimant à faire macérer la pointe de ses seins dans les senteurs, mais n'éprouvant, en somme, une délicieuse et accablante extase, que lorsqu'on lui ratissait la tête avec un peigne ou qu'elle pouvait humer, au milieu des caresses, l'odeur de la suie, du plâtre des maisons en construction, par le temps de pluie, ou de la poussière mouchetée par de grosses gouttes d'orage, pendant l'été.
Huysmans, À rebours,1884, p. 160. − P. anal. Parfum émané de toute autre substance : 10. Et je respire sans effroi
Un languide et terreux arôme :
Odeur du sol, le dernier baume
Autour des corps muets et froids!
A. de Noailles, Les Forces éternelles,1920, p. 284. − P. métaph. : 11. L'enfance, la première jeunesse est l'essence de la vie. Nous délayons ce baume précieux dans le cours des années insipides qui s'écoulent après. Aussi, devons-nous nous estimer heureux quand, au milieu de notre existence le goût de ce parfum n'est pas entièrement évaporé.
Delécluze, Journal,1825, p. 205. Rem. On rencontre dans la docum. le néol. balsame, subst. masc. (R. de Montesquiou, Les Hortensias bleus, 1896, p. 259 : ... de mystiques balsames / À fermer toutes les blessures; empr. au lat. balsamum). Synon. de baume. PRONONC. ET ORTH. : [bo:m]. Enq. : /bom, D/. Fér. Crit. t. 1 1787 écrit baûme. ÉTYMOL. ET HIST. − 1. Ca 1150 « onguent propre à guérir les blessures » (Thèbes, éd. L. Constans, 6236 dans T.-L. : La langue li oignent de basme; O un coutel les denz desjoignent, La langue de basme li oignent, Iço le fist parler un poi); d'où 1532 fig. « chose agréable » (Bourdigné, Pierre Faifeu, ch. 36 dans Hug.); 1683 « ce qui calme, adoucit les peines » (Boss., Marie-Thérèse dans DG); 2. a) 1262-68 bot. « nom sous lequel on désigne un grand nombre de plantes odoriférantes » (Brunet Latin, Trésor, éd. Chabaille, 155 dans T.-L. : Ce [Judee] est une grant province, ou li baumes croist) en partic. 1680 « sorte de menthe » (Rich.); b) xiie-xiiies. « substance résineuse et odorante qui coule de quelques végétaux » (Flore et Blancheflor, éd. I. Bekker, 625 dans T.-L. : d'autre part ot un cresmier Et a senestre un balsamier. N'ert en cest siecle tele odour Qui vausist cele de la flour : Car de l'un basmes decouroit, Et de l'autre cresmes cäoit).
Du lat. balsamum, au sens 2 a (Pline, Nat., 12, 111 dans TLL s.v., 1710, 10) d'où « sorte de menthe » en lat. médiév. viiie-xies. (Gloss. III, 281, 16 [éd. Steinmeyer et Sievers] dans Mittellat W. s.v., 1332, 61); au sens 2 b surtout au plur. (Virgile, Georg., 2, 119 dans TLL s.v., 1710, 34); le sens 1 en b. lat. et lat. médiév. viies. (Aesculapius, 11, p. 15, 1 dans Mittellat. W. s.v., 1332, 21); d'où fig. « ce qui est agréable » [non daté] (Burch., Iud., 1 [éd. P. Lehmann, Erforsch. d. Mittelalt. II, p. 251], ibid., 1332, 57) lat. empr. au gr. β
α
́
λ
σ
α
μ
ο
ν lui-même d'orig. hébraïque : bęsęm « id. ». BBG. − Gall. 1955, p. 457. − Gottsch. Redens. 1930, p. 240. − Pope 1961 [1952], § 250. |