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BARAGOUINER, verbe intrans.
Gén. péj.
A.− Emploi intrans.
1. Parler mal une langue (maternelle ou étrangère) jusqu'à la rendre inintelligible; en particulier, en la prononçant incorrectement :
1. Aussitôt qu'une femme parle mal notre langue, elle est charmante; si elle fait une faute de français par mot, elle est exquise, et si elle baragouine d'une façon tout à fait inintelligible, elle devient irrésistible. Maupassant, Contes et nouvelles,t. 1, Découverte, 1884, p. 959.
2. − Je suis sûr que tu ne sais pas un mot d'allemand. − Je sais très bien, au contraire. − Voyons un peu. Ils se mirent à causer en allemand. Le petit baragouinait, d'une façon incorrecte, mais avec un aplomb drolatique; ... R. Rolland, Jean-Christophe,La Nouvelle journée, 1912, p. 1499.
P. méton. :
3. virginie. − Ça brouillasse dans ma tête! ... On ne voit pas clair dans ces phrases-là! ... Est-ce que l'amour baragouine? (...) il va droit au fait, l'amour! Balzac, Le Faiseur,1850, I, 2, p. 178.
2. P. ext. Parler une langue qui choque l'assistance parce qu'elle ne la connaît et ne la comprend pas :
4. ... à quelques pas de ma fenêtre, une lanterne-potence au pied de laquelle baragouinent quelques gamins allemands, blonds et ventrus. Hugo, Le Rhin,1842, p. 347.
B.− Emploi trans. (avec un compl. d'obj. interne).
1. Baragouiner une langue (notamment étrangère). La parler incorrectement ou la maîtriser insuffisamment jusqu'à la rendre inintelligible :
5. ... j'entends très bien l'Italien; il y a du moins peu de choses qui m'échappent quand on ne le parle pas trop vite; pour ce qui est de le parler, je baragouine quelques mots. Flaubert, Correspondance,1850, p. 265.
P. ext. Dire (dans sa propre langue) des choses peu intelligibles, en raison d'une mauvaise articulation, d'un excès de technicité, etc. :
6. − Papa, si tu as à baragouiner sciences, allez dans le jardin, disait Cora... Balzac, Œuvres diverses,t. 3, 1850, p. 635.
7. Il remua lentement, montrant son visage encore endormi et baragouinant je ne sais quoi. Saint-Exupéry, Terre des hommes,1939, p. 248.
2. P. ext.
a) Baragouiner (qqc. dans une lang.). Dire quelque chose dans une langue (notamment étrangère) qui choque l'assistance parce qu'elle ne la connaît et ne la comprend pas :
8. ... des étrangères assises dépliaient des cartes et baragouinaient, en des langues inconnues, des remarques. Huysmans, À rebours,1884, p. 173.
9. De sa voix rauque, avec des gestes farouches, Walter baragouinait déjà mille choses dans son incompréhensible anglais, et nous nous demandions tous, à l'exception d'Arthur Rance et de Mrs Édith : « Qu'est-ce qu'il dit? ... G. Leroux, Le Parfum de la dame en noir,1908, p. 120.
P. métaph. :
10. Maintenant les cloches parlaient une langue abolie, baragouinaient des sons vides et dénués de sens. Huysmans, Là-bas,t. 1, 1891, p. 65.
b) Dire (dans sa propre langue) des choses qui, au jugement de l'assistance, paraissent médiocres ennuyeuses, etc. :
11. ... avons sur le dos un procureur du roi, qui parle morale et baragouine des bêtises sur l'administration. Balzac, La Cousine Bette,1847, p. 251.
12. ... la noce sur un seul rang de chaises, écoutant MgrAdriani, le nonce du pape, baragouiner une interminable homélie... A. Daudet, Immortel,1888, p. 291.
PRONONC. : [baʀagwine], (je) baragouine [baʀagwin].
ÉTYMOL. ET HIST. − 1. 1578 inf. substantivé fam. « parler incorrect » (H. Estienne, Dial. du lang. franç. ital., Autre Remonstrance dans Hug. : Pourrois-je point donc deviner D'où vient ce barragoiner?); 1580 intrans. barragouiner « parler (une lang.) d'une manière incorrecte et donc incompréhensible » (Mont., liv. II, ch. 12, p. 281 dans Gdf. Compl.); 1666 trans. « prononcer indistinctement » (Furetière, Roman bourgeois, p. 324); 2. 1611 « parler une lang. étrangère (que personne ne comprend) » (Cotgr.). Dér. de baragouin*; dés. -er.
STAT. − Fréq. abs. littér. : 32.
BBG. − Haust (J.). Notes d'enq. dial. en Wallonie. In : [Mél. Roques (M.)]. Paris, 1952, t. 4, pp. 143-147.