| BANCAL, ALE, ALS, adj. et subst. I.− Adj. et subst. A.− [En parlant d'une pers., d'un animal] Qui a une jambe ou les jambes tortues : 1. L'instituteur n'avait pas d'accent, mais il n'avait pas de voix. Je ne l'ai jamais vu qu'essoufflé, enroué. Toujours bancal aussi, toujours boiteux, toujours gaucher.
Giraudoux, Simon le Pathétique,1926, p. 13. − Emploi subst. [En parlant d'une pers. seulement] :
2. Extraordinaire cortège! de bancroches, de bancals, mutilés, vineux de sang, qui gémissaient au long des chemins.
J. de La Varende, Nez-de-cuir, gentilhomme d'amour,1936, p. 14. − [En parlant des jambes d'une pers.] Tortu : 3. ... sa grosse tête triangulaire au crâne aplati, ses jambes bancales, son torse à bedon, sa peau noire inspiraient la plus vive répulsion au ministre; ...
A. Arnoux, Rêverie d'un policier amateur,1945, p. 17. B.− P. anal. [En parlant d'un meuble, d'un bâtiment, des jambages de lettres, etc.] Qui a des pieds de longueur inégale, qui présente une hauteur inégale. Chaise bancale, fauteuil bancal, maison bancale : 4. La salle était absolument déserte. Des mouches grésillaient dans l'air. Dans une cage jaune posée sur le comptoir bancal, un perroquet, toutes plumes retombées, était affaissé sur son perchoir.
Camus, La Peste,1947, p. 1333. C.− Au fig. Qui n'est pas établi sur des bases solides, qui est mal équilibré, qui manque de rigueur. Budget bancal, paix bancale, raisonnement bancal : 5. Les pensées trompent et mentent; notre adversaire a toujours raison sur quelque point. Quel raisonnement n'est bancal?
Mauriac, Journal 2,1937, p. 176. − Spéc., arg. Qui n'est pas en situation régulière vis-à-vis de la loi, qui présente un caractère illicite. Maison bancale. Maison de jeu clandestine (L. Larchey, Dict. hist. d'arg., Nouv. Suppl., 1889). ♦ Subst. La bancale était pleine de Grecs! (France1907). II.− Subst. masc. Sabre de cavalerie recourbé : 6. Ils [les deux soldats] arpentèrent successivement, (...) les chaussées de l'une et de l'autre [la Ville Haute et la Ville Basse], les faubourgs bêtement bourgeois de la seconde et les carrefours pittoresques de la première, frôlèrent alternativement, de leurs coudes et de leurs bancals, des devantures baissées de confiseries modernes et des bicoques sapées par l'âge, (...).
Courteline, Le Train de 8 h 47,1888, 2mepartie, 5, p. 153. 7. ... lorsque le hussard prit congé et qu'il sentit trembler la main d'Hélène dans la sienne, il murmura son prénom, puis s'échappa aussitôt en trébuchant dans son bancal.
Aymé, La Jument verte,1933, p. 129. PRONONC. ET ORTH. : [bɑ
̃kal]. Ortho-vert 1966, p. 105, précise des bancals. ÉTYMOL. ET HIST. − 1. 1426 subst. « pièce d'étoffe servant à recouvrir un banc » (R. des Stés sav. des départements, t. 6, p. 135 : .ii. bancs, .i. bancal rouge peu naillant armoyé des armes de Beauffort), attest. isolée; 2. a) 1747 adj. et subst. fam. « (d'une pers.) qui a les jambes tordues » (Caylus,
Œuvres badines, p. 17 − Guillaume − : l'autre [de ces demoiselles] qui étoit bancale, ... Oh, dam!, dit la bancale), usité en parlant d'une femme tandis qu'on emploie bancroche à propos d'un homme jusqu'à la fin du xviiies. (Ac. 1762-1798); b) p. ext. 1831 adj. « (d'un objet) mal équilibré » (Lamartine, Correspondance, p. 227 : j'envoie ce matin à Ladvocat pour le livre bancal une grande Harmonie); 1833 « (d'un objet muni de pieds) » (T. Gautier, Albertus, p. 127); 3. p. anal. 1819 arg. milit. « sabre à lame courbe » (Le Farceur du Régiment, 21 dans R. Dagneaud, Les Eléments pop. dans le lex. de La Comédie Humaine d'H. de Balzac, Quimper, 1954, p. 101).
1 empr. à l'a. prov. bancal « id. », 1240-50 (Roman de Flamenca, 381 dans Levy (E.) Prov. : Entretan fai ben adobar La vila et encortinar De bancals e de bels tapitz, De bels palis, de bels samitz); à rapprocher du lat. médiév. bancalis « id. », 507-877 (Capitularia reg. franc., 32, 42 dans Mittellat. W. s.v., 1335, 11); 2 dér. de banc*, étymol. 1; suff. -al*, les pieds d'un banc étant souvent faits selon des tracés divergents. STAT. − Fréq. abs. littér. : 65. BBG. − Brüch (J.). Bemerkungen zum französischen etymologischen Wörterbuch E. Gamillschegs. Z. fr. Spr. Lit. 1927, t. 49, p. 296. − Dauzat Ling. fr. 1946, p. 28. − Sain. Lang. par. 1920, p. 138. |