| BAH, interj. Fam. Exprime, suivant la nature du ton, l'étonnement mêlé de doute, l'absence de surprise ou de désappointement; ou au contraire, et le plus souvent, l'indifférence ou l'insouciance : 1. − Voilà un grand malheur, ai-je dit. − Bah!, reprit Ampère, c'est partout la même chose.
Delécluze, Journal,1825, p. 136. 2. − O Pauline, m'écriai-je en lui serrant la main, je voudrais être riche!
− Bah! Pourquoi? dit-elle d'un air mutin.
Balzac, La Peau de chagrin,1831, p. 153. 3. − Mon lieutenant, dit La Guillaumette, nous cherchons de l'argent que nous avons perdu.
− Ah bah!
L'étonnement outré qu'il affectait avait toute l'insolence d'un démenti à froid.
Courteline, Le Train de 8 h 47,1888, 2epart., 9, p. 201. 4. Le cousin continuait, hésitant et désabusé : − Je puis pas bien vous dire. Je sais pas si j'aurai l'argent. Ça doit être vendu vendredi matin, dernier délai? Je vous enverrai bien une dépêche la veille ou le matin?
− Ah! Bah! Bah! Bah! Vous savez bien que pour vingt mille de plus vous feriez la bonne affaire.
Malégue, Augustin,t. 1, 1933, p. 204. Rem. Souvent répété ou en loc. exclam. ah bah! − Emploi subst., rare : 5. Bah! Signifie Ce mal est peu de choses, et on y va remédier. Ce bah! me paraît inusuel. On dit ce n'est rien! Le bah! usuel exprime insouciance, celui-ci énergie.
G. Esnault,[Commentaire des Misérables lors du dépouillement I.G.L.F.], 1937. PRONONC.− 1. Forme phon. : [bɑ]. 2. Homon. : bas, bât. ÉTYMOL. ET HIST. − 1. Ca 1170 ba interj. marquant le doute (Rois, p. 36, Ler. de Lincy ds Gdf. : Mais les fiz Belial distrent entre sei : Ba! purrad nus cist de nos enemiz salver?), attest. isolée; non attesté dans les dict. jusqu'à 1823, Boiste; 2. ca 1200 ba interj. marquant refus, négation, mécontentement (Aucassin et Nicolette, éd. H. Suchier, 10, 45 ds T.-L. : Pere, fait Aucassins, ne m'alés mie sermonant, mais tenés moi mes covens. − Ba! Quex covens, biax fix?); seulement dans ce texte et non attesté dans les dict. jusqu'à 1823, Boiste; 3. 1216 ba interj. marquant l'étonnement (R. de Clary, Constantinople, éd. Hopf, 101 ds T.-L. : ba, seigneur, dene connissiés vus que che fust chi femme Kyrsaac? ... Ba, dene me connissiés vus?) − 1285, J. Bretel, Tournois Chauvency ds T.-L.; non attesté dans les dict. jusqu'à 1823, Boiste; 4. 1794 bah interj. marquant l'indifférence (Fabre d'Églantine ds Lar. 19e: ... Malgré vous et les vôtres, On vous fera bien voir... − Bah! j'en ai bien vu d'autres).
Onomat., imitant les cris d'étonnement, etc., dans la lang. parlée; à rapprocher du verbe batare « bayer* » dér. d'une onomat. de forme voisine, exprimant l'étonnement dans diverses lang. i.-e. (cf. IEW, s.v. bata-). STAT. − Fréq. abs. littér. : 1 396. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 634, b) 4 001; xxes. : a) 1 979, b) 1 208. |