| BAGUENAUDER, verbe. Familier A.− Emploi intrans. 1. Passer son temps à des choses frivoles et sans importance. Synon. muser : 1. M. Gattel avait fait un fort bon dictionnaire où il avait osé noter la prononciation et dont je me suis toujours servi. Enfin, c'était un homme qui savait travailler cinq à six heures tous les jours, ce qui est énorme en province où l'on ne sait que baguenauder toute la journée.
Stendhal, Vie de Henry Brulard,t. 1, 1836, p. 247. 2. ... nous ne songions qu'à nous divertir, qu'à baguenauder...
L. Daudet, Salons et journaux,1917, p. 177. ♦ Baguenauder sur.Tenir des propos légers sur des sujets sérieux. Madame Prune (...) a plutôt marivaudé, (...) a plutôt baguenaudé sur la question si sérieuse du peuplement de l'empire, ... (Loti, La Troisième jeunesse de Madame Prune,1905, p. 147). ♦ Aller baguenaudant. Aller musant et baguenaudant (Courier, Lettres de France et d'Italie,1811, p. 848);aller rêvant et baguenaudant (G. Sand, François le Champi,1850, p. 12). 2. P. ext. Se promener sans but précis, flâner : 3. Que peut souhaiter de plus l'élu des Dieux? Pourtant, quelle mélancolie, quel désarroi! Les jours lui paraissent longs, vaine sa méthodique activité; il bâille, cherche un but, baguenaude de Neuilly au Palais-Bourbon, entre chez son éditeur.
Blanche, Mes modèles,1928, p. 48. − P. métaph. [Le suj. désigne les yeux, un cours d'eau] :
4. L'air narquois, ensommeillé, voluptueux, il restait indéfiniment à bayer aux corneilles. Ses yeux, qui baguenaudaient, faisaient tout le tour de la chambre d'Antoinette (...) − ils se promenaient sur le petit lit de fer, (...) − sur les portraits de son père et de sa mère, − sur une vieille photographie...
R. Rolland, Jean-Christophe,Antoinette, 1908, p. 880. 5. À mes pieds est ma ville, que l'Yonne paresseuse et le Bouvron baguenaudant ceignent de leurs rubans.
R. Rolland, Colas Breugnon,1919, p. 29. Rem. Ce sens paraît auj. l'emporter sur le premier. B.− Emploi pronom. à valeur subjective. Se baguenauder.Se promener sans but précis. Synon. se balader : 6. ... « allez, allez! ferme-moi tes bouquins, ce n'est pas tous les jours qu'on est ensemble! On va sortir, je t'invite. Tu connais bien un endroit rigolo? On va se baguenauder un peu. Oublie que je suis ton père... »
Aragon, Les Beaux quartiers,1936, p. 204. − Spéc. [Le suj. désigne un attribut de la pers.] Les pognes de la fille [harpiste] se baguenaudant sur les cordes (A. Simonin, Touchez pas au grisbi,1953, p. 224). C.− Emploi trans. [Suj. et compl. désignent gén. des pers.] Baguenauder qqn. 1. Vx. Jouer, railler, moquer quelqu'un. Rem. Attesté ds Lar. 19e(avec la mention ,,inus. aujourd'hui``), Guérin 1892, Nouv. Lar. ill. (,,vieux``). 2. Pop., rare. Promener quelqu'un. Je le baguenaude à travers les rues, ... (Céline, Mort à crédit,1936, p. 182; cf. affur(e), ex. 8). Rem. Dans l'ex. qui suit, l'aut. a forgé le subst. verbal baguenaud, prob. p. anal. avec badaud : ,,Andoche. − Pardon, excuse, ej' suis là à discourir coumme un charlatan ed' foire qui vent l'appât aux puces pour amuser les baguenauds, ...`` (R. Martin du Gard, La Gonfle, 1928, II, 5, p. 1208). PRONONC. : [bagnode] (Passy 1914 : [bagnoˑde]), je me baguenaude [ʒ
əmbagno:d]. ÉTYMOL. ET HIST. − 1. 1466 intrans. « passer son temps à des frivolités » (J. de Bueil, Jouvencel, fo16a ds Gdf. Compl. : Aler baguenauder a la court); qualifié de ,,bas`` ou ,,familier`` par Ac. 1694 à 1878, de ,,vieux`` et ,,bas`` par Trév. 1704 à 1771, de ,,vieux`` par Rich. 1706; 2. [xviiies. « se promener » d'apr. Rob. Suppl.]; 1867 arg. (Delvau, Dict. de la lang. verte).
Dér. de baguenaude1* étymol. 2; dés. -er. STAT. − Fréq. abs. littér. : 40. BBG. − Delvau (A.). Dict. de la lang. verte. 2eéd. Paris, 1867. − Esn. 1966. |