| BADIN1, INE, adj. et subst. I.− Emploi adj. A.− [En parlant d'une pers., de son esprit] Qui manifeste un naturel gai et enjoué, parfois un peu folâtre ou moqueur. 1. [En parlant d'une pers. ou d'une collectivité] :
1. Il avait recouvré toute sa gaieté, bouffonnant, riant à pleine gorge, et si badin qu'il prit plaisir, voyant apparaître Arcangeli, à l'envoyer considérer les « bêtes » du labyrinthe.
Bourges, Le Crépuscule des dieux,1884, p. 26. − P. ext. Caractère, esprit, humeur badin(e). Qui aime à folâtrer et à rire. Tout ce qu'il fait marque un esprit badin et fort plaisant (G. Sand, Les Beaux Messieurs de Bois-Doré,1858). 2. [En parlant d'un air, d'un ton, d'une conversation] :
2. Il prit à part le patron et tâcha de lui faire comprendre que je méritais également quelques égards. Tout cela sur un ton enjoué, badin, avec un sens exquis du comique et des convenances.
Gide, Ainsi soit-il,1951, p. 1239. 3. [En parlant d'un sentiment, ou d'une attitude mor.] :
3. Qu'est-ce que dit donc si longtemps aujourd'hui à vos yeux ce livre? murmurait-elle avec une impatience moitié sérieuse, moitié badine.
Lamartine, Les Confidences,Graziella, 1849, p. 226. B.− [En parlant d'une chose en relation avec une pers.] 1. [D'un style, d'un genre littér. ou artistique] a) LITT. Qui raconte une histoire plaisante ou est écrit dans un style léger. Épître, littérature badine; poème badin, vers badins : 4. Le style pathétique, élevé, harmonieux, et propre à l'éloquence de la tribune, était aussi facile à un Grec ou à un Romain, que le style spirituel et poli, vif et court, badin et flatteur, est facile à un Français.
J. Joubert, Pensées,t. 1, 1824, p. 412. − P. méton. Plume badine. ,,... des termes assez piquants et plus gais qu'on ne l'attendrait d'une plume aussi peu badine...`` (Sainte-Beuve, Nouveaux lundis, t. 6,1863-69, p. 47). b) GRAV. Pointe badine. ,,Main qui trace les traits légèrement, adroitement et avec un caprice agréable`` (Lar. 19e). Rem. Attesté ds Nouv. Lar. ill., DG. c) MUS. Dont l'écriture ou l'exécution est faite de manière enjouée et légère. Mélodie badine, motif, passage badin (cf. badinerie) : 5. Ces divers motifs de l'Andante du quatuor op. 130 de Beethoven, plaisants, badins, ne sont qu'une libre construction de la mélodie initiale. Il semble que le Maître se soit imposé une aimable bouffonnerie.
J. de Marliave, Les Quatuors de Beethoven,1925, p. 295. 2. [D'une chose appartenant ou ressemblant à une chose] Qui a un aspect un peu folâtre et frivole : 6. Ton filet qu'embellit le cornichon badin
Forme le déjeuner de l'humble citadin...
Ch. Monselet, Poésies complètes,1880, p. 133. 7. Elle [Léa] (...) hocha ses cheveux gris badins autour d'un important sourire de juge gourmet...
Colette, La Fin de Chéri,1926, p. 135. II.− Emploi subst. A.− [Désignant une pers.] Personne aimant à rire, plaisanter, dire ou écrire des choses légères et futiles : 8. Qu'il est pédant, qu'il est appliqué dans sa frivolité! Il fait le badin, sans se fatiguer, avec ce point de vue. C'est trop d'insistance, trop de pédantisme en dépit de son apparente légèreté, trop d'application à faire le frivole.
Barrès, Mes cahiers,t. 7, 1909, p. 311. B.− [Désignant un inanimé abstr.] Ce qui est plaisant, léger, frivole : 9. La haine de l'ironie, l'horreur du badin, du léger, du gracieux, une facilité singulière à s'émouvoir et vibrer, le goût du fort, du sévère, du grand, − avec, parfois, une douceur, une tendresse poignantes, − caractérisaient son tempérament, et faisaient penser à quelque chose de nordique dans la structure de son cerveau.
Van der Meersch, L'Empreinte du dieu,1936, p. 92. PRONONC. − 1. Forme phon. : [badε
̃], fém. [-in]. 2. Homon. : badin2. ÉTYMOL. ET HIST.
A.− Subst. 1. 1452 « fou, sot » (Arnoul Gréban, Mystère de la Passion : Il est de la maignie folle, Cent contre ung, ce meschant badin) − 1680, Rich.; 2. 1690 (Fur. : Badin, ine ... Qui est folâtre, peu serieux, qui fait des plaisanteries).
B.− Adj. 1. 1543 « sot, niais » (Calvin, Traicté des Reliques, VI, 433 ds Hug. : Les Apostres et les vrays chrestiens de leur temps n'ont pas esté si badins que de s'amuser à telles manigances) − 1656, Molière, L'Étourdi, I, 2 ds
Œuvres, éd. du Seuil, 1962; 2. av. 1680 « enjoué, plaisant » (Bussy-Rabutin ds Rich. 1680 : Il avoit un tour admirable dans son esprit enjoüe & badin).
Empr. au prov. badin « nigaud », adj. et subst. (Mistral), adj. attesté seulement à la fin du xvies. (Pansier, t. 3), dér. du prov. badar « bayer » fin xiies.-début xiiies. (P. Vidal, Si col paubres ds Rayn.) avec suff. -in; badar provient lui-même du b. lat. batare (bayer*); v. aussi badaud. Le changement de sens au xviies. s'explique par le fait que badin a été employé pour désigner le bouffon dans les comédies au xves. (Lew., p. 153) et au xvies. (Rab., III, 37 ds Hug.), personnage qui fait le sot, par conséquent qui provoque un rire facile. STAT. − Fréq. abs. littér. : 83. BBG. − Bach.-Dez. 1882. − Lew. 1960, p. 153. − Sain. Lang. Rab. t. 1 1922, p. 329; Ibid. t. 2 1923, p. 189. − Sandry-Carr. Manouche 1963. − Springh. 1962. |