| AVIDITÉ, subst. fém. Action ou état consistant à être avide; manifestation de cette action ou de cet état. A.− Désir ardent, immodéré de quelque chose. 1. [En parlant de nourriture] Voracité, gloutonnerie. Manger, boire avec avidité (Lar. 19e, Nouv. Lar. ill., DG), manger avec avidité, avec une extrême avidité (Ac. 1798-1935, Besch. 1845, Guérin 1892), l'avidité d'un homme affamé (Besch. 1845) : 1. La petite fille cependant dévorait avec avidité un morceau de pain, et regardait attentivement tour à tour Colomba et son frère, cherchant à comprendre dans leurs yeux le sens de ce qu'ils disaient.
Mérimée, Colomba,1840, p. 75. 2. Quand on parle de l'avidité gloutonne de l'araignée, on oublie qu'elle doit manger double, ou bien périr, manger pour refaire son corps, manger pour refaire son fil.
Michelet, L'Insecte,1857, p. 211. − P. ext., BIOL., CHIM. ,,Propriété d'une substance d'un tissu ou d'un organe, d'absorber ou de fixer une grande quantité d'un liquide ou d'un gaz`` (Méd. Biol. t. 1 1970) : 3. Les recherches de Laroche... ont mis en évidence l'avidité de la toxine pour le tissu nerveux...
Aviragnet, Weill-Hallé, Marie ds(F. Widal, P.-J. Teissier, G.-H. Roger, Nouv. traité de méd.,fasc. 2, 1920-24, p. 639). 2. [En parlant de not. abstr. comme le gain, les honneurs, ou de choses concr. comme les biens, l'or, etc.] L'avidité des honneurs (Ac. 1798-1935, Besch. 1845, Lar. 19e, Nouv. Lar. ill., Quillet 1965) : 4. On sait que l'avidité de l'or, et l'esprit de conquête dont les Espagnols et les Portugais étaient animés, il y a deux siècles, faisaient parcourir à des aventuriers de ces deux nations les différentes mers et les îles des deux hémisphères, dans la seule vue d'y rencontrer ce riche métal.
Voyage de La Pérouse,t. 2, 1797, p. 347. 5. Ainsi donc, comme on ne peut y demeurer que retenu par la verge du despotisme, ou par les fureurs de l'avarice et l'avidité forcenée du gain, il est aisé de concevoir que ces circonstances physiques doivent nécessairement produire à la longue, dans le moral, la plus dégoûtante dégradation.
Cabanis, Rapports du phys. et du moral de l'homme, t. 2, 1808, p. 37. 3. P. ext., absol. Avarice, cupidité. Une insatiable avidité (Ac. 1835-1935, Guérin 1892) : 6. Buttler, cherchant à faire partager à Isolan son projet d'assassinat, ne pouvait, sans absurdité, s'étendre avec complaisance sur la bassesse et l'avidité de ceux qu'il avoit choisis pour remplir ses vues.
Constant, Wallstein,1809, p. XXXI. 7. Nous ferons mieux connaître, plus tard, en parlant du livre de Caton sur l'agriculture, toute la rudesse du vieux génie latin. C'était un peuple patient et tenace, rangé et régulier, avare et avide. Supposé qu'un tel peuple devienne belliqueux, ces habitudes d'avarice et d'avidité se changeront en esprit de conquêtes.
Michelet, Hist. romaine,t. 1, 1831, p. 33. B.− Manifestation de l'avidité. 1. Attention ardente, passionnée. a) [Avec les verbes de perception] Voir, sentir, contempler avec avidité : 8. Et, comme la lune, sur le bord des nuages, répandait une lumière plus vive, elle contemplait Stephen; elle aspirait avec avidité les parfums incertains répandus dans l'air, elle regardait la verdure et le feuillage des arbres. Puis ses yeux se reportaient sur Stephen...
Karr, Sous les tilleuls,1832, p. 225. 9. Et je contemple tout cela [la mosquée] avec l'avidité qu'on éprouve quand le temps vous presse et qu'on a déjà le sentiment qu'un rapide oubli menace ce qui est encore là sous vos yeux.
J. et J. Tharaud, Paris Saïgon dans l'Azur,1932, p. 73. b) Au fig. [Le verbe exprime une opération intellectuelle] Dévorer (un livre) avec avidité : 10. Les Ragu tiennent table ouverte pour leurs intimes et, deux ou trois fois par semaine, je me rends à leur constante invitation. Le docteur est des plus intelligents, des mieux cultivés, des plus instruits; curieux de tout ou de presque tout, il lit beaucoup, dévore livre après livre avec une avidité juvénile; ...
Gide, Journal,1943, p. 222. 2. Avidité de + inf.Impatience de... : 11. Quoi de plus odieux, par exemple, que ces inopportunes impatiences du peuple, ce défilé de pétitions impossibles dont ils viennent de m'accabler! Quelle avidité de jouir! Quelles prétentions subversives!
Renan, Drames philos.,Caliban, 1878, III, 3, p. 413. 12. Sceptique et satirique devait être un esprit [A. France] que distinguait son extrême avidité de tout connaître. Son immense culture lui fournissait abondamment les moyens de désenchanter.
Valéry, Variété 4,1938, p. 37. PRONONC. : [avidite]. ÉTYMOL. ET HIST. − 1. 1389 « désir immodéré de qqc. » (Ph. de Maizières, Songe du vieil pel., III, 125 ds Gdf. Compl. : L'avidité de seignourir de Cyrus); 2. plus spéc. a) 1587 « désir immodéré de nourriture » (Ronsard, Franciade, L. II, var., note de l'éd. de 1587 ds Hug. : L'avidité : l'ardeur de manger. Je ne sache point de mot François plus propre, encores qu'il soit mendié du Latin); b) 1751 « désir immodéré de biens, d'argent » (Voltaire, Siècle de Louis XIV, c. 25 ds Dict. hist. Ac. fr. : Il parut bien, quand il [Fouquet] fut arrêté et conduit à la Bastille et à Vincennes, que son parti n'était autre chose que l'avidité de quelques courtisans et de quelques femmes, qui recevaient de lui des pensions et qui l'oublièrent dès qu'il ne fut plus en état d'en donner).
Empr. au lat. aviditas attesté au sens 1 dep. Plaute (Merc., 29 ds TLL s.v., 1422, 43), au sens 2 a dep. le Iers. av. J.-C. (Rutilius Lupus, 1, 18, ibid., 1423, 5), et au sens 2 b (Cicéron, Phil., 5, 20, ibid., 1422, 68). STAT. − Fréq. abs. littér. : 557. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 200, b) 563; xxes. : a) 431, b) 782. BBG. − Bastin 1970. − Méd. Biol. t. 1 1970. |