| ATRABILAIRE, adj. A.− MÉD. ANC. Qui a rapport à l'atrabile, à la bile noire : 1. Arétée distingue soigneusement les délires causés par les obstructions viscérales atrabilaires, de ceux qui se manifestent directement dans les fonctions du cerveau.
Cabanis, Rapports du physique et du moral de l'homme, t. 2, 1808, p. 368. ♦ Qui est causé par l'atrabile. Maladie atrabilaire : 2. Les maladies chroniques dépendent presque toutes, dans les pays chauds et secs, d'inflammations lentes, d'engorgemens hypocondriaques, ou de dégénérations atrabilaires, introduites dans toutes les humeurs.
Cabanis, Rapports du physique et du moral de l'homme, t. 2, 1808p. 193. B.− Littér. Porté à la mauvaise humeur, à l'irritation, à la colère, à la mélancolie. Synon. bilieux : 3. Des tentures de deuil coupoient ces arcades à une certaine élévation, et les brigands disséminés sur le fond de cette décoration funèbre ajoutoient à sa mystérieuse horreur; les uns, immobiles et recueillis, assis au fond des stalles creusées dans le massif des colonnes, et qu'on auroit pris pour des figures sinistres disposées par un sculpteur atrabilaire; ...
Nodier, Jean Sbogar,1818, p. 205. − Au fig. Qui exprime ou marque la mauvaise humeur : 4. Le jésuite, ému de pitié, n'avait qu'un souci : c'était, avec l'aide de Dieu, « de convertir, de guérir et de sauver M. Rousseau ». « Allons, Monsieur Rousseau, mon cher Monsieur Rousseau, un peu de vraie philosophie chrétienne... » « Où avez-vous donc pris ce ton triste et atrabilaire depuis dix ou douze ans que je n'ai eu l'honneur de vous voir? ... »
Guéhenno, Jean-Jacques,Roman et vérité, 1950, p. 141. − Emploi subst., vx. Un, une atrabilaire. Personne d'un caractère désagréable, irritable : 5. Le mélancolique évite les hommes, l'atrabilaire les repousse.
Bonnaire1835. PRONONC. ET ORTH. : [atʀabilε:ʀ]. Ac. Compl. 1842 donne la forme atrabilieux. Besch. 1845, s.v. atrabilieux, renvoie à atrabilaire (cf. aussi Quillet 1965). Land. 1834 enregistre séparément atrabilaire et atrabilieux (qu'il transcrit : a-tra-bi-lieû, fém. lieûze). Cf. aussi Lar. 19eet Nouv. Lar. ill. ÉTYMOL. ET HIST.
I.− Atrabilaire.
A.− Adj. 1. 1546 anc. méd. « (du sang, d'une humeur) qui contient de la bile noire, qui engendre l'hypocondrie » (Ch. Estienne, Dissect. des Parties du Corps, 197, 19 ds Quem. : sang atrabilaire); cf. 1670 (Molière, Pourc., I, 8 ds Ch.-L. Livet, Lexique de la lang. de Molière, Paris, Imprimerie Nationale, t. 1, 1895, p. 159 : La seconde [espèce de mélancolie] ... vient de tout le sang, fait et rendu atrabilaire); 1575-90 humeur atrabilaire (Paré, XX, 2 ds Gdf. Compl.); 2. 1584-98 atri-bilaire « (d'une personne) en qui l'atrabile prédomine, hypocondre, mélancolique » (Guill. Bouchet, 36eSeree, éd. Roybet, V, 110 ds Hug. : Les ladres ... n'engendrent gueres d'enfans, à cause qu'ils sont atribilaires, et par consequent froids et secs).
B.− Subst. 1690 (Fur.); 1764, 30 janvier (Voltaire, Lettres ds Dict. hist. Ac. fr. : Douze parlements jansénistes sont capables de faire des Français un peuple d'atrabilaires).
II.− Atrabilieux, 1845 synon. de atrabilaire (Besch.).
Atrabilaire, dér. de atrabile*; suff. -aire*. Atrabilieux, croisement de atrabile* et de bilieux*. STAT. − Fréq. abs. littér. : 42. BBG. − Foulq.-St-Jean 1962. − Littré-Robin 1865. − Méd. Biol. t. 1 1970. − Nysten 1824. − Rog. 1965, p. 109. |