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ASSAISONNER, verbe trans.
A.− ART CULIN. Ajouter à un mets des éléments (ingrédients ou épices) propres à en relever le goût. Synon. accommoder :
1. Il assaisonnait volontiers lui-même sa soupe au poisson, sachant la dose de poivre et de sel et les herbes qu'il fallait, et se régalait autant de la faire que de la manger. Hugo, Les Travailleurs de la mer,1866, p. 89.
SYNT. Assaisonner un mets, un plat, une viande, une sauce, une salade.
Assaisonner de :
2. ... salez, poivrez et assaisonnez d'une prise de poivre rouge (poivre long mûr réduit en poudre). Les Gdes heures de la cuis. fr., L. Tendret,1896, p. 200.
[Le suj. est une chose] Le sel, le poivre assaisonne les aliments.
Proverbial. La faim, l'appétit assaisonne tout. ,,Quand on a faim, tout mets paraît bon`` (Ac. 1835-1932).
B.− Au fig.
1. Accompagner ses propos, ses actes ou ses attitudes, etc., d'un certain piquant :
3. Il y a mille manières d'apprêter et d'assaisonner la parole; Cicéron les aimait toutes. Joubert, Pensées,t. 2,1824, p. 160.
4. Ce qui donne bien aux Lettres Persanes leur date et le cachet de la Régence, c'est la pointe d'irrévérence et de libertinage qui vient là pour relever le fond et l'assaisonner selon le goût du jour. Sainte-Beuve, Causeries du lundi,t. 7,1851-62, p. 39.
Emploi passif, rare. Assaisonné (par). Rendu attirant :
5. Il en usait galamment avec toutes les femmes, même avec celles dont une longue habitude avait émoussé pour lui l'attrait, comme ce devait être le cas de Madame de Rochemaure, à moins qu'assaisonnée par la trahison, l'absence, l'infidélité et l'embonpoint, il ne la trouvât appétissante. A. France, Les Dieux ont soif,1912, p. 142.
[Le suj. est une chose] Rendre plus agréable, plus piquant :
6. Presque aucun jour ne passait sans qu'éclatât entre eux quelqu'une de ces escarmouches que l'abbé nommait des « castilles ». Il prétendait que la vieille fille en avait besoin pour sa santé; il la faisait monter à l'arbre comme on emmène un chien faire un tour. Il n'y apportait peut-être pas de méchanceté, mais certainement de la malice et s'y montrait assez provoquant. Cela les occupait tous deux et assaisonnait leur journée. Gide, Isabelle,1911, p. 650.
7. À l'idée qu'elle était peut-être israélite, le peu qui subsistait chez Antoine de son éducation s'émut : juste assez pour assaisonner l'aventure d'un piment d'indépendance et d'exotisme. R. Martin du Gard, Les Thibault,La Belle saison,1923, p. 892.
2. Pop. Invectiver, injurier, frapper :
8. Je vais le sortir aussi, moi, tiens... je vais l'assaisonner ce sale voyou! ... Céline, Mort à crédit,1936, p. 554.
9. Je l'assaisonne [un homme] à grands coups de bottine, mais après j'ai regret, je me dis, c'est la nature chétive qu'est-ce qu'il en peut, pauvre canard. Aymé, Le Passe-muraille,1943, p. 262.
PRONONC. : [asεzɔne], j'assaisonne [ʒasεzɔn]. Land. 1834 est le seul dict. à transcrire la 2esyllabe avec [e] fermé (cf. après-saison). Enq. : /asezon/ (il) assaisonne.
ÉTYMOL. ET HIST. A.− 1. 1209 fig. « disposer, régler » (Reclus de Molliens, Miserere, éd. van Hamel, 194, 2 ds T.-L. : Jhesus, ... Ki toutes coses asaisones A droit et rens justes merites), attest. isolée; 2. 1371 « conduire les cultures et façons de la terre selon les saisons » (Reg. du chap. de S. J. de Jerus., Arch. MM 29, fo36 vods Gdf. : Sera tenuz ledit preneur de labourer et cultiver lesdites terres bien et souffisament de toutes façons, et en saison, et ycelles justement asaisonnees) − 1393 (Arch. MM 31, fo190 ro, ibid.). B.− xiiies. asaisnie « apprêté (d'un mets) » (Rigomer in Rom., XIX, 288 ds T.-L. : Lors vos ferai une poree, Si avra ens une coree De chievrel mout bien asaisnie); 1539 assaisonner « rendre savoureux à l'aide de condiments culinaires » (Est.); 1572 fig. (Amyot, trad. de Plutarque, Œuvres morales, comment on pourra discerner le flatteur d'avec l'amy ds Dict. hist. Ac. fr. : Quelquefois ils [les amis] usent d'un jeu, d'un boire et manger ensemble, d'une risee, d'une facetie l'un avec l'autre, comme de saulse pour assaisonner des affaires de pois et de grande conséquence). C.− 1601 « accommoder ensemble (des éléments différents) » (Charron, De la Sagesse, liv. II, C-6, ibid. : Les nécessités naturelles que Dieu a assaisonnées de plaisir, leur sont corvées). Dér. de saison*; préf. a-1*, dés. -er.
STAT. − Fréq. abs. littér. : 194.
BBG. − Darm. Vie 1932, p. 155. − Esn. Poilu 1919. − Feugère (F.). Apr. sept cents ans. Le grand s. de Saint Louis et son vocab. Déf. Lang. fr. 1970, no53, p. 11. − Grimaud (F.). Petit gloss. du jeu de boules. Vie Lang. 1968, p. 110. − Lasnet 1970. − Le Breton 1960. − Noter-Léc. 1912. − Plais.-Caill. 1958. − Sandry-Carr. 1963.