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ASPHYXIER, verbe trans.
BOT., MÉD. et MÉD. VÉTÉR.
I.− Emploi trans. [Le compl., s'il est exprimé, désigne une pers., un coll., un animal ou une plante] Provoquer, entraîner l'asphyxie :
1. Quand on fait respirer de l'hydrogène sulfuré, cela arrête immédiatement les mouvements respiratoires du thorax. Est-ce là ce qui asphyxie l'animal? C. Bernard, Cahier de notes,1860, p. 89.
Par hyperbole :
2. Et ces puanteurs d'essence qui nous entêtaient, nous chaviraient, nous asphyxiaient! A. Arnoux, Calendrier de Flore,1946, p. 131.
[Le compl. désigne une pers.] Surprendre par un récit passionnant qui arrête la respiration de l'auditoire.
Rem. Attesté ds Lar. encyclop.
Absol. [Le suj. désigne une pers., un animal ou une plante] Étouffer d'asphyxie :
3. Le corps de l'assaillant, dont il [l'inspecteur Colombin] essayait de défaire les mains sauvages qui serraient, faisait boulet à son cou. Il asphyxiait. Il donna un coup de reins formidable et roula du lit avec l'agresseur. Aragon, Les Beaux quartiers,1936, p. 473.
P. métaph. ou au fig. [Le compl. désigne une pers. ou un inanimé] Paralyser plus ou moins, au point de vue intellectuel ou moral, sous l'action du milieu de vie :
4. Être et se sentir fils d'un grand homme est souvent plus accablant qu'inspirant. Cela même étouffe et asphyxie, si l'on reste trop près de son père... Sainte-Beuve, Nouveaux lundis,t. 3,1863-69, p. 63.
5. ... Car l'âme se fatigue aussi précisément que le corps et comporte ses toxines qui l'asphyxient. J. de La Varende, Don Bosco,1951, p. 152.
Arg. et lang. fam. Boire. Asphyxier le perroquet. ,,Boire un verre d'absinthe`` (Larch. 1880). Asphyxier le pierrot. ,,Boire un verre de vin blanc`` (Larch. 1880). Asphyxier le ver. ,,Variante [de tuer le ver. Boire la goutte le matin]`` (L. Rigaud, Dict. du jargon parisien, L'arg. anc. et mod., 1878, p. 341). Voler, dérober (Ch.-L. Carabelli, Lang. pop.).
II.− Emploi pronom. [Le suj. désigne une pers.] Se suicider par le gaz :
6. lechy elbernon. − (...) Pour moi, si le démon de la tristesse ne me quitte point, je me tuerai, quand je devrais m'ouvrir le ventre avec des ciseaux! Je m'asphyxierai au-dessus d'un bec de gaz. Claudel, L'Échange,1reversion,1894, III, p. 703.
Par hyperbole :
7. Pas une invention, pas une imagination! À peine si dans un petit fumoir, où cinq fumeurs s'asphyxient, Lami a déroulé une petite frise charmante de Carnaval de Venise. E. et J. de Goncourt, Journal,1863, p. 1329.
P. ext. [En parlant d'un inanimé concr., en partic. du feu] S'éteindre, mourir par manque d'air :
8. La soupente de la goélette! que j'y ai vécu! pataugeant dans les balles et les choses de cale. J'admire encore la lampe que j'y regardais s'asphyxier... Valéry, Correspondance[avec Gide],1894, p. 221.
Au fig. [Le suj. désigne une pers. ou un inanimé abstr.] :
9. On pense bien qu'au milieu de telles idées Lucien n'eut pas la moindre tentation d'aller s'asphyxier dans les idées épaisses du salon de Madame Grandet, et encore moins se soumettre à ses serrements de main. Stendhal, Lucien Leuwen,t. 3,1836, p. 374.
10. ... nous avions besoin d'altitude; ici mes pensées s'asphyxiaient. A. Arnoux, Rêverie d'un policier amateur,1945.
Rem. On rencontre ds la docum. le néol. asphyxieur, subst. masc. (M. Rollinat, Les Névroses, Les Âmes, 1883, p. 14; suff. -eur2*). Ell. de parfum asphyxieur : ,,Oh oui! dans l'ombre épaisse ou dans le demi-jour, / Se gorger de parfums comme d'une pâture, / C'est bien subodorer l'âme de la Nature, / Humer le souvenir, et respirer l'amour! / Ces doux asphyxieurs aussi lents qu'impalpables / Divinisent l'extase au milieu des sophas, / Et les folles Iñès et les pâles Raphas / En pimentent l'odeur de leurs baisers coupables`` (Id., ibid.).
PRONONC. ET ORTH. − 1. Forme phon. [asfiksje], j'asphyxie [ʒasfiksi]. 2. Forme graph. − Asphyxier fait partie des verbes qui ont ,,deux i à la 1reet à la 2epersonne du plur. de l'imparfait de l'indicatif et du présent du subjonctif : asphyxiions, asphyxiiez. Ces deux i sont produits par la rencontre de l'i final ou radical qui se maintient dans toute la conjugaison, avec l'i initial de la terminaison`` (cf. Besch. Conjug. 1961, p. 31).
ÉTYMOL. ET HIST. − 1791 asphyxié part. passé subst. (Fourcroy cité par Guérin 1892 : Le plus sûr moyen de guérir les asphyxiés, c'est de les porter au grand air et de leur faire respirer un gaz ammoniac comme stimulant); 1793 asphyxié part. passé adj. « étouffé par l'asphyxie » (Les Représentants à l'armée d'Italie au Com. Sal. p., 8ejour du 2emois de l'an II.-29 oct. 1793, Aul., Act. Com. de Sal. p., t. VIII, p. 115 ds Brunot t. 10, 1, p. 66 : Le patriotisme est encore ici comme un corps asphyxié qu'il faut rappeler à la vie. Les moyens révolutionnaires sont les seuls convenables et les seuls curatifs que nous sachions administrer); 1835 trans. et pronom. (Ac. : Asphyxier. Déterminer, causer l'asphyxie. La vapeur de charbon asphyxie. Ce gaz les asphyxia. Il s'emploie aussi avec le pronom personnel, et signifie, Se donner la mort au moyen d'une vapeur qui asphyxie. Il a voulu s'asphyxier); 1826, 15 mars, fig. (Journal des Dames et des Modes ds Quem.). Dér. de asphyxie*; dés. -er.
STAT. − Fréq. abs. littér. : 57.
BBG. − Gottsch. Redens. 1930, p. 122. − Grimaud (F.). Pt gloss. du jeu de boules. Vie Lang. 1968, p. 110. − Larch. 1880. − Sandry-Carr. 1963.