| ARTILLERIE, subst. fém. A.− MILITAIRE 1. Ensemble des matériels de guerre comprenant les canons, obusiers, etc., leurs munitions et les véhicules qui servent à leur transport ou à leur traction : 1. ... de toutes les maisons qu'on avoit construites, il ne reste plus que le grand magasin devenu arsenal, dans lequel on a déposé la grosse artillerie des fortifications, et celle qui fut prise à la capitulation de Saratoga.
Crèvecœur, Voyage dans la Haute Pensylvanie,t. 1, 1801, p. 260. 2. L'interdiction totale ne pouvait être espérée que de l'artillerie lourde mobile et de l'artillerie de campagne, seules capables d'assurer et de maintenir des résultats permanents. Il fallait donc mettre ces artilleries à portée d'interdiction efficace.
Foch, Mémoires,t. 2, 1929, p. 124. SYNT. Artillerie terrestre, navale; artillerie de campagne, de montagne, de siège; batterie, pièce, train d'artillerie. − P. métaph. : 3. L'artillerie des plaisanteries vulgaires des petits journaux, la mitraille des pamphlets Cormenin tombaient alors sur la Cour.
Balzac,
Œuvres diverses,t. 3, 1850, p. 339. 4. Je suis, en face des vanités de ce monde, une sorte d'inspecteur aux revues. Je ne me mêle pas à l'escadron des passions, ni à l'infanterie des goûts, ni à l'artillerie des fantaisies, pour conduire les charges des unes, les attaques des autres, les évolutions des troisièmes.
Gobineau, Les Pléiades,1874, p. 10. 2. P. méton. Corps d'armée affecté au service de ce matériel : 5. ... eux qui avaient vu un monde nouveau sortir, frais, resplendissant et sublime, du sépulcre des siècles défunts, une Europe s'écrouler, une autre s'élever, et un simple lieutenant d'artillerie réaliser les plus extravagantes chimères de l'ambition la plus effrénée par la seule vigueur de son génie et par l'énergie de ses rudes soldats?
P. Bourget, Essais de psychol. contemp.,1883, p. 167. 6. Ce soir, à dîner, M. de Saint-Laurent, chef d'escadron d'artillerie, nous donnait quelques détails sur les grandes manœuvres qui viennent d'avoir lieu; ...
E. et J. de Goncourt, Journal,1895, p. 847. B.− Au fig. 1. Loc. fam., iron. a) Faire donner l'artillerie. ,,Changer de ton, abandonner les accusations vagues et se faire plus précis en fournissant éventuellement des preuves à l'appui de ses dires. (...) Passer de la moquerie légère à l'injure percutante et grasse. (...) Solliciter l'assistance des sympathisants au cours d'une joute oratoire mal engagée`` (Éd. 1967). b) Et voilà la grosse artillerie. ,,Se dit pour saluer l'arrivée d'un groupe de personnes de forte corpulence`` (Éd. 1967). 2. Arg. Artillerie. ,,Dés à jouer truqués`` (J. Lacassagne, L'Arg. du « milieu », 1928, p. 8). Coup d'artillerie. ,,Coït`` (Ch.-L. Carabelli, [Lang. pop.], p. 18). Demander l'artillerie ou envoyer des fusées. ,,Vomir ayant trop bu`` (G. Esnault, Notes complétant et rectifiant « Le Poilu tel qu'il se parle », 1956). PRONONC. : [aʀtijʀi]. Les dict. indiquent ,,l mouillé`` jusqu'à Littré inclus. ÉTYMOL. ET HIST. − 1. Ca 1307 « ensemble des engins de guerre, arbalètes, lances, etc. » (G. Guiart, Royaux lignages, éd. Buchon, II, 11245 ds T.-L. : Artillerie est le charroi Qui par duc, par conte ou par roi Ou par aucun seigneur de terre Est charchie de quarriaus en guerre, D'arbalestes, de dars, de lances Et de targes d'unes semblances); xves. « matériel de guerre comprenant les canons, les mortiers, les bombes, etc. » (Ph. de Commynes, Mémoires ds Bartsch Chrestomathie de l'a. fr., 99, 70 : Poncet de Rivieres devant ledict Pont de Charanton, et monsr. du Lau et d'autres par devers le Boys de Vincennes, jusques a nostre artillerye et tüerent ung canonier); d'où fig. a) fin xves. « inventions subtiles » (Pronostication d'Habenragel ds Anc. poés. fr. éd. Montaiglon, t. 6, p. 36); b) 1585 « vivres » (N. du Fail, Contes d'Eutrapel, 8, [I, 144] ds Hug.); 2. 1692 « troupes employées au service de l'artillerie » (Ordonnance de Louis XIV, fév. 1692 ds Jal1: ... six capitaines, qui seront nommés Capitaines de galiotes et d'Artillerie, de neuf lieutenants, neuf sous-lieutenants et neuf aides d'Artillerie); cf. Ac. 1694.
Dér. du rad. de artillier « équiper, pourvoir d'engins », début xiiies. (Chev. au Barizel, 5, Méon, Rec. I ds Gdf.), lui-même altération de l'a. fr. atillier « arranger, ajuster » sous l'influence de art* (Thomas, Essais de philol. fr., 1897, pp. 243-244); atiller (attesté dès 1665-70 au sens de « se parer », Chr. de Troyes, Erec et Enide, éd. W. Foerster, 360 ds T.-L., et en partic. « revêtir les diverses parties de l'armure », ca 1200, Perceval, ms. Montp. H 249, fo224ads Gdf.) est issu du lat. *aptĭculare, dér. de aptare « rendre capable » (REW3, O. Bloch ds R. Lang. rom., t. 11, pp. 314-316) de la même manière que appareiller* < lat. apparĭculare (apparare); l'-i- de atiller au lieu de -ei- attendu est dû soit à -ĭculare devenu -īculare (Fouché, p. 198) soit à l'influence du verbe a.fr. atirier (xiies. ds T.-L.) « arranger, disposer » (< a.fr. tire « rangée, série », a.b.frq. *têri « état de ce qui est en ordre »). Cette explication écarte l'objection d'ordre phonét. formulée par EWFS2contre l'étymon *apticulare; suff. -erie*. STAT. − Fréq. abs. littér. : 1 609. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 938, b) 1 341; xxes. : a) 1 759, b) 3 411. BBG. − Bach.-Dez. 1882. − Blanche 1857. − Bouillet 1859. − Brüch. (J.). Bemerkungen zum französischen etymologischen Wörterbuch E. Gamillschegs. Z. fr. Spr. Lit. 1927, t. 49, p. 293. − Éd. 1967. − Esn. 1966. − Esn. Poilu 1919. − Gay t. 1 1967 [1887]. − Gruss 1952. − Jal 1848. − Lacr. 1963. − Le Breton 1960. − Le Clère 1960. − Leloir 1961. − Privat-Foc. 1870. − Sandry-Carr. 1963. − Will. 1831. |