| ARTICHAUT, subst. masc. A.− Plante potagère de la famille des Composées ayant la forme d'un gros chardon, cultivée pour ses capitules ou têtes d'artichauts : 1. Les carreaux du potager sont à multiplier pour la salade, les pois, les artichauts, les choux-fleurs, les épinards, salsifis, navets et tous autres, ...
Pesquidoux, Le Livre de raison,t. 1, 1925, p. 154. SYNT. Artichaut camus de Bretagne, de Laon, de Provence; artichaut perpétuel, artichaut violet hâtif. − MÉD. La tige et les feuilles ,,ont de multiples propriétés : antirhumatismales, fébrifuges, laxatives et diurétiques``. (Lar. méd. 1970). Rem. Le nom d'artichaut est porté par plusieurs autres plantes plus ou moins apparentées ou ressemblant à l'artichaut potager : artichaut de Jérusalem (S. de Beauvoir, Mémoires d'une jeune fille rangée, 1958, p. 64), - des toits ou - bâtard, − des murailles. − P. ext. Partie comestible de l'artichaut potager, capitule ou tête d'artichaut : 2. Il la contemplait tandis qu'elle grignotait les feuilles d'un petit artichaut cru.
R. Martin du Gard, Les Thibault,La Belle saison, 1923, p. 893. SYNT. (domaine de l'art culin., soit que l'on consomme l'artichaut entier débarrassé de son foin, soit que l'on ne consomme que le fond). Artichaut cru à la croque-au-sel, à la poivrade et à la vinaigrette; artichaut cuit au beurre, à la sauce blanche, à la crème, à la sauce hollandaise, à la sauce tartare, à la mayonnaise, farci à la barigoule, à la grecque, à la lyonnaise, à la diable, etc.; fond d'artichaut à la crème, à la béchamel, à la mornay, à la florentine, à la jardinière ou garni d'appareils divers (Ac. Gastr. 1962). Rem. S'emploie adjectivement pour désigner, avec plus de précision, une variété de vert : vert artichaut (Gide, Journal, 1923, p. 759). B.− P. compar. ou p. anal. 1. Fam. [En parlant d'une femme, plus rarement d'un homme] Avoir un cœur d'artichaut. Avoir le cœur trop tendre et le donner sans discernement à autant de personnes qu'il y a de feuilles sur celui de l'artichaut : 3. Cependant il s'attardait encore sur le pas de la porte et demandait à Jupien des renseignements sur le quartier. « Vous ne savez rien sur le marchand de marrons du coin, pas à gauche, c'est une horreur, mais du côté pair, un grand gaillard tout noir? Et le pharmacien d'en face, il a un cycliste très gentil qui porte ses médicaments. » Ces questions froissèrent sans doute Jupien car, se redressant avec le dépit d'une grande coquette trahie, il répondit : « Je vois que vous avez un cœur d'artichaut. »
Proust, Sodome et Gomorrhe,1922, p. 609. 2. [Désigne une chose] a) Lang. cour., littér. Ce qui, par sa forme caractéristique, rappelle l'artichaut : 4. Au kiosque, les journaux du matin pendent avachis et jaunes un peu déjà, formidable artichaut de nouvelles en train de rancir.
Céline, Voyage au bout de la nuit,1932, p. 368. 5. Le raid était-il terminé? Une mince lueur à gauche. Des bottes sonnèrent dans le silence plein de lointains appels. Un artichaut de flammes succéda à la lueur, retomba; puis, projetée sur le ciel et sur les maisons, une grande lueur s'établit.
Malraux, L'Espoir,1937, p. 721. b) En partic. − PYROTECHNIE. Pièce d'artifice percée de trous lui permettant simultanément de tourner et de monter. − SERR. ,,... assemblage de crocs et de pointes de fer, dont on garnit un mur ou le revers d'un fossé pour en défendre l'accès`` (Jossier 1881) : 6. Soudain, une voix formidable cria :
− À l'assaut! Et l'on vit le prince des Boscénos dressant sur le mur armé de pointes et d'artichauts de fer sa forme gigantesque.
A. France, L'Île des pingouins,1908, p. 238. c) Arg. (Fond d') artichaut ou artiche. Portefeuille; p. ext. argent : 7. On barbote au pauvr' diable qui crève
Ce qu'il a dans son artichaut,
Ses beaux crocs même on lui enlève,
À l'hosteau. (Goualantes de la Vilette, 1906).
J. Lacassagne, P. Devaux, L'Argot du« milieu », 1948, p. 8. ♦ Tête d'artichaut. ,,Espèce de casse-tête ou d'assommoir`` (P. Joigneaux, Les Prisons de Paris, 1841, p. 296). PRONONC. ET ORTH. : [aʀtiʃo]. Littré indique que le t ne se lie pas; en revanche, l's du plur. se lie. Enq. : /aʀtiʃo/. Fér. 1768 et Fér. Crit. t. 1 1787 relèvent une var. artichaud. ÉTYMOL. ET HIST. − 1. Av. 1506 carchoffle « ornement d'un harnais de cheval en forme d'artichaut » (J. Molinet, Chron., éd. Doutrepont et Jodogne, II, 1935, p. 457, année 1499 : dessus la cruppe, estoit une crosse carchoffle d'or); 2. 1538 artichault « la plante » (Estienne, Dictionarium Latino-gallicum, s.v. cynera scolymus, p. 647 : scolymos, Herba, Ung artichault).
1 appellation empr. p. anal. à l'ital. carciofjo « artichaut », attesté au sens propre dep. le xvies. (Aretino [1492-1556] II, 171 ds Batt.), prob. empr. aux lang. hispano-romanes : a. esp. carchiofa 1423 ds Cor., a. cat. carxofa 1492 ds Alc.-Moll., eux-mêmes empr. à l'hispano-arabe haršûfa (ar. class. ḥáršafa) d'apr. Cor. 2 empr. à l'ital. du nord articiocco « id. » (lui-même issu d'une forme précédée de l'article al-; cf. l'esp. alcachofa, Nyrop t. 1, p. 61; Sain. Lang. Rab., p. 148; Migliorini, Storia, p. 425; Sar., p. 27; Wind, p. 169) notamment en usage en Lombardie et en Piémont où il a la forme articiocch, attestée dep. le xvies. (A. F. Doni [1513-70] Mondi celesti, terrestri et infernali [1reéd. 1552] 3 ds Batt.). STAT. − Fréq. abs. littér. : 110. BBG. − Ac. Gastr. 1962. − Alex. 1768. − Bach.-Dez. 1882. − Barb.-Cad. 1963. − Bouillet 1859. − Brard 1838. − Canada 1930. − Chabat t. 1 1875. − Chass. 1970. − Criqui 1967 →. − Dumas 1965 [1873]. − Esn. 1966. − France 1907. − Gottsch. Redens. 1930, p. 23. − Höfler (M.). Eine Fragwürdige Methode der Lehnwortforschung. Z. rom. Philol. 1966, t. 82, no5/6, p. 464. − Jossier 1881. − Larch. 1880. − Lar. méd. 1970. − Lar. mén. 1926. − Lasnet 1970. − Littré-Robin 1865. − Mont. 1967. − Mots rares 1965. − Nysten 1824. − Pomm. 1969. − Pope 1961 [1952], § 92, 535. − Privat-Foc. 1870. − Rog. 1965, p. 50. − Roll. Flore t. 7 1967, p. 113, 115. − Sain. Lang. par. 1920, p. 99, 383. − Sar. 1920, p. 27. − Wind 1928, p. 169, 205. |