| APOTHICAIRE, subst. masc. Péj. ou iron. Préparateur et vendeur de produits pharmaceutiques. Synon. mod. pharmacien :1. − J'ai l'air du fils d'un apothicaire, d'un vrai courtaud de boutique! se dit-il à lui-même avec rage en voyant passer les gracieux, les coquets, les élégants jeunes gens des familles du faubourg Saint-Germain, ...
Balzac, Les Illusions perdues,1843, p. 177. 2. Parce qu'il herborisait, on le prenait pour un apothicaire, un faiseur d'orviétan.
Guéhenno, Jean-Jacques,Grandeur et misère d'un esprit, 1952, p. 235. − En compos. ou en appos. : 3. Probablement que c'était le logis vénéré d'un bon apothicaire-herboriste d'autrefois, lors du vieux temps des élixirs et des juleps, quand on venait chercher chez lui la drogue orientale, le médicament miellé, l'or potable qui prolonge la vie, et puis aussi le remède mystérieux qui se composait la nuit dans la seconde arrière-boutique, derrière les gros alambics verts et les paquets de baume : ...
Flaubert, Par les champs et par les grèves,1848, p. 276. 4. Que croyez-vous voir dans la personne de ce gros garçon joufflu, prosaïque, au nez rond, aux cheveux plats, au pied large, largement chaussé d'une large botte, qui divise des paquets d'assa fétida, et qui, drogue lui-même, vit au milieu des drogues? − C'est un garçon apothicaire, un élève en pharmacie?
Balzac,
Œuvres diverses,t. 2, 1850, p. 9. Rem. Ac. 1835 note : ,,le mot Pharmacien est aujourd'hui plus usité.`` Cf. Besch. 1845 : ,,On emploie aujourd'hui le mot Pharmacien.`` Apothicaire n'est employé auj. que p. iron. ou avec une nuance dépréc. (cf. 1, 2, 4). ,,Il ne s'emploie plus que par dénigrement.`` (Ac. t. 1 1932). − Loc. métaph. ♦ Péj. Note, mémoire, compte d'apothicaire. Calculs compliqués ou mesquins, ou que l'on présume exagérément majorés : 5. le général. − Monsieur, la note que vous m'avez envoyée est un véritable compte d'apothicaire, ...
Brillat-Savarin, Physiol. du goût,1825, p. 327. Rem. ,,L'apothicaire faisant commerce de substances dont le vulgaire ignore complètement la nature et le prix, le mot apothicaire devint, pour le peuple, synonyme de trompeur; de là l'emploi de ce mot en mauvaise part, et le plus souvent d'une manière ironique.`` (Lar. 19e). ♦ Vx. Faire de son corps une boutique d'apothicaire. Absorber trop de médicaments sans nécessité. Un apothicaire sans sucre. Personne dépourvue de ce qui est indispensable à l'exercice de sa profession : 6. Divers usages du sucre. Le sucre est entré dans le monde par l'officine des apothicaires. Il devait y jouer un grand rôle; car, pour désigner quelqu'un à qui il aurait manqué quelque chose essentielle, on disait : c'est comme un apothicaire sans sucre.
Brillat-Savarin, Physiol. du goût,1825, p. 105. Rem. On rencontre ds la docum. le mot apothicairesse, subst. fém. vieilli. ,,Religieuse qui prépare les remèdes pour les malades de son couvent.`` (Littré). PRONONC. ET ORTH. : [apɔtikε:ʀ]. Clédat 1930, p. 49, rappelle que ,,on trouve apoticaire [sans h] chez Voltaire``. − Dér. Apothicairesse. Dernière transcription ds Littré : a-po-ti-kê-rè-s' (pour une durée longue sur la 4esyllabe, cf. aussi Fér. 1768 et Fér. Crit. t. 1 1787). ÉTYMOL. ET HIST.
I.− Apothicaire. Ca 1260 apotecaire « celui qui prépare ou vend des drogues » (E. Boileau, Métiers, 2epart., XVI, 4 ds Gdf. Compl. : Tuit pevrier et tuit apotecaire ne doivent riens de coutume); 1350 apothicaire (G. Le Muisit, Poésies II, 61, éd. Kervyn de Lettenhove ds T.-L.).
II.− Apothicairesse. 1. 1312 apotikairesse « femme de pharmacien (?) » (Médecine Franche Comté ds IGLF : à Ysabel l'apotikairesse, pour plusieurs choses); 1704 (Trév. : Apothicaresse ou Apothicairesse. C'est la femme d'un apothicaire [...] il est bas en ce sens) − Trév. 1771; 2. 1531 apothicaresse « religieuse au service des pauvres, qui prépare les remèdes » (Archiv. hospit. de Paris, I, 146, Bordier ds Gdf. : apothicaresse chevetayne qui est l'office d'avoir la domination du service des pauvres); 1704 apothicairesse « id. » (Trév. : Apothicairesse. Religieuse qui a soin de l'apothicairerie de son couvent) − Littré 1872.
I empr. au b. lat. apothecarius « magasinier, boutiquier », (Saint Augustin, Epist., 185, 4, 15 ds TLL s.v., 255, 65); cf. lat. médiév. au sens de « celui qui prépare les médicaments » (Johannes Platearius, Simpl. med., p. 25 ds Mittellat. W. s.v., 770, 16); dér. du lat. apotheca « réserve » (Cicéron, Vat., 12, ibid., 255, 28), lui-même empr. au gr. α
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η « magasin » (Thucydide, 6, 97 ds Bailly). Sur les rapports entre apothicaire et pharmacien voir E. Guitard ds Rev. Hist. Pharmacie, IX, 517-518. II dér. de apothicaire*; suff. -esse*. STAT. − Fréq. abs. littér. : 207. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 358, b) 754; xxes. : a) 162, b) 72. BBG. − Arts Mét. 1766. − Bach.-Dez. 1882. − Bouillet 1859. − Canada 1930. − Comm. t. 1 1837. − France 1907. − Gay t. 1 1967 [1887]. − Gottsch. Redens. 1930, p. 239, 241. − Goug. Mots t. 1 1962, p. 238. − Laf. Suppl. 1878. − Larch. Suppl. 1880. − Le Roux 1752. − Letessier (F.). Notes lexicol. : boutiquier, apothicaire, pharmacien, quinine, chlorose. Fr. mod. 1951, t. 19, pp. 109-111. − Lew. 1960, p. 221. − Littré-Robin 1865. − Mots rares 1965 (s.v. apothicairesse). − Nysten 1824. − Privat-Foc. 1870. − St-Edme t. 1 1824. |