| ANTIQUITÉ, subst. fém. I.− Au sing. A.− [Avec ou dans un compl.] Caractère de ce qui appartient à une époque très ancienne ou qui dure depuis une telle époque. 1. [Le mot est suivi d'un compl. de nom, prép. de, exprimant ce qui est affecté de ce caractère] L'antiquité d'un nom. Synon. (haute) ancienneté : 1. Je n'ai rien nié, j'ai expliqué. Je n'ai pas eu besoin de récuser les évangiles ni la tradition chrétienne, de supposer des interpolations, des anachronismes, des mensonges dans cette haute et respectable antiquité du christianisme. J'ai tout accepté, et j'ai seulement expliqué.
Leroux, De l'Humanité,t. 2, 1840, p. 965. SYNT. L'antiquité du monde, l'antiquité d'un mouvement, l'antiquité d'un peuple, l'antiquité d'une race. 2. [Le mot est l'élément de base d'un syntagme introd. par la prép. de] :
2. Je jouis vivement à voir défiler les beaux villages qui se succèdent et se multiplient en approchant de Londres : riches maisons enguirlandées de verdure, (...). Beaucoup d'églises, riches aussi, d'un gothique moderne, mais qui ont trouvé moyen de se vêtir d'antiquité, en jetant sur elles un ample et sombre manteau de lierre.
Michelet, Sur les chemins de l'Europe,1874, p. 166. − P. ext. Vieillesse extrême et vénérable : 3. Il arrivait à la hauteur de la colonne Morris, lorsque le ramasseur de mégots s'ébranla, et marcha vers lui. Il avait une barbe blanche, et des yeux pleins d'antiquité.
J. Romains, Les Copains,1913, p. 79. B.− [Emploi sans compl.] Époque historique très ancienne. 1. [Avec un adj. précisant] a) [Le degré d'ancienneté] Une haute antiquité : 4. Dans mon opinion, les Druzes sont un de ces peuples dont la source s'est perdue dans la nuit des temps, mais qui remontent à l'antiquité la plus reculée; leur race, au physique, a beaucoup de rapport avec la race juive, et l'adoration du veau me porterait à croire qu'ils descendent de ces peuples de l'Arabie Pétrée qui avaient poussé les Juifs à ce genre d'idolâtrie, ou qu'ils sont d'origine samaritaine.
Lamartine, Voyage en Orient,t. 2, 1835, p. 114. ♦ De toute antiquité, (dès) la plus haute -. Depuis toujours, de tout temps. b) [La caractéristique de l'époque considérée comme ayant produit un type de civilisation] L'antiquité classique : 5. À envisager les choses de haut, il est aisé de discerner dans l'histoire d'Europe, depuis les temps anciens jusqu'à nos jours, deux grands ordres sociaux, savoir, l'Antiquité grecque et romaine, d'une part, et le Moyen Âge, de l'autre. Entre ces deux mondes il y a un prodigieux abîme, creusé et comblé par le christianisme et par les barbares.
Sainte-Beuve, Tableau hist. et crit. de la poésie fr. et du théâtre fr. au XVIes.,1828, p. 282. SYNT. L'antiquité chrétienne, l'antiquité païenne. 2. [Sans adj.] L'Antiquité. L'Antiquité classique, l'Antiquité gréco-romaine : 6. J'ai parlé au début de ce discours de ce que pouvait être une renaissance, de ce que pouvait être l'héritage d'une culture. Une culture renaît quand les hommes de génie, cherchant leur propre vérité, tirent du fond des siècles tout ce qui ressembla jadis à cette vérité, même s'ils ne la connaissent pas. La Renaissance a fait l'Antiquité au moins autant que l'Antiquité a fait la Renaissance.
Malraux, Les Conquérants,1928, p. 177. 3. P. méton. Les hommes, les peuples qui ont vécu dans une telle époque. Synon. les anciens : 7. Ce que nous appelons proprement amour parmi nous, est un sentiment dont la haute Antiquité a ignoré jusqu'au nom. Ce n'est que dans les siècles modernes qu'on a vu former ce mélange des sens et de l'ame, cette espèce d'amour, dont l'amitié est la partie morale. C'est encore au christianisme que l'on doit ce sentiment perfectionné ...
Chateaubriand, Génie du Christianisme,t. 1, 1803, p. 373. II.− Au sing. et le plus souvent au plur. A.− Objet antique. 1. Monument(s), objet(s) divers remontant à l'Antiquité. Antiquités grecques et romaines; on voit près de cette ville une belle antiquité (Ac.1835-1932) : 8. Nous rentrons à Séville par Miguera et les bois de chênes-lièges, qui font de plus en plus ressembler ce pays à la chaîne des Maures. Après El Garobbo, commencent les cultures illimitées qui entourent Séville. Les amateurs d'antiquités romaines pourront s'arrêter à Italica où, avec beaucoup d'imagination, on peut reconstituer les arènes et le forum.
T'Serstevens, L'Itinéraire espagnol,1933, p. 166. − P. ext., au plur. (Ensemble de) tout ce qui est relatif à l'antiquité. Synon. plus usuel archéologie : 9. Je répondis la vérité, qui était que notre histoire générale des peintres n'avait pas trouvé la fortune qu'on espérait pour elle et qu'il avait fallu l'interrompre dès ses commencements. J'ajoutai que j'y avais perdu un emploi agréable et singulièrement utile, et que, maintenant, je collaborais à un grand dictionnaire d'antiquités; mais que la tâche était plus difficile et moins bien payée.
A. France, La Vie en fleur,1922, p. 543. 2. Objets d'art plus ou moins anciens; en partic. objets en vente chez un antiquaire. Cabinet, (collection) d'antiquités; magasin, marchand d'antiquités : 10. Certes, elle avait la prétention d'aimer les « antiquités » et prenait un air ravi et fin pour dire qu'elle adorait passer toute une journée à « bibeloter », à chercher « du bric-à-brac », des choses « du temps ».
Proust, Du côté de chez Swann,1913, p. 244. B.− P. ext. Mœurs et usages d'un autre âge, et/ou p. méton. les personnes qui les pratiquent : 11. Le « respect », l'honneur − la vénération − la louange, les actions de grâce, toutes ces antiquités qui se font, ou vont se faire étranges, qui passent des mœurs aux musées.
Valéry, Tel quel II,1943, p. 46. PRONONC. : [ɑ
̃tikite]. Enq. : /ɑ
̃tikite/. ÉTYMOL. ET HIST. − 1. Ca 1100 antiquitet « caractère de ce qui est très ancien » (Roland, 2613 ds Gdf. Compl. : En Babilunie Baligant ad mandet : Ço est l'amirailz, li vieilz d'antiquitet); 2. a) ca 1155 collectif « les Anciens » (Wace, Brut, ms. Munich, 307 ds Gdf. Compl. : L'antiquiteiz Albe la nome); b) 1580 « la civilisation, les siècles antiques » (Montaigne, III, 120 ds Littré); 3. 1680 (Rich. : Antiquité [...] les ouvrages des siecles passez), plus souvent au plur. Les Antiquités de Rome, de la Grèce (Fur.) d'où sens mod. « objets anciens », 1854 (Du Camp, Le Nil, p. 250 : la vente des curiosités et des antiquités).
Empr. au lat. antiquitas « les temps anciens, les ouvrages du passé » (Cicéron, Brut., 60 ds TLL s.v., 174, 27); « les Anciens » (Id., Rep., 2, 19, ibid., 174, 79); « ancienneté » (Id., Verr., 2, 46, ibid., 175, 51). STAT. − Fréq. abs. littér. : 1 646. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 4 569, b) 2 103; xxes. : a) 1 484, b) 1 080. BBG. − Bach.-Dez. 1882. − Blanche 1857. − Bouillet 1859. − Canada 1930. − Cohen 1946, p. 15. − Dainv. 1964. − Daire 1759. − DLF 16e. − Éd. 1967. − Guyot 1953. − Jossier 1881. − Lacr. 1963. − Lar. comm. 1930. − Lar. mén. 1926. |