| ANIS, subst. masc. A.− BOT., au propre 1. Nom donné le plus souvent au Pimpinella anisum (anis vert), plante aromatique dicotylédone, famille des ombellifères, présentant une tige annuelle, de petites fleurs blanches, des graines oblongues, striées, verdâtres, renfermant une huile odoriférante; p. ext. graine de cette plante (cf. Bot., 1960, p. 1067 ds encyclop. de la Pléiade) : 1. On trouve des farineux sucrés dans le bulbe de la patate et de l'igname; des épiceries dans les pattes du gingembre; des huiles dans les capsules souterraines de la fausse pistache, remplies d'amandes très savoureuses lorsqu'elles sont grillées. Ces mêmes substances se montrent en évidence dans les aromates des graines du cardamome et de l'anis, ...
Bernardin de Saint-Pierre, Harmonies de la nature,1814, p. 70. − Usages variés : a) DISTILL. (aromate pour boissons diverses) : 2. ... j'ai pu préparer (c'est une invention) une nouvelle espèce de sorbets ... à l'anis ... Oui, l'anis! Qui est très particulièrement rafraîchissante, et qui grise! ah! ... Quand la soif de Sa Majesté me fera la faveur d'ordonner ...
Gide, Saül,1903, I, 8, p. 270. − Absol., p. méton. Liqueur parfumée à l'anis vert : 3. Ils inventoriaient les apéritifs : l'amourette, le junod, l'anis del oso qui remplacent l'absinthe d'avant-guerre; le byrrh, le quinquina, le dubonnet, boissons inoffensives; le vermouth, l'amer, le cinzano, et tant d'autres flacons dont l'éclat bariolé amusait l'œil avant de tenter la soif.
Dabit, L'Hôtel du Nord,1929, p. 29. Rem. Cet emploi, apparemment récent, ne figure pas dans les dict. sauf Quillet 1965; Hanse 1949 remarque : ,,anis désigne la plante dont on fait une boisson; celle-ci s'appelle anisette ...`` ♦ Ratafia d'anis (cf. Lar. 19e-Lar. encyclop.). b) GASTRONOMIE − ALIM. GÉN. (condiment pour divers mets) : 4. ... il rencontra la vieille sur l'huis, qui apportoit un bon brouet tout fumant, et le plaça sur sa petite table avec une cuiller de bois : − Mange, mange, lui dit-elle, et ne te fais pas faute de ce brouet au miel avec une pointe d'anis vert, comme tu l'aimois quand tu étois encore tout enfant; car tu as du chemin, mon mignon, et beaucoup de chemin à faire aujourd'hui.
Nodier, Trésor des fèves et Fleur des pois,1833, p. 35. − CONFISERIE (ingrédient aromatique pour bonbons, dragées, etc.) : 5. Pour tuer le temps, Maroula nous offrit de jouer des bonbons : c'est un divertissement à la mode dans la société moyenne. Elle prit un bocal dans la boutique, et distribua à chacun de nous une poignée de bonbons indigènes, au girofle, à l'anis, au poivre et à la chicorée. Là-dessus, on donna les cartes, et le premier qui savait en rassembler neuf de la même couleur recevait trois dragées de chacun de ses adversaires.
About, Le Roi des montagnes,1857, p. 37. ♦ Absol., p. méton. Dragée faite avec de l'anis vert (cf. en partic. Ac. 1835, Lar. 19e-Lar. encyclop. et Quillet 1965). ♦ Anis commun (cf. Ac. 1835-1878);anis de Flavigny (cf. Privat-Foc. 1870, Guérin 1892, Ac. t. 1 1932, Lar. encyclop.);anis de Verdun (cf. Ac. 1835-1932, Besch. 1845, Littré, DG, Quillet 1965). − PÂTISS. (ingrédient aromatique ou élément décoratif pour pains, gâteaux, etc.). Grains d'anis : 6. On parfume également ces gimblettes au zeste de citron, de cédrat, de bigarade, aux anis, à la vanille, et à la fleur d'orange pralinée.
Les Grandes heures de la cuis. fr., Carême, 1833, p. 149. 7. − À sa gauche, gisait une armée de bonshommes en pain d'épice, mollasse et blond, les uns frustes, les autres savamment enjolivés de festons de pâte, diaprés de grains d'anis, grenelés de points de sucre; ...
Huysmans, Les Sœurs Vatard,1879, p. 87. c) MÉD. (agent thérapeutique utilisé principalement comme excitant de l'appareil digestif) : 8. Julia relève dans son bras la tête de Madeleine; elle approche des lèvres la tasse qui sent le fenouil et l'anis, l'absinthe et la rue terrible, l'ombre noire de la terre.
Il y en a au fond de la tisane qu'elle remue avec la cuiller et toute l'odeur du fenouil est étouffée soudain sous la sombre odeur de cette suie des seigles malades.
Giono, Le Grand troupeau,1931, p. 221. ♦ Alcoolat d'anis (vx, cf. Lar. 19e; Deschamps d'Avallon, Compendium de pharm. pratique, 1868, p. 415; Nouv. Lar. ill.);eau distillée d'anis (vx, cf. Lar. 19e; Deschamps d'Avallon, Compendium de pharm. pratique, 1868, p.734; Codex Medicamentarius Gallicus, 1884, p. 376; Nouv. Lar. ill.);essence d'anis, essence extraite des graines de l'anis vert, caractérisée par ses propriétés stupéfiantes (empl. également en parfumerie) (cf. Lar. 19e-Lar. méd. 1970, G.-H. Roger ds [F. Widal, P.-J. Teissier, G.-H. Roger, Nouv. traité de méd., fasc. 6, 1926, p. 30]);teinture d'anis (vx, cf. Lar. 19e-Nouv. Lar. ill.; Deschamps d'Avallon, Compendium de pharm. pratique, 1868, p.399);tisane à l'anis (cf. Codex Medicamentarius Gallicus, 1884, p. 609 et 1908, p. 754; Dub.; cf. aussi ex. 8). 2. [Gén. avec un déterminant] Nom donné aussi à diverses autres plantes et substances. a) BOT. Anis âcre, ou anis aigre, faux anis, nom vulgaire du cumin (cf. Comm. t. 1 1837 et Quillet 1965);anis bâtard, ou carum carvi, kummel, anis-des-Vosges (cf. Guérin 1892, Lar. encyclop., Fournier 1961);anis doux, ou anis de Paris, variété de fenouil dont la graine est parfois utilisée au lieu d'anis vert, notamment en confiserie (cf. Bouillet 1859 et Quillet 1965);anis étoilé, ou anisum stellatum, anis de Chine, anis des Indes, badiane, fruit de l'ilicium verum (famille des Magnoliacées), utilisé parfois pour ses propriétés aromatiques au lieu d'anis vert, notamment en droguerie et en distillerie pour fabriquer de l'anisette (cf. Nysten 1814-20, Bot., 1960, pp. 962-963 ds encyclop. de la Pléiade et Lar. méd. 1970). b) COMM. Bois d'anis. Bois odorant du laurier avocatier, utilisé en ébénisterie, etc. (cf. Lar. 19e, Nouv. Lar. ill., Rob.). c) HORTIC. Pomme d'anis ou fenouillet. Variété de pomme dont le parfum rappelle celui du fenouil ou de l'anis (cf. en partic. Littré et Bél. 1957). B.− Au fig. Chose dont la forme, l'odeur, la couleur rappelle celle de l'anis vert : 9. ... un mot de représailles taquine la bouche de la marquise (...) tombe de ses petites dents en grains d'anis.
G. d'Esparbès, Les Derniers lys,1898, p. 51. 10. L'odeur des mousses se leva de son nid et élargit ses belles ailes d'anis.
Giono, Le Chant du monde,1934, p. 17. 11. Rhône bleu d'acier des clairs de lune (...), anis, absinthe trouble, veinée de groseille des couchants ...
A. Arnoux, Rhône, Mon fleuve,1944, p. 422. − Spéc., arg. Anis, de l'anis, avoir ou boire de l'anis dans une écope. Terme, loc. de refus. Synon. des nèfles, du vent, flûte(cf. [Raspail], Réforme pénitentiaire, lettres sur les prisons de Paris, 1835, p. 2; A. Delvau, Dict. de la lang. verte, 1867, p. 22; Ch. Virmaître, Dict. d'arg. fin-de-s., 1894, p. 98; France 1907; Ch.-L. Carabelli, [Lang. pop.]). DÉR. Anisique, adj.,chim. (rad. anis; suff. -ique*).[En parlant d'un acide, d'un aldéhyde ou d'un alcool à fonction éther-oxyde phénolique] Qui est obtenu à partir de l'anis ou de ses composés. (1reattest. ds Chesn. 1857; enregistré ds la plupart des dict. gén. du xixeet du xxes.). PRONONC. : [ani]. Passy 1914 donne également la possibilité d'une prononc. [ɑ
ˑni] (cf. aussi Barbeau-Rodhe 1930 avec la rem. ,,un peu vieilli``). Pt Rob. signale la possibilité d'une prononc. avec l's final : ani(s). L'ensemble des dict. du xixes. transcrivent le mot sans s final. − Dér. Anisique. Seule transcription ds Littré : a-ni-zi-k'. ÉTYMOL. ET HIST. − 1236 bot. (G. de Lorris, Rose, éd. F. Lecoy, CFMA, v. 1342 ds Gdf. Compl. : Il ot ou vergier meint espice, [...] citoaut, anis et canele), connaît divers emplois spéc. : 1690 confiserie (Fur.); 1752 bot. (Trév. : Anis aigre. [...] Cumin).
Empr. au lat. anisum dep. Caton, Agr., 121 ds TLL s.v., 41, 29; (cf. Celse, 32, ibid., s.v. anesum, 41, 21); bien attesté ds des emplois culinaire et thérapeutique; lat. anisum empr. du gr. α
́
ν
ι
σ
ο
ν « id., plante et graine » (Alexis − Ath., 170a − ds Bailly); cf.
α
́
ν
η
θ
ο
ν « aneth, faux anis » (Bailly); voir André Bot. 1956, p. 31. STAT. − Fréq. abs. littér. : 60. BBG. − Ac. Gastr. 1962. − Alex. 1768. − Bible 1912. − Bouillet 1859 (et s.v. anisique). − Canada 1930. − Chesn. 1857 (et s.v. anisique). − Comm. t. 1 1837. − Dauzat Ling. fr. 1946, pp. 43-44. − Dumas 1965 [1873]. − Duval 1959 (et s.v. anisique). − Fen. 1970. − France 1907. − France Suppl. 1907. − Goug. Lang. pop. 1929, p. 89. − Grand. 1962 (et s.v. anisique). − Hanse 1949. − Lar. comm. 1930. − Lar. méd. 1970. − Lar. mén. 1926. − Lasnet 1970. − Littré-Robin 1865 (et s.v. anisique). − Méd. Biol. t. 1 1970. − Mont. 1967. − Nysten 1824. − Privat-Foc. 1870 (et s.v. anisique). − Sain. Lang. par. 1920, p. 382. |