| ANIMADVERSION, subst. fém. A.− Littér. [En parlant d'une pers., d'une collectivité et plus rarement d'un inanimé abstr.] Désapprobation latente, hostilité sourde, se manifestant occasionnellement dans des paroles, des attitudes ou des actes. 1. Vx. [Avec un caractère officiel] Action hostile. a) [En parlant d'une chose] :
1. Quant à la presse périodique, elle est évidemment l'objet principal de l'animadversion du projet de loi.
Chateaubriand, Opinion sur le projet de loi relatif à la liberté de la presse,1818, p. 157. b) [En parlant d'une pers.] :
2. Ces trois hommes avaient personnellement encouru l'animadversion du ministère Villèle; et depuis un bon nombre d'années on avait supprimé les chaires de littérature française occupée par Villemain, celle d'histoire moderne où siégeait Guizot, et enfin celle d'histoire de la philosophie où s'était distingué Cousin.
Delécluze, Journal,1828, p. 495. 2. [Sans caractère officiel] Antipathie agressive. S'attirer l'animadversion des honnêtes gens (Ac. 1835-1932); animadversion entre, contre : 3. Qu'on sache que les amis qui me restent, tout petit que soit leur nombre, ne sont pas de ceux qui se retirent au jour du combat; ils ont un jugement formé, et ils n'attendent point l'approbation ou l'animadversion d'un bureau d'esprit pour savoir à quel rang ils doivent placer un ouvrage : ...
Chateaubriand, Les Martyrs,t. 1, 1810, p. 106. 4. L'animadversion des classes inférieures contre la classe aristocratique ne détruit pas son ascendant sur ceux mêmes dont elle est haïe; ...
Mmede Staël, Considérations sur les princ. événements de la Révolution fr.,t. 1, 1817, p. 276. 5. Ils frappent leur patrie pour s'en faire obéir. Mais ils succomberont sous l'animadversion, la vitupération, l'indignation, la fureur, l'exécration et l'abomination publiques.
A. France, L'Île des pingouins,1908, p. 278. 6. Je commence à comprendre qu'il y avait, depuis longtemps, entre M. Chalgrin et M. Rohner, une animadversion qui ne paraissait guère.
G. Duhamel, Chronique des Pasquier,Les Maîtres, 1937, p. 125. 7. ... représentant [la racine de la mandragore] à nos yeux prévenus (...) une espèce de gros vieillard nain, pleine de science redoutable, de méchanceté souterraine, de cynisme et d'animadversion.
A. Arnoux, Calendrier de Flore,1946, p. 77. B.− Spéc., PHILOL., vx, au plur. ,,Remarques faites sur le texte d'un auteur`` (Ac. Compl. 1842). ,,Animadversions sur Horace, sur Pétrone`` (Ac. Compl. 1842). Rem. Attesté également ds Lar. 19e, Guérin 1892, Nouv. Lar. ill., DG (qui le qualifie de ,,vieilli``). PRONONC. : [animadvε
ʀsjɔ
̃]. ÉTYMOL. ET HIST. − 1. Fin xiies. « attention de l'esprit » (Trad. Dialogue de Saint Grégoire, éd. Foerster, 216, 18 ds T.-L. : Quant sodainement cele regardanz amont vit Jhesum venant, et par grande animadversion [cum magna animadversione] comenzat az estanz environ a crieir disanz : Aleiz vos de ci, aleiz vos de ci, Jhesus vient), attest. isolée, sens relevé par Fur. 1690; Trév. 1704 note que ce mot ,,n'est point du tout en usage en ce ... sens``; 2. 1580 dr. « blâme général, censure judiciaire » (Montaigne, 1. III, ch. IX, p. 111 ds Gdf. Compl. : La justice a cognoissance et animadversion aussi sur ceulx qui chaument); 1823 gén. « improbation » (Chateaubriand, Opinions et discours ds Dict. hist. Ac. fr. t. 3, p. 243); 3. 1690 philol. (Fur.).
Empr. au lat. animadversio composé de anima « esprit » et du rad. vers- de vertere « tourner » d'où « attention de l'esprit » (Cicéron, Off., 1, 103 ds TLL s.v., 75, 58), puis « blâme, châtiment » (Id., Orat., 195, ibid., 75, 74). Bl.-W.5note que le sens moderne d'« improbation » semble dû à une interférence dans l'esprit du locuteur, de animadversio avec adversus « contre »; ce sens pourrait cependant n'être qu'une ext. du sens 2 à la lang. commune. STAT. − Fréq. abs. littér. : 26. BBG. − Laf. Suppl. 1878. − St-Edme t. 1 1824. − Vie Lang. 1968, no194, p. 291. |