| ANGÉLUS, subst. masc. RELIG. CATH. Prière latine qui commence par le mot angelus et se récite matin, midi et soir en commémoration du mystère de l'Incarnation; cette même prière en français : 1. ... autrefois (...) on sonnait les heures canoniales : matines et laudes, avant le lever du jour; prime, dès l'aube; tierce, à neuf heures; sexte, à midi; none, à trois heures et encore les vêpres et les complies; aujourd'hui, on annonce la messe du curé, les trois angélus, du matin, de midi et du soir, parfois des saluts, et, certains jours, on lance quelques volées pour des cérémonies prescrites, et c'est tout.
Huysmans, Là-bas,t. 2, 1891, p. 116. − P. méton. La sonnerie de cloches qui, trois fois par jour, annonce l'heure de cette prière : 2. ... C'est l'angélus qui tinte, et rappelle en tout lieu
Que le matin des jours et le soir sont à Dieu;
À ce pieux appel le laboureur s'arrête,
Il se tourne au clocher, il découvre sa tête,
Joint ses robustes mains d'où tombe l'aiguillon,
Élève un peu son âme au-dessus du sillon,
Tandis que les enfants, à genoux sur la terre,
Joignent leurs petits doigts dans les mains de leur mère.
Lamartine, Jocelyn,1836, p. 748. 3. Trois fois chaque jour, lorsque l'angélus sonnait, au réveil de l'aube, dans la maturité de midi, à la tombée attendrie du crépuscule, il se découvrait, il disait un ave en regardant autour de lui, cherchant si la cloche ne lui annonçait pas enfin la venue de Marie. Il avait vingt-cinq ans. Il l'attendait. Au mois de mai, l'attente du jeune prêtre était pleine d'un heureux espoir.
Zola, La Faute de l'Abbé Mouret,1875, p. 1295. − Péj. (sans doute p. allus. au passage de Jocelyn, supra, et à l'Angélus (1867) du peintre J.-F. Millet) : 4. Depuis cinq jours qu'ils s'étaient quittés [Sabine et Jérôme], elle avait reçu de lui une lettre longue, respectueuse et réservée, et une autre lettre courte, descriptive de la nature comme un paysage peint et d'une sentimentalité d'angélus.
A. de Noailles, La Nouvelle espérance,1903, p. 76. − P. métaph. : 5. « Ainsi, disais-je, ainsi sans doute dans la vie, quand tout est dépouillé en nous, quand nous descendons les avenues sans feuillage, il est de ces jours où les cœurs rajeunis étincellent comme au printemps : les premiers tintements de l'âge glacé nous arrivent dans un angélus presque joyeux. Est-ce illusion décevante; un écho perdu de la jeunesse sur cette pente qui mène à la mort? Est-ce annonce et promesse d'un séjour d'au-delà? »
− « C'est promesse assurément », disait-elle.
Sainte-Beuve, Volupté,t. 1, 1834, p. 125. 6. ... ils se ressemblaient tous : les villages assis dans l'herbe; les grandes villes qui sont debout; les casernes, et les troupeaux de bœufs tranquilles. Ils se réjouissaient de téter le soleil; mais il coulait en eux comme de l'ombre chaude; leurs masses s'entr'ouvraient pour prendre ses rayons, et puis les verrouillaient au cachot de la chair. Nous avons à coups de cloches jeté sur eux l'angélus de la conscience neuve; ils s'éveillent, ils se lavent, ils sont dieux, leur règne arrive, ...
Romains, La Vie unanime,1908, p. 247. PRONONC. ET ORTH. − 1. Forme phon. : [ɑ
̃
ʒelys]. Passy 1914 attribue à la voyelle nasale une demi-longueur. La voyelle de syllabe finale est longue pour Barbeau-Rodhe 1930, demi-longue pour Passy 1914. Rouss.-Lacl. 1927, p. 168 et Kamm. 1964, p. 199, considèrent angélus comme une exception à la règle selon laquelle ,,l's est généralement muette dans les finales françaises`` (Rouss.-Lacl. 1927). − Rem. Nod. 1844 et Littré conseillent pour la seconde syllabe graph. un e muet. Fér. 1768 et Littré signalent à titre de var. respectivement la prononc. avec e et la prononc. avec é. 2. Forme graph. − Ac. n'introduit l'accent qu'en 1878. Écrivent également angelus sans accent Nod. 1844, Besch. 1845, Poit. 1860, Lar. 19e, Littré. ÉTYMOL. ET HIST. − 1672 (?) « signal donné par la cloche d'une église pour appeler à réciter l'angélus » (Bossuet, Règle. ds Littré : A cinq heures et demie, on sonnera l'angelus); 1690 (Fur. : Angelus : est une priere à la Vierge qui commence par le mot d'angelus).
1ermot des quatre versets qui avec trois Ave Maria et une oraison constituent cette prière. La récitation du soir, première en date, a été longtemps liée à la sonnerie du couvre-feu, au moment du coucher du soleil : cf. xiiies., Oxford, Bodeleienne, Canonici, ms. Miscell., 75 fo66b ds Cabrol et Leclercq, Dict. d'archéol. chrét. et de liturgie. Les récitations du matin et de midi ne semblent pas antérieures au xives.; au xvies. s'introduit l'usage de séparer les 3 Ave par 3 versets et leurs répons; l'incipit du premier verset a donné son nom à l'ensemble de la prière (d'apr. Cabrol et Leclercq, op. cit.). STAT. − Fréq. abs. littér. : 276. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 164, b) 301; xxes. : a) 883, b) 340. BBG. − Archéol. chrét. 1924. − Bach.-Dez. 1882. − Bouillet 1859. − Dub. Pol. 1962, p. 84. − Foi t. 1 1968. − Marcel 1938. |