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AMUSEUR, EUSE, subst. et adj.
A.− Emploi subst.
1. Celui qui divertit la société par ses facéties, ses bons mots, ses manières plaisantes. Synon. bouffon, boute-en-train :
1. − Vous avez bien fait, me dit Béranger, de vous en tenir à la popularité qu'on domine. Moi j'ai beaucoup de peine à me soustraire à la popularité qui vous monte dessus (...) c'est tout simplement le métier d'ancien bouffon de cour! Amuseur de prince, amuseur de peuple, même chose. V. Hugo, Choses vues,1885, p. 180.
2. Daudet est le boute-en-train, l'amuseur, le causeur commediante, le bruit, le mouvement, l'esprit bouffon des dimanches du Grenier. Aujourd'hui, il a mimé, avec du comique à mourir de rire, les ataxiques qu'il rencontre à Lamalou, gens pour la plupart faisant le mouvement contraire de celui qu'ils veulent, déployant une verve, une verve féroce qui, à la fin, m'a rendu tout triste. E. et J. de Goncourt, Journal,mai 1887, p. 671.
3. ... les gens accoutumés à ne voir dans la vie que des mots et des apparences, (...) grossièrement trompés au sens du mot « amuseur », ne voient pas de quelles tristesses sont faits certains éclats de rire. G. Courteline, Philosophie de Courteline,1917, p. 166.
4. La ville et les églises recevaient l'Infante avec ces pompes et ces lenteurs qui l'avaient tant ennuyée. Eux, les bouffons et les nains, ils lui offraient ce qu'elle aimait, ce qu'ils savaient faire supérieurement; cet art d'amuseur qu'on leur avait inculqué par les caresses et les coups. J. de La Varende, Dans le goût espagnol,1946, p. 235.
Avec une nuance péj. :
5. Moraliser son époque est le but que tout écrivain doit se proposer, sous peine de n'être qu'un amuseur de gens... H. de Balzac, Œuvres diverses,t. 3, 1850, p. 651.
6. ... il doit répugner à une grande nation de n'être plus que les amuseurs du monde civilisé. E. Viollet-le-Duc, Entretiens sur l'architecture,t. 2, 1872, p. 398.
7. L'écrivain est quelquefois un serviteur : secrétaire, conseiller ou précepteur, mais le plus souvent c'est un entretenu, un amuseur ou un parasite. Il va de pair avec le chapelain ou le fou. Arts et littératures dans la société contemporaine,t. 2, 1936, p. 84-1.
Spéc. [En parlant des choses] :
8. Le dessin animé dont on a fait, on ne sait pourquoi, un amuseur, peut aborder des thèmes d'inspiration extrêmement élevés. Arts et littératures dans la société contemporaine,t. 1, 1935, p. 88-8.
Rem. Syntagmes amuseur fantaisiste, mondain, officiel, public, universel; − de boulevard, des foules, de gens, de peuple, de prince, de public, du monde.
2. Rare. Celui qui détourne des choses sérieuses :
9. Jeune fille, n'écoutez pas ce léger Valcourt; il n'est qu'un amuseur. S. Mercier, Néologie ou Vocabulaire de mots nouveaux, t. 1, 1801, p. 35.
[En parlant d'un inanimé personnifié] Une amuseuse :
10. ... une chose est plus incontestable. C'est le caractère d'obsession et de ritualisation qu'elle [la rythmique] présente uniquement chez le nègre, son accent religieux et social inhérent à son existence même, son rôle non de simple amuseuse, mais d'organisatrice et de régulatrice de la vie profondément intégrée aux cadences extérieures et intérieures qui marquent sa place dans un univers dont elle est inséparable. Arts et littératures dans la société contemporaine,t. 1, 1935, p. 64-14.
B.− Emploi adj.
Rare. [En parlant d'une pers. ou d'un collectif] Qui est propre à distraire; dont la verve plaisante incite au rire et à la gaîté :
11. Son guide était Montaigne, de qui sa mère descendait. Ce génie amuseur et douteur avait passé en partie avec le sang dans ce jeune homme. Le livre de Montaigne était son catéchisme. A. de Lamartine, Les Confidences,1849.
12. Cette vivacité de production spirituelle fait de Paris aujourd'hui la capitale la plus amuseuse, la plus brillante, la plus curieuse qui fut jamais. H. de Balzac, Œuvres diverses,t. 3, 1850, p. 585.
13. 29 octobre. − Mort subite d'Alphonse Allais. Encore un. Tout mon passé croule et disparaît. Je ne l'avais pas revu depuis environ vingt ans. La nouvelle m'a été pénible. Le malheureux doit avoir un terrible besoin de prières. Un des derniers actes de sa vie de journaliste amuseur a été un article amical pour moi. L. Bloy, Journal,1905, p. 281.
Rem. Dans ces deux ex., les aut. emploient prudemment l'adj. qu'ils notent en italique.
Prononc. : [amyzœ:ʀ], fém. [-ø:z]. Passy 1914 note une durée mi-longue pour la 2esyllabe du mot.
Étymol. ET HIST. − 1. 1545 « celui qui retient l'attention par de fausses promesses » (J. Bouchet, Epistres familières du Traverseur, 76 ds Hug. : Ce monde abuseur, Grand mensongier, et des gens amuseur); peu us. d'apr. Trév. 1771; 2. av. 1695 « celui qui divertit » (La Fontaine, Lettres, à M. de Harlay ds Dict. hist. Ac. fr., t. 3, 1888, p. 167b : Platon par ses douceurs Vous pourroit amuser un moment, je l'avoue; C'est le plus grand des amuseurs); peu usité d'apr. Ac. 1835. 1 dér. de amuser* étymol. 1; 2 dér. de amuser* étymol. 3; suff. -eur2*.
STAT. − Fréq. abs. litt. : 28.
BBG. − Bar 1960. − Bél. 1957. − Boiss.8.