| AMPOULE, subst. fém. A.− Petit récipient de forme renflée. 1. ANTIQ. ROMAINE. ,,Espèce de burette ou de petit vase à col étroit, à large panse, servant à contenir l'huile ou les parfums que les Romains emportaient aux bains publics.`` (Bach.-Dez. 1882). Rem. Attesté ds plusieurs dict. gén. (Guérin 1892, etc.). 2. CHIM., PHARM., PHYS. a) ,,Nom donné à (...) de petites fioles de verre, et en général à tous les vaisseaux qui ont un col assez long et un gros ventre.`` (Bouillet 1859). b) Tube de verre effilé à une extrémité ou aux deux, et servant à contenir un liquide (médicament surtout) ou un gaz; le contenu de ce tube : 1. Il rompit l'ampoule, y introduisit l'aiguille, emplit la seringue jusqu'au degré prescrit, et vida lui-même les trois quarts de l'ampoule dans le seau.
R. Martin du Gard, Les Thibault,La Consultation, 1928, p. 1120. 3. RELIGION a) LITURG. ANC. Petit vase contenant les saintes huiles (pour l'administration du baptême, de l'extrême-onction, etc.) : 2. − Emportez aussi les évangiles, fit l'abbé qui arriva sur ces entrefaites; ce seront les célestes ampoules où vous puiserez l'huile nécessaire pour panser vos plaies.
J.-K. Huysmans, En route,t. 1, 1891, p. 273. b) Sainte ampoule. Fiole où l'on conservait, à Reims, l'huile servant au sacre des rois de France : 3. Dans le Fils de Louis XVI, j'ai dit ma conviction de la déchéance irrémédiable des Bourbons. J'ai oublié un fait d'importance capitale, pourtant, qui prouve que Dieu en avait tout à fait assez de cette race et qu'il l'a vraiment rejetée. C'est la profanation et la destruction irréparable de la Sainte Ampoule par le conventionnel Rhul, en 1793. Il y avait là un beau chapitre à écrire.
L. Bloy, Journal,1904, p. 72. 4. Rare et parfois arg. Bouteille, flacon : 4. Donnez-m'en encore! ... Versez-m'en encore un verre... que je crache cent mille bougies, comme ça, d'un coup! ... Je sens mon sang entrer en ébullition, par saint Janvier! ... Passez-moi l'ampoule, par Barabbas! ... Je l'achète... on l'exposera Fleet-Street, au bar de la Presse... Mais le flacon n'était pas à vendre.
B. Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 313. B.− P. ext. Récipient de verre ou de métal entièrement fermé, vide d'air ou rempli de certains gaz, muni d'un filament ou d'électrodes et servant à obtenir, par le passage du courant électrique, certaines radiations ou, le plus couramment, de la lumière; p. ext. la lampe elle-même. Ampoule sphérique avec col ou sans col, ovale, torsadée, diffusante (Siz. 1968) : 5. ... elle s'était, battant des bras indignés, heurtée à la suspension qui se balança, avec toutes ses complications de cuivre, et la lampe à pétrole conservée au-dessous de l'ampoule, pour le cas où l'électricité manquerait.
L. Aragon, Les Beaux quartiers,1936, p. 150. C.− P. anal. 1. ANAT. Élargissement en forme de renflement, d'un conduit, d'un organe : 6. On ne peut pas mettre n'importe quoi dans nos réservoirs naturels : l'estomac, la vessie, l'ampoule rectale; et ils sont terriblement soumis à nos émotions.
G. Duhamel, Chronique des Pasquier,Les Maîtres, 1937, p. 91. 2. BOTANIQUE a) Ampoule véroleuse. ,,Maladie de la vigne (...) Phytocopte, insecte microscopique qui s'attache sous les feuilles et produit une galle en forme de filaments ou de moisissures. Le dessus de la feuille est couvert de cloques qui prennent un ton rouge.`` (P. Martellière, Glossaire du Vendômois, 1893, p. 14). b) ,,Filaments transparents, simples ou rameux, cylindriques, articulés, que possèdent certaines plantes marines, et auxquelles ces plantes doivent la propriété de surnager.`` (Bouillet 1859); ,,Nom vulgaire de certains renflements pleins d'air qui se voient sur plusieurs espèces de fucus.`` (Littré). ♦ Ampoule copulatrice. Terminaison renflée de quelques filaments dans certains champignons (cf. Lar. encyclop.). Ampoule résinifère. Vésicule contenant la résine produite par certains arbres (cf. Bél. 1957). 3. ENTOMOL. Ampoule frontale. ,,Ampoule frontale, v. Ptiline.`` (Lar. encyclop.). 4. MÉD. et lang. cour. Renflement à la surface du corps, formée par l'accumulation de sérosité entre le derme et l'épiderme, par suite de frottement, d'échauffement, etc. : 7. On reprenait la bêche, la pioche. Le manche brûlait la chair des mains. Un liquide gras coulait des ampoules éclatées, dont la peau s'en allait par lambeaux.
M. Van der Meersch, Invasion 14,1935, p. 362. − Proverbe. Ne pas se faire d'ampoules aux mains. Travailler mollement (cf. Lar. 19e). 5. Tout objet ayant une forme comparable à celle d'une ampoule. a) Monticule de dimensions variables : 8. Le sol de l'université était montueux. La montagne Sainte-Geneviève y faisait au Sud-Est une ampoule énorme, et c'était une chose à voir du haut de Notre-Dame que cette foule de rues étroites et tortues (aujourd'hui le pays latin), ces grappes de maisons qui, répandues en tous sens du sommet de cette éminence, se précipitaient en désordre et presque à pic sur ses flancs jusqu'au bord de l'eau...
V. Hugo, Notre-Dame de Paris,1832, p. 146. 9. À noter encore, de-ci, de-là, près des demeures, une sorte d'ampoule lisse, sur le sol, de soulèvement arrondi : c'est une tombe.
A. Gide, Le Retour du Tchad,1928, p. 882. b) Vieilli. Bulle d'eau. (Attesté ds Besch. 1845, Chesn. 1857 et DG). c) TECHNOL. (céram., métall., etc.). Boursouflure anormale d'un corps : 10. Le dressage [des tôles pour fer blanc] fait bien disparaître les ampoules (...) formées [par les soufflures], mais elles apparaissent de nouveau au cours de l'étamage.
M. Gasnier, Dépôts métalliques directs et indirects,1927, p. 38. d) ZOOL. ,,Nom vulgaire d'une espèce de mollusque, la bulla ampulla.`` (Guérin 1892). Rem. Attesté aussi ds d'autres dict. (Nouv. Lar. ill., etc.). 6. Région. (Canada). [P. anal. avec l'origine des ampoules apparues à la surface du corps] ,,Annexe, aile d'un bâtiment, construction ajoutées à une maison pour l'agrandir.`` (Canada 1930). D.− Au fig., rare. [En parlant du style] Emphase, enflure : 11. victor hugo. Discours aux funérailles de F. Soulié.
− ... Charlatan de cimetière...
− ... Ô creux, ô ampoule! Qui donc me crèvera cette vessie!
Ch.-A. Sainte-Beuve, Mes poisons,1869, p. 43. 12. Cet homme en habit n'est qu'un larbin de première classe. Il fait voir en parlant ses canines trop longues, comme s'il voulait percer à mesure les ampoules de son style.
H. Bazin, Vipère au poing,1948, p. 208. Prononc. ET ORTH. − 1. Forme phon. : [ɑ
̃pul]. Passy 1914 note une durée mi-longue pour la 1resyllabe du mot. Pour l'indication d'une durée longue, cf. aussi Fér. 1768. 2. Hist. − Fér. 1768 donne en vedette la forme ampoulle avec 2 l. Fér. Crit. t. 1 1787, s.v. ampoulle signale que Trév. écrit ampoule. Fér. fait également la rem. suiv. : ,,Pourquoi ces 2 ll. Pour l'étymologie ampulla? Mais les 2 ll se prononcent en latin et on n'en prononce qu'une en français!`` Étymol. ET HIST. − 1. 1174 ampule « fiole à ventre renflé » (Garn., S. Thom., B.N. 13513, fo97bds Gdf. Compl. : Or a Deus saint Thomas cele ampule donee); 2. a) 1260 la sainte ampoule « la fiole contenant le saint chrême qui servait à sacrer les rois » (Menestrel de Reims, 309, ibid. : Et furent enoint de la sainte ampoule que Dieus envoia des cieus a mon seigneur saint Remi pour enoindre Cloovis); b) début xiiies. p. ext. méd. « vésicule formée par une accumulation de sérosités sous l'épiderme » (Péan Gatineau, Vie de S. Martin, éd. Söderhjelm, 6420 ds T.-L. : des oilz ne vit mie, Car les ampoles la covrirent).
Empr. au lat. ampulla « petite fiole à ventre bombé » (Plaute, Persa, 124 ds TLL s.v., 2018, 40 : ampullam, strigilem, scaphium, soccos, pallium); cf. avec 2 a, lat. médiév. ampulla « l'ampoule de Reims » (av. 966 Flodoard, Hist. Remens., I, 13, baptême de Clovis ds Du Cange s.v. t. 1, p. 235a: Sanctificato denique fonte, nutu divino Chrisma defuit. Sanctus autem Pontifex oculis ad coelum porrectis tacite traditur orasse cum lacrymis; et ecce subito columba ceu nix advolat candida, rostro deferens Ampullam coelestis doni chrismate repletam). Le lat. ampulla est aussi attesté comme terme de rhét. « terme emphatique » (Horace, Ars, 97 ds TLL s.v., 2019, 4), voir ampoulé. STAT. − Fréq. abs. litt. : 261. Fréq. rel. litt. : xixes. : a) 224, b) 95; xxes. : a) 226, b) 731. BBG. − Bach.-Dez. 1882. − Bailly (R.) 1969 [1946]. − Bél. 1957. − Bénac 1956. − Boiss.8. − Bouillet 1859. − Bruant 1901. − Canada 1930. − Chesn. 1857. − Delorme 1962. − Duval 1959. − Électron. 1963-64. − Fér. 1768. − Fromh.-King 1968. − Galiana Déc. sc. 1968. − Gautrat Ski 1969. − Gay t. 1 1967 [1887]. − Laborde 1872. − Lar. méd. 1970. − Lar. mén. 1926. − Lavedan 1964. − Littré-Robin 1865. − Marcel 1938. − Nysten 1814-20. − Piéron 1963. − Prév. 1755. − Privat-Foc. 1870. − Séguy 1967. − Siz. 1968. − Timm. 1892. − Uv.-Chapman 1956. |