| AMPHIGOURIQUE, adj. Fam. et souvent en mauvaise part A.− LITTÉRATURE 1. [En parlant d'un écrit, d'un discours, d'un lang., d'un style] Qui a le caractère de l'amphigouri. Synon. embrouillé, obscur : 1. Les mots nouveaux créés par les événements, ou ceux que le caprice met à la mode, prêtent d'abord à la conversation de ceux qui s'en servent je ne sais quoi d'amphigourique et d'obscur qui leur donne une supériorité soudaine, ils paraissent profonds à ceux qui ne les comprennent pas.
H. de Balzac, Les Mots à la mode,1830, p. 189. 2. monfignon : « ... le jeune homme [Tartenpomme] accoucha enfin d'un grand drame en trente-six tableaux intitulé : les Femmes avant la création du monde. »
− Sapristi! dit Dupétral, voilà un titre qui me paraît amphibologique et même amphigourique!
P. de Kock, L'Âne à M. Martin,1862, p. 101. 3. Niaiserie, prétention (...) préciosité amphigourique, voilà, dans son ensemble, tout notre théâtre depuis cinquante ans.
P. Léautaud, Le Théâtre de Maurice Boissard,t. 2, 1943, p. 284. − Vx. Qui est caractérisé par une éloquence emphatique et sonore : 4. Il s'exprimait avec une emphase qui tenait lieu d'esprit, et trouvait le moyen de servir à chacun un compliment amphigourique.
A. Gide, Les Faux-monnayeurs,1925, p. 1166. 2. [En parlant d'une pers., gén. d'un aut.] Dont le langage ou les écrits ressortissent à l'amphigouri : 5. Comment oublier Du Monin, dont le nom était devenu proverbial à titre de poëte amphigourique, vers 1580!
Ch.-A. Sainte-Beuve, Portraits contemporains,t. 5, 1846-1869, p. 123. 6. ... au dire des contemporains, il [Shakespeare] était bavard et amphigourique comme un de ses personnages de second plan.
L. Daudet, L'Entre-deux-guerres,1915, p. 292. B.− P. ext. [Appliqué aux moyens d'expr. d'autres domaines] 1. PEINT. [En parlant d'un tabl.] Grâce amphigourique. À la fois ambiguë et obscure : 7. Malgré tout, il y a dans ces toiles [de Boldini] une espèce de grâce amphigourique qui amuse le regard.
J.-J. Toulet, Notes sur l'art,1920, p. 29. 2. Dans différents domaines postulant une recherche sur le plan spéculatif (philos., théol., etc.).Théorie amphigourique. Dont le style contourné et alambiqué supplée à la carence ou à la précarité de ses fondements : 8. ... plus d'un fidèle de Jésus s'imaginait pouvoir greffer l'Évangile sur une théorie amphigourique [le gnosticisme], ayant l'air de dire quelque chose, sans rien expliquer en réalité...
E. Renan, Hist. des origines du Christianisme,L'Église chrétienne, 1879, p. 150. DÉR. Amphigouriquement, adv.D'une manière amphigourique (Boiste 1829); parler amphigouriquement (Lar. 19e). Prononc. : [ɑ
̃figuʀik]. − Dér. Amphigouriquement. Dernière transcription ds Littré : an-fi-gou-ri-ke-man. Étymol. ET HIST. − 1748 « qui a rapport avec l'amphigouri » (F.-A. P. de Moncrif, Le Coq-à-la-nax, tragédie amphigourique, d'apr. G. von Proschwitz ds St. Neophilol. t. 27, p. 228); 1777 « id. » (Courrier de l'Europe du 18 mars 1777, ibid. : Il a passé, Monsieur, dans le Courrier de l'Europe, plusieurs critiques, les unes innocentes, les autres amphigouriques, des opéras de Mr. Gluck).
Dér. de amphigouri*; suff. -ique*.
− Amphigouriquement, 1929 (Boiste). STAT. − Fréq. abs. litt. : 8. BBG. − Bailly (R.) 1969 [1946]. − Bar 1960. − Bél. 1957 (et s.v. amphigouriquement). − Bénac 1956. − Lav. Diffic. 1846 (et s.v. amphigouriquement). − Noter-Léc. 1912. |