| AMI, IE, subst. I.− [Correspond à l'emploi passif et souvent aussi actif du verbe aimer, la réciprocité étant envisagée ou possible] Personne qui de la part d'une autre est l'objet d'un attachement privilégié; celui, celle qu'on aime et/ou qui aime. A.− [L'attachement est de nature affective] 1. [Il exclut la relation amoureuse] a) [L'attachement est de nature princ. affective, mais distinct des affections familiales et de la passion amoureuse. Subst. corresp. amitié] Un vieil ami, une amie de pension; un ami de la famille, chambre d'amis : 1. ... la conduite de Gustave acheva de le rendre l'idole des soldats. Il partageait avec eux toutes les fatigues, tous les dangers, toutes les intempéries des saisons. Il était leur compagnon, leur ami, leur confident, leur père : ...
B. Constant, Wallstein,1809, p. 207. 2. La maxime : Vis avec ton ami comme s'il devait être un jour ton ennemi, quoique fondée sur une politique injurieuse à l'amitié, est juste au fond, par la maxime inverse est vraie : Vis avec ton ennemi comme s'il devait un jour être ton ami. À la vérité on lui en oppose une tout à fait contraire : Méfie-toi d'un ennemi réconcilié; car on a fait en morale autant d'axiomes qu'on a voulu.
J.-H. Bernardin de Saint-Pierre, Harmonies de la nature,1814, p. 314. 3. Pythagore a dit le premier : Mon ami est un autre moi-même. N'est-ce pas dire : Aime ton prochain comme toi-même.
A. de Vigny, Le Journal d'un poète,1835, p. 1037. 4. C'était la vieille camarade de MmeÉmilie, son amie de dortoir, sa confidente intime; elles se voyaient presque tous les jours, restaient longtemps ensemble, et se reconduisaient régulièrement jusqu'à la porte de la rue, où la conversation se prolongeait bien encore un bon quart d'heure.
G. Flaubert, La Première éducation sentimentale,1845, p. 37. 5. Elle ne t'est rien qu'une amie fort tendre, tu n'es rien non plus pour elle qu'un excellent camarade qu'elle serait désespérée de perdre comme ami, impardonnable de prendre pour amant. Ce qui vous unit n'est donc qu'un lien, charmant s'il n'est qu'un lien, horrible s'il devenait une chaîne. Tu lui es nécessaire dans la mesure où l'amitié compte et pèse dans la vie; ...
E. Fromentin, Dominique,1863, p. 143. 6. Miss Flora Ashburton, qui n'avait plus de famille, avait été d'abord l'institutrice de ma mère, puis sa compagne et bientôt son amie.
A. Gide, La Porte étroite,1909, p. 495. 7. − Voici qui aurait fait plaisir à mon père, dit-il à François. Il me reprochait mes amis, il répétait : « De mon temps, on n'avait pas d'amis, on n'avait que des parents. » Ce n'est qu'aujourd'hui qu'il vous eût agréé, ajouta-t-il en riant.
R. Radiguet, Le Bal du comte d'Orgel,1923, p. 102. 8. Mais quelle chose bonne c'est de parler à un ami comme on se parle à soi-même, de lui tout dire et d'en attendre tout! Car on retrouve alors cette amitié hors de laquelle on ne respire pas.
H. Pourrat, Gaspard des montagnes,Le Pavillon des amourettes, 1930, p. 201. 9. Nul ne connaît la solitude véritable, s'il n'a entendu un jour le médecin prononcer certaines paroles. Il n'est pas nécessaire que ce soit les paroles qui condamnent : une simple menace suffit. Et la créature la plus entourée, la plus aimée, entre dans le royaume de l'angoisse, où personne au monde ne peut la suivre. Même les êtres aimés, les amis de cœur, s'éloignent, prennent de la distance : ils font partie d'un autre monde − celui où le malade entend, distincts, éclatants, indifférents, inutiles, les bruits de la ville : sonnerie de tram, trompe d'autos, grincements de frein; assiettes remuées dans la salle à manger.
F. Mauriac, Journal 2,1937, p. 185. 10. − J'avais un ami. C'était mon frère. Nous avions étudié de compagnie. Nous habitions la même chambre à Stuttgart. Nous avions passé trois mois ensemble à Nuremberg. Nous ne faisions rien l'un sans l'autre : je jouais devant lui ma musique; il me lisait ses poèmes. Il était sensible et romantique. Mais il me quitta. Il alla lire ses poèmes à Munich, devant de nouveau compagnons.
Vercors, Le Silence de la mer,1942, p. 73. 11. − On ne connaît que les choses que l'on apprivoise, dit le renard. Les hommes n'ont plus le temps de rien connaître. Ils achètent des choses toutes faites chez les marchands. Mais comme il n'existe point de marchands d'amis, les hommes n'ont plus d'amis. Si tu veux un ami, apprivoise-moi!
A. de Saint-Exupéry, Le Petit Prince,1943, p. 471. 12. On lui reproche d'être oublieux, versatile, ingrat; de brusquement cesser de voir ceux qu'il a, quelque temps, pris plaisir ou profit à fréquenter. Soyons justes : ce n'est pas par caprice qu'il est inconstant, ni par satiété ou négligence qu'il écarte certaines relations d'hier. Pas d'ami plus attentif, plus patient, plus dévoué, plus fidèle! Alors? Eh bien, il fait seulement ce que nous devrions tous faire, de temps à autre : Il révise ses traités d'alliance...
R. Martin du Gard, Notes sur André Gide,1951, p. 1414. − Proverbe. Les bons comptes font les bons amis : 13. Entre nous, tenez, autant régler maintenant nos petites affaires, les bons comptes font les bons amis. Une supposition que j'aurais écouté M. de la Follette, je n'aurais jamais loué à un fonctionnaire, surtout curé.
G. Bernanos, L'Imposture,1927, p. 486. − Plus rare. [La pers. aimée est un membre de la famille naturelle] :
14. M. Rousseau, qui ne l'était pas si fort des siens, veut que nous soyons les amis de nos enfants. Au bout du compte, je crains que l'amitié ne fasse regretter un jour l'indulgence et la courtoisie car, en somme, c'est plutôt nous qu'elle avantage. Il est moins difficile d'être ami que d'être père...
G. Bernanos, Dialogues des Carmélites,1948, 1ertabl., 4, p. 1576. 15. Je n'eus aucun mal à l'aimer, et tendrement, car il était bon, généreux, gai, et plein d'affection pour moi. Je n'imagine pas de meilleur ami ni de plus distrayant. À ce début d'été, il poussa même la gentillesse jusqu'à me demander si la compagnie d'Elsa, sa maîtresse actuelle, ne m'ennuierait pas pendant les vacances.
F. Sagan, Bonjour tristesse,1954, p. 14. − Except. [La pers. aimée et la pers. qui aime correspondent au même individu se considérant dans un dédoublement de sa personnalité. Syntagme corresp. l'amour de soi] :
16. Mais, lui demanda l'Anglais, comment faisiez-vous pour vivre, étant repoussé de tout le monde? − D'abord, dit l'Indien, je me dis : Si tout le monde est ton ennemi, sois à toi-même ton ami. Ton malheur n'est pas au-dessus des forces d'un homme.
J.-H. Bernardin de Saint-Pierre, La Chaumière indienne,1791, p. 113. 17. Je ne suis plus bon à rien, et bientôt je ne serai plus rien : tout me l'annonce. Triste vérité, qui afflige mes amis et mes parens même, car je n'ai pas de fortune, mais, qui n'afflige personne autant que moi, car, à parler franc, je me crois encore le meilleur de mes amis, quelque tendresse qu'on puisse me porter. De l'intérêt que je prends à moi-même résulte pour moi plus d'une inquiétude en cette circonstance.
V. de Jouy, L'Hermite de la Chaussée d'Antin,t. 5, 1814, p. 285. − Emploi abs. C'est un(e) ami(e). C'est une personne qui a toute notre confiance : 18. panisse. − C'est facile à dire, voyons. Je vous le dis à vous, parce que j'ai envie de le dire à quelqu'un et que vous êtes un ami! Ma résolution est prise ...
m. brun. − Allons, soyez viril ... Réfléchissez ...
panisse. − C'est tout réfléchi. Je ne suis pas capable de supporter ce calvaire.
M. Pagnol, Marius,1931, I, 1, p. 40. 19. Ami. Homme dévoué sur lequel on peut compter. Ex. : Tu peux y aller = c'est un ami.
Ch.-L. Carabelli, [Langue de la pègre], début du xxes. − Constr. partitive. Un(e) de mes ami(e)s : 20. Je revins à cette époque à Paris reprendre mon service militaire dans la garde du roi. C'est alors que je me retrouvai avec un de mes amis d'enfance qui était aussi entré dans les gardes du corps. Il s'appelait le comte Aymon de Virieu. On l'a déjà entrevu en Italie avec moi. Il fut le premier et le meilleur de mes amis, ou plutôt ce nom banal d'amitié rend imparfaitement la nature du sentiment qui nous lia dès l'enfance. C'était quelque chose comme les liens du sang ou comme la parenté de l'âme. Je fus son frère et il fut le mien. En le perdant, j'ai perdu la moitié de ma propre vie. Ma pensée ne retentissait pas moins en lui qu'en moi-même.
A. de Lamartine, Les Confidences,1849, p. 310. ♦ Arch. Un mien ami : 21. ... la propriété avait dû s'étendre jusqu'au delà du ruisseau, ou au moins jusqu'au ruisseau même. Aristide s'amusait à y jeter de temps en temps un sien ami, nommé Perrin, qui était sa victime dans l'espérance de le faire rosser par le voisin comme violateur de son bien.
L.-É.-E. Duranty, Le Malheur d'Henriette Gérard,1860, p. 45. ♦ Fam. Un(e) ami(e) à moi : 22. − Mais, reprit Mariette, M. le comte a pensé que Mademoiselle reverrait avec plaisir une ancienne amie.
− Une amie à moi? s'exclama Jeanne avec surprise.
− Une amie de Mademoiselle, insista Mariette.
P.-A. Ponson du Terrail, Rocambole,t. 1, L'Héritage mystérieux, 1859, p. 610. 23. ... « Le docteur, ton ami, il est gentil n'est-ce pas? » Elle revenait à la charge, comme si je lui étais resté sur l'estomac. « Il est gentil! ... Je ne veux rien dire contre lui, puisque c'est un ami à toi ... Mais c'est un homme qu'on dirait brutal tout de même avec les femmes... Je veux pas en dire du mal puisque je crois c'est vrai qu'il t'aime bien... »
L.-F. Céline, Voyage au bout de la nuit,1932, p. 503. − [Sans idée partitive] :
24. − C'est un vieil ami à moi, dit Mounnezergues, un des rares, le seul. Je l'ai connu alors qu'il bonimentait à l'anatomic'hall que mon père fournissait en figures de cire. Il avait à peine dix-huit ans et il avait déjà un bagout du tonnerre de dieu pour exhiber ses saloperies.
R. Queneau, Pierrot mon ami,1942, p. 142. Rem. 1. [Syntagmes fréq.]
a) Adj. + ami. Admirable, ancien, bienfaisant, charitable, charmant, doux, excellent, faux, fidèle, grand, illustre, inoubliable, malheureux, meilleur, nouvel, petit, seul, suprême ami.
− Ami + adj. Ami ardent, cher, commun, complaisant, délaissé, discret, disparu, divin, excellent, fidèle, généreux, inconnu, indulgent, intime, parfait, particulier, personnel, regretté, sincère, sûr, total; ex-ami, ancien ami :
25. L'homme que je suis avec mon frère Ferdinand, (...), ne ressemble en rien à celui que je suis avec ma femme. Et ce Laurent Pasquier est parfaitement étranger à celui que connaît mon ex-ami Victor Legrand.
G. Duhamel, Chronique des Pasquier, Le Notaire du Havre, 1933, p. 25.
b) Ami de + subst. ou adv.
− [Expr. de l'orig. temp. de l'amitié]
. [Le subst. sans art. désigne une époque de la vie] Ami d'autrefois, d'avant-guerre, de collège, d'enfance, de guerre, de jeunesse, de (jeune) temps, de toujours; par iron., arg. ami de collège ,,camarade de prison`` (L. Larchey, Dict. historique d'argot, 2esuppl., 1883 et France 1907).
. [Le subst., déterminé, est un nom de durée] Ami de (x) ans, d'un demi-siècle, d'hier, de (toute la) vie.
− [Le subst. avec art. désigne le lieu de résidence ou de rencontre de l'ami] Ami du château, de la maison, du ministère.
− [Expr. de la qualité] Ami de cœur, de rencontre.
c) Subst. + ami. Visite d'ami (légèrement péj.).
d) Verbe + ami. Faire de quelqu'un son ami, se faire un ami de, perdre un ami, traiter (comme) un ami; péj. faire ami-ami avec :
26. Un très ancien passé qui transcende son enfance, rejoint la longue lignée des siens, des très simples gens auxquels il doit la vie et toutes les routes morales où ses pas ont marqué. Et maintenant, il va rejoindre la vermine « libre-penseuse », les carcasses maçonniques, honte et lèpre de la France, et il fera « ami, ami » avec cette pourriture.
J. Malègue, Augustin ou le Maître est là, t. 1, 1933, p. 352.
Rem. 2. Assoc. paradigm. a) (Quasi-)synon. admirateur, allié, camarade, compagnon, complice, confrère, conseiller, disciple, égal, factotum, familier, frère, maître, mentor, pair, père, serviteur, zélateur; b) Anton. adversaire, ennemi, étranger, indifférent, juge, rival.
Rem. 3. Au contact de ami, ie, certains adj. antéposés prennent une valeur affective (grand, petit, pauvre, vieil ami) :
27. Marthe mettait sa main sur la tête de Jacqueline, et la caressait, sans parler. La fillette se confiait. Elle allait faire visite à sa grande amie, quand son cœur était gonflé. À quelque moment qu'elle vînt, elle était sûre de trouver les mêmes yeux indulgents, qui verseraient en elle un peu de leur tranquillité.
R. Rolland, Jean-Christophe, Les Amies, 1910, p. 1110.
28. Écoute, César, il y a quarante ans que je te connais, et depuis quarante ans, tu te dis « mon vieil ami ». Mon vieil ami. C'est mon vieil emmerdeur qu'il faudrait dire!
M. Pagnol, Fanny, 1932, II, 7, p. 149.
− En partic. Pour désigner un malade, un être qui souffre :
29. 27 mai. Aujourd'hui, la vache à Marie Piarry a fait veau. Marie pleurait et disait : « Je ne veux pas voir ça, J'vas m'en aller. » Elle revenait. « Oh! La pauvre amie! La pauvre amie! Tenez! Elle est morte! Je vois bien qu'elle est morte. Jamais elle ne sortira! » La vache vêlait et poussait des soupirs.
J. Renard, Journal, 1889, p. 25.
30. ... j'ai trouvé mon malheureux camarade étendu à terre, sans connaissance. (...). Cependant l'hémorragie a cessé. Tandis que j'attendais le médecin, notre pauvre ami a repris connaissance. Mais il ne parlait pas.
G. Bernanos, Journal d'un Curé de campagne, 1936, p. 1259.
Rem. 4. Au plur. ami(e)s prend volontiers une valeur affaiblie et devient synon. de camarades, compagnons (compagnes) (cf. infra A 1 c) :
31. ... il se sentait sans défense, car il n'avait plus d'argent! Ses amis, ses compagnons de fête? Leurs figures, déjà presque invisibles, fuyaient de son souvenir. C'était justice : il ne pouvait plus être des leurs! Et maintenant que sa vie de plaisir se refusait à lui, comment, par quoi la remplacerait-il?
A. de Châteaubriant, Monsieur des Lourdines, 1911, p. 240.
32. Quand i's auront fini tous de s'battre, i' r'viendra chez lui. I' dira à ses amis et connaissances : « Me v'là sain t' et sauf », et ses copains s'ront contents, ...
H. Barbusse, Le Feu, 1916, p. 127.
33. C'est donc moi qui, vers ce temps, et j'y reviendrai plus loin, attirais à la maison des amis, des camarades. Valdemar montrait une bien étrange figure au milieu de cette jeunesse.
G. Duhamel, Chronique des Pasquier, Vue de la Terre promise, 1934, p. 105. b) P. anal. ou ext. − [L'attachement a pour obj. ou suj. un être spirituel ou surnaturel] :
34. ... la moindre ressemblance avec le souverain être est un titre de gloire qu'aucun esprit ne peut concevoir. La ressemblance n'ayant rien de commun avec l'égalité, nous ne faisons qu'user de nos droits en nous glorifiant de cette ressemblance. Lui-même s'est déclaré notre père et l'ami de nos âmes. L'homme-Dieu nous a appelés ses amis, ses enfans et même ses frères; et ses apôtres n'ont cessé de nous répéter le précepte d'être semblables à lui.
J. de Maistre, Les Soirées de Saint-Pétersbourg,t. 1, 1821, p. 263. 35. Saint Antoine de Padoue eut dans la bienheureuse Hélène Ensimelli une amie et une sœur comme saint François dans sainte Claire; ...
Ch. de Montalembert, Hist. de saint Élisabeth de Hongrie,introd., 1836, p. LV. 36. ... en ce qui concernait mes amis hommes j'aimais en eux plus encore qu'eux-mêmes, en tant qu'êtres individuels et uniques, telle qualité dont ils sont le lieu, (...) mon attachement à ces qualités mêmes me rendait toute indulgence pour le reste, mais en même temps ne créait pas le besoin de réciprocité...
Ch. Du Bos, Journal,mai 1927, p. 268. 37. Car dès le principe, cet appel à la perfection que l'amour adresse à tous, et qu'eux ont entendu, les a orientés vers une union divine qui dépasse toutes les forces de la nature. Dispersés, inconnus, ce sont ces amis de Dieu qui rachètent les âmes et soutiennent le monde, en achevant en eux ce qui manque à la passion de leur maître.
J. Maritain, Primauté du spirituel,1927, p. 170. 38. À nous entendre on croirait trop souvent que nous prêchons le Dieu des spiritualistes, l'être suprême, ce seigneur que nous avons appris à connaître comme un merveilleux ami vivant, qui souffre de nos peines, s'émeut de nos joies, partagera notre agonie, nous recevra dans ses bras, sur son cœur.
G. Bernanos, Journal d'un Curé de campagne,1936, pp. 1050-1051. 39. « Vous êtes un prêtre bizarre, dit-elle d'une voix qui tremblait d'impatience, d'énervement, un prêtre tel que je n'en ai jamais connu. Quittons-nous du moins bons amis. − Comment ne serais-je pas votre ami, Madame, je suis votre prêtre, votre pasteur. − Des phrases! Que savez-vous de moi, au juste? − Ce que vous m'en avez dit. − Vous voulez me jeter dans le trouble, vous n'y réussirez pas. J'ai trop de bon sens. »
G. Bernanos, Ibid.,p. 1155. 40. Pour entrer il faut découvrir une fenêtre qui se trouve près de l'abside. On pousse le volet et l'on est dedans. Les murs peints à la chaux n'ont d'autre ornement qu'un chemin de croix colorié et une statuette en plâtre de saint Jean l'apôtre, celui qu'on appelait jadis l'ami de Dieu.
H. Bosco, Le Mas Théotime,1945, pp. 69-70. − [L'attachement a pour suj. ou obj. un animal ou un élément naturel personnifié] :
41. M. de la Popelinière se déchaussait un soir devant ses complaisants, et se chauffait les pieds; un petit chien les lui léchait. Pendant ce temps-là la société parlait d'amitié, d'amis : « Un ami, dit M. de la Popelinière, montrant son chien, le voilà. »
S. Chamfort, Caractères et anecdotes,1794, p. 121. 42. La lumiere est la vie de l'univers, l'amie de l'homme et sa compagne la plus agréable; avec elle il ne s'aperçoit plus de sa solitude, il la cherche dès qu'elle lui manque, ...
Ch.-F. Dupuis, Abrégé de l'origine de tous les cultes,1796, p. 96. 43. « Ah! Si tu savais combien l'aspect des tourelles me fait palpiter, quand enfin je les vois bordées de lueur par la lune, notre amie, notre seule confidente. »
H. de Balzac, Louis Lambert,1832, p. 168. 44. Cette mer qui la berçait, était restée sa grande amie. Elle en aimait l'haleine âpre, le flot glacé et chaste, elle s'abandonnait à elle, heureuse d'en sentir le ruissellement immense contre sa chair, goûtant la joie de cet exercice violent, qui réglait les battements de son cœur.
É. Zola, La Joie de vivre,1884, p. 871. 45. Je ne sais si ces compagnons, ces amis de l'homme sont sensibles comme lui au frisson du jour qui point, mais j'ai vu souvent, à l'aube, de vieilles bêtes même s'arrêter sur la porte en sortant, et humer longuement l'espace frais : ...
J. de Pesquidoux, Le Livre de raison,t. 1, 1925, p. 150. c) [L'attachement, à caractère surtout soc., a pour obj. des pers. fréquentées dans les relations mondaines. Subst. corresp. relation, amitié] :
46. « Dans le monde, disait M., vous avez trois sortes d'amis : vos amis qui vous aiment; vos amis qui ne se soucient pas de vous, et vos amis qui vous haïssent. »
S. Chamfort, Caractères et anecdotes,1794, p. 147. 47. C'est bien la créature la plus communicative qu'il y ait sur le globe. Il vous appelle son ami la première fois qu'il vous rencontre, et vous tutoie la seconde. (...). Tout le monde connaît son petit dialogue avec M. de N., qu'il aborda auprès du poële, à la sortie de l'Opéra, en lui disant : Bonsoir, mon ami; comment te portes-tu? − Fort bien, mon ami; comment te nommes-tu?
V. de Jouy, L'Hermite de la Chaussée d'Antin,t. 2, 1812, p. 250. 48. Il est maintenant devenu, et cela en un instant, l'ami de la maison. Or, on n'est ami des grands que dans trois cas : quand ils ont besoin de nous, quand on sert leurs plaisirs, ou lorsqu'on les fait trembler.
H. de Balzac, Annette et le criminel,1824, p. 144. 49. ... elle jeta un regard à la ronde : « Elle a des amis affreux!
− Ce ne sont pas ses amis ni ceux de personne, dit Dubreuilh; c'est le tout-Paris : il n'y a rien de plus minable ».
S. de Beauvoir, Les Mandarins,1954, p. 364. Rem. 1. Cet emploi est particulièrement fréq. au plur. 2. Par réaction, dans un cont. d'inspiration mondaine, ami(e) ne désigne une relation au sens 1 que s'il est accompagné d'une épithète soulignant l'authenticité de l'amitié (ami(e) sincère, véritable) : 50. ... recueillez un dernier hommage, plus touchant que tous ceux que vous avez reçus dans la prospérité. Sachez, continua-t-il, que depuis ce matin, c'est-à-dire, depuis l'instant où le bruit de votre mort s'est répandu, tous vos sincères admirateurs, tous vos véritables amis, sont successivement accourus sur cette montagne.
Mmede Genlis, Les Chevaliers du Cygne,t. 2, 1795, p. 269. 2. [L'attachement inclut la relation amoureuse] a) [L'accent est mis principalement sur la nature sentimentale de l'attachement] :
51. ... « On ne peut pas être et avoir été. J'ai été dans mon temps, tout comme un autre, l'amant d'une femme galante, le jouet d'une coquette, le passe-temps d'une femme frivole, l'instrument d'une intrigante. Que peut-on être de plus? − L'ami d'une femme sensible. − Ah! nous voilà dans les romans. »
Chamfort, Caractères et anecdotes,1794, p. 142. 52. ... on dit que la vieillesse, changeant nos organes, nous rend incapables d'aimer; pour moi, je n'en crois rien. Votre maîtresse, devenue votre amie intime, vous donne d'autres plaisirs, les plaisirs de la vieillesse. C'est une fleur qui après avoir été rose le matin, dans la saison des fleurs, se change en un fruit délicieux le soir, quand les roses ne sont plus de saison.
Stendhal, De l'Amour,1822, pp. 238-239. 53. Alors Leuillet eut d'autres espoirs. Il fit la cour à la femme de son ami. Il était bien de sa personne, pas bête, riche aussi. Il se croyait sûr du succès; il échoua. Alors il devint amoureux tout à fait, un amoureux que son intimité avec le mari rendait discret, timide, embarrassé. MmeSouris crut qu'il ne pensait plus à elle avec des idées entreprenantes et devint franchement son amie. Cela dura neuf ans.
G. de Maupassant, Contes et nouvelles,t. 1, Le Vengeur, 1883, p. 910. 54. Vous ne m'aimez pas. Vous ne me désirez même pas. − Ne cherchez pas le mot qui définisse. Je vous propose une heure de bonheur à me donner, une folie, un caprice. Que vous soyez une divinité, que vous vous laissiez adorer à genoux. Que vous demeuriez pour un seul être, pendant toute sa vie, le bijou qu'il a connu, l'amie insoupçonnée dont il est l'esclave toujours ému, toujours reconnaissant.
M. Barrès, Mes cahiers,t. 3, 17 avr. 1903-10 janv. 1904, p. 85. − Littér. Ami(e) de cœur. Synon. bien-aimé(e), fiancé(e) : 55. Quel spectacle plus touchant que celui de cette jeune et belle fiancée! Dans la simplicité de son cœur elle s'appuie sur la main de l'ami qui doit la conduire dans le sentier de la vie; ...
G. de Staël, De l'Allemagne,t. 2, 1810, p. 169. 56. ... je lui jurai de vivre, de vivre pour l'adorer, son esclave, son ami, son frère; nous inventions tous les doux noms qui nous étaient permis. « Viens, me dit-elle en se jetant à genoux; prions ensemble; demandons à Dieu de nous aimer dans l'innocence, de nous aimer ainsi jusqu'à la mort! »
Duchesse de Duras, Édouard,1825, p. 178. 57. On vint à parler d'ami de cœur, on fit sur ce thème de la morale de concert. − Vivre sans un ami de cœur, disait M. de Sanréal plus qu'à demi-ivre de gloire et de punch, ce serait la plus grande des sottises, si ce n'était pas une impossibilité. − Il faut se hâter de choisir, dit M. de Vassignies. Madame d'Hocquincourt se pencha vers Leuwen, qui était devant elle. − Et si celui qu'on a choisi, lui dit-elle à voix basse, porte un cœur de marbre, que faut-il faire?
Stendhal, Lucien Leuwen,t. 2, 1836, p. 185. − Région. Synon. amoureux(se), futur(e), promis(e) : 58. ... nous irons voir une charmante créature à qui je donne presque toujours le temps qui me reste entre l'heure de mon dîner et celle où mes visites sont terminées. On la nomme ma bonne amie dans le canton; mais ne croyez pas que ce surnom, en usage ici pour désigner une future épouse, puisse couvrir ou autoriser la moindre médisance.
H. de Balzac, Le Médecin de campagne,1833, p. 112. 59. La femme s'aperçoit que son mari est beaucoup plus bête qu'elle ne le croyait; il lui avait paru si spirituel, quand il n'était encore qu'un fiancé (suivant l'expression poétique), un parti (suivant l'expression sociale), un bon ami (comme disent les cuisinières), et une p... dans l'horizon (suivant nous)!
G. Flaubert, Smarh,1839, p. 72. 60. ... il lui demanda si cela ne l'ennuyait pas de retourner chez elle, si elle ne voudrait pas avoir, comme Céline, un amoureux qui la promènerait? Elle répondit, sans gêne, que bien sûr elle serait heureuse d'avoir un bon ami, mais elle ajouta d'un ton très décidé : pour le bon motif. Auguste ne fut pas très satisfait, ...
J.-K. Huysmans, Les Sœurs Vatard,1879, p. 94. b) Par euphémisme ou pudeur. [L'accent est mis principalement sur la nature phys. de l'attachement, avec une idée de relations avant ou hors ou sans mariage] − Lang. commune (surtout au fém., avec une épithète de valeur affective). Bon(ne), petit(e) ami(e) : 61. ... je suis l'amie, la maîtresse, comme vous voudrez, d'un des plus déterminés Jacobins; ...
G. Sénac de Meilhan, L'Émigré,1797, p. 1790. 62. Parbleu! Nous nous mettrons dans la même salle qu'eux; puis, j'aurai l'air de l'apercevoir, je pousserai un cri d'étonnement et j'irai lui donner la main. Et comme il sera étonné, à son tour, et dira qu'il ne me connaît pas, je lui répondrai : De quoi! De qui! Tu fais le fier avec les amis? Tu es pourtant bien Léon Rolland, ouvrier ébéniste, et tu as une bonne amie qu'on nomme Pauline, à preuve que t'as deux enfants...
P.-A. Ponson du Terrail, Rocambole,t. 1, L'Héritage mystérieux, 1859, p. 175. 63. Ce fut elle réellement qui le débaucha, séduite par les membres forts de ce gros garçon, dont la face régulière et massive annonçait un mâle solide. Lui, céda, puis recommença craignant de passer pour un imbécile, d'ailleurs tourmenté à son tour du besoin de cette vicieuse, qui savait comment on excite les hommes. Au fond, son honnêteté native protestait. C'était mal, d'aller avec la bonne amie de M. Hourdequin, auquel il gardait de la reconnaissance. Sans doute il se donnait des raisons : elle n'était pas la femme du maître, elle lui servait de traînée; ...
É. Zola, La Terre,1887, p. 97. 64. ... l'arrivée d'un homme de sa connaissance ayant fait se lever « l'ami », comme on dit pudiquement aujourd'hui, assis en face de la créature, impulsivement, Patrick se pencha vers elle et, à voix basse : − « Où pourrais-je vous revoir, Madame? » osa-t-il murmurer. (...) il aurait cru avoir rêvé, n'eût été une impression de honte à voir la fille demander câlinement une cigarette à « l'ami » revenu à sa place, et l'allumer en lui susurrant un « merci, toi! ». Cette complicité avec la rouerie de cette prostituée, quelle bassesse, encore aggravée quand, au seuil de la porte et sur le point de quitter le restaurant, elle eut l'audace de lui faire, par-dessus l'épaule de son compagnon (...) un petit geste de la main!
P. Bourget, Nos actes nous suivent,1926, p. 117. ♦ Par affaiblissement (fréq. au plur. et au fém.). Personne de relation intermittente ou de rencontre : 65. Je ne suis pas mariée... Je me tiens bien, mais enfin, vous n'étiez pas forcé de le savoir... Je ne suis pas de ces femmes qui ont plusieurs amis... Moi, je n'en ai qu'un. (...)
− J'ai su ça, vous savez, par les domestiques − ... que vous ne vouliez pas louer à des « grues ».
T. Bernard, Monsieur Codomat,1907, I, 5, pp. 146-147. 66. Christophe la regardait : et il pensait à une de ses amies de rencontre, une grisette égoïste, immorale, incapable d'affection vraie, mais qui, dès qu'elle voyait souffrir, se sentait des entrailles de mère pour l'indifférent de la veille ou pour un inconnu.
R. Rolland, Jean-Christophe,Les Amies, 1910, p. 1152. 67. Vous ne savez pas donner un baiser mieux que ça? Pourtant quand vous êtes avec vos petites amies? Il est vrai qu'avec ses petites amies, c'est lui qui prend les initiatives. Ici, il se laisse faire. Il veut être convenable.
J. Romains, Les Hommes de bonne volonté,Le 6 octobre, 1932, p. 296. 68. Enfin l'image que je me fais d'elle, pas la vraie Chloé, hélas! est plus collante qu'une vieille maîtresse, − j'en parle par ouï-dire, car je n'ai jamais eu ce qu'on appelle une maîtresse, tout au plus des bonnes amies, comme on dit en Savoie, que j'emmenais à l'hôtel le dimanche après-midi, ou bien des poules, comme la petite du deuxième que j'ai renversée sur son lit, en vitesse, pendant que son ami était allé faire une commission...
R. Vailland, Drôle de jeu,1945, p. 82. − Synon. noble ou mondain de amant, maîtresse.[Subst. correspondant amour, liaison] :
69. ... je trouvais, dans une jolie fille de dix-neuf ans, une aimable et tendre amie, ma plus proche parente, puisqu'elle faisait mon bonheur; une épouse, puisqu'elle se donnait elle-même; je m'y livrai tout entier.
N.-E. Restif de La Bretonne, Monsieur Nicolas,1796, p. 68. 70. Ses relations avec Louise, dont il n'a obtenu que des preuves d'amitié, l'isolent en quelque sorte des femmes réelles et l'entraînent à se forger un être idéal qui a toutes les qualités de cette Louise qui ne lui appartiendra jamais, et d'une amie qui aurait pour lui des complaisances plus humaines. (...) Il ne pourra se tirer de là qu'au moyen d'une maîtresse bien vivante, et qui lui donnera tout autre chose à faire que de la controverse sur l'amour, mais il n'en est pas là encore.
É.-J. Delécluze, Journal,1825, p. 103. 71. Vous veniez également ici pleurer un mort? − Oui, Madame. − Une morte? − Oui, Madame. − Votre femme? − Une amie. − On peut aimer une amie autant que sa femme, la passion n'a pas de loi.
G. de Maupassant, Contes et nouvelles,t. 1, Les Tombales, 1881, p. 1210. 72. J'ai beaucoup souffert durant ces vacances. Je me suis décidé à rompre avec cette femme que tu connaissais, Jeanne B., qui était depuis trois mois mon amie. Dès que nous nous étions aimés, elle avait tout abandonné pour moi. (...) Elle avait eu, il y a quelques années, des amants. Un homme s'est tué pour elle. Elle avait été légère, méchante et capricieuse : pour moi, elle se mettait à genoux dans la cuisine et elle lavait les carreaux.
J. Rivière, Alain-Fournier, Correspondance,lettre de A.-F. à J. R., sept. 1910, p. 245. ♦ Plus rarement. [Dans le mariage] :
73. Adieu, mon adorable Joséphine, pense à moi souvent. Si tu cessais d'aimer ton illisible ou si ton cœur se refroidissait pour lui tu serais bien affreuse, bien injuste, mais je suis sûr que tu seras toujours mon amante comme je serai toujours ton tendre ami.
Napoléon Ier, Lettres à Joséphine,1796, p. 59. 74. L'amour, en s'approfondissant, s'attendrissant encore, perdra son aiguillon, ce qu'il a d'âpre à la première blessure. Tu te feras à moi, tu m'appelleras : Mon ami et je serai, sous ce doux nom calmant, soigneux de modérer, de retenir en partie mes ardeurs.
J. Michelet, Journal,1849, p. 636. Rem. Le vocab. est ici largement tributaire de celui de la litt. courtoise ou du Cantique des Cantiques, interprété comme un poème de l'amour conjugal : 75. ... les vierges de la nouvelle Sion chantoient le cantique de l'épouse : « Tel est le lis entre les épines, telle est ma bien-aimée entre les vierges. Que vous êtes belle, ô mon amie! Votre bouche est une grenade entr'ouverte, et vos cheveux ressemblent aux rameaux du palmier. (...) Mon âme s'est fondue à la voix de mon amie. Vent du milieu du jour, répandez les plus doux parfums de celle qui est les délices de l'époux! Ma bien-aimée, vous avez blessé mon âme! ... »
F.-R. de Chateaubriand, Les Martyrs,t. 2, 1810, p. 205. ♦ Spéc. [Entre pers. de même sexe] :
76. − « Tu m'en veux, dis, » soupira Bianca en prenant son amie dans ses bras, et l'amadouant de caresses dont l'une s'égara. Cela n'eut pas la durée d'un des éclairs de chaleur qui sillonnaient le ciel en ce moment, mais Leonora se précipita du lit.
J. Péladan, Le Vice suprême,1884, p. 24. 77. C'est d'ailleurs la règle presque générale pour les Charlus. L'amour de l'homme qu'ils aiment pour une femme est quelque chose d'autre, qui se passe dans une autre espèce animale (le lion laisse les tigres tranquilles), ne les gêne pas et les rassure plutôt. Quelquefois il est vrai, chez ceux qui font de l'inversion un sacerdoce, cet amour les dégoûte. Ils en veulent alors à leur ami de s'y être livré, non comme d'une trahison, mais comme d'une déchéance.
M. Proust, À la recherche du temps perdu,La Prisonnière, 1922, p. 217. c) Dans la lang. des mystiques : 78. ... le Christ lui apparut au milieu d'une lumière délicieuse, et lui dit d'une voix très douce : « Viens, Élisabeth, ma fiancée, ma tendre amie, ma bien-aimée, viens avec moi dans le tabernacle que je t'ai préparé de toute éternité; c'est moi-même qui t'y conduirai. »
Ch. de Montalembert, Histoire de sainte Élisabeth de Hongrie,1836, p. 266. Rem. Ici encore le vocab. est inspiré du Cantique des Cantiques, mais interprété comme un texte mystique des relations entre l'âme et Dieu. B.− [L'attachement est de nature pol., idéol., etc.] Synon. partisan. 1. Domaine de la politique intérieure : 79. Le premier parti royaliste qui prit, au retour de Charles II, le maniement des affaires fut en effet le parti légal, représenté par son plus habile chef, le grand chancelier Clarendon. Vous savez que, de 1660 à 1667, Clarendon fut Premier Ministre, et la véritable influence dominante en Angleterre. Clarendon et ses amis reparurent avec leur ancien système, la souveraineté absolue du roi, ...
F. Guizot, Hist. générale de la civilisation en Europe,1828, p. 28. 80. On arrêtait au passage, on entourait les vétérans, les anciens ministres, les « amis de Gambetta »; ces derniers paraissaient investis d'une autorité particulière, nimbés de l'auréole des apôtres qui survivent au dieu et gardent sa doctrine.
E.M. de Vogüé, Les Morts qui parlent,1899, p. 119. 81. ... Stanley et ses amis quittèrent le parti et le plateau Tory remonta d'un bond. L'amusant était que les troupes tories, elles aussi, combattaient sous un chef qui regardait toujours du côté des adversaires et semblait préférer l'approbation de ceux-ci à celle de ses partisans.
A. Maurois, La Vie de Disraëli,1927, p. 93. 82. Mon père est, vous le savez, un vieux militant socialiste, un ami de Guesde et de Jaurès.
G. Duhamel, Chronique des Pasquier,Le Combat contre les ombres, 1939, p. 83. 2. Autres domaines (cf. aussi infra II A 2) : 83. « ... est-ce qu'on est obligé de choisir ses compagnons de façon si étroite? Mes amis, ce sont tous les hommes. Quand je vais au bureau, le matin, il y a, devant moi, derrière moi, d'autres hommes qui vont à leur travail. Je les vois, si j'osais je leur sourirais, je pense que je suis socialiste, qu'ils sont tous le but de ma vie, de mes efforts et qu'ils ne le savent pas encore. C'est une fête pour moi, Monsieur. »
J.-P. Sartre, La Nausée,1938, p. 149. 84. Tu dis : « Celui-là qui est mon partisan, j'en puis user. Mais cet autre qui s'oppose à moi, je le range par commodité dans l'autre camp et ne prétends point agir sur lui sauf par la guerre. » Ce en quoi faisant, tu durcis et forges ton adversaire. Et moi je dis qu'ami et ennemi sont mots de ta fabrication. Et qui certes spécifient quelque chose, comme de te définir ce qui se passera si vous vous rencontrez sur un champ de bataille, mais un homme n'est point régi par un seul mot...
A. de Saint-Exupéry, Citadelle,1944, p. 859. 85. J'ai, pour ne le [Voltaire] point aimer, des raisons qui ne tiennent pas à son antichristianisme : la preuve, c'est qu'aucun philosophe ne me reste plus cher que Nietzsche, ce pauvre antéchrist, et que je compte plus d'un ami dans la postérité de Voltaire : Stendhal, d'abord, et plus près de nous, le sourire voltairien s'est, à mes yeux, dépouillé de toute sa hideur, en éclairant d'une lumière ravissante le beau visage de Jean Giraudoux.
F. Mauriac, Le Bâillon dénoué,1945, p. 447. II.− [Correspond à l'emploi actif du verbe aimer; l'obj. désigne une ou plusieurs pers., parfois des choses] Celui, celle, ce qui aime quelqu'un ou quelque chose. A.− Personne qui veut du bien à une autre personne. 1. Domaine de la vie privée : 86. Un Tancogne connaît la vie : à la Motte-Beuvron, à Romorantin, à Paris, il a des relations utiles, des amis qui agissent plus volontiers qu'ils ne bavardent, ce qu'on appelle des intelligences.
M. Genevoix, Raboliot,1925, p. 88. 87. don pélage. − Sentez-vous que je veuille lui faire du mal?
dona honoria. − C'est de votre bien que j'ai peur.
don pélage. − Croyez-moi, le meilleur ami du coupable, ce n'est aucun de vos consolateurs, ni ses complices, ni le confesseur lui-même, c'est le juge seul qui a pouvoir de lui apporter quittance et libération.
P. Claudel, Le Soulier de satin,1929, 3, p. 724. 88. ... nous avons débarqué sous des ombrages, devant la porte du gardien, Don Joachim, bientôt notre ami, et notre pourvoyeur en vivres pendant notre escale de plusieurs jours.
A. T'Serstevens, L'Itinéraire espagnol,1933, p. 253. 89. ... saint Jérôme m'a été présent toute la journée, comme un ami, comme une personne de laquelle on se dit qu'elle pense à nous, qu'elle nous tolère, nous veut du bien, etc.
V. Larbaud, Journal,mars 1934, p. 292. − Expr. en emploi abs. Conseil, prix d'ami; (parler, etc.) en ami : 90. « J'ai emmené vendredi soir le jeune Lévy chez Granié, qui a été charmant. Voilà : Lévy enthousiaste de la Suite de gestes. Il voudrait bien en avoir la copie retouchée que vous avez proposée. Il me prie de vous en demander le prix d'ami et me supplie de ne pas vous dire ce que lui-même peut donner. »
A. Lhote, Peinture d'abord,1942, p. 32. 91. le comte. « Comme on n'est pas le maître de son cœur, si vous aviez envie de m'aimer, vous seriez en droit de vous satisfaire, voilà mon sentiment. »
lucile. « Me parlez-vous en ami? »
le comte. « Oui, Sylvia, en homme sincère. »
lucile. « C'est mon avis aussi; j'ai décidé de même et je crois que nous avons raison tous les deux, ainsi je vous aimerai, s'il me plaît...
J. Anouilh, La Répétition,1950, II, pp. 44-45. 92. Si tu t'ennuies trop, si tu ne veux pas céder à l'ennui, à cette monotonie qui est ici une bonne conseillère, − tu m'entends bien, − je vais te donner à mon tour un conseil d'ami et de père. Car je t'aime bien, Aldo, tu le sais. Le nom que tu portes est illustre et ta famille bien accréditée à la seigneurie. Je vais te donner le conseil de partir.
J. Gracq, Le Rivage des Syrtes,1951, p. 50. 2. Domaine des relations internationales.Un ami de notre pays, les amis de la France : 93. ... ce qui ne pourrait manquer toutefois d'exciter la jalousie des Espagnols, qui aimeront toujours mieux avoir leurs ennemis naturels, les Portugais, pour voisins, que leurs meilleurs amis et leurs plus fidèles alliés.
Voyage de la Pérouse autour du monde,t. 4, 1797, p. 95. 94. ... tandis que la papauté enjoignait à Frédéric II de partir pour l'Orient et d'y diriger la guerre sainte contre le sultan, le sultan l'invitait à y venir en ami et en allié pour le défendre contre son frère et les associés de son frère, c'est-à-dire contre les remous de barbarie propagés du fond de l'Asie Centrale par la tourmente mongole.
R. Grousset, L'Épopée des croisades,1939, p. 315. 95. Car un peuple observé du dehors fournit à ses amis et à ses détracteurs autant de traits qu'il leur est nécessaire pour nourrir leur admiration ou pour renforcer leurs critiques. C'est l'éminente dignité du roman (à laquelle Valéry ne pense pas assez) que seul il nous livre l'âme d'un pays. Un peuple romancier comme le peuple britannique ne sera jamais pour nous « l'étranger ».
F. Mauriac, Le Bâillon dénoué,1945, p. 444. 96. En décembre 1943, Benès s'était rendu à Moscou et avait conclu avec Staline un « traité d'amitié, de collaboration et d'assistance mutuelle ». Regagnant Londres, il vint à Alger, le 2 janvier. Nous reçûmes avec tous les égards possibles ce chef d'état, qui à travers de terribles vicissitudes était toujours resté l'ami de la France.
Ch. de Gaulle, Mémoires de guerre,L'Unité, 1956, p. 203. 3. En partic., surtout au plur. Personne(s) qui s'attache(nt) à défendre les intérêts de quelqu'un, à favoriser la défense ou l'illustration d'une valeur. (Association des) amis de Ch. Péguy, de la Nature : 97. Un temps viendra où les papes, contre lesquels on s'est le plus récrié, tels que Grégoire VII, par exemple, seront regardés dans tous les pays comme les amis, les tuteurs, les sauveurs du genre humain, comme les véritables génies constituants de l'Europe.
J. de Maistre, Des Constitutions politiques et des autres institutions humaines,1810, p. 48. 98. La connaissance de soi-même, si recommandée par la sagesse ancienne, n'est pas sans danger pour les grands hommes : elle les expose à partager d'avance l'admiration de la postérité. Les amis de Dante ont regretté qu'il ne leur eût pas abandonné le soin de sa gloire : on souffre à le voir empressé pour des honneurs qui n'étaient pas dignes de lui.
F. Ozanam, Essai sur la philosophie de Dante,1838, p. 76. 99. Je crois qu'il y a vraiment quelque chose dans cette idée d'un conservatoire de la pensée écrite, ancienne ou moderne. Beaucoup de gens sont dégoûtés des éditions de luxe et des illustrations, et je crois qu'une « société des amis de la lettre » n'aurait aucune peine à se fonder et à prospérer.
P. Claudel, A. Gide, Correspondance,lettre de P. C. à A. G., 1899-1926, p. 105. 100. Là vécut et mourut le P. Mersenne, homme très utile et assez considérable dans la société des esprits au commencement du xviiesiècle; religieux facile et plein de curiosités, (...); ami d'enfance, ami constant et excessif de Descartes, propagateur de ses doctrines, et l'un des plus aimables de ces êtres secondaires dont le rôle est peut-être essentiel dans le développement des grands hommes et dans le déchaînement des grandes choses.
P. Valéry, Variété 2,1929, p. 10. 101. Amis de l'enfance et sauveurs de l'enfance, je vous convie tous à l'arbre de Noël; j'y tiens beaucoup. Afin que les traîtres ne disent pas, devant cet arbre, que Jésus est né, et puis qu'il est mort, et que tout a recommencé comme auparavant.
Alain, Propos,1935, p. 1299. 102. Ai-je besoin de dire que j'étais, chaque année, refusé au salon des amis des arts? Ceux-ci, depuis, m'ont fait à contre-cœur, risette, mais, dépourvu par ailleurs de mémoire, j'ai celle des bons et des mauvais procédés. Prisonnier de ma rancune, je les refuse à mon tour, avec délectation.
A. Lhote, Peinture d'abord,1942, p. 24. B.− Personne qui a un goût particulièrement prononcé pour quelqu'un ou quelque chose représentant une valeur. 1. [L'obj. au plur. ou au sing. coll. désigne un type de pers. ou d'êtres] Un ami des jeunes, des femmes : 103. Aussi ce ne fut pas sans étonnement que, vers 1805, les hérons, si bien établis, virent rôder sous leurs cèdres, en pleine mare, un rare visage, un homme. Un seul était capable de les visiter là, patient, voyageur infatigable, et brave autant que pacifique, l'ami, l'admirateur des oiseaux, Alexandre Wilson.
J. Michelet, L'Oiseau,1856, p. 69. 104. ... chez un homme qui vit dans les bois et les champs, la découverte d'un nid est toujours une émotion neuve. Fernand Lequenne, l'ami des plantes, se promenant avec sa femme Mathilde, voit un nid de fauvette dans un buisson d'épine noir; Mathilde s'agenouille, avance un doigt, effleure la fine mousse, laisse le doigt en suspens... Tout à coup je suis secoué d'un frisson.
G. Bachelard, La Poétique de l'espace,1957, p. 96. 2. [L'obj. désigne un écrivain, un artiste, etc., ou son œuvre] Un vieil ami d'Homère : 105. Un ami de Ronsard, de Muret et de Baïf, un savant en grec et en latin, un successeur de Ramus au collège de France, Jean Passerat fut le premier poète, depuis la réforme de 1550, qui revint à la gaieté naturelle et à la bonne plaisanterie du vieux temps.
Ch.-A. Sainte-Beuve, Tableau hist. et crit. de la poésie française et du théâtre français au XVIes.,1828, p. 121. 106. ... je posai cette question à Walter Berry − le plus avisé des amis et admirateurs de James et de Marcel Proust : « voyons, peut-on dire qu'Henry James ait été un grand esprit? »
J.-É. Blanche, Mes modèles,1928, p. 152. 107. Comment croire à la ruine d'une nation qui invite les amis de Mozart du monde entier à l'incomparable merveille des représentations de Don Juan au Festspielhaus?
F. Mauriac, Journal 2,1937, p. 132. 3. [L'obj. désigne une valeur concr. ou abstr.] Un ami de la mer, de la justice : 108. Le sage seul, instruit des lois de l'univers,
Sait goûter dans les champs une volupté pure :
C'est pour l'ami des arts qu'existe la nature.
J. Delille, L'Homme des champs,1800, p. 97. 109. Je suis l'ami des vieilles fenêtres hypocrites, le confident des portes hostiles et verrouillées, le complice des caves où quelqu'un descendit jadis qui n'est jamais remonté...
O.-V. Milosz, L'Amoureuse initiation,1910, p. 225. 110. Je suis l'ami des jardins à parterre, des maisons bien tenues, de la vaisselle éclatante sur les nappes, de l'esprit et du silence. Je suis le pire ennemi de Dieu.
J. Giraudoux, Judith,1931, II, 4, p. 156. 111. Il avait mis aux bagages deux grosses malles et un lit de fer pliant.
− C'est tout, dit-il à Justin qui l'accueillit sur le quai. Je suis l'ennemi du luxe, l'ami de la simplicité.
G. Duhamel, Chronique des Pasquier,Le Désert de Bièvres, 1937, pp. 95-96. Rem. La distinction entre les emplois A et B est parfois subtile, voire impossible, comme l'est celle qui distingue le goût pour qqc. et l'intérêt actif qu'on lui porte. Voici quelques ex. de ce flou sém., particulièrement typique lorsque le suj. désigne une chose personnifiée : 112. ... quand la vie nous échappe, nous nous élançons vers une autre vie. Ainsi la religion est de son essence la compagne fidèle, l'ingénieuse et infatigable amie de l'infortuné. Ce n'est pas tout. Consolatrice du malheur, la religion est, en même temps, de toutes nos émotions, la plus naturelle.
B. Constant, Principes de politique,1815, p. 131. 113. Dans ce monde étroit, mais si plein de dégoût, un seul objet connu me sourit : la fiole de laudanum; une vieille et terrible amie; comme toutes les amies, hélas! féconde en caresses et en traîtrises.
Ch. Baudelaire, Petits poèmes en prose,La Chambre double, 1867, p. 28. 114. Le bonheur de naître pauvre. Dans la suite de mes années, la parole d'Hérodote que me cita M. Dubois m'est revenue bien souvent à l'esprit : « Sache que la pauvreté est l'amie fidèle de la Grèce. La vertu l'accompagne, fille de la sagesse et du bon gouvernement. » Je remercie la destinée de m'avoir fait naître pauvre. La pauvreté me fut une amie bienfaisante; elle m'enseigna le véritable prix des biens utiles à la vie, que je n'aurais pas connu sans elle; en m'évitant le poids du luxe, elle me voua à l'art et à la beauté.
A. France, La Vie en fleur,1922, p. 557. 115. ... Rumelles, qui a fait partie de son cabinet, en parle comme d'un homme de cœur, un ministre scrupuleux, appliqué, un politicien honnête, un ami de l'ordre, un ennemi de toute aventure.
R. Martin du Gard, Les Thibault,L'Été 1914, 1936, p. 134. III.− Constr. et usages partic. A.− [Emploi en apostrophe] 1. [l'apostrophe s'adresse à une pers. connue (cf. aussi infra sous B)] Ami(e), mon ami(e), chers amis! : 116. L'état de mari a cela de fâcheux, que le mari qui a le plus d'esprit peut être de trop partout, même chez lui, ennuyeux sans ouvrir la bouche, et ridicule en disant la chose la plus simple. Être aimé de sa femme sauve une partie de ces travers. De là vient que M. disait à sa femme : « Ma chère amie, aidez-moi à n'être pas ridicule. »
Chamfort, Maximes et pensées,1794, p. 64. 117. ... je lui dis :
− Eh bien, m'amie, ma payse, essayez et que Notre-Dame de la montagne vous soit en aide!
P. Mérimée, Carmen,1847, p. 36. 118. − ... De quoi te mêles-tu, mon garçon? Est-ce que je provoque du scandale? Est-ce que je suis un objet de honte? Alors, à quoi penses-tu? à l'argent? Tout est possible. Sache, mon petit ami, que ces choses-là ne m'ont jamais coûté un sou. (...)
− Tu demandes que « ça finisse ». Mon ami, je vais y songer.
G. Duhamel, Chronique des Pasquier,Le Jardin des bêtes sauvages, 1934, p. 213. 119. Mais c'est la vision que les autres ont de vous qui change. On se transforme, on devient un autre à leurs yeux. Tel qui vous écrivait « cher ami » use aujourd'hui du « cher Monsieur et ami ».
F. Mauriac, Journal 1,1934, p. 46. 120. Il fut assez surpris de trouver, ce jour-là, un homme au visage mélancolique, à la voix basse et lointaine, aux gestes désabusés, et qui disait, avec un sourire déférent.
− Asseyez-vous, mon bon ami. Nous allons manger tout de suite. Oh! j'imagine votre existence de travail et je suis le premier à comprendre combien votre temps est précieux.
G. Duhamel, Chronique des Pasquier,Cécile parmi nous, 1938, p. 176. − [Avec une idée de commisération, parfois iron., et/ou de regret pour l'incompréhension dont fait preuve l'interlocuteur] Mon pauvre ami! : 121. Tu m'accuses sans cesse d'égoïsme et de dureté, en toi-même depuis longtemps tu as reconnu que je ne t'aimais pas. Erreur! Erreur, ma pauvre amie! Je suis venu à toi parce que je t'aimais. Je t'aime encore tout autant; je t'aime à ma façon, à ma mode, selon ma nature.
G. Flaubert, Correspondance,1846, p. 423. 122. faustina. − Vous êtes tous devenus fous, à Florence?
manente. − Non, mais nous sommes des hommes vivant dans la crainte du fouet.
faustina. − Mes pauvres amis!
uderigo. − Ne te moque pas. C'est en tremblant qu'on parle du fouet lorsqu'on a été bien fouetté seulement pendant une heure.
A. Salacrou, La Terre est ronde,1938, III, 1, p. 218. 2. [L'apostrophe est une formule de salutation s'adressant à une pers. de rencontre] − [Inconnue] Hé, l'ami! 123. ... il aperçut, montant du haut du Faubourg Poissonnière, un cabriolet de régie, dont le cocher, morne et fumant sa pipe, semblait vouloir regagner les extrémités du Faubourg Saint-Denis, où, sans doute, il faisait son séjour ordinaire.
− Eh! l'ami, dit Benedetto.
− Qu'y a-t-il, notre bourgeois? demanda le cocher.
A. Dumas Père, Le Comte de Monte-Cristo,t. 2, 1846, p. 526. − [Ou connue (au plur. notamment)] :
124. l'aubergiste. − Offre-lui plutôt de la soupe. Ils l'entourent. Le savant va et vient. On frappe à la porte. Chacun saute en arrière. Le grognard court et fait le salut militaire. Il jette son bonnet en l'air, il crie : « L'empereur! » Entre le boucher.
le boucher.− Salut, les amis, salut! Je ne connais qu'une chose, un beau carreau qui luit dans la nuit, et derrière, du vin, du feu et de bonnes gueules comme voilà. Ne riez pas tous ensemble, vous allez vous démantibuler la gargoulette.
J. Audiberti, L'Ampélour,1937, p. 97. 3. [L'apostrophe s'adresse à des pers. supposées présentes (lecteur, etc.)] :
125. Par une veillée d'hiver, comme elle était devant ses tisons et poussait pour édifier deux autres béates, ses commères, des lamentations capables d'empêcher le quartier de dormir :
− « Ah! pauvre Michel, je ne te verrai plus! Ah! reviens, pauvre Michel, reviens chercher ta Dorothée ». − tout d'un coup, ho! petits, mes amis! dans la cheminée, un cri effroyable, une masse noire qui s'abat sur les braises; ...
H. Pourrat, Gaspard des Montagnes,Le Château des sept portes, 1922, p. 166. − [Dans le discours fam.] [Mes amis peut être dégradé à un emploi purement interjectif, aucune personne présente ou absente n'étant visée] : 126. Toute l'Espagne est là qui danse sur la mer jolie. Les gens s'ont aperçu à la fin qu'on ne pouvait vraiment pas vivre autre part que sur l'eau. Et les pêcheurs au milieu de tout ça, mes amis! les canots pour la ravitaille, les domestiques, les comédiens, les baladins, les prêtres avec le bateau pour dire la messe, sonnant la cloche, la gendarmerie!
P. Claudel, Le Soulier de satin,1944, 4ejournée, 1, p. 850. B.− [Ami(e) introducteur d'un nom (commun ou propre) de pers.] 1. Mon ami(e) + nom de pers. : 127. Mais mon ami le juriste n'est pas seulement juriste. Il est historien aussi. Cela me donnait quelque espérance d'être mieux compris de lui.
J.-R. Bloch, Destin du Siècle,1931, p. 19. 2. [Avec une nuance de familiarité] L'ami(e) + nom de pers. : 128. Mais je ne puis m'empêcher de sourire à la malice de la vie quotidienne qui avait fait sympathiser deux hommes aussi peu faits pour se rencontrer et pour s'entendre que l'ami Chadenat et que l'ami Prado...
B. Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 351. Rem. En antéposition avec ou sans art., ami n'est pas loin de l'emploi adj. : 129. Beaucoup de boutiques étaient malgré tout en train de péricliter à cause de la guerre, tandis que celle de Madame Herote, à force de jeunes Argentins, d'officiers à pécule et des conseils de l'ami commissaire prenait un essor que tout le monde, aux environs, commentait, on peut l'imaginer, en termes abominables.
L.-F. Céline, Voyage au bout de la nuit,1932, p. 94. 130. − Je plaisantais, dit Paul le marchand de jounaux. Après un petit silence, Voussois reprit :
− Non, ce n'était pas un crime de brûler l'uni-park!
Il replia son journal et le mit dans sa poche.
− Bonsoir, ami Paul. Vous voyez comme c'est intéressant, les faits divers.
− Surtout quand ils ont lieu l'été.
R. Queneau, Pierrot mon ami,1942, p. 188. IV.− Emplois de valeur adj. A.− [Correspond à l'emploi passif et souvent actif du verbe aimer, la réciprocité étant envisagée ou possible] Qui est aimé d'une autre personne ou qui l'aime. 1. [L'attachement est de nature affective] a) [L'attachement est de nature principalement affective, mais distinct des affections familiales et de la passion amoureuse; en parlant d'une pers., d'un élément de la pers.] :
131. Elle avait pris une attitude moins familière, comme si, depuis la situation nouvelle, elle était retombée, de son rôle de gouvernante amie, à son ancien rang de servante. Vis-à-vis de Clotilde surtout, elle changeait la traitant en jeune dame, en maîtresse moins aimée et plus obéie.
É. Zola, Le Docteur Pascal,1893, p. 179. 132. Il vit qu'elle ne tarderait pas à pleurer; et, déposant la machine, il voulut la prendre aux coudes pour la convaincre de gaieté. En même temps les larmes sautèrent des cils, les sanglots de la bouche contractée; elle jeta ses bras aux épaules d'Omer, afin d'enfouir son chagrin dans une poitrine amie.
P. Adam, L'Enfant d'Austerlitz,1902, p. 282. − Except. Être ami pour soi-même : 133. Ne poussez pas le majestueux et imperturbable temps qui conduit tous les univers ensemble d'un instant à un autre instant. Les choses n'attendent qu'un regard pour vous prendre et vous porter. Il faudrait apprendre à être bon et ami pour soi-même.
Alain, Propos,1910, p. 92. − P. anal. [En parlant d'un être spirituel, surnaturel] :
134. ... dans les fictions des Grecs on avait vu des dieux amis et des dieux ennemis embrasser indifféremment la querelle du juste et de l'injuste, et servir, selon leur caprice, ou l'oppresseur ou l'opprimé; ...
J.-F. Marmontel, Essai sur les romans,1799, p. 298. 135. ... j'ai (...) de grandes consolations, la conscience d'avoir agi comme je devais, la certitude d'un dieu ami des malheureux et l'intelligence des joies saintes auxquelles une âme résignée peut aspirer.
− Mais vous souffrez, Lélia, dit Sténio de plus en plus étonné de la trouver si sincère; vous n'êtes donc pas résignée? Vous ne ressentez donc pas ces joies que vous comprenez? Ce dieu, ami des infortunés, ne vous assiste donc pas? La paix de votre conscience n'est donc pas une félicité suffisante?
G. Sand, Lélia,1839, p. 525. − P. ext. [En parlant d'un animal ou d'un élément naturel personnifié] :
136. ... Encor les voici
Mélodieuses fuir dans le bois éclairci.
Aux calices aimés leurs mains sont gracieuses;
Un peu de lune dort sur leurs lèvres pieuses
Et leurs bras merveilleux aux gestes endormis
Aiment à dénouer sous les myrtes amis
Leurs liens fauves et leurs caresses...
P. Valéry, Album de vers anciens,Vaines danseuses, 1900, p. 81. 137. Ils étaient venus retrouver l'animal ami ... Ils le caressaient, lui parlaient à l'oreille, le baisaient sur le mufle. La jeune bête frémissait de sa peau fine, tendait le front, et pour rendre caresse pour caresse léchait de sa large langue le visage du bambin. C'était habitude de berceau. Pas un geste des enfants, pas un mouvement brusque de l'animal ne troublait l'intimité câline. Une paix biblique enveloppait le groupe, ...
J. de Pesquidoux, Le Livre de raison,t. 3, 1932, p. 174. b) [L'attachement a pour obj. des pers. fréquentées dans les relations mondaines] :
138. Au vestiaire, un homme, grand, élégant, portant beau sa cinquantaine et l'habit, avec sa barbe encore blonde, et les cheveux bien lissés, blanchissant, avait salué très profondément MmeBeurdeley. C'était le couturier Charles Roussel, qu'on disait très ami de la grande actrice. MmeBeurdeley s'habillait chez lui.
L. Aragon, Les Beaux quartiers,1936, p. 213. c) P. ext. [L'attachement a pour obj. des pers. connues par relation amoureuse] :
139. − Et elle, qui aime-t-elle? Il faut me le dire...
− elle prétend qu'elle aime Boris, et je le crois, et cependant elle a l'air très amie avec Michel, et c'est elle qui souvent le poursuit pour avoir, dans les coins, avec lui, des conversations qui rendent Boris malade de jalousie.
G. Leroux, Rouletabille chez le tsar,1912, p. 24. 140. L'amour c'est comme l'alcool, plus on est impuissant et saoul et plus on se croit fort et malin, et sûr de ses droits.
Madame Herote, cousine de nombreux héros décédés, ne sortait plus de son impasse qu'en grand deuil; encore, n'allait-elle en ville que rarement, son commissaire ami se montrant assez jaloux.
L.-F. Céline, Voyage au bout de la nuit,1932, p. 98. 2. [L'attachement est de nature pol., idéol., etc.] :
141. On vous en veut, parce que vous êtes orléaniste ami particulier du duc d'Orléans. Vous l'avez loué dans quelques brochures, vous êtes du parti d'Orléans. Voilà ce qui se dit de vous, et que bien des gens croient, non pas moi. Je juge de vous tout autrement. Vous n'êtes point orléaniste, ami et partisan du duc : vous n'aimez aucun prince, vous êtes républicain.
P.-L. Courier, Pamphlets politiques,Réponses aux anonymes. 1822, p. 147. B.− [Correspond à l'emploi actif du verbe aimer; en parlant d'une ou de plusieurs pers., parfois de choses] Qui aime quelqu'un ou quelque chose. 1. Qui veut du bien à quelqu'un, qui manifeste de la bienveillance envers quelqu'un. a) Domaine de la vie privée.[En parlant d'un élément de la pers., d'un trait du comportement hum., etc.] Regard, visage, voix ami(e) : 142. ... merci du fond du cœur de votre lettre si amie et si tendre.
H. de Balzac, Correspondance,1882, p. 127. 143. ... nous ne vîmes que des visages amis, des regards bienveillants; nous n'entendîmes que des paroles obligeantes et affectueuses, ces touchants saluts, ces vœux prolongés et naïfs des peuples primitifs, ...
A. de Lamartine, Voyage en Orient,t. 2, 1835, p. 163. 144. ... tout m'a paru froid et hostile ... Les chapelles ont pour moi quelque chose de funèbre depuis que je ne prie plus! ... Cette visite n'a fait que m'assombrir... Je me sens si seule! ...
maurice. − Et vous n'avez pu résister au besoin d'entendre une parole amie? ... Vous m'aimez un peu?
louise. − Parlerais-je avec cette confiance si je n'avais pour vous qu'une amitié banale?...
F. de Curel, La Nouvelle idole,1899, II, 3, pp. 197-198. 145. On aime avoir quelqu'un à qui on parle de ses projets. Une oreille amie, (un cœur ami), une entente, une audience amie. On ne le fait pas seulement pour se donner du courage. Et de la consolation.
Ch. Péguy, Victor-Marie, Comte Hugo,1910, p. 698. b) Domaine des relations internationales.Pays ami : 146. Le colonel, un nouveau venu qui le connaissait mal, avait infligé un discours sévère sur le respect de la propriété en pays allié et ami.
R. Vercel, Capitaine Conan,1934, p. 90. 147. Comment pourrions-nous ignorer tous les échanges d'idées, de sentiments, de coutumes et même de mots, que se prodiguèrent l'un à l'autre les deux peuples naturellement amis et dont il suffit de venir à Édimbourg pour recueillir tant de témoignages? Or, cette amitié et cette compréhension, qu'en tout temps l'Écosse a montrée aux Français, leur sont aujourd'hui plus précieuses qu'elles ne l'ont jamais été.
Ch. de Gaulle, Mémoires de guerre,L'Appel, 1954, p. 610. c) En partic. Qui s'attache à défendre les intérêts d'une personne, à favoriser la diffusion d'une valeur : 148. ... disciple de la nature, ami des hommes, sectateur du vrai et du beau, prêt à s'immoler au bien public, il est le plus utile et le plus sublime des héros, le bienfaiteur de l'humanité, l'organe particulier de l'ordre universel, le plus grand des hommes.
É. Senancour, Rêveries,1799, p. 212. 149. ... les braillards de l'antisémitisme se sont déchaînés dans la rue sous les yeux d'une police amie; le juge s'est fait complice des violences; le jury a obéi. Et de toutes ces soumissions et de toutes ces violences, qu'est-il résulté? Rien du tout.
G. Clemenceau, L'Iniquité,1899, p. 281. 2. Qui a un goût particulièrement prononcé pour quelqu'un ou quelque chose représentant une valeur. a) [En parlant d'une pers.] − [L'obj. désigne un type d'êtres] :
150. Fini d'errer tout est possible
Puisque la table est droite comme un chêne
Couleur de bure couleur d'espoir
Puisque dans notre champ petit comme un diamant
Tient le reflet de toutes les étoiles
Tout est possible on est ami avec l'homme et la bête...
P. Éluard, Donner à voir,1939, p. 210. − [L'obj. désigne un écrivain, un artiste, etc. ou son œuvre] :
151. Quand je serai crevé, la jeunesse amie de ma littérature qui tient une plume se mettra à gémir sur la destinée de mes livres de mon vivant : elle n'en aura vraiment pas le droit, ma renommée ne devra quelque chose qu'à mes éreinteurs.
E. et J. de Goncourt, Journal,juin 1889, p. 980. 152. Ce que je n'ai presque jamais ressenti dans les maisons les plus luxueuses et dans les plus nobles familles (où la supériorité qui s'y affirmait me semblait empruntée, tout extérieure et de surface), je l'ai éprouvé chez ce grand bourgeois artiste, commensal et ami de tout ce qui s'était illustré dans la littérature et dans les arts en Angleterre et en France depuis 1870...
F. Mauriac, Journal du temps de l'occupation,1944, p. 346. − [L'obj. désigne une valeur concr. ou abstr.] ♦ [Valeur concr.] :
153. ... un père de six enfans ne trouvera point parmi eux son identique de caractère. Le père ne tient aucun compte de cette différence de penchans; s'il est ami du commerce et ami des raves, il forcera son fils à manger des raves et débiter des mensonges à la boutique.
Ch. Fourier, Le Nouveau monde industriel,1830, p. 70. ♦ [Valeur abstr.] :
154. La vieillesse est amie de l'ordre, par cela même qu'elle est amie du repos. Elle aime l'arrangement autour d'elle, comme un moyen de commodité, comme épargnant la peine, et facilitant les souvenirs.
J. Joubert, Pensées,t. 1, 1824, p. 223. 155. C'était là tout ce qui restait de ces arabes qui vivaient ici, depuis des siècles, dans une parfaite harmonie avec la nature et le ciel, de cette population raffinée, amie du rêve et du furieux plaisir, chez qui richesse et pauvreté étaient choses à peu près semblables, et où même pauvreté semblait une noblesse de plus...
J. et J. Tharaud, La Fête arabe,1912, p. 137. 156. ... ils sont insociables, tranquilles, et présentent à l'abord une des mille formes de la réserve et de la restriction : (...) amis de la nature, amis des livres, dociles, doux, bornés ou têtus.
E. Mounier, Traité du caractère,1946, pp. 363-364. b) [En parlant d'une chose personnifiée] − [En parlant d'un animal, d'un élément naturel, d'une chose concr.] :
157. Il lui adressa ses premières paroles et ses plus vives affections : elle lui répondit par des paroles plus touchantes et des affections plus tendres : ainsi la lune réfléchit les rayons du soleil par une lueur plus amie des yeux.
J.-H. Bernardin de Saint-Pierre, Harmonies de la nature,1814, p. 320. 158. Le chat est l'ennemi du mulot; le mulot est l'ennemi du bourdon; cela explique que les nids de bourdons soient toujours aux environs de nos maisons. Mais, bien mieux, le bourdon est le seul, parmi les insectes chercheurs de nectar, qui puisse féconder le trèfle rouge, c'est-à-dire transporter le pollen d'une fleur à l'autre; et il faut savoir aussi que la fécondation croisée est favorable aux plantes, sans doute par la compensation des maladies, qui ramène les descendants à l'équilibre. Voilà donc les chats qui sont amis du trèfle rouge. C'est ainsi que les choses s'ajustent et s'engrènent...
Alain, Propos,1912, p. 133. 159. À de certains moments privilégiés des heures noires, le poids qui l'accablait quittait sa proie, le libérait, s'élevait brusquement de son cœur. Sans raison; par le plus gratuit des coups d'ailes. Même les choses le sentaient. Les couvertures se faisaient tièdes et légères, l'édredon devenait ami. Une certaine douceur connue, attendue, descendait sur lui, l'enveloppait, l'emportait loin de la chambre et de toute souffrance.
J. Malègue, Augustin ou le Maître est là,t. 2, 1933, p. 381. − [En parlant d'une chose abstr.] :
160. Le monde, c'est mon ami dont je suis enveloppé. Son cœur est aujourd'hui pour moi comme un berceau de nourrice. Je sens de toutes parts, autour de moi la douceur, la chaleur amie.
J. Michelet, Journal,janv. 1849, p. 9. 161. ... il y avait en ce religieux une douceur qui rassurait les animaux les plus craintifs, et qui plaisait extrêmement à ces pingouins. Ils tournaient vers lui, avec une curiosité amie, leur petit œil rond prolongé en avant par une tache blanche ovale, qui donnait à leur regard quelque chose de bizarre et d'humain.
A. France, L'Île des pingouins,1908, p. 39. Rem. 1. Ami(e) construit en épithète est toujours postposé; il s'emploie aussi comme attribut et en apposition. 2. Sa valeur adj. n'est réellement nette que si ami(e) est précédé d'adv. intensifs-comparatifs du type bien, plus, si, très, etc. (cf. supra ex. 138, 139, 147, 157) ou dans le syntagme (fam.) (être) ami avec qqn (cf. supra ex. 150). 3. L'ex. suiv. où l'on passe de l'emploi attribut de ami à son emploi avec adj. poss. montre que l'emploi adj. est fondamentalement un emploi de subst. sans article : 162. − ... Mais que penserait Monseigneur? − Vous me plaisez beaucoup, m'a-t-il dit. Nous aurions été amis. − Votre ami, moi? − Sûr! Et ce n'est pourtant pas faute d'en savoir long sur votre compte.
G. Bernanos, Journal d'un curé de campagne,1936, p. 1214. Prononc. − 1. Forme phon. : [ami]. En ce qui concerne les mots se terminant en voyelle + e (en l'occurrence le fém. de l'adj. et du subst.), Rouss.-Lacl. 1927, p. 140 et 142 indique : ,,Les voyelles suivies d'un e muet final sont généralement fermées et quelque peu plus longues que si elles étaient seules.`` Non suivies de e ,,elles sont légèrement plus brèves, mais néanmoins fermées``. Nyrop Phonét. 1951, p. 91 le conteste pour ,,Paris et le Nord de la France``. Mais il observe d'autres différences : ,,C'est le contexte seul qui indique si la finale est féminine ou masculine; si le contexte fait défaut, les Français eux-mêmes se trouvent embarrassés; (...) ils recourent, pour se faire comprendre, non pas à l'allongement de la voyelle finale, mais à la prononciation du [ə], qui ressuscite pour un moment (...). Cependant il existe tout de même une nuance entre les finales féminines et les finales masculines (...) : les mots à finale féminine du genre donnée, allée, maintiennent bien l'accent traditionnel sur la dernière syllabe, tandis que les mots masculins correspondants sont sujets à des déplacements d'accent.`` 2. Homon. : à mi (cf. Zlat. 1862), amict, ammi (cf. ibid.). Étymol. ET HIST.
I.− Subst. 1. « celui, celle que l'amitié unit à une autre personne » 2emoitié xes. masc. (Pass., 108 ds Gdf. Compl. : Sant Johan lo son cher amic); ca 1100 fém. (Rol., éd. Bédier, 3713 : Soer, cher' amie, d'hume mort me demandes); 1165-70 « celle qui éprouve de l'amour pour un homme » (Chrétien, Erec, éd. Roques, 204 : Conuistre vuel lui et s'amie); d'où au masc. 1remoitié xives. [date du ms.] « amant » (Bartsch, Rom. und Past., I, 41, 30 ds Gdf. : Ses maris li prist a dire : Puis ke je vos taing ici Jamais jor an sa bailie Ne vos tanra vos amis); 2. ca 1170 « celui qui est partisan d'une autre personne, favorable à une institution » (Aymeri de Narbonne, éd. Demaison, 592 ds T.-L. : Crestïente n'a mes nul bon ami); 3. xvies. « celui qui a du goût pour qqc. » (Amyot, Comment discern. le flatt., 17 ds Littré : ces amis de fricassée et de nappe mise).
II.− Adj. 1174-1180 amie a qqn, fém. « (d'une femme) que l'amour unit à (un homme) » (Chrétien, Perceval, éd. Roach, 3938 : Car il me fist molt grant anui, Qu'il m'ocist, nel celerai mie, Celui a cui j'estoie amie), seulement en a.fr.; 1647 « qui appartient à un ami, favorable » (Corn., Héracl., V, 3 ds Littré : Toutes les fois, tyran, qu'on se laisse adopter, On veut une maison illustre autant qu'amie).
Du lat. amicus I attesté comme subst. au sens gén. dep. Naevius, Com., 39 ds TLL s.v., 1906, 83 : dapsiliter suos amicos alit; au sens de « amicus feminae » dep. Naevius, Com., 90, ibid., 1912, 59 : numquam quisquam amico amanti amica nimis fiet fidelis; au sens de « partisan » dep. Cicéron, Pet., 16, ibid., 1908, 46 : hoc nomen « amicorum » in petitione latius patet quam in cetera vita. Quisquis est enim, qui ostendat aliquid in te voluntatis, qui colat, qui domum ventitet, is amicorum numero est habendus; constr. avec génitif d'inanimé dep. Rhet. Her., 4, 37, 49 ibid., 1908, 31 : amici veritatis. II attesté comme adj. constr. avec la dat., au sens gén. dep. Plaute, Bacch., 539 ibid., 1902, 72 : quem mi amicum esse arbitratus sum; au sens de « amica viri » dep. id., Merc., 925 ibid., 1903, 41 : suspicatur illam amicam esse illi. STAT. − Fréq. abs. litt. : 45 840. Fréq. rel. litt. : xixes. : a) 80 695, b) 76 852; xxes. : 61 894, b) 47 686. BBG. − Bailly (R.) 1969 [1946]. − Bar 1960. − Barb. Infl. 1919, p. 12. − Baudr. Pêches 1827. − Bél. 1957. − Bénac 1956. − Bible 1912. − Boiss.8. − Bouillet 1859. − Brereton (G. E.). Titres et termes d'adresse dans le Ménagier de Paris. Romania. 1958, t. 79, p. 479, 483. − Brisson (M.). Bele amie dans le Chastel Perilleux, xivesiècle. St. fr. 1967, t. 11, no2, pp. 278-280. − Bruant 1907. − Canada 1930. − Daire 1759. − Dauzat Ling. fr. 1946, p. 21. − Dumas 1965 [1873]. − Dup. 1961. − Dupin-Lab. 1846. − Esn. 1966. − Fér. 1768. − Foll. 1966. − France 1907. − Gottsch. Redens. 1930, p. 65. − Lacr. 1963. − Laf. 1878. − Larch. Suppl. 1880. − Lav. Diffic. 1846. − Le Breton Suppl. 1960. − Le Roux 1752. − Marcel 1938. − Nelli 1968. − Noter-Léc. 1912. − Pope 1961 [1952], * 302, 429, 442, 616, 734, 798. − Privat-Foc. 1870. − Romeuf t. 1 1956. − Sandry-Carr. 1963. − Sardou 1877. − Spr. 1967. − Théol. bibl. 1970. − Thomas 1956. − Tournemille (J.). Au jardin des locutions françaises. Vie Lang. 1964, pp. 710-711. − Will. 1831. |