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ALTIER, IÈRE, adj.
A.− [En parlant de pers., de leur caractère, de leur comportement] Qui est d'une grande fierté. Peuple altier, esprit altier :
1. Qui l'eût pu prévoir? se disait-il. Une fille d'un caractère si altier, d'un génie si élevé, plus fière que moi du nom qu'elle porte! Stendhal, Le Rouge et le noir,1830, p. 438.
2. Si son amour-propre eût été moins profondément blessé, Malorthy se fût décidé sans doute à rendre bon compte à sa femme de sa visite au château. Il pensa mieux faire en dissimulant quelque temps encore son inquiétude et son embarras, dans un silence altier, plein de menaces. G. Bernanos, Sous le soleil de Satan,1926, p. 70.
3. J'entends par là que l'on sent l'auteur nourri de la Bible; d'où cette sorte d'austérité, de dépouillement du récit; d'où cette grandeur, cette noblesse sans panache, cette altière résignation; le ton même du récit, souvent, est biblique. A. Gide, Journal,1941, p. 102.
Avec nuance péj. Qui fait sentir sa supériorité, qui cherche à écraser :
4. La famille de son mari, altière et fastueuse, la voulut mortifier plus d'une fois sur ses humilités : elle ne s'en déconcertait pas. Ch.-A. Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 2, 1842, p. 308.
5. On me fait des plaintes de Girard; son caractère entier, altier, brusque et tranchant, ne le rend pas commode à vivre et fait un peu tort à la société de chant du conservatoire, me dit-on. H.-F. Amiel, Journal intime,12 juin 1866, p. 318.
6. Ce n'est plus l'altière, la méprisante voluptueuse que je presse sur mon cœur. Ce n'est plus qu'une petite fille malheureuse et bafouée. P. Benoit, L'Atlantide,1919, p. 262.
B.− [En parlant d'une chose concr. ou abstr.] Sans nuance péj. Noble :
7. Son poing de créateur, fait pour le marbre altier, Trace des chiffres vils sur un obscur papier. Sully Prudhomme, Les Solitudes,Damnation, 1869, p. 56.
8. Mais aussi, faut-il que l'existence soit abominable pour que ce soit là le seul bonheur vraiment altier, vraiment pur que le ciel concède, ici-bas, aux âmes incrédules que l'éternelle abjection de la vie effare. J.-K. Huysmans, Là-bas,t. 2, 1891, p. 53.
Spéc. Qui impressionne par sa hauteur. Dôme altier, pic altier, âme altière :
9. Enfin nous prenons l'habitude de semer nos landes de pins maritimes. Ces pins altiers, si droits, qui finissent par être dépouillés de branches, et qui, ne gardant qu'une cime maigre et plate sans ombre presque, oscillent d'un bloc sous le vent comme des fûts d'airain ... J. de Pesquidoux, Le Livre de raison,t. 1, 1925, pp. 162-163.
Prononc. : [altje], fém. [ε:ʀ]. Littré condamne la liaison avec le r de altier dans : Cet homme est altier et dur. ,,Beaucoup de mots en -ier, dont l'r ne se prononçait pas au xviesiècle pas plus qu'aujourd'hui ont repris l'r aux xviieet xviiiesiècles, par exemple altier, entier, familier, etc. Dans ces mots la prononciation de -er s'est modelée sur celle de fier, hier`` (Fouché t. 2 1969, p. 251). Fér. cite cette prononc. en 1787 (mais pas en 1768!), concurremment avec la forme actuelle. De même Gattel 1841. ,,L'Académie maintient encore en 1762 l'r d'altier qu'elle ne laisse disparaître qu'en 1835`` (Mart. Comment prononce 1913, p. 293).
Étymol. ET HIST. − a) 1578 « haut. élevé » (D'Aubigné, Printemps, ii, 2 ds DG : Plus altière que l'aer); b) 1611 « qui est fier, orgueilleux » (Cotgr. : Altier [...] Proud, loftie, stately, disdainefull, haughtie). Empr. à l'ital. altero attesté au sens a dep. la 1remoitié du xiiies. (Giacomo da Lentini, II-100 ds Batt. t. 1 1961), au sens b dep. le xiiies.; au xives. forme altiero (M. Villani, 7-54, ibid. : Si mostrava in atto e nel suo portamento più superbo che altiero. Id., 8-29 : Il tesoriere altiero e presuntuoso non si curò del pagamento né delle minaccie), cette 2eforme ayant disparu au profit de la 1re.
STAT. − Fréq. abs. litt. : 407. Fréq. rel. litt. : xixes. a) 667, b) 1 182; xxes. : a) 459, b) 251.
BBG. − Bonnaire 1835. − Darm. Vie 1932, p. 145. − Dup. 1961. − Goug. Mots t. 2 1966, p. 86. − Guizot 1864. − Kold. 1902. − Laf. 1878. − Lav. Diffic. 1846. − Sar. 1920, p. 5.