| ALPESTRE, adj. Qui a rapport ou qui est propre aux Alpes; qui ressemble aux Alpes, qui les rappelle. Synon. alpin.Paysage, plante alpestre : 1. Une immense pièce aux boiseries blanches, aux rideaux de serge verte, avec, au milieu, un lustre de café de province et, par une fente des rideaux fermés, une filtrée de lumière ensoleillée, tombant d'une façon toute rembranesque, sur les crânes d'une rangée d'hommes pâles, d'hommes jaunes, et éclairant un coin d'un terrible paysage alpestre, comme peint avec des couleurs de décomposition.
E. et J. de Goncourt, Journal,janv. 1883, p. 230. 2. Le poète célébrait le duel homérique de ces grandes déesses, dont les lances s'entre-choquent, depuis le commencement de l'histoire : cette iliade millénaire, qui est à celle de Troie ce que la chaîne alpestre est aux collines grecques.
R. Rolland, Jean-Christophe,La Nouvelle journée, 1912, p. 1485. 3. Les Alpes, au centre de l'Europe, avant d'être sillonnées par des voies internationales, possédaient leur système propre, leur réseau muletier. Il existe toujours et s'est surtout développé entre 800 et 1 800 mètres, c'est-à-dire dans la zone où confinent les cultures et les pâturages, sur la combinaison desquels est fondée l'économie alpestre.
P. Vidal de La Blache, Principes de géographie humaine,1921, p. 233. Rem. Syntagmes fréq. sites, beautés, cime, nature, fleurs alpestres. − P. méton., GÉOGR. [En parlant d'une région montagneuse] Qui est caractérisé par la présence de certaines espèces végétales : 4. Quatre zones ou régions divisent les Alpes tout entières de bas en haut : la région méditerranéenne, la région moyenne, la région alpestre et la région alpine. De 1 200 à 1 800 m. région alpestre : hêtres, sapins, épicéas, pins sylvestres. De 1 800 à 2 800 m. région alpine, dernière zône de la végétation forestière; au-dessus se trouve la région complètement pastorale.
Guérin1886. − Au fig. Âpre, rigide : 5. M. Joseph de Maistre est un Bossuet alpestre.
Lamartine (Lar. 19e,1866). Rem. Attesté également ds Guérin 1892, Nouv. Lar. ill. Prononc. : [alpεstʀ
̥]. Étymol. ET HIST. − 1550 « qui est propre ou qui a rapport aux Alpes, d'où rude, sauvage » trad. de l'ital. (Vasquin Philieul, trad. de Pétrarque, L. IV, Triomphe d'Amour, chap. 2 : Scilla devient rude pierre et alpestre, Qui rend la mer en Sicile difforme); 1560 « id. » id. (Louveau, Trad. des « Facétieuses nuits » de Straparole, IV, 5 ds Hug.).
Empr. à l'ital. alpestre « id. » attesté dep. le xiiies. (A. Guittone, Lettere, I, 182, 143 ds Batt. t. 1 1961), cf. xives. (F. Petrarca, Trionfo d'Amore, II, v. 179 ds Rime e Trionfi a cura di F. Neri, Torino, 1960, p. 530 : Vidi'l pianto d'Egeria; invece d'osse Scilla indurarsi in petra aspra ed alpestra, Che del mar ciciliano infamia fosse); l'ital. lui-même venant du lat. médiév. alpestris attesté pour le domaine ital. en 928, Du Cange. − L'hyp. d'un empr. dir. au lat. alpestris, EWFS2, est à écarter étant donnée l'orig. des premières attest. fr. STAT. − Fréq. abs. litt. : 62. BBG. − Bél. 1957. − Bénac 1956. − Ritter (E.). Les Quatre dictionnaires français. Remarques lexicographiques. B. de l'Inst. nat. genevois. 1905, t. 36, p. 346. |