| ALGÉBRIQUE, adj. A.− Qui a rapport à l'algèbre; qui utilise l'algèbre; obtenu par l'algèbre (cf. algèbre A) : 1. Enfin dans le calcul, et particulièrement dans les procédés de l'analyse algébrique, il suffit de penser en commençant l'opération, en arrangeant ou en traduisant les données du problème; la méthode exécute ensuite tout le reste, sans que nous ayons besoin d'y songer; c'est elle seule qui opère les transformations, le dégagement des inconnues, etc.
Maine de Biran, De l'Influence de l'habitude sur la faculté de penser,1803, p. 188. 2. J'ai pensé qu'il me serait plus facile de descendre ensuite du tout à la partie, que de la partie au tout. C'est un axiome algébrique qui veut que l'on procède du connu à l'inconnu et non de l'inconnu au connu...
A. Dumas père, Le Comte de Monte-Cristo,t. 1, 1846, p. 706. 3. En comparant ces trois parties essentielles de la mathématique, on reconnaît que le calcul, dont le principal essor est algébrique plutôt qu'arithmétique, a surtout une destination logique, outre son utilité propre et directe. Son aptitude essentielle consiste à développer autant que possible notre puissance déductive.
A. Comte, Catéchisme positiviste,1852, p. 114. 4. Une carte géographique, suivant le système de projection adopté, conserve, par exemple, la proportionnalité des lignes du terrain entre elles, ou les angles de deux lignes du terrain, etc. Tu vois qu'on n'a pas de telles règles pour le langage ordinaire. Le langage algébrique conserve ad libitum la personnalité des quantités et les opérations, etc.
A. Gide, P. Valéry, Correspondance,lettre de P. V. à A. G., juill. 1901, p. 387. 5. ... dispensé de les concevoir (elles [les régions de l'infiniment petit et de l'infiniment grand] sont presque inconcevables par images ou par idées) le savant les attaque sous le couvert de ses symboles mathématiques ou algébriques. Ceux-ci ne parlent plus à la sensibilité, ne suscitent aucun concept mental; purement anonymes et dépassant en abstraction les mots qui, semblables à une plante arrachée avec ses racines pleines de terre, entraînent toujours avec eux trop d'expérience du réel, ils permettent de penser l'impensable, en quelque sorte.
R. Huyghe, Dialogue avec le visible,1955, p. 59. Rem. 1. Algébrique prend un sens plus précis dans les expr. syntagm. Calcul algébrique. ,,Partie de l'algèbre élémentaire consacrée aux diverses opérations sur les expressions algébriques.`` (Uv.-Chapman 1956, s.v. calcul; cf. A. Cournot, Essai sur les fondements de nos connaissances, 1851, pp. 377-378). Clôture algébrique. ,,Extension d'un corps commutatif, algébrique et algébriquement close. Par exemple, le corps C des nombres complexes est une clôture algébrique du corps R des nombres réels.`` (Chamb. 1970). Courbe algébrique. ,,... les C. algébriques ou géométriques (...) sont celles pour lesquelles la relation entre l'abscisse et l'ordonnée (...) est représentée par des quantités algébriques ordinaires.`` (Bouillet 1859, s.v. courbe). Élément algébrique. ,,Un élément d'une algèbre associative unitaire E sur un corps commutatif K est algébrique s'il existe un polynôme non nul à coefficients dans K s'annulant sur cet élément. Lorsque l'algèbre E est de dimension finie sur K, tous les éléments de E sont algébriques sur K.`` (Chamb. 1970). Ensemble algébrique. ,,Partie de l'espace vectoriel Kn(où K est un corps commutatif) qui peut être définie comme l'ensemble des points (z1, z2, ..., zn) annulant une famille finie de fonctions polynomiales.`` (Ibid.). Entier algébrique. ,,Nombre algébrique défini à l'aide d'un polynôme dans lequel le terme de degré le plus élevé a pour coefficient l'unité.`` (Lar. encyclop. Suppl. 1968). Équation algébrique. ,,Équation obtenue en égalant deux expressions algébriques et qui ne comporte que les signes des 6 opérations algébriques.`` (Uv.-Chapman 1956, s.v. équation). Expression algébrique. ,,Ensemble de nombres donnés explicitement ou représentés par des lettres, reliés entre eux par les symboles des 6 opérations suivantes : addition, soustraction, multiplication, division, élévation à une puissance, extraction de racine.`` (Ibid., s.v. expression; cf. L.-G. de Bonald, Législation primitive, t. 1, 1802, p. 333). Extension algébrique. ,,Une extension K' d'un corps commutatif K est algébrique si tous les éléments de K' sont algébriques sur K. Pour que K soit algébriquement clos, il faut et il suffit que toute extension algébrique de K soit égale à K.`` (Chamb. 1970). Fonction algébrique. ,,Fonction explicite, qui ne contient pas d'autres opérations indiquées sur la variable que celles d'addition, soustraction, multiplication, division, élévation à une puissance déterminée, ou encore extraction d'une racine d'une inconnue, ou encore racine y d'une équation de la forme f(x,y) = 0, où f est un polynôme entier en x et y.`` (Lar. encyclop., s.v. fonction). Formule algébrique. ,,Expression de la règle à suivre pour déduire la valeur des inconnues, des relations que l'énoncé d'un problème établit entre les grandeurs connues et inconnues que l'on a à considérer.`` (Guérin 1892; cf. R. Ruyer, Esquisse d'une philosophie de la structure, 1930, p. 248). Géométrie algébrique. ,,Étude des ensembles et des variétés algébriques, et des invariants par le groupe des applications birationnelles.`` (Chamb. 1970). Nombre algébrique (synon. nombre relatif). ,,Nombre réel, doté du signe + ou du signe -.`` (Uv.-Chapman 1956, s.v. nombre); anton. nombre transcendant. Opération algébrique. ,,L'une des 6 opérations suivantes : addition, soustraction, multiplication, division, élévation à une puissance, extraction d'une racine, ou la combinaison d'un nombre fini de telles opérations.`` (Ibid., s.v. opération; cf. G. Leroux, Le Parfum de la Dame en noir, 1908, p. 98). Quantité algébrique. ,,Ensemble de lettres et de nombres réunis les uns aux autres par des signes d'opération.`` (Lar. encyclop.; cf. P.-J. Proudhon, Qu'est-ce que la propriété? 1840, p. 315). Somme algébrique, ,,Suite d'additions ou de soustractions portant sur des nombres ou des expressions algébriques.`` (Uv.-Chapman 1956, s.v. somme; cf. F. Perroux, L'Économie du XXesiècle, 1964, p. 147). Structure algébrique. ,,Un ensemble E est muni d'une structure algébrique s'il est muni d'une ou de plusieurs lois de composition internes, et s'il est muni éventuellement d'une ou de plusieurs lois de composition externes, ces lois pouvant présenter entre elles certaines relations (la distributivité, par exemple).`` (Chamb. 1970). Valeur algébrique. ,,La valeur algébrique d'une grandeur ou d'une quantité dotée d'un sens est un nombre algébrique dont le signe correspond au sens de cette grandeur ou de cette quantité et dont la valeur algébrique correspond à sa mesure.`` (Uv.-Chapman 1956, s.v. valeur). 2. Sur algébrique, on a fait parfois un subst. fém. dérivé algébricité « caractère ou qualité de ce qui est algébrique » : 6. On pourrait caractériser la géométrie finie du géomètre danois Juel en disant qu'elle consiste dans la recherche des propriétés des êtres algébriques qui subsistent lorsqu'on renonce à l'algébricité.
Hist. générale des sciences,t. 3, vol. 2, 1964, p. 83. B.− P. anal (cf. algèbre B). 1. Qui a un caractère de rigueur et d'abstraction. Exactitude algébrique (Lar. 19e) : 7. Par l'intérêt qu'elle porte aux classes pauvres, par la préoccupation qu'elle a de leur bien-être, par le compte algébrique qu'elle tient de leurs misères, l'économie politique avait naturellement donné à Henri Mauperin une couleur de libéralisme.
E. et J. de Goncourt, Renée Mauperin,1864, p. 90. 8. ... toute la musique est établie avant tout sur le postulat des résonances, sur une architecture des fréquences, la fréquence étant l'élément dominant, de caractère algébrique, presque séparable du phénomène lui-même, tant il tire à lui l'importance.
P. Schaeffer, À la recherche d'une musique concrète,1952, p. 51. − Péjoratif : 9. La méthode algébrique, appliquée à des objets qu'on ne peut saisir par le raisonnement seul, ne laisse aucune trace durable dans l'esprit. Pendant qu'on lit ces écrits sur les hautes conceptions philosophiques, on croit les comprendre, on croit les croire, mais les arguments qui ont paru les plus convaincants échappent bientôt au souvenir.
G. de Staël, De l'Allemagne,t. 4, 1810, p. 114. − [En parlant d'une pers.] :
10. Entre Gautier et moi, Girardin, un coquin sec, algébrique : oui, un élève de l'École polytechnique, qui s'est évadé par les mines de Saint-Bérain.
E. et J. de Goncourt, Journal,déc. 1864, p. 111. 2. Qui a un caractère hermétique : 11. Donc Kant est à un degré déjà assez arriéré. Donc, il n'y a point opportunité. Quant à sa terminologie, il ne fallait pas le traduire dans sa langue algébrique, mais dans la langue accessible à tous dont se sert Pascal, dont se sert Malebranche dans le traité de l'Entendement pur et de sa Nature des idées, même matière que Kant.
A. de Vigny, Le Journal d'un poète,1847, p. 1253. Prononc. : [alʒebʀik]. − Rem. Littré transcrit le mot avec [ε] ouvert. Fouché Prononc. 1959, pp. 68-69 fait la rem. suiv. : ,,Si au cours de la dérivation ou de la conjugaison, un [ε] accentué [écrit è] devient inaccentué (...), l'[ε] accentué devenu inaccentué passe à [e], qui s'écrit é``. Ainsi : lèpre [lεpʀ
̥], mais lépreux [lepʀø]; mètre [mεtʀ
̥], mais métrer [metʀe], métrage [metʀa:ʒ]; algèbre [alʒ
εbʀ
̥], mais algébrique [alʒ
εbʀik]; ténèbres [tenεbʀ
̥], mais ténébreux [tenebʀø]. Étymol. ET HIST. − Algébrique. 1740 « qui a rapport à l'algèbre » (Trév. : Algébraïque. Qui appartient à l'Algèbre. Les notes ou caractères algébriques, sont ceux dont on a fait mention ci-dessus). A remplacé algébraïque (1585-1751).
Dér. de algèbre*; suff. -ique*.
− Algébricité. 1964, supra ex. 6. STAT. − Fréq. abs. litt. : 119. BBG. − Bél. 1957. − Chamb. 1970. − Lav. Diffic. 1846. − Uv.-Chapman 1956. |