| ALBE, adj. et subst. A.− Adj. et subst., poét., rare. [Gén. antéposé] 1. Emploi adj. a) [Se rapporte à un inanimé concr.] De couleur blanche ou claire : 1. Voici [prenant part à l'un des concerts Lamoureux] (...) Cortot, un jeune à qui Diémer enseigne « à lécher de ses albes doigts la crème des touches d'un Pleyel » ...
Willy, Entre deux airs, par l'ouvreuse du cirque d'été,1895, p. 207. 2. Je veux parsemer d'albes fleurs de lys
Ce péplum d'or de Volupté [ta blonde chevelure]
X. Privas, Chansons vécues,1903, p. 62. 3. ... nous arrivâmes ainsi au « gardiennage », petit carré de mer où l'on tient en garde les petits yachts de plaisance, les petits bateaux bien propres d'acajou ciré, les petits navires d'une toilette irréprochable. Mon gamin les considérait d'un œil connaisseur et prenait à cette inspection un vif plaisir. Une embarcation jolie, toute sa voile dehors − elle n'en avait qu'une − accosta. Cette voile était immaculée, gonflait son albe triangle, éclatant dans le radieux soleil.
G. Leroux, Le Parfum de la Dame en noir,1908, p. 24. b) Au fig. [Se rapporte à un inanimé abstr.] Qui a la pureté, la limpidité du blanc : 4. ... Palmiers de corail blanc aux résines d'acier!
Lys marmoréens à sourires hystériques,
Qui vous mettez à débiter d'albes musiques
Tous les cent ans, quand vous allez avoir du lait!
J. Laforgue, L'Imitation de Notre-Dame la Lune, Climat, faune, flore de la lune, 1886, p. 217. 5. Je ne rencontrerai donc pas sur la roue universelle la Vérité blanche et pure, l'albe et candide Vérité que je cherche.
A. France, Le Puits de Sainte Claire,1895, p. 221. 6. La voilà [Pierrette trépassée] cachée
Sous l'albe recueil
De ces fleurs de deuil!
C'est un doux cercueil
Que cette jonchée
X. Privas, La Chanson sentimentale,1906, p. 157. 2. Emploi subst. Blancheur, pureté : 7. L'andante qui finit pare l'albe de l'Ève. (G. Kahn, Palais nomades).
Plowert1888. B.− Subst. masc., vx. Bois de sapin et plus généralement bois blanc. Stylistique − Ce latinisme rare n'appartient qu'à la lang. recherchée ou poét. (ex. 8). S'il a pu connaître une certaine vitalité vers la fin du xixes., il a été vite qualifié de « quelque peu enfantin » et disparaît progressivement du vocab. du xxes. :
8. ... il était bon genre d'écrire, en 1888, (...) albe flambeau lunaire pour blanche lune.
L. Larchey, Dict. historique d'argot, nouv. suppl., 1889, p. 13.
9. Les recherches de mot quelque peu enfantines : albe neige, ultime lueur (...) taches imperceptibles, dont un esprit attentif et malveillant aurait pu incriminer les chansons juvéniles de Xavier Privas [ont aujourd'hui disparu]. [X. Privas, par L. Tailhade].
X. Privas, La Chanson sentimentale, 1906, p. 15.Rem. Attesté ds Ac. Compl. 1842, Lar. 19e, Nouv. Lar. ill., Lar. encyclop. Prononc. − 1. Forme phon. : [alb]. Pour Rouss.-Lacl. 1927, p. 115, ,,les voyelles toniques suivies, dans la prononciation, de deux consonnes, dont la seconde n'est ni l ni r, sont moyennes``. 2. Dér. et composés : albation, albedo, albène, albescent, albeur, albicorne, albification, albinisme, albique, albite, albivère, albugine, albugo, albumen, déalbation. Étymol. ET HIST. − 1. 1271 Subst. « bois blanc, aubier » (Livre des mestiers, 1repart., LXXIX, 5, Bonnardot ds Gdf. : Se li mestre qui gardent les mestier truevent arçon mauves, c'est a savoir aube, il doivent le aube faire tailler hors netement). − vx lang. d'apr. Ac. Compl. 1842; 2. a) xiiies. adj. « blanc » (Beroul, Tristan, éd. Muret, 872 ds T.-L. : espines aubes et noires), attest. isolée; 1895 « id. » emploi poétique (supra, ex. 1); b) 1887 subst. « blancheur » (Plowert 1888, supra, ex. 7), attest. isolée.
Empr. au lat. albus, empl. fréquemment pour qualifier certains arbres (TLL s.v., 1504, 25) en partic. le peuplier (populus); emploi subst. en lat. médiév. (synon. de albedo), ca 1160, Metellus Buc., 4, 19 ds Mittellat. W. s.v., 434, 67 : bucula ... maculis insignis et albeo ac niveo miscens orbis nigros quasi carbo. STAT. − Fréq. abs. litt. : 2. BBG. − Timm. 1892, p. 249. |