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AGNOSTIQUE, adj. et subst.
PHILOS., THÉOL.
A.− Emploi adj. [En parlant d'une pers., d'une attitude spirituelle] Qui fait profession d'agnosticisme (cf. agnosticisme) :
1. Quoi qu'on prétende, l'ordre social ne trouve pas en lui-même sa raison d'être et l'homme qui « a reçu l'intelligence et la volonté en partage ne subit pas sa loi passivement; il y découvre la fin vers laquelle est ordonnée toute son activité, celle qu'il ne peut pas ne point poursuivre sans cesser d'être homme et l'ordre social, complément, couronnement de son individualité, il l'aperçoit voulu par cette volonté éternelle de qui tout procède... etc. » Et voilà, du même coup, qui nous montre la notion insuffisante que les doctrinaires agnostiques de l'ordre se font de la civilisation et de la culture, dont ils veulent rétablir la valeur d'« appétit naturel », en se passant de l'absolu. H. Massis, Jugements,t. 1, 1923, p. 218.
2. Le parti pris agnostique, positiviste, matérialiste et minimiste appliqué à l'écriture a abouti à des résultats décevants et grotesques. Il faut avoir lu quelques livres de critique bibliste pour se rendre compte à quel degré de folie, de sottise, d'absurdité, d'arbitraire, la vanité humaine aiguillonnée par le Baal des mouches a pu pousser des âmes de pédants. C'est la teigne qui croit étudier une tapisserie en en dévorant à la fois la forme, la couleur et la substance. P. Claudel, Un Poète regarde la Croix,1938, p. 16.
3. Quand il eut arrangé son menu avec le maître d'hôtel, il parut vouloir s'excuser. « Mais, mon cher Gaëtan, c'est tout naturel! moi, qui suis agnostique, je vais bien chaque dimanche à la chapelle anglaise, parce que c'est la chose-convenable. Que vous observiez certaines formes religieuses, je n'y vois pas d'inconvénients, d'autant plus que cela nous distingue de ces vulgariens bruyants, dont la vulgarité justement consiste à s'abstenir de la chose-convenable. V. Larbaud, A. O. Barnabooth,1913, p. 269.
4. Ah, ma raison dit bien que non, et non, et mille fois non. Mais mon éducation... je suis très malheureux, Archibaldo, je vous le jure. Oui, c'est entendu, je ne crois pas. Mais je doute, et mon doute est en faveur du mythe. Voyez comme je vous ai menti; par exemple, quand je vous ai dit que j'étais scandalisé parce que l'Angiola, de Naples, mettait ses images de piété sous nos oreillers. J'ai dit ça parce que j'ai pensé qu'il fallait ainsi vous présenter la chose, à vous protestant de nom et agnostique de fait. V. Larbaud, A. O. Barnabooth,1913p. 270.
P. ext., lang. moins soutenue. Parfois synon. (contesté) de athé ou de libre-penseur :
5. ... il était agnostique, comme on dit dans le monde, pour ne point employer le terme odieux du libre penseur. A. France, La Révolte des anges,1914, p. 4.
6. Le néo-thomisme traduit un besoin d'ordre intérieur et d'oubli plutôt que de foi ou de sacrifice. Quant à la position spirituelle de l'Action Française, on l'a définie un catholicisme anti-chrétien, une religion d'athées. Assez plaisamment Gyp a écrit : « un catholicisme agnostique ». Construction purement dialectique dans l'ordre privé, politique dans l'ordre social. J.-R. Bloch, Destin du Siècle,1931, pp. 175-176.
7. [Angus à Wilfred] : − ... Je suis devenu tout à fait agnostique. − Tu veux dire que tu es athée, en somme? fit Milfred d'un air informé. Angus tira une cigarette de sa poche. − C'est beaucoup plus nuancé, dit-il en faisant claquer un briquet d'argent. Je ne nie rien. D'un autre côté, je n'affirme rien. Tu saisis? J. Green, Chaque homme dans sa nuit,1960, p. 17.
B.− Emploi subst. Partisan de l'agnosticisme :
8. Qu'il n'y ait pas de dernier mot des choses ou tout au moins que ce dernier mot ne puisse sans doute prendre forme de vérité et que la valeur fondamentale de la vie religieuse consiste précisément en ce qu'elle transcende en quelque manière toute énonciation à visée objective portant sur l'univers − ce sont là, il me semble, les idées directrices de la première partie de ce journal. On commettrait d'ailleurs une erreur en voyant là une forme détournée d'agnosticisme. L'agnostique reste en deçà d'une certaine vérité qui demeure seulement pour lui informulable parce que les conditions auxquelles la pensée humaine est soumise l'empêchent de briser jamais le cercle des phénomènes. G. Marcel, Journal métaphysique,1914-1923, p. X.
9. − « Non, Monseigneur. je vous ai dit tout à l'heure que j'étais catholique, mais de baptême seulement aujourd'hui. En réalité, je suis ce que les positivistes appellent un agnostique. » − « Qu'entendez-vous exactement par ce terme? » demanda le prélat. − « Que nous ne pouvons connaître ni les causes, ni les substances, mais seulement les phénomènes. » P. Bourget, Nos actes nous suivent,1926, p. 63.
10. Il n'y a pas cent ans, au moment où croyants et agnostiques étaient jetés en désarroi par le brusque essor de la science et de l'industrie, les mots « moderne », « scientifique », « raison », terrorisaient aussi sûrement que l'apparition d'un dieu. E. Mounier, Traité du caractère,1946, p. 668.
11. Autour de nous, les progrès « naturels » dont s'alimente la sainteté de chaque siècle nouveau sont trop souvent abandonnés aux enfants du siècle, c'est-à-dire à des agnostiques ou à des impies. Inconsciemment ou involontairement, sans doute, ceux-ci collaborent au royaume de Dieu et à l'achèvement des élus : leurs efforts, dépassant ou corrigeant des intentions inachevées ou mauvaises, sont récupérés par celui « dont l'énergie est capable de tout se soumettre ». P. Teilhard de Chardin, Le Milieu divin,1955, p. 58.
Rem. Dans la lang. relig. agnostique est (quasi-) synon. de incroyant (ex. 10, où il s'oppose à croyants).
Prononc. : [agnɔstik]. Le groupe gn se prononce [gn] dans agnat, agnus-castus, cognition, diagnostic, gnome, gnose, ignition, inexpugnable, magnat, prognathe, pugnacité, stagnation et les mots apparentés (cf. Rouss.-Lacl. 1927, p. 162; Fouché Prononc. 1959, p. 341; Kamm. 1964, p. 187).
Étymol. ET HIST. I.− Adj. 1884 « qui professe l'agnosticisme » (J. Claretie, La Vie de Paris, 63 [1erfévrier] ds Quem. t. 1 1959 : Presque toute l'Angleterre pensante, l'Angleterre cultivée est agnosticiste ou agnostic, et systématiquement ne veut rien savoir, rejette, par principe, le tourment de douter). II.− Subst. [1909] « partisan de l'agnosticisme » (Le Lar. pour tous : Agnostique [...] Se dit de ceux qui professent l'agnosticisme). Empr. à l'angl. agnostic, dér. de gnostic (hist. relig., dep. 1585 ds NED; fr. gnostique*) par préf. a- privatif, sur le modèle du gr. α ́ γ ν ω σ τ ο ς « inconnu », ο ̔ Α γ ν ω σ τ ο ς « le dieu inconnu (à Athènes) ». Terme forgé par Thomas Huxley en 1869 lors de la fondation de la Metaphysical Society, (Collected Essays, V, 239, 309 ds ODEE 1967) en réf. à l'allus. de St Paul à l'autel dédié à Athènes au dieu inconnu (Α γ ν ω ́ σ τ ω θ ε ω ̃; Actes, XVII, 23). − Mack. t. 1 1939, p. 242.
STAT. − Fréq. abs. litt. : 22.
BBG. − Bél. 1957. − Foulq.-St-Jean 1962. − Lal. 1968. − Miq. 1967. − Ros.-Ioud. 1955.