| AGIR, verbe. I.− Emploi verbal A.− Emplois intrans. 1. [Le suj. exprimé ou non, est un animé, une pers. ou fonction de la pers. hum.] Pouvoir propre à l'homme de transformer ce qui est, de s'exprimer par des actes : 1. Dès lors votre doctrine me paraît enfin remplir toutes les conditions essentielles de la religion, telle que vous l'avez définie, puisqu'elle convient également aux trois grandes parties de notre existence, aimer, penser, agir, qui ne furent jamais autant combinées.
A. Comte, Catéchisme positiviste,1852, p. 60. 2. Vouloir, agir, opérer, produire : ainsi sommes-nous peu à peu entraînés vers des développements peut-être imprévus, mais sûrement conformes à l'aspiration profonde du vouloir primitif. L'expression de l'acte, si imperceptible qu'elle soit à l'origine, est le germe d'une immense croissance.
M. Blondel, L'Action,1893, p. 211. 3. Attelés, comme des bœufs de labour, à une lourde tâche, nous sentons le jeu de nos muscles et de nos articulations, le poids de la charrue et la résistance du sol : agir et se savoir agir, entrer en contact avec la réalité et même la vivre, mais dans la mesure seulement où elle intéresse l'
œuvre qui s'accomplit et le sillon qui se creuse, voilà la fonction de l'intelligence humaine.
H. Bergson, L'Évolution créatrice,1907, p. 192. 4. Agir, nous semble-t-il, c'est émettre une certaine quantité de force, c'est surtout extérioriser. Une telle définition est liée à la représentation instrumentaliste et implique les mêmes contradictions. Mais elle a ses racines dans la nature même de la vie personnelle; d'où ce qu'il y a en elle d'inévitable. On rejoindrait, en approfondissant ceci, l'idée de la volonté comme détente que j'ai cherché autrefois à dégager.
G. Marcel, Journal métaphysique,1920, p. 251. 5. Ainsi cette intelligence trouve son dernier mot dans le déni. Loin de voir là je ne sais quelle « excroissance démesurée de la faculté compréhensive », nous sommes bien plutôt disposés à n'y voir qu'une sorte de rétrécissement. C'est faire de l'intelligence un usage contre nature que d'en user seulement pour détruire et pour nier. D'elle-même elle aspire à affirmer, c'est-à-dire à être. Elle nous est donnée pour connaître, pour agir, pour éclairer nos sentiments, et non point pour les obscurcir et nous éloigner du réel.
H. Massis, Jugements,t. 1, 1923, p. 167. 6. Juger, décider, agir, voilà les fonctions de l'âme. « Mais, dit l'homme libre, l'âme n'est peut-être rien autre chose qu'une santé, un équilibre, une force du corps. Rien ne prouve que ce qui juge et veut soit séparable, et doive survivre. Vous nous jetez dans d'autres peurs. » Aussi n'ai-je rien annoncé de pareil, ...
Alain, Propos,1924, p. 612. 7. L'être humain ne se rencontre nulle part dans la nature. Nous n'y observons que l'individu. Celui-ci se distingue de l'être humain en ce qu'il est une réalité concrète. C'est lui qui agit, aime, souffre, combat, meurt. Au contraire, l'être humain est une idée platonicienne. Il vit dans notre esprit et dans nos livres. Il se compose des abstractions étudiées par les physiologistes, les psychologistes, les sociologues. Ses caractères sont des universaux.
A. Carrel, L'Homme, cet inconnu,1935, p. 283. 8. Tout ce qui travaille, crée, agit, souffre, fermente et couve dans la nuit de notre âme inconsciente, − tout ce qui s'y manifeste, d'une part dans la vie de notre organisme, d'autre part dans les influences que nous recevons des autres âmes et de l'univers entier, − ... tout cela monte, avec un accent tout particulier, de la nuit inconsciente à la lumière de la vie consciente; et ce chant, cette merveilleuse confidence de l'inconscient au conscient, nous l'appelons : sentiment.
A. Béguin, L'Âme romantique et le rêve,1939, p. 137. 9. Il est d'une part le présent de la présence irrécusable, pleine, d'un monde déjà-là, par delà toute attente, toute exigence, toute construction idéale. Mais, d'autre part, dans ce présent indéductible, j'œuvre, j'opère des présences, je suis auteur d'événements : j'agis.
P. Ricœur, Philosophie de la volonté,1949, p. 191. Rem. a) Synon. créer, fabriquer, œuvrer, opérer, produire, travailler; b) Anton. être (au sens statique); c) Autres assoc. paradigm. fréq. (gén. rel. aux autres catégories de la vie hum.) aimer, connaître, juger, penser, sentir, souffrir, vouloir. a) En partic. [En liaison avec des éléments contextuels mettant en relief tel aspect de l'action.] − Sortir de l'inaction, se mettre à l'œuvre : 10. 14 septembre fini le mémoire, que je crois bon. Il a fait un très bon effet, m'a dit Juliette. Je me suis mis en tête une nouvelle tentative de carrière aventureuse. Nous verrons. Je voudrais à tout prix agir. Je suis las d'écrire.
B. Constant, Journaux intimes,sept. 1814, p. 409. 11. Jamais un banquier ne bavarde : il agit, pense, médite, écoute et pèse. Ainsi, pour avoir bien l'air d'un banquier, ne dis rien, ou dis des choses insignifiantes. Éteins ton œil égrillard et rends-le grave, au risque de le rendre bête.
H. de Balzac, César Birotteau,1837, p. 168. 12. george. − Fallait-il imprimer une tache à mon nom? m. mercier. − Il fallait... il fallait... on ne va pas si vite, que diable! on prend conseil, et l'on agit ensuite.
F. Ponsard, L'Honneur et l'argent,1853, II, 10, p. 53. 13. La médecine d'observation contemple, la médecine expérimentale agit. On peut comme le grand prêtre dire : « La foi qui n'agit point, est-ce une foi sincère? La médecine inerte, est-ce la médecine? » Non, la vraie médecine est celle qui agit pour arrêter le mal.
C. Bernard, Principes de médecine expérimentale,1878, p. 18. 14. (...) Cristi, ce n'est pas le moment de s'endormir; agissons. »
L. Cladel, Ompdrailles,1879, p. 244. 15. Antoine vacilla, et, cédant à une seconde de panique, descendit précipitamment quelques marches. Il respirait avec effort : une tendresse, surgie des profondeurs, se dilatait soudain dans sa poitrine, l'étouffait. Et tous ces inconnus... Que faire? Partir? Il se ressaisit : le goût de la lutte le poussait en avant : ne pas remettre, agir.
R. Martin du Gard, Les Thibault,La Sorellina, 1928, p. 1199. 16. Au retour d'Allemagne, il ne peut plus agir; il ratiocine. Je tiens la métaphysique allemande pour responsable de ses irrésolutions. De ses maîtres de là-bas, son esprit a pris la clef des champs de la spéculation abstraite, qui, si spécieusement, au champ de l'action se superpose. Et cette petite question si simple se charge de signification et d'angoisse : « Oh! prince Hamlet, qu'alliez-vous faire à Wittenberg? »
A. Gide, Journal,1931, p. 1063. 17. Il écrasa sa cigarette dans le cendrier, et s'étira. « Voilà le docteur Thibault qui reparaît », fit-il en souriant. « Eh bien! Vivre, c'est agir, après tout! Ça n'est pas philosopher... Méditer sur la vie? À quoi bon? La vie, on sait bien ce que c'est : un amalgame saugrenu de moments merveilleux et d'emmerdements! La cause est entendue, une fois pour toutes... vivre, ça n'est pas remettre toujours tout en question... »
R. Martin du Gard, Les Thibault,L'Été 1914, 1936, p. 146. 18. À force d'analyser les motifs plus ou moins compliqués de Pierre et de Paul, nous sommes en train de crever; Freud nous emmerde avec ses ambivalences (c'est un mot qui avait fait fortune entre nous). À force de raffiner sur l'ambiguïté, nous oublions l'essentiel, qui est d'agir...
R. Abellio, Heureux les pacifiques,1946, p. 33. Rem. Anton. s'attarder (sur des détails), contempler, délibérer, méditer, penser, philosopher, ratiociner, réfléchir, rêver, spéculer (cf. action). − Se remuer, se dépenser : 19. ... quand on est agité, pressé d'agir à chaque instant, que la vie est irrégulière, qu'il n'y a aucune suite dans les occupations et les idées qui la partagent, qu'on voudrait toujours arriver au temps qui n'est pas encore, qu'on précipite tout par impatience, qu'on gaspille le temps, ce temps semble s'être traîné avec une inconcevable lenteur, quand on mesure par la pensée l'intervalle entre deux points.
Maine de Biran, Journal,1816, p. 230. 20. ... et moi, monsieur, moi son père, croyez-vous que ça m'amuse? Que voulez-vous que nous pensions, que nous devenions? Pouvons-nous vivre comme ça? Où le chercher? Voyons, dites, parlez!... Agissez! morbleu! retrouvez-le! c'est votre affaire. S'il vous est égal de savoir où est votre femme, moi je veux savoir où est mon fils, et de suite encore!... Ah! vous vous en mêlerez! vous nous le rendrez! j'irai partout, entendez-vous bien? Je remuerai tout, j'ai des amis, des protections, Morel va nous guider, j'irai chez le ministre, chez le roi s'il le faut, je mettrai dans les journaux...
G. Flaubert, La Première éducation sentimentale,1845, pp. 190-191. 21. Femmes, enfants, sont là penchés sur l'eau sombre, le dos dans le soleil, leurs haïks retroussés au-dessus du genou, leur voile attaché par derrière, emplissant et vidant les écuelles, faisant ruisseler les entonnoirs, ficelant les outres gonflées. Tout ce monde grouille, agit, s'empresse; mais avec si peu de paroles, que, pour la plupart, on les dirait muets.
E. Fromentin, Un Été dans le Sahara,1857, p. 151. 22. Évidemment non, ce n'est pas la question que je me pose. Mais je ne veux rien expliquer.
« Il concluait, me dit l'autodidacte d'un ton consolant en faveur de l'optimisme volontaire. La vie a un sens si l'on veut bien lui en donner un. Il faut d'abord agir, se jeter dans une entreprise. Si ensuite l'on réfléchit, le sort en est jeté, on est engagé. Je ne sais ce que vous en pensez, monsieur? »
« Rien », dis-je.
Ou plutôt je pense que c'est précisément l'espèce de mensonge que se font perpétuellement le commis-voyageur, les deux jeunes gens et le monsieur aux cheveux blancs.
J.-P. Sartre, La Nausée,1938, p. 145. 23. Toute formation spirituelle qui jette l'introverti hors de lui lui est bonne. « Se perdre pour se trouver » doit être sa formule de vie. Il lui faut agir, se dévouer, créer, s'oublier dans les choses et parmi les hommes.
E. Mounier, Traité du caractère,1946, p. 335. 24. annenkov. − Je suis heureux, Stepan, que le parti t'ai envoyé ici.
stepan. − Il le fallait. J'étouffais. Agir, agir enfin ... (il regarde Annenkov.) Nous le tuerons, n'est-ce pas?
annenkov. − J'en suis sûr.
A. Camus, Les Justes,1950, I, p. 309. 25. Le jour où il prononça le mot de mariage, je fis longuement le bilan de ce qui nous séparait : « Jouir de belles choses lui suffit; il accepte le luxe et la vie facile, il aime le bonheur. Moi, il me faut une vie dévorante. J'ai besoin d'agir, de me dépenser, de réaliser : il me faut un but à atteindre, des difficultés à vaincre, une œuvre à accomplir. Je ne suis pas faite pour le luxe. Jamais je ne pourrais me satisfaire de ce qui le satisfait. »
S. de Beauvoir, Mémoires d'une jeune fille rangée,1958, p. 216. − Se conduire, se comporter. ♦ [Avec un compl. indiquant la pers. avec laquelle est faite l'action] Agir avec, envers qqn : 26. Quel prix peut-on d'ailleurs attacher aux passagères affections d'un pareil être? Cela vaut-il la peine de mettre un masque et de se dégrader jusqu'à introduire de petits et vils calculs dans le plus noble et le plus haut des sentiments? Ce ne sera jamais ainsi que j'agirai avec toi, Adèle; je t'aime avec fierté parce que je t'aime avec candeur; je crois qu'un détour nous abaisserait tous deux et que ton cœur est assez grand pour comprendre un grand amour. Réponds avec cette confiance et cette franchise à la question que je viens de te faire. Tout dépend de là.
V. Hugo, Lettres à la fiancée,1821, p. 59. 27. Quoique M. de Montmorency me fût peu favorable, il agit envers moi (je l'ai dit) selon l'impulsion de son sang et de sa vertu : en prenant congé de l'empereur, il l'invita à moins s'effrayer de ma personne.
F.-R. de Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 3, 1848, p. 160. ♦ [Avec un compl. précisant la manière dont se comporte le suj.] Agir en + subst. inactualisé; agir comme + subst. actualisé par l'art. un ou par un pron. (tel, etc.) : 28. − Vous ne pouvez donc vous résoudre à quitter le canton qui vous a vu naître? − Tous mes amis ont disparu de cette terre : les hommes qui les ont chassés sont violens et cruels; ils parlent de liberté, mais ils agissent en tyrans : oh! sans doute, je quitterois sans peine des lieux que je ne reconnois plus!...
Mmede Genlis, Les Chevaliers du cygne,t. 1, 1795, p. 196. 29. Le lendemain, Leuwen agit absolument comme un fou. Les lieutenants, ses camarades, redevenus méchants, se disaient : « Ce beau dandy de Paris n'est pas accoutumé au champagne, il est encore détraqué d'hier; ... »
Stendhal, Lucien Leuwen,t. 2, 1836, p. 8. 30. « ... cette petite-fille de Jean Croissy est la dernière personne au monde que vous puissiez épouser. Vous seriez donc très coupable de troubler son cœur et de laisser naître et grandir dans le vôtre une passion sans issue. Vous êtes un honnête homme. Votre présence chez moi le prouve. Agissez en honnête homme. »
P. Bourget, Nos actes nous suivent,1926, p. 84. 31. − Quand on y pense, dit un jour Rosenthal, cette dénonciation ne nous a paru étrange que parce que nous pensions au caractère phénoménal de Pluvinage, mais il y a sans doute beaucoup à dire sur son caractère intelligible. Qui n'est pas double? Laforgue trouva cette parade de foire révoltante et dit à son ami : − Pas de kantisme, je t'en prie! Peut-être avons-nous agi comme des salauds!...
P. Nizan, La Conspiration,1938, p. 180. 32. D'un bond de fauve, il [l'évêque] fut sur moi, l'index braqué : − Vous m'avez promis obéissance ainsi qu'à mes successeurs. Vous êtes mon vicaire général et vous agirez comme tel!
A. Billy, Introïbo,1939, p. 160. Rem. Parfois, dans des syntagmes du type agir comme (qqn), agir ainsi, le sens du verbe s'affaiblit jusqu'à n'être plus que le substitut (comparable à l'emploi class. du verbe faire) d'un verbe ou d'un syntagme déjà exprimé dont on veut éviter la répét. : 33. Apprenez donc (...) que cette coutume vient des Romains, qui divinisaient le commencement de l'année. En sorte qu'agir comme eux est se faire idolâtre.
Lar. Lang. fr.1971. − Exercer une influence. Agir sur qqn (plus rarement sur qqc.).(Cf. infra 2) : 34. Additionner, comme je disais tout à l'heure, toutes les générations d'hommes les unes au bout des autres, toutes les races, tous les peuples, ne donnera qu'un chiffre, et ne donnera pas l'humanité. Considérer que les hommes agissent et réagissent les uns sur les autres, et par suite voir, dans ces générations qui s'ajoutent les unes aux autres, comme une sorte d'être abstrait qui croît et se développe, cela est vrai et juste; mais pourtant où est l'être, l'être véritable? D'être véritable, je ne vois que les hommes, les individus, les êtres particuliers; je ne vois rien qui ait vie, sentiment, conscience, intelligence, responsabilité, ...
P. Leroux, De l'Humanité,t. 1, 1840, p. 251. 35. En effet, si le médecin considérait l'organisme comme un tout indivisible et qu'il voulût agir sur lui, il verrait qu'il n'agit pas constamment et qu'il y a même d'assez nombreuses exceptions.
C. Bernard, Principes de médecine expérimentale,1878, p. 279. 36. Il est aisé de comprendre pourquoi « la matière » − qui n'est qu'un mécanisme spécial entre beaucoup d'autres − a pu paraître si facilement à l'homme la réalité par excellence. Elle se présente comme d'elle-même à la connaissance spontanée. L'homme s'y heurte, la touche, la voit, il agit sur elle, et elle agit sur lui, elle est « le familier » par excellence.
R. Ruyer, Esquisse d'une philosophie de la structure,1930, p. 43. 37. L'homme, aux yeux de Marx, n'est pas un produit passif du milieu, il est actif, il agit sur le milieu pour le transformer, − mais « dans le sens fixé par l'évolution économique et sociale ». Voilà ce qui importe ici.
J. Maritain, Humanisme intégral,1936, p. 141. 38. La réalité n'est pas figée, dit Dubreuilh. Elle a un avenir, des possibilités. Seulement pour agir sur elle et même pour la penser, il faut s'installer en elle et non s'amuser à des petits rêves.
S. de Beauvoir, Les Mandarins,1954, p. 554. 39. ... l'Occident s'est voulu exclusivement utilitaire, tout entier tourné vers la possession du monde extérieur. Il en est obsédé; par la science, la recherche des lois physiques, il veut agir sur lui, le domestiquer; il entend faire de lui l'instrument de ses désirs, être conquérant de l'univers et de ses secrets en même temps que d'espaces et de peuples!
R. Huyghe, Dialogue avec le visible,1955, pp. 30-31. ♦ Agir auprès de qqn.Essayer par des démarches, etc., d'user de son influence sur quelqu'un : 40. Il n'est question que de faire agir nos amis en France auprès des deux grands philosophes...
C. Desmoulins, Le Vieux Cordelier,1793-1794, p. 65. − Déployer son énergie. Agir contre qqn : 41. De ces abominables forfaits, si quelques élus aujourd'hui sont avertis, il nous est indispensable, madame, de compter sur leur discrétion parfaite, sur leur pleine et entière soumission à l'indication qui leur sera donnée en temps opportun. Agir sans nous, c'est agir contre nous. Et, en plus de la désapprobation ecclésiastique qui pourra entraîner... Qu'à cela ne tienne : l'excommunication, toute initiative individuelle se heurtera aux démentis catégoriques et formels de notre parti. Il s'agit ici, madame, d'une croisade; oui, mais d'une croisade cachée.
A. Gide, Les Caves du Vatican,1914, p. 752. 42. mariana. − Tout ce qui est fait contre lui, il y aide. Et vous le prétendez égoïste!
bernal. − Il agit contre soi, parce qu'il y trouve son plaisir.
H. de Montherlant, Le Maître de Santiago,1947, II, 3, p. 638. 43. Tout cela n'était pas sans ruse. Libre aux pasteurs de se conduire avec lui comme des prêtres! Mais ne devaient-ils pas reconnaître en lui la tradition protestante, la voix même des fondateurs : « Rétracter quoi que ce soit, je ne puis ni ne veux, avait dit Luther, ... car agir contre sa conscience, ce n'est ni sûr ni honnête. »
J. Guéhenno, Jean-Jacques,Grandeur et misère d'un esprit, prol., 1952, p. 126. Rem. L'expr. semble d'orig. jur. Cf. infra et Ac. 1798-1932 : ,,Il a été obligé d'agir contre son tuteur.`` b) DROIT − Agir en justice. ,,Prendre l'initiative de soumettre une prétention à un tribunal. On peut agir soit par voie de requête, sans appeler aucun adversaire, soit, au contraire, par voie d'assignation. Celui qui agit est appelé demandeur, celui contre qui on agit est appelé défendeur. Agir ou défendre, c'est ester en justice.`` (Cap. 1936). Agir criminellement, civilement (Ac. 1798-1932). Rem. Attesté aussi ds Ac. 1798-1932, Besch. 1845, Lar. 19e, Littré, Bél. 1957 Rob., Bar 1960, Pt Rob.; cf. intenter une action. − Agir d'office. Agir sans être requis, par le seul devoir de sa charge. Rem. Attesté ds Ac. 1835, Besch. 1845, Ac. 1878-1932. 2. [Le suj. désigne un inanimé dont l'activité est comparable à celle de l'homme] Produire un effet, un résultat : 44. [Jordan] : − (...) L'univers n'est-il pas un immense atelier où l'on ne chôme jamais, où les infiniment petits font chaque jour un labeur géant, où la matière agit, fabrique, enfante sans relâche...
É. Zola, Travail,t. 1, 1901, p. 195. 45. le docteur (à voix basse). − « Le bromure agit, la nuit va être plus calme. » Lourdement MmeBarois se lève et, sur la pointe des pieds, s'approche de la porte : appuyée au vantail, le masque inerte et douloureux, les paupières à demi baissées, elle regarde fixement dans la chambre éclairée.
R. Martin du Gard, Jean Barois,1913, p. 209. 46. Si l'on montre de la viande à un chien adulte, le flux de salive se produit encore; l'aliment agit à distance, la sensation visuelle suffit à déclencher le réflexe. Il est d'ailleurs de connaissance courante que le seul aspect d'un plat appétissant fait venir l'eau à la bouche.
J. Rostand, La Vie et ses problèmes,1939, p. 89. 47. Quand il s'agit de littérature ou de musique, nous n'avons aucune raison d'espérer que la postérité en jugera mieux que les contemporains. Dans un siècle, les raisons qui nous interdisent l'accès d'une œuvre sublime risquent de jouer encore et La Veuve joyeuse continuera d'enchanter les foules futures. Il en va tout autrement de la politique. Ici, le temps agit dans le sens de la vérité parce qu'il dissipe la fumée des batailles partisanes : la poussière du combat retombe, les passions s'apaisent, les faits restent.
F. Mauriac, Le Bâillon dénoué,1945, p. 487. − Faire, laisser agir qqc. : 48. Laissons agir mes lettres, et le temps... Cerise regarda sir Williams avec enthousiasme et lui dit : − Ah! comment ne vous aimerait-elle pas, rien qu'à vous voir?
P.-A. Ponson du Terrail, Rocambole,t. 1, L'Héritage mystérieux, 1859, p. 387. 49. ... la science est une règle d'action qui réussit, au moins généralement et, j'ajoute, tandis que la règle contraire n'aurait pas réussi. Si je dis, pour faire de l'hydrogène, faites agir un acide sur du zinc, je formule une règle qui réussit : j'aurais pu dire, faites agir de l'eau distillée sur de l'or; cela aurait été aussi une règle, seulement elle n'aurait pas réussi.
H. Poincaré, La Valeur de la science,1905, pp. 218-219. − Agir sur qqc. ou qqn (cf. supra 1 a).Exercer une influence : 50. Il me semble impossible de séparer le besoin d'un perfectionnement social du désir de s'améliorer soi-même; et, pour me servir du titre de l'ouvrage de Bossuet, dans un sens différent de celui qu'il lui donne, la politique est sacrée, parce qu'elle renferme tous les mobiles qui agissent sur les hommes en masse, et les rapprochent ou les éloignent de la vertu.
G. de Staël, Considérations sur les principaux événements de la Révolution française,t. 2, 1817, p. 280. 51. La solitude agit toujours ainsi sur l'intelligence; elle développe la poésie qui est toujours dans l'homme; tout pâtre est rêveur. J'ai donc écrit ce conte bleu dans le lieu même, caché dans le ravin-fossé, assis sur un bloc qui a été un rocher jadis, qui a été une tour au douzième siècle et qui est redevenu un rocher,...
V. Hugo, Le Rhin,1842, p. 186. 52. ... chaque jour amène des générations nouvelles, chaque fait accompli enfante un droit récent qui combat un ancien droit, chaque heure commence une légitimité : le temps a deux pouvoirs; d'une main il renverse, de l'autre il édifie. « Enfin le temps agit sur les esprits par cela seul qu'il marche : on se sépare violemment du pouvoir; on l'attaque; on le boude, puis la lassitude survient; le succès réconcilie à sa cause : bientôt il ne reste plus en dehors que quelques âmes élevées dont la persévérance met mal à l'aise ceux qui ont failli... »
F.-R. de Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe, t. 4, 1848, p. 319. 53. 23 mardi. Je lis ta lettre et je suis pénétré de ce charme ravissant, de cette profonde attraction; elle agit sur moi de part en part. La douce tendresse de tes refus briserait mes désirs les plus impétueux; d'autre part, elle les augmente... Un parfum angélique de sagesse et d'amour est dans toute cette lettre, et j'en suis enivré.
J. Michelet, Journal,janv. 1849, p. 12. 54. Il est possible que deux poisons ne puissent pas agir en même temps sur le même système nerveux. Dans certains états près de l'agonie, les individus ne sont plus susceptibles de réactions; ils peuvent avoir impunément des perforations intestinales sans péritonite ni douleur (la section du sympathique ne fait plus rien dans les effets calorifiques chez ces animaux près de mourir...).
C. Bernard, Principes de médecine expérimentale,1878, p. 234. Rem. Syntagmes fréq. 1. Subst. + verbe : besoin d'agir (R. Rolland, Beethoven, t. 1, 1928, p. 163); difficulté d'agir (V. de Jouy, L'Hermite de la Chaussée d'Antin, t. 2, 1812, p. 92); façon d'agir (Stendhal, Lucien Leuwen, t. 1, 1836, p. 204); faculté d'agir (H. Bergson, L'Évolution créatrice, introd., 1907, p. V); liberté d'agir (Maine de Biran, Journal, 1816, p. 125); manière d'agir (Stendhal, De l'Amour, 1822, p. 98); moment d'agir (J.-A. Brillat-Savarin, Physiologie du goût, 1825, p. 372; G. Leroux, Le Mystère de la chambre jaune, 1907, p. 64); motif d'agir (M. Van der Meersch, Invasion 14, 1935, p. 499); moyen d'agir (Stendhal, Lamiel, 1842, p. 121); nécessité d'agir (Stendhal, Lucien Leuwen, t. 1, 1836, p. 335); pouvoir d'agir (Maine de Biran, loc. cit.); raison d'agir (R. Rolland, Jean-Christophe, Dans la maison, 1909, p. 1010); temps d'agir (A. de Musset, À quoi rêvent les jeunes filles, 1832, II, 1, p. 359; F. Mauriac, Le Nœud de vipères, 1932, p. 178); volonté d'agir (Ch. Maurras, Kiel et Tanger, 1914, p. 236). 2. Verbe + verbe : faire agir. Mettre en action, en œuvre, entraîner, manœuvrer, pousser à (P.-A. Ponson du Terrail, Rocambole, t. 5, Les Exploits de Rocambole, 1859, p. 253). 3. Verbe + adv. ou compl. prép. de manière : bien agir (J. Péladan, Le Vice suprême, 1884, p. 186); agir à sa guise (É. Estaunié, L'Ascension de Monsieur Baslèvre, 1919, p. 212); agir de concert (J.-H. Bernardin de Saint-Pierre, Harmonies de la nature, 1814, p. 316); agir contre sa conscience (ex. 43); mal agir (H. de Montherlant, La Reine morte, 1942, p. 145); agir sans délibération, sans détermination préalable (J.-B. Lamarck, Philosophie zoologique, t. 2, 1809, p. 336); agir sans discernement (V. de Jouy, ibid., t. 3, 1813, p. 111); agir selon l'impulsion de (G. Sand, Histoire de ma vie, t. 1, 1855, p. 14); agir d'autorité. ,,Employer son autorité pour faire quelque chose.`` (Land. 1834; attesté aussi ds Ac. 1835-1932, Besch. 1845, Rob.); de cause : agir par concupiscence (E. Renan, Drames philosophiques, L'Eau de jouvence, 1881, I, 1, p. 447); agir par traîtrise (M. Proust, À la recherche du temps perdu, Le Côté de Guermantes 1, 1920, p. 179); de but : agir pour le mieux (G. Bernanos, Monsieur Ouine, 1943, p. 1486); agir pour mon bien (S. de Beauvoir, Les Mandarins, 1954, p. 418). 4. Verbe + conj. de subordination : agir de telle sorte (Ch. Péguy, Victor-Marie, comte Hugo, 1910, p. 827). B.− PHILOS., littér., emploi trans. Activer, actionner, conditionner (qqn.). 1. Forme active, rare : 55. Au lieu de se trouver seul avec sa sagesse, il [Tolstoï] s'est retrouvé seul avec son erreur et il l'a agie, comme il faisait tout, passionnément.
L. Daudet, L'Hérédo,1916, p. 204. 2. Forme passive : 56. On soupçonnera trop qu'il n'est pas libre dans son action et qu'elle est « agie » par des ressorts inférieurs.
Ch. Maurras, L'Avenir de l'Intelligence,1905, p. 73. 57. Oui, là est tout mon problème. Problème bizarre, presque contre nature, je veux dire contre ma nature qui partout ailleurs − songeons à l'art, à l'exaltation, au travail créateur − non seulement accepte d'être mue, d'être agie, mais témoigne même de l'inquiétude lorsque c'est elle qui meut et qui agit. L'anomalie est due à ce que ne voulant pas cette fois revenir par la porte du sacrement de la pénitence, j'ai − comme il en va toujours avec moi − été trop loin dans l'autre direction.
Ch. Du Bos, Journal,avr. 1927, p. 240. 58. Ainsi nous trouvons-nous, semble-t-il, devant une double nécessité contradictoire : tout instrument n'étant utilisable − et même saisissable − que par le moyen d'un autre instrument, l'univers est un renvoi objectif indéfini d'outil à outil. En ce sens la structure du monde implique que nous ne puissions nous insérer dans le champ d'ustensilité qu'en étant nous-mêmes ustensile, que nous ne puissions agir sans être agis.
J.-P. Sartre, L'Être et le néant,Paris, Gallimard, 1943, p. 388. Rem. Les dict. ne mentionnent pas cet emploi, à l'exception de Lar. 19e(qui le définit ainsi : ,,Dans le langage philosophique, Poussé, mis en mouvement``, l'illustre par des ex. de Bossuet et de Fénelon, en précisant ,,ne se dit plus``), de Littré (qui déclare : ,,Ce participe n'est pas en usage. Cependant l'autorité de Bossuet et de Fénelon pourrait en justifier l'emploi dans le langage philosophique``) et Lar. Lang. fr. (qui le déclare ,,rare``, et cite un ex. de Ch. Maurras). Les philosophes mod. ont remis en honneur cet emploi (cf. surtout ex. 58). C.− Emploi pronom. (impers.). S'agir. 1. Spéc., vx ou vieilli − Vieux ♦ Il s'agit si. ,,Se dit par ellipse pour il s'agit de savoir si.`` (Besch. 1845). Rem. Attesté aussi ds Lar. 19e, Littré, Bél. 1957. ♦ Dont s'agit. ,,Locution encore en usage au barreau, et qui s'emploie pour dont il s'agit.`` (Nouveau Lar. ill.). Rem. Attesté aussi ds Besch. 1845, Littré. − Vieilli ou littér. ♦ S'agissant de (loc. conj.). Vu qu'il s'agit de : 59. La même retenue devenait impossible à conserver, s'agissant d'accusations énormes portées contre lui.
Saint-Simon 502.78 (Littré). Rem. Attesté ds Lar. 19e, Bél. 1957, Rob., Pt Rob., Lar. Lang. fr. 2. Il s'agit de (ou que). ♦ Il s'agit de + subst. ou inf. Il est question de : 60. S'agit-il de bijoux, je suis bien sûr de vous apprendre que Mellerio est le premier homme du monde pour les bagues hiéroglyphiques et lithologiques; Nitot pour le dessin et la monture des boucles d'oreilles; ...
V. de Jouy, L'Hermite de la Chaussée d'Antin,t. 1, 1811, p. 77. 61. Il faut finir et cependant que j'ai encore de choses à te dire! Ne me parle plus de toi, ma bien-aimée Adèle, comme d'une femme ordinaire; sois modeste tant que tu voudras, mais ne me force pas à l'être quand il s'agit de toi.
V. Hugo, Lettres à la fiancée,1821, p. 61. 62. don carlos, faisant un pas. − Duc, ce n'est pas d'abord de cela qu'il s'agit. Il s'agit de la mort de Maximilien, empereur d'Allemagne.
V. Hugo, Hernani,1830, I, 3, p. 22. 63. Il s'inclina distraitement devant le procureur, cherchant le regard du juge qui répondit par un signe imperceptible. − Vous permettez? J'accompagne Monsieur le Curé quelque pas. − De quoi s'agit-il? Qu'est-ce qui se passe? − Je crois que je puis avoir confiance en vous, murmura le prêtre sur le même ton. Je désirerais vous parler.
G. Bernanos, Un Crime,1935, p. 771. ♦ Il s'agit de + inf. Il importe de (nuance impér.) : 64. Pour le coup, j'éclatai : « Comment, madame, il est nécessaire que je me ruine pour tenir l'enfant d'une femme que je connais à peine, et qui croit aux prédictions de MlleLenormand! − Il ne fallait pas accepter; vous l'avez fait, il s'agit de vous en tirer honorablement. »
V. de Jouy, L'Hermite de la Chaussée d'Antin,t. 1, 1811p. 26. 65. ... le comte Ludwig marchait vivement vers un café. − Si tu veux faire le brutal avec moi, je te plante là... Il s'agit d'empêcher que, par quelque tour de passe-passe, ce maudit Parisien ne nous mette dans notre tort, et par suite ne se moque de nous.
Stendhal, Lucien Leuwen,t. 2, 1836, p. 197. 66. Enfin, enfin, je sais, un peu, comme tout le monde, ce qu'est la douleur. Si la douleur est agréable, ce n'est plus la douleur. Il s'agit de s'entendre. Et s'il est une puissance surnaturelle capable de nous rendre la douleur délectable, que cette puissance, alors, se manifeste. Qui songerait à la récuser?
G. Duhamel, Journal de Salavin,1927, p. 143. 67. Il s'agit d'en finir avec cette espèce d'ignorance hagarde au milieu de laquelle tout le théâtre contemporain avance, comme au milieu d'une ombre, où il ne cesse pas de trébucher.
A. Artaud, Le Théâtre et son double,1939, p. 155. ♦ Fam. (Il) (ne) s'agit (pas) que. Il (ne) faut (pas) que : 68. Le vieux, ragaillardi, racontait alors par le menu des histoires de l'asile. Tout à coup, il jetait un coup d'œil sur la pendule. D'un geste maladroit, il prenait sa canne et sa casquette. − S'agit pas que je rentre en retard, parce que alors... fini les sorties!
E. Dabit, L'Hôtel du Nord,1929, p. 232. Rem. Sauf exception (Pt Rob.), cet emploi est gén. ignoré des dict. II.− PHILOS., emploi subst. masc. (seulement au sing. et toujours précédé de l'art. masc. sing. le). Faculté d'agir spécifiquement humaine; exercice de cette faculté : 69. ... le sentir est fonction de l'agir. Mais alors je suis mon corps ne signifierait-il pas : « Je suis une certaine puissance d'agir qui s'appréhende elle-même comme instrument, et se saisit d'autre part en tant qu'inhibée ou au contraire favorisée dans son exercice par les conditions extérieures »? interprétation « énergétique » du corps.
G. Marcel, Journal métaphysique,1920, p. 252. 70. ... l'agir porte le désirer. Je crois que nous ne savons pas bien désirer ce que nous ne pouvons faire, et que l'espérance non aidée est toujours triste. C'est pourquoi la vie privée est toujours triste, si chacun attend le bonheur comme quelque chose qui lui est dû.
Alain, Propos,1923, p. 479. 71. Toute philosophie politique, comme toute philosophie morale, sont ainsi une sorte de limite abstraite, la science des lois naturelles de l'agir humain. En fait cependant, l'homme n'est pas dans un état purement naturel, mais dans l'état de nature déchue et de nature réparée; la règle de conduite de la vie individuelle et sociale ne peut donc pas faire abstraction de l'ordre surnaturel.
J. Maritain, Primauté du spirituel,1927, p. 190. 72. Cette exclusion mutuelle du penser au sens le plus large et de l'agir se justifierait ainsi : l'intentionalité en tant que telle est adynamique : le penser est une lumière, l'agir est une force; les mots force, efficacité, énergie, empire, production, effort, etc. appartiendraient donc à une toute autre dimension du sujet que la visée non-productrice de la perception, du souvenir, du désir, du vœu, du commandement, et par conséquent que la visée également non-productrice du projet.
P. Ricœur, Philosophie de la volonté,1949, pp. 192-193. 73. En lui [le mysticisme chrétien] se manifeste un étonnant équilibre entre l'agir et le pâtir, entre la possession du monde et son abandon, entre le goût des choses et leur mépris.
P. Teilhard de Chardin, Le Milieu divin,1955, p. 144. Rem. 1. L'emploi subst. de agir ne figure que dans qq. dict. (Lar. 19e, Goblot 1920, Foulq.-St-Jean 1962). 2. Cet emploi, spécifique de la lang. philos. (qui l'a calqué sur l'all., où de tels usages sont communs à la lang. philos. et à la lang. commune) est à la fois verbal et subst. En tant qu'il est verbal : a) Il laisse au verbe sa valeur abs. (absence de compl. d'obj.); b) Il conserve l'aspect imperf.-dérivatif propre à l'inf. dit « présent »; c) Il confère à celui-ci une valeur intemporelle. − En tant qu'il s'agit d'un emploi subst., une épithète est possible : l'agir humain (ex. 71). − Cf. en outre : ,,agir est un verbe neutre qui ne comporte pas, comme un verbe actif, de régime direct. (...). Aussi est-ce là une raison primordiale de la supériorité métaphysique de l'expression pur agir sur celle d'acte pur. Agir suggère à la fois ce qui, n'étant point statique et lié à une production définitive, est dynamique, tout en restant intérieur à soi.`` (M. Blondel, L'Action, 1936, p. 170, d'apr. Foulq.-St-Jean 1962). Prononc. − 1. Forme phon. : [aʒi:ʀ], j'agis [ʒaʒi]. Enq. : /aʒi/, /zéro (prés. 123, impér. 2), ʀe1, ʀa, ʀõ, ʀe1(D), ʀiõ, ʀie1/; /aʒis/, /zéro (prés. 6, subj. 1236), õ, e1, e1(D), iõ, ie1/; inf. /aʒiʀ/; part. /aʒisã, aʒi/. 2. Dér. et composés : agissant, agissement(s), réagir. Étymol. ET HIST. − 1. 1450 « produire » (Dialog. entre le Maheustre et le Manant, fo6 vods Gdf. Compl. : Il n'y a que Dieu... qui puisse agir telle conversion). − 1611, Cotgr.; 2. 1600 s'agir à, impers. « être question de » (O. de Serres, Théâtre d'agric., VI, 1 ds Hug. : Puis qu'il ne s'agit qu'à façonner Jardins, leur peu de contenue se pourra accommoder sans excessive despense); 3. 1680 (Rich. t. 1 : Agir. Faire, se comporter, se conduire d'une certaine manière − agir en galant homme, en ami, en homme d'honneur... Agir de concert avec quelqu'un. Ils ont agi comme pour eux...).
Dér. du lat. agere av. chang. de conjug. Agere attesté au sens 1 dep. Plaute, Bac., 479 ds Oxford Latin dict., s.v. 89 b : nullo pacto res mandata potest. agi?; au sens 2 impers. agitur de ds Cicéron, Man., 14, ibid., 90 a; au sens 3 dep. Terence, Ev., 1066 : non cognosco vostrum tam superbum ... − sic ago. STAT. − Fréq. abs. litt. : 19 250. Fréq. rel. litt. : xixes. : a) 26 396, b) 19 607; xxes. : a) 23 818, b) 34 514. BBG. − Bailly (R.) 1969 [1946]. − Bar 1960. − Bél. 1957. − Bénac 1956. − Boiss.8. − Bonnaire 1835. − Bruant 1901. − Canada 1930. − Cap. 1936. − Caput 1969. − Darm. Vie 1932, p. 193. − Dup. 1961. − Fér. 1768. − Foulq.-St-Jean 1962. (s.v. acte, action). − Girard 1756. − Goblot 1920. − Grev. Probl. t. 3 1964. − Guilb. Aviat. 1965. − Guizot 1864. − Hanse 1949. − Kold. 1902. − Laf. 1878. − Lav. Diffic. 1846. − Le Breton 1960. − Littré-Robin 1865. − Miq. 1967 (s.v. acte). − Nysten 1814-20. − Rog. 1965, p. 128, 163. − Sardou 1877. − Sommer 1882. − Synon. 1818. − Thomas 1956. |