| GRAAL, subst. masc. A. − 1. Coupe creuse ou vase qui aurait servi lors de la Cène et où Joseph d'Arimathie aurait recueilli le sang issu de la blessure infligée par Longin au Christ en croix. Si l'on veut en croire la légende, le calice du Graal aurait été taillé dans une seule émeraude (Metta, Pierres préc.,1960, p. 80). 2. Symbole du salut spirituel, objet d'une quête dont le succès requiert de ceux qui l'entreprennent une pureté de cœur absolue (associé au Cycle des romans arthuriens, le Graal ou Saint Graal est devenu le thème central d'un ample corps de récits romanesques et légendaires). Les chevaliers du Graal; le thème, la tradition du Graal. Artisans merveilleux des poèmes de chevalerie, chansons de geste, etc., appartenant au cycle de la Table ronde et du Graal (Fulcanelli, Demeures philos., t. 2, 1929, p. 213).Ces légendes celtiques adoptées par le Moyen Âge, où le chevalier pur parvient au château du roi pécheur, gardien du Graal (Divin.1964, p. 249).Le grand prosateur qui a écrit la Quête du Graal en a fait un sommet mystique de la légende. La quête du Graal devient l'allégorie de l'ascension à la sainteté, la quête de Dieu (Henry, Chrestomathie, t. 1, 1970, p. 119). B. − P. ext., littér. Coupe symbolique. Les grands Chevaliers (...) Chevauchant deux à deux (...) Vers le sang des graals et l'espoir du combat (Régnier, Poèmes anc.,1890, p. 19).Et moi aussi, un jour, j'ajouterai quelque chose au vase de tristesse, au graal des poètes romantiques (Barrès, Cahiers, t. 1, 1897, p. 128). Prononc. et Orth. : [gʀal]. Gén. avec une majuscule. Étymol. et Hist. 1. Mil. xiies. « plat large et creux » (Roman d'Alexandre, ms. de Venise ds Elliott Monographs, t. 1, p. 33, 618); en partic. 1181-90 (Chr. de Troyes, Conte du Graal, éd. F. Lecoy, 6207); 2. ca 1200 « plat de la Cène » (Robert de Boron, Graal, éd. W.A. Nitze, 2659). Issu sous une forme fr.-prov. ou occitane d'un lat. gradalis « plat large et creux » (1010 ds Du Cange) d'orig. très discutée; l'étymol. la mieux établie est celle qui y voit un dér. *cratalis de cratis « claie » substantivé au sens de « récipient » apr. ell. d'un subst. tel que vas « vase » (FEW t. 2, p. 1293), mais qui fait difficulté du point de vue sém.; on a proposé d'autres étymons moins vraisemblables ou insuffisamment étayés : − un rattachement au lat. crater « cratère » (Diez5, p. 602; v. aussi Gossen ds Vox rom. t. 18, pp. 207-209), − un dér. de gradus « degré », soit parce que dans ce récipient les morceaux sont disposés l'un après l'autre (REW3, no3830a), soit parce qu'il s'agit d'un récipient à pied (M. Roques ds Les Romans du Graal aux xiieet xiiies., 1956, p. 12 et 13). En tout cas, il est établi dep. l'art. de M. Roques, loc. cit., que le mot est lié à une réalité domestique et rurale et que l'aire des formes gré, greau, grial dans la région Est et Nord-Est du domaine d'oïl représente une aire en régression à laquelle correspond, dans les domaines francoprovençal et occitan, celle du type graal, grazal. Bbg. Gossen (C. Th.). Zur etymologischen Deutung des Grals. Vox rom. 1960, t. 18, pp. 177-219. |