| COLOSSE, subst. masc. A.− Statue aux dimensions extraordinaires. Colosse de bronze, de granit, de pierre. L'île de Rhodes était consacrée au soleil, auquel on avait élevé une statue colossale, connue sous le nom de colosse de Rhodes (C. Dupuis, Abr. de l'orig. de tous les cultes,1796, p. 22): 1. J'étais le voyageur qui baissait encore un peu la tête, − un voyageur de grande taille −, en entrant dans le port de Rhodes, pour ne point se heurter au colosse.
Giraudoux, Simon le Pathétique,1926, p. 39. − P. métaph. et au fig. [P. réf. à la statue apparue en songe au roi Nabuchodonosor, Daniel 2, V. 31-45] Colosse aux pieds d'argile. Puissance menacée d'écroulement. La légende impériale s'écroulait avec son colosse à la tête d'or, aux pieds d'argile (Adam, L'Enfant d'Austerlitz,1902, p. 302). 2. Pour fonder la république allemande et remettre sur des pieds solides le colosse d'argile russe, ce sont de longs mois qu'il faudra encore, voire des années.
R. Martin du Gard, Les Thibault,Épilogue, 1940, p. 451. B.− P. anal. Homme, rarement animal, d'une taille et d'une force exceptionnelle. Énorme colosse; jambes, mains, torse de colosse; être taillé en colosse. Il possédait en outre des pieds énormes et des mains géantes, des mains de colosse (Maupassant, Contes et nouvelles,t. 2, Le garde, 1884, p. 978). − Emploi adj. en appos., rare. C'étaient [Les cuirassiers] des hommes géants sur des chevaux colosses (Hugo, Les Misérables,t. 1, 1862, p. 395). C.− Au fig. [En parlant d'un animé] − Littér. Colosse de + subst. non déterminé désignant une qualité.Personne portant une qualité à son plus haut degré. Colosse de vertu, de ruse; colosse d'érudition. − Souvent fam. Celui qui domine dans sa spécialité. Les colosses de la littérature. Et l'on se prit à admirer comme ce génie assez malicieux s'était élevé en se jouant jusqu'à la stature des colosses des Lettres européennes de ce temps-là (Valéry, Variété IV,1938, p. 21). D.− État, grande puissance ou empire à son apogée. Le colosse romain, le colosse russe. − [Avec l'idée que cette puissance est menacée par sa grandeur même comme le colosse aux pieds d'argile] Plusieurs courses préparaient la chute de ce colosse. Le colosse est tombé (Ac.1835-1932). Rem. On relève dans la docum. le néol. colossifier, verbe intrans. Elle prodiguait démesurément des superlatifs (...) Dès cette époque elle commençait à tout (...) colossifier (Balzac, Les Illusions perdues, 1837, p. 45). Prononc. et Orth. : [kɔlɔs]. Pour le timbre de la 2esyll. cf. carrosse et Buben 1935, § 53. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. xves. [ms.] (Chron. et hist. saint. et prof., Ars 3515, fo78 rods Gdf. Compl. : En ceste cité [Rhodes] fut fait le collosse d'airrain... En celle isle furent faiz autres collosses moindres); 2. a) 1654 « géant » (S. Cyrano de Bergerac, Lettres diverses ds
Œuvres, éd. G. Ribemont Dessaignes, 1957, p. 278); b) av. 1628 au fig. colosses d'orgueil (Malherbe,
Œuvres, éd. 1666, II, 12 ds Littré); c) 1666 en parlant de quelque chose ou de quelqu'un aux dimensions ou au pouvoir gigantesque un colosse d'État (Corneille, Agésilas, III, 1, p. 984). Empr. au lat. impérial colossus, lui-même empr. au gr. κ
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ς désignant une statue très grande, notamment le colosse de Rhodes, statue d'Apollon de très grandes dimensions érigée dans cette ville. Fréq. abs. littér. : 548. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 687, b) 1 413; xxes. : a) 982, b) 395. |