ZÉRO, adj. et subst. masc.
Étymol. et Hist. I. Subst.
A. 1. a) 1485 « signe numérique représentant une valeur nulle » (
Jehan Certain,
Le kadran des marchans [ms. Paris Arsenal 2904], prologue, cité par L.
Jordan Materialien... ds
Archiv für Kulturgeschichte t. 3, p. 191: la disiesme [figure] ne vault riens mais elle fait valloir les autres figures et se nomme
zero ou chiffre);
b) ca 1903 alg. (
Gde Encyclop.: on appelle
zéros d'une fonction
f (
x) les racines de l'équation
f (
x) = o); 1964
zéro d'un polynôme (
Hist. gén. sc., t. 3, vol. 2, p. 49);
c) 1964
ligne de zéro « axe pris pour représenter les valeurs nulles d'une variable » (
Rob.);
2. a) 1512 fig. « personne nulle, sans valeur » (J.
Lemaire de Belges,
Les Illustrations de Gaule et Singularitez de Troye, 3
elivre ds
Œuvres, éd. J. Stecher, t. 2, p. 454: Childeric [...] n'estoit estimé que pour ombrage, ou pour un
zero au nombre des chiffres);
ca 1617 (D'
Aubigné,
Confession du Sieur de Sancy, II, 7 ds
Œuvres, éd. H. Weber, p. 653: je le connois pour un
zero);
b) av. 1679
compter qqn pour un zéro (
Retz,
Mém., éd. A. Feillet, t. 4, p. 361); 1846 (
Balzac,
Cous. Bette, p. 168: le baron, comptant Marneffe pour
zéro); 1934
compter (intrans.)
pour zéro (
Montherl.,
Célibataires, p. 765);
3. a) α) 1611
se reduire au zero « être ruiné » (
Cotgr.); 1793 (
Cailhava, rapport ds
Brunot t. 10, p. 293: production du grain [...] presque réduite à
zéro); 1798 (
Ac.: sa fortune est réduite à
zéro);
β) 1761
être réduit à zéro « disparaître entièrement » ([
Desboulmiers],
Honny soit qui mal y pense, 17 ds
Quem. DDL t. 38);
b) 1671 (
Pomey: cela ne vaut pas un
zero); 1777 (
Voltaire,
Lett. Messance ds
Littré: tout est
zéro);
c) 1840
partir de zéro (
Balzac,
Z. Marcas ds
Œuvres, Bibl. de la Pléiade, t. 8, 1977, p. 832); 1938
repartir à zéro (
Cocteau,
Parents, I, 4, p. 207); 1938
repartir de zéro (
Romains,
Verdun, p. 161);
d) 1842
c'est zéro « c'est mauvais, cela ne vaut rien » (
Reybaud,
J. Paturot, p. 413); 1928
zéro! (
Martin du G.,
Thib., Sorell., p. 1236);
e) 1947
avoir le moral à zéro, v.
moral2; 1949
le trouillomètre à zéro (
Sartre,
Mort ds âme, p. 48); 1953
être à zéro « avoir le moral à zéro » (
Simonin,
Touchez pas au grisbi, p. 223);
4. 1966
raser la boule à zéro « tondre les cheveux extrêmement ras » (B.
Clavel,
L'Hercule sur la place, p. 120 ds
Cellard-
Rey); 1969
être tondu à zéro (
Riv.-
Car.).
B. 1. a) 1757 « degré de température de la glace fondante » (
Encyclop. t. 7, p. 540a: le degré marqué
zéro sur le thermometre de M. de Reaumur); 1813
au-dessous de zéro (
Jouy,
Hermite, t. 3, p. 147); 1823
au-dessous de zéro fig. « dans une ambiance glaciale, dépourvue de cordialité » (
Boiste); 1818
zéro absolu (
Gay-
Lussac ds
Ann. chim. et phys., t. 9, p. 310: la détermination du
zéro absolu de chaleur); 1819 (
Desormes et
Clément, in
Journ. de phys. et de chim., t. 89, p. 322 ds
Quem. DDL t. 41: le
zéro absolu de la température);
b) 1964 métrol.
appareil de zéro (
Lar. encyclop.); 1964 électr.
zéro mécanique (
ibid.);
2. 1900 « la plus basse note, dans la notation scolaire » (
Colette,
Cl. école, p. 219); 1911
zéro de conduite (
Larbaud,
F. Marquez, p. 73); 1959
zéro pointé (
FEW t. 9, p. 589b);
3. 1904 hydrographie
zéro des cartes (
Nouv. Lar. ill.).
II. A. Adj. numéral cardinal
1. 1690 (
Fur.: 45.degrez
zero minutes); 1923 p. ell. (
Martin du G.,
Thib., Belle sais., p. 925: il fut battu [au tennis] par quatre-
zéro);
2. 1949
zéro heure « point de départ du décompte des heures d'une journée » (
Sartre,
op. cit., p. 47: à minuit: à
zéro heure)
. B. Adj. ou appos.
1. a) 1811
température zéro (
Poisson,
Mécan., t. 2, p. 433); 1956 thermodyn.
énergie au zéro absolu (
Daudel,
Fond. chim. théor., p. 180); 1964
énergie au point zéro (
Rob.); 1960 én. nucl.
point zéro « projection verticale au sol du point d'éclatement d'un projectile nucléaire » (
Charles);
b) 1949
année zéro (
Lar. mens., avr., Le mois cinématogr.:
Allemagne année zéro de Roberto Rossellini);
c) 1972 écon.
croissance zéro (
Le Monde, 15 juin, p. 4, col. 5: [interview de Sicco Mansholt] nous arriverons à une « croissance
zéro » dans les pays riches); 1981 pol. internat.
option zéro [proposition de Reagan, président des États-Unis, aux Soviétiques le 18 nov. 1981] (
Le Nouvel Observateur, 21 nov., p. 56, col. 1);
2. a) 1902 ling.
degré zéro (R.
Gauthiot,
Note sur le degré zéro,
Mél. ling. A. Meillet, pp. 49-60 ds
Z. rom. Philol. t. 89, p. 2); 1916
signe zéro, désinence zéro, suffixe zéro (
Sauss., p. 124, p. 254, p. 256); 1933
état zéro, morphème zéro, tonalité zéro (
Mar. Lex.);
b) 1953 (R.
Barthes,
Le Degré zéro de l'écriture, Paris, éd. du Seuil). Empr. à l'ital.
zero « zéro » (1491, P.
Calandri,
De Arithmetica opusculum, Florence, f
o4 v
o,
cf. F.
Woepcke ds
J. Asiatique, 6
esérie, t. 1, p. 522;
Littré;
FEW t. 19, p. 158a), « rien » (av. 1484, L.
Pulci,
Morgante ds
Tomm.-
Bell.,
Cor.-
Pasc.,
s.v. cero), altér. de
zefiro (
cf. C.
Tagliavini,
Le origini delle lingue neolatine, 3
eéd., Bologna, 1959, p. 263), issu du lat. médiév.
zephirum (1202,
Leonardo Fibonacci, de Pise,
Liber Abbaci ds
Pellegr. Arab., p. 80: cum hoc signo O, quod arabice
zephirum appellatur), empr. à l'ar.
ṣifr « vide; zéro » (
chiffre*). Le m. fr.
zéro a supplanté
chiffre dans le sens « zéro » que ce dernier avait en a. fr. et m. fr. avant de se spécialiser, à partir de la fin du
xves., dans celui de « signe d'un système numérique », qu'il a toujours.