VOILE1, subst. masc.
Étymol. et Hist. A. 1. a) Ca 1180
vol « pièce d'étoffe qui couvre la tête des religieuses » (
Gautier d'Arras,
Ille et Galeron, éd. F. A. G. Cowper, 3342: Un
vol et une blance gone Comme rencluse et comme none); 1571
prendre le voile (
Ronsard,
Epitaphe de Françoise de Viel-Pont ds
Œuvres, éd. P. Laumonier, t. 15, p. 303); 1667
quitter le voile (R.
Arnauld D'
Andilly,
Mémoires, t. 2, p. 95);
b) α) ca 1170
voil « pièce d'étoffe qui couvre une partie du corps » (
Beroul,
Tristan, éd. E. Muret et L. M. Defourques, 4001); spéc.
β) 1210-14
voil en parlant d'une femme (
Jean Renart,
Galeran de Bretagne, éd. L. Foulet, 2019); 1623
porter le voile de l'espousee (
Coeffeteau,
Histoire Romaine, p. 388);
γ) 1821 « morceau de tissu fin qui orne un chapeau » (
Obs. modes, t. 7, p. 96);
c) 1721 « pièce d'étoffe avec laquelle les femmes musulmanes se masquent le visage » (
Montesquieu,
Lettres Persannes, p. 172); 1721
vivre sous le voile (
Id.,
ibid., p. 181); 1743
sans voiles « à visage découvert » (Cl.
Godard D'
Aucour,
Mémoires turcs, t. 1, p. 134);
2. a) 1193-97
voile « grand rideau, tenture » (
Hélinant,
Les Vers de la Mort, éd. Fr. Wulff et Em. Walberg, XXXIII, 10, p. 31: Morz voit par mi
voile et cortine);
b) déb.
xiiies. hist. juive
Le veil del temple (
André de Coutances,
Evangile de Nicodème, éd. G. Paris et A. Bos, 131);
c) 1622 « étoffe légère qu'on place sur le calice pendant la messe » (
Inv. de Notre Dame de Reims, fol. 67 v
ods
Gay); 1637
voiles de calice (N.
de Peiresc,
Lettres, t. 5, p. 48);
3. 1627 « vêtement léger et transparent qui couvre le corps » ici, celui des dieux (Ch.
Sorel,
Le Berger extravagant, p. 231); 1772 (
Crebillon fils,
Le Sylphe, p. 154: son sein n'avoit d'autre
voile qu'une gaze légère, que le zéphyr derangeoit);
4. 1723 « tissu léger et croisé analogue à celui dont on fait le voile des religieuses » (
Savary t. 2, p. 1935).
B. Sens métaph.
1. ca 1200
voil « élément qui modifie l'apparence de quelque chose » (
Moralité sur Job ds
Li Dialogue Gregoire le Pape, éd. W. Foerster, p. 303: a la foiz si(u)t la tristece la maurteit de lever, et aumbret par un
voil de dolor tote la bone oevre ke la pense avoit comenciet par bone entencion);
2. 1561 « moyen employé pour dissimuler la réalité » (
Ronsard,
Elégie à J. Grévin ds
Œuvres, t. 14, p. 196: & d'un
voile divers Par fables ont caché le vray sens de leurs vers); 1593 (
Satyre Ménippee, Harangue de Monsieur d'Aubray, éd. Ch. Read, p. 263: Vous estes descouvert, le
voile est levé!); 1647 (Cl.
Malleville,
Œuvres Poét., p. 297: J'exposeray tes faits sans ombres et sans
voiles); 1679
déchirer le voile de (J.-F.
de Retz,
Mémoires, t. 2, p. 105); 1742
lever un coin du voile (
Racine,
La Religion, p. X).
C. Sens anal.
1. 1550 se dit de ce qui rend moins net ou obscurcit (
Ronsard,
Odes, IV, 16 ds
Œuvres, t. 2, p. 142: Mais quand le paresseus
voile De la nuit quitte les cieux);
2. a) 1584 « obscurcissement du champ visuel » (
Id.,
Elégies,
ibid., t. 18, p. 126: Mes yeux estoyent couverts d'un
voile tenebreux, Mes oreilles tintoyent, & ma langue seichée Estoit à mon palais de chaleur attachée);
b) 1733
le voile mortel (A.
Piron,
Gustave Wasa, p. 377); 1761
les voiles de la mort (Ch. P.
Colardeau,
Caliste, p. 356);
c) 1876 phot. (L.
Girard,
Journ. offic., 6 oct., p. 7350, 2
ecol. ds
Littré Suppl.).
D. 1. a) 1667 bot. « enveloppe sèche, mince et coriace qui entoure les fleurs de certaines liliacées » (P.
Morin,
Remarques nécessaires pour la culture des fleurs, p. 279 d'apr.
FEW t. 14, p. 224b);
b) 1872 « membrane qui enveloppe les bords du chapeau des champignons avant leur maturité » (
Littré);
2. 1784 anat.
les voiles du palais (
Diderot,
Éléments de physiol., p. 148). Du lat.
velum « voile, toile, tenture, rideau », empl. également au figuré.