VÉRITÉ, subst. fém.
Étymol. et Hist. I. Subst.
A. 1. a) α) 2
emoit.
xes.
veritiet « (en parlant de religion) opinion conforme à ce qui est, par opposition à erreur » (
St Léger, éd. J. Linskill, 34);
ca 1050
veritet (
Alexis, éd. Chr. Storey, 64); en partic. 1656
les vérités de l'Evangile (
Pascal,
Les Provinciales, deuxième lettre, éd. L. Lafuma, p. 378);
β) 1585 plus gén. [cacher et obscurcir]
la vérité des hautes et entières sciences (N.
Du Fail,
Contes et discours d'Eutrapel, XXX ds
Œuvres facétieuses, éd. J. Assézat, t. 2, p. 244);
γ) 1684
une vérité première et fondamentale (J.
Abbadie,
Traité vérité relig. chrét., p. 4); 1910 p. iron.
il pleut des vérités premières (
Péguy,
V.-M., comte Hugo, p. 764);
b) 1567
dire à qqn ses vérités « lui dire des choses désobligeantes sans ménagement » (
Amyot,
Brutus, 42 ds
Littré); 1676 p. ext. « lui dire des injures » (
Sévigné,
Corresp., éd. R. Duchêne, t. 2, p. 398);
c) ca 1590 « opinion accréditée ayant forme d'axiome mais pouvant être fausse » (
Montaigne, Essais, II, 12, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, p. 579);
2. xiiie-
xives. « caractère de toute connaissance jugée vraie » (
Roman des sept Sages ds
Le Livre des proverbes fr., éd. Le Roux de Lincy, t. 2, p. 434 [=
ca 1210,
Dolopathos, 352 ds T.-L.,
s.v. maçue:
Vertez c'est la massüe Qui menteor ossist et tüe]);
3. fin
xiiie-déb.
xives. [ms.] « caractère de conformité de la pensée d'un objet » (
Ronceveaux, ms. Châteauroux, éd. W. Foerster, XIII, 4, p. 11); d'où
a) 1872
vérité matérielle (
Viollet-
Le-
Duc,
Archit., p. 247);
b) 1920
vérité formelle (
Théol. cath. t. 4, 1, p. 1200);
4. 1485-90 « principe général considéré comme une entité pouvant être ou non personnifiée » (
Proverbes en rimes, éd. Gr. Frank et D. Miner, 895-896: Dame Loyauté dort Et
Verité est morte);
cf. 1639
la Vérité, cette fille timide (
Rotr.[
ou],
Antig., IV, 6 ds
Littré);
5. 1
remoit.
xvies. « Dieu considéré en tant que fondement de toute vérité »
il [le Christ]
est la Verité (M.
de Navarre,
La Nativité de Jesus Christ, éd. F. E. Schnéegans, 492);
6. 1932
vérité ontologique (
Gilson,
Esprit philos. médiév., p. 32).
B. 1. a) Ca 1165 « caractère d'une chose conforme au réel, donnée comme telle, fidèlement rapportée ou à connaître » (
Benoît de Ste-
Maure,
Troie, éd. L. Constans, 18708: que la
vérité n'en iert dite);
b) 1735
une vérité historique (
Lenglet du Fresnoy,
Hist. justifiée, p. 289);
2. a) 1165 « ensemble des caractères, des traits, ou caractère essentiel qui définit un objet »
la vérité de sa dolor (
Benoît de Ste-
Maure,
op. cit., 16497);
b) 1964 en appos.
caméra-vérité (
Le Monde, 21 août ds
Gilb. 1980);
3. ca 1500 « ce qui est conforme au réel tel que nous le percevons » (
Philippe de Commynes,
Mém., éd. J. Calmette, prol., t. 1, p. 1);
cf. 1561
Que vérité s'assemble avec la fiction (J.
Grévin,
César, III ds
Théâtre compl., éd. L. Pinvert, p. 35);
4. 1669 « caractère de ce qui est ou nous paraît conforme à la réalité, en particulier dans le domaine artistique » (
Molière,
La Gloire du Val de Grâce, 101 ds
Œuvres, éd. E. Despois et P. Mesnard, t. 9, p. 543: donner au sujet sa
vérité); 1765 peint. (
Dider.,
Salon, Œuv., t. XIII, p. 3 et 4 ds
Pougens ds
Littré);
5. a) 1687 « sincérité, bonne foi d'une personne qui exprime avec sincérité ce qu'elle sent » d'où « expression spontanée et fidèle de cette réalité »
un air de vérité (
Racine,
Lettre à Boileau, 24 mai ds
Œuvres, éd. P. Mesnard, t. 6, p. 552);
b) 1761 p. ext. « personne sincère qui parle sans détour et sans réticence »
vous, la vérité même (
Marmontel,
Cont. mor. Amit. à l'épr. ds
Littré);
6. av. 1709 « véracité d'une personne » (
St Simon d'apr.
Lar. Lang. fr.);
7. 1939 « caractère essentiel d'un être qui en constitue la valeur intrinsèque, en justifie l'existence » (
Saint-
Exup.,
Terre hommes, p. 251: La
vérité des gazelles est de goûter la peur).
II. Loc adv.
1. de vérité 1174-80 « en vérité » (
Chrétien de Troyes,
Perceval, éd. F. Lecoy, 3754);
2. en vérité a) ca 1274 « d'une manière vraie; véritablement »
dites en vérité (
Adenet le Roi,
Berte, éd. A. Henry, 1105);
b) ca 1456-67 sert à renforcer une affirmation
En vérité, monseigneur (
Cent Nouvelles Nouvelles, 96
eNouvelle, éd. Fr. P. Sweetser, p. 541, ligne 63);
c) 1672 « formule évangélique »
En vérité, en vérité, je vous le dis (
Saci,
Bible, Év. St Jean ds
Littré);
3. à la vérité 1485 (
Myst. Vieux Testament, 37574, éd. J. de Rothschild, t. 5, p. 41);
4. dans la vérité 1671 (
Sévigné,
op. cit., t. 1, p. 317). Empr. au lat. class.
veritas « la vérité, le vrai, la réalité », dér. de
verus « vrai, véritable, réel » (v. aussi
vrai); une forme pop.
verté est aussi att. du
xiieau
xives.