TAILLE, subst. fém.
Étymol. et Hist. A. 1. a) α) ca 1140 « estimation, évaluation » (
Geffrei Gaimar,
Hist. des Anglais, éd. A. Bell, 6112: par
taille);
β) 1160-74 « sorte d'impôt » (
Wace,
Rou, éd. A. J. Holden, III, 2008);
b) α) ca 1160 fig. (
Enéas, éd. J.-J. Salverda de Grave
2, 8078: bien l'a Amors mise an sa
taille);
β) ca 1188 « baguette fendue en deux au moyen de laquelle un commerçant et un client font le compte des articles achetés en portant à chaque achat une encoche sur les deux parties appliquées l'une contre l'autre » (
Aimon de Varennes,
Florimont, 4942 ds T.-L.);
2. a) α) Ca 1165 « ciselure » (
Benoît de Ste-
Maure,
Troie, éd. L. Constans, 1825);
β) 1621 « chacune des incisions faites avec le burin dans le cuivre, en gravure » (
Binet,
Essay des merveilles de nature, Rouen, R. de Beauvais et J. Osmont, p. 121);
b) α) 1176 « coupe, manière dont on coupe les vêtements, les tissus » (
Chrétien de Troyes,
Cligès, éd. A. Micha, 322);
β) ca 1298
pierre de taille, v.
pierre; 1562 « opération dans laquelle on coupe aux arbres fruitiers des bourgeons ou des branches » (
Du Pinet, trad. de l'
Histoire naturelle de Pline d'apr.
FEW t. 13, 1, p. 50a, déjà au sens de « déboisement, abattage » vers 1330,
Guillaume de Digulleville,
Pèlerinage vie hum., 9686 ds T.-L.);
c) 1240-80 « tranchant de l'épée » (
Baudouin de Condé,
Dits et Contes, éd. A. Scheler, t. 1, p. 83, 113);
d) 1268
la taille de la monoie (doc. ds
Gdf. Compl.);
e) av. 1526 mus. (J.
Marot,
Œuvres, V, 118 ds
Littré: Voyla com d'Alvian desiroit la bataille, Pensant en sa musique faire la contre et
taille);
f) 1636 chir. (
Monet:
taille pour le calcul, la pierre; déjà att. en 1603 au sens de « césarienne » ds
Boutillier,
Somme rurale, Paris, B. Macé, p. 548 d'apr.
La Curne et comme subst. masc.
taill « incision » en 1387-89,
Gaston Phébus,
Livre de la chasse, éd. G. Tilander, 40, 26);
g) 1765 minér. (
Encyclop.).
B. 1. a) α) ca 1200 « stature » (
Beuve de Hantone, I, 1409 ds T.-L.: Arondel, qui est de boine
taille);
β) 1538 « longueur du corps humain, de la plante des pieds au sommet de la tête » (
Est. d'apr.
FEW t. 13, 1, p. 50b); 1611
il n'est pas de taille pour estre si mal traitté (
Cotgr.); 1636
être de taille à (+ inf.) (
Corneille,
L'Illusion, II, 7, 539 ds
Œuvres, éd. Marty-Laveaux, t. 2, p. 461);
b) ca 1306 « grandeur, grosseur et conformation du corps (par rapport aux vêtements) » (
Guillaume Guiart,
Royaux Lignages, éd. Wailly et Delisle, 17559: Armez de cotes a leurs
tailles);
c) α) 1677 « dimension d'un objet quelconque » (
Sévigné,
Lettre du 3 juil. ds
Corresp., éd. R. Duchêne, t. 2, p. 483);
β) 1957
de taille « très grand, très important » (
Mathiot,
Éduc. mén., p. 57);
2. a) 1657 [éd.] « corps humain depuis les épaules jusqu'aux hanches » (
Scarron,
Roman comique, Paris, G. de Luyne, 2
epart., p. 175);
b) 1718 [éd.] « partie plus ou moins resserrée du tronc entre les côtes et les hanches » (
Fénelon,
Dialogue des morts, Paris, Delaulne, t. 1, p. 35);
c) 1839 « partie du vêtement qui se resserre au niveau de la ceinture » (
Toepffer,
Nouv. genev., p. 392:
taille basse);
d) 1842 « corsage d'une robe de femme » (
Balzac,
Albert Savarus ds
La Comédie humaine, éd. P.-G. Castex, t. 1, p. 916);
e) 1877
en taille (A.
Daudet,
Nabab, p. 238). Déverbal de
tailler*.
Taille « sorte d'impôt » dérive du sens de « baguette fendue en deux, dans laquelle on fait des incisions », v.
Z. fr. Spr. Lit. t. 66, 1956, pp. 36-39. Au sens de « stature »,
taille est issu de
(bien) taillié (d'une personne), v.
taillé.