PROVINCE, subst. fém.
Étymol. et Hist. A. 1. 1160-74 « circonscription ecclésiastique » (
Wace,
Rou, éd. A. J. Holden, III, 9257);
2. 1680 « réunion de maisons religieuses dépendant d'un même supérieur » (
Rich.).
B. Ca 1165 « contrée, pays » (
Benoît de Ste-Maure,
Troie, éd. L. Constans, 23139);
ca 1175 (
Id.,
Chron. des ducs de Normandie, éd. C. Fahlin, 70; 14271).
C. 1. Ca 1175 « circonscription territoriale, état » (
Id.,
ibid., 444);
ca 1265 (
Brunet Latin,
Trésor, I, 122, 7, éd. F. J. Carmody, p. 111 : c'est [la Judée] une grant
province);
2. a) « certaine étendue de pays faisant partie du royaume de France » 1328
province de Poitou (
Chron. d'apr.
G. Dupont-Ferrier ds
R. hist. t. 160, 1929, p. 255, note 11); 1384 synon. de
bailliage :
ès provinces et ès bailliages de nostre royaume (
Pièces [...]
règne de Charles VI, éd. Douët d'Arcq, t. 1, 1863, p. 55); 1477 en parlant du comté d'Artois (
Ordonnances [...]
3erace, t. 18, éd. de Pastoret, p. 307);
b) 1675, 20 oct. désigne les habitants de ce pays (
Sévigné,
Lettres, éd. E. Gérard-Gailly, t. 1, p. 885 : Je prends part à la tristesse et à la désolation de toute la
province);
3. a) 1653 spéc., en France, p. oppos. à la capitale (
Racan,
Vie de Malherbe ds
Œuvres ds
Malherbe, Paris, Barbou, 1723, t. 1, p. 40 : Dois je dans la
province établir mon séjour? [
cf. La Fontaine,
Fables, III, 1 ds
Œuvres, éd. R. Groos, 1954, t. 1, p. 690, note 4]); 1672
vicomte de province (
Molière,
Comtesse d'Escarbagnas, XI);
b) 1672, 11 déc. plur. « l'ensemble de ceux qui n'habitent pas à Paris » (
Sévigné,
op. cit., t. 1, p. 598).
D. Ca 1213 antiq. romaine (
Faits des Romains, éd. L. F. Flutre et K. Sneyders de Vogel, 656, 20). Empr. au lat.
provincia « circonscription territoriale gouvernée par un proconsul ou un propréteur » [D] (sens issu de celui de « domaine, sphère où s'exerce l'activité légale d'un magistrat [
? munus] »), spéc. « administration d'un territoire conquis », de là, à basse époque, et p. ext. « région, contrée, pays » (déb.
iiies.,
Tertullien ds
Blaise Lat. chrét.) [B];
cf. a. prov.
proensa ca 1140 Trad.
Code Justinien ds
Rayn.; au déb. du
ves. (418-422,
Blaise Lat. chrét.)
provincia désigne dans le vocab. de l'admin. eccl. le district d'un évêque métropolite [A]; à partir du
viiies., il entre dans le vocab. de l'admin. franque pour désigner une circonscription territoriale [C], devenant synon. de
ducatus, pagus, comitatus (fin 747 d'apr.
Dupont-Ferrier,
op. cit., p. 251, note 7).
Provincia « circonscription territoriale » a spéc. désigné la 1
reprovince romaine de Gaule, ébauchée en 123-122 par le consul Caius Sextus Calvinus et qui, en 59, au moment où César en prit le gouvernement, comprenait le bassin du Rhône depuis le confluent de la Saône jusqu'à la Méditerranée et allait des Corbières et des Cévennes jusqu'aux Alpes; d'où, par voie pop., l'a. prov.
Proensa (1130-48,
Marcabru, éd. J. Dejeanne, IV, 4; IX, 27; 1145-80,
Bernard de Ventadour, éd. C. Appel, XII, 36) et la forme sav. fr.
Provence, v.
provençal (
Ronjat, § 288;
Fouché, p. 642).