CAROTTE, subst. fém.
Étymol. et Hist. A. 1. 1393
garroite « plante dont la racine charnue est comestible » d'où « la racine même de cette plante » (
Ménagier, éd. Sté Bibliophiles fr., t. 2, p. 244); 1538
carote (
Estienne,
Dict. latinogallicum, s.v. daucus); 1564
carotte (
Liébault, p. 377 ds
Gdf. Compl.); d'où 1694
ne vivre que de carottes « vivre mesquinement »
(Ac.); 1878
avoir ses carottes cuites « être mourant, agoniser » (ds
FEW t. 2, 1,
s.v. carota, p. 396b, sans ex.); p. anal.
2. 1721, 1
eraoût
tabac en carotte « rouleau de feuilles de tabac en forme de carotte » (
Déclaration rendue à la suite du rétablissement du privilège de la Ferme générale ds
Brunot t. 6, p. 491); 1723
carotte de tabac (
Savary des Bruslons,
Dict. universel de comm., Paris);
3. 1887-90 « petit cylindre de roche ou de terrain que l'on extrait du fond d'un trou de sonde »
(Gde Encyclop.);
4. 1846
couleur carotte « couleur rouge » (
Balzac,
La Cousine Bette, p. 434 : une girafe couleur
carotte); 1858 adj.
cheveux carotte (
Larch., p. 432).
B. Fig. et fam.
a) 1784 arg. de la police
tirer la carotte « extorquer à quelqu'un des aveux par des moyens adroits » (
Esn., sans ex.); d'où 1831
tireur de carottes « prétexte inventé pour soutirer de l'argent » (Raspail ds
Esn.);
b) 1966, 10 févr. « avantage accordé pour obtenir l'assentiment, la confiance d'une catégorie de subordonnés, d'administrés » (
Le Monde ds
Gilb.); 1969, 2 janv.
le bâton et la carotte (La Croix, ibid.). Empr. au lat.
carota «
id. » (
Apicius, 3, 21 tit. ds
André Bot.) lui-même empr. au gr. κ
α
ρ
ω
τ
ο
́
ν (Diphilus Siphnius ap.
Ath. 371c [texte douteux] ds
Chantraine); A 3 est, comme A 2, issu de A 1 p. anal. de forme; l'hyp. d'un empr. à l'angl. (
Dauzat 1973) est à écarter, l'équivalent étant dans cette lang. :
core-sample ou
core, terme des mines, proprement « centre d'une masse, noyau » (
Harrap's standard French and English dictionary, English-French, ed. with Suppl. 1962); A 4 p. anal. de couleur. B a dér. de A, peut s'expliquer par le fait que l'on sort les carottes longues de terre en tirant doucement sur les feuilles (si on tire trop brutalement, les feuilles s'arrachent et la carotte reste dans la terre); peut-être aussi infl. de
carotter « jouer mesquinement, ne hasarder que peu » (d'où l'idée de prudence et de ruse qu'implique l'expression
tirer la carotte); b,
cf. aussi l'expr. angl.
to dangle a carrot « agiter la carotte » 1897 (
Westm. Gaz. 24 Aug. 2/2 ds
NED Suppl.) c'est-à-dire « faire des promesses pour attirer quelqu'un ». Pour d'autres explications,
cf. supra rem. sous D
in fine.