BÉLIER, subst. masc.
ÉTYMOL. ET HIST. − 1. 1412 « mâle de la brebis » empl. comme nom de pers. (
Bibl. de l'Ec. des Chartes, 5
esérie, I, 225 dans
Gdf. Compl. : Despense faite le quatriesme jour de juillet 1412 en l'ostel de
Belier [nom d'un chanoine de la Ste Chapelle]); p. anal.
2. a) 1548 milit. « poutre de bois armée en son extrémité d'une tête de bélier en airain et employée par les anciens et au Moy. Âge pour renverser les murailles des places assiégées » (
Rabelais,
Quart Livre, 61, éd. Marty-Laveau, t. 2, p. 486);
b) 1796-1821 p. ext. « tout élément de force capable de briser ou renverser un obstacle matériel ou moral » (
J. de Maistre,
Correspondance, t. 1, p. 113);
3. 1587 sens libre « mari trompé (à cause des cornes que l'on lui prête) » (
Cholières,
2eAp. Disnee, p. 67 dans
Hug. : Le Seigneur Rodolphe mourroit, ou il faudroit qu'elle mourut, si elle le faisoit
belier);
4. technol.
a) 1660 « machine servant à enfoncer des pieux » (
Oudin,
Tresor des deux lang. espagnolle et françoise, 2
epart.);
b) 1797-98
bélier hydraulique « machine servant à élever l'eau, inventée par les frères Montgolfier et Argant » (
Annales de l'agric. fr., t. 1, an VI, p. 310);
5. 1680 astron. (
Rich.).
Issu, avec changement de suff., de l'a. fr.
belin « bélier » (
ca 1178,
Renart, éd. M. Roques, branche I, 1368 et
passim, nom propre donné au mouton); déjà
ca 1151
Belinus nom propre du mouton dans l'
Ysengrimus, cf. renard*), qu'il finit par évincer.
Belin est − soit une adaptation du néerl.
belhamel (
Gallas) composé de
bel « cloche » et de
hamel « mouton » littéralement « mouton à sonnaille », celui qui marche en tête du troupeau, bien que le composé néerl. ne semble pas attesté av. le dict. de Kiliaen [1599] d'apr.
FEW t. 15, 1
repart., p. 92b;
cf. cependant le corresp. angl., de formation analogue,
belwether, attesté dep. 1284 dans
MED; − soit empr., avec suff.
-in* au m. néerl.
belle « cloche » (
Verdam), d'où la désignation, en fr., de l'animal porteur de cloche, le bélier; à l'encontre de cette hyp., le fait que le m. néerl.
belle n'a pas été empr. par le fr. au sens de « cloche »; aussi est-il difficile d'affirmer avec
EWFS2que
belin a été à l'origine adj. dans
mouton belin « bélier » (v. cependant
bélière). Même objection contre l'hyp. de A. Schossig dans
Rom. Forsch., t. 71, 1959, pp. 27-43 pour qui
belin est dér. du m. néerl.
bel non au sens propre de « sonnaille » mais au sens de « testicules » (
cf. le sens de
cloche dans
Renart, éd. Roques, 928); le m. néerl.
bel étant à rapprocher du néerl.
bal « balle, boule » dont les corresp. en diverses lang. ont connu le même sens dér. (
FEW t. 15, 1, p. 44,
s.v. balla). L'hyp. d'une dér. de l'a. fr.
beler (bêler*
) d'orig. onomatopéique (
Barb. Misc. t. 2, n
o6;
Valkh., pp. 57-58) offre moins de vraisemblance; cependant les objections d'ordre phonét. formulées par Meyer-Lübke dans
Die Neueren Sprachen, t. 35, 1927, pp. 569-570 (l'a. fr. ayant selon lui connu
beeler et non
beler) ne semblent pas justifiées (v. dans T.-L. les nombreuses attest. de l'a. fr.
beler).