ANCHE, subst. fém.
Étymol. ET HIST. − 1. 1388 lat. médiév.
enchia, pays de Vaud (Lausanne) « goulot de fontaine » (
Comptes Recteurs, V, 3,
Morel-Fatio,
Gloss. patois ds
Pat. Suisse rom. t. 1 1924-33, p. 389 : Pro
enchia metalli bornelli [fontaine] ante magnam ecclesiam), sens encore attesté dans ce dial.; 1402 a. norm.
ence « conduit servant à écouler l'eau, gouttière » (
Denombr. du baill. de Rouen, Arch. P 307, f
o94 r
ods
Gdf.,
s.v. enche : Si y avons un gort en Saine et la X
esepmaine d'acquis de fours a ban, et de ceulx qui doivent les
ences et plusieurs autres forfaitures); 1413 a. norm.
anche « goulot » (
Aveux du bailliage d'Evreux, Arch. P294, reg.4,
ibid. : .XXIIII. pos de vin et .XXIIII.
anches); av. 1585
anche « tuyau par lequel le vin s'écoule du pressoir » (
Ronsard,
Gayetez, 3 ds
Hug. : L'un tout autour du pivot fait rouer La viz qui geint, l'autre le marc asserre En un monceau, et d'aiz pressez le serre, L'un met à l'
anche un panier attaché, L'autre reçoit le pepin escaché); 1655
enche (
Borel,
Dict. des termes du vieux françois :
Enche, canal de pressoir), sens conservé dans les dial. norm. (
Moisy 1885), ang. (
Verr.-On. 1908), blésois (
A. Thibault,
Gloss. du pays blaisois, 1892), mosellan (
L. Zéliqzon,
Dict. des pat. romans de la Moselle, 1924) et du Centre (
Jaub. t. 1 1855); à rapprocher du sens noté dep.
Rich. t. 1 1680 :
Anche [...] Conduit de bois par où tombe la farine dans la huche;
2. 1530 mus. (
Palsgrave,
Eclaircissement de la lang. fr., éd. Génin, p. 261 : Rede to play or pype with −
anche); 1684
jeux d'anche (
Bull. archéol. du Comité des Travaux Historiques, Arts et Monuments, t. 3, p. 291 : ... la trompette, le clairon, le cromorne, la voix humaine et l'écho, et la musette, qui sont
jeux d'anche).
Empr. à l'a. bas frq. *
ankya « canal de l'os » (a. h. all.
ancha, ancho et
encho « jambe » ds
Graff t. 1 1834-46, col. 344), d'où, en fr., les sens de « conduit, goulot, embouchure » puis avec transposition au domaine de la mus. « lame mobile placée à l'embouchure d'un instrument »,
cf. lat.
tibia « jambe » et « flûte ». Dans la France du nord, le mot est prob. issu des dial. du Centre et de l'Ouest où le sens primitif de « conduit » est encore attesté (
supra). L'empr. au frq. a dû se produire très tôt (av. le
viiies.) puisque la palatalisation a pu avoir lieu. Mais on ne peut envisager un empr. au germ. car le mot étant propre au domaine gallo-rom. les formes à
en- initial ne peuvent pour des raisons phonét. remonter à *
ankya; étant donné leur ancienneté (1388 franco-prov.,
supra) elles ne peuvent être des altérations des formes en
an-; étant donnée leur localisation au domaine franco-prov. et prov. (fin
xvies.
enco « cannelle de tonneau » ds
Pansier,
Hist. de la lang. prov. à Avignon du XIIeau XIXes., t. 2, 1927, lexique),
FEW t. 15, 1
repartie, p. 21b les fait remonter au burg. et got. *
inka. La forme norm.
ence (1402,
supra) demeure difficile à expliquer (peut-être altération isolée de
anche?).
L'hyp. d'un empr. par l'intermédiaire de l'ital. (
Brüch,
Der Einfluß der germanischen Sprachen auf das Vulgärlatein, 1913, p. 51) n'est pas vraisemblable, l'ital. ne semblant pas attesté av. Carena [1778-1859] ds
Batt., et étant au contraire empr. au fr.