AMBASSADE, subst. fém.
Étymol. ET HIST. − [1299
ambasce « mission officielle auprès d'un haut personnage » (
Voy. de Marc. Pol., X, Roux ds
Gdf. : Il li distrent l'
ambasce por coi le grant sire des Tartars les envoie a l'apostoile ...;
ibid., XI :
embasce ...;
ibid., XIII :
Enbasce); 1299
ambaxee « message officiel destiné à un haut personnage » (
Ibid., VIII : En tel mainere con vos avez oï se contenoit en l'
ambaxee ke le grant sire envoie a l'apostoile por [lire : par] les deus freres); 1299
enbasee « mission officielle » (
Ibid., XVI : Li jeune bazaler fait sa
enbasee bien et sajemant)].
1352-1356
ambaxade « mission auprès d'un personnage éminent, d'un souverain » (
Jean Le Bel,
Chronique, I, 122 ds
Chronique de Jean Le Bel, éd. J. Viard et E. Déprez, Paris, [1904-1905] : Quant ilz furent si bien festiez, comme a eulx appartenoit, ilz conterrent au gentil conte et a son frere leur
ambaxade pour quoy il estoient expressement envoyez a eulx); 1387
ambassade (
Jeh. d'Arras,
Mélusine, 228 ds
Quem. t. 1 1959 : Les deux Chevaliers qui vindrent a Lusignan avec le gentil homme en
ambassade); 1680 (
Rich. :
Ambassade. Fonction d'ambassadeur).
Empr. à l'ital.
ambasciata, attesté dep. le
xiiies. au sens de « mission diplomatique » (
Brunetto Latini,
Il Tesoretto, I, 137 ds
Batt.) et, au sens de « message officiel » (
Iacopone da Todi,
ibid.); les formes
ambaxade, ambassade sont des emprunts directs; les formes
ambassee, ambasse, sont, en raison de leur provenance, des adaptations de l'ital., peut-être influencées par les équivalents de lat. médiév., tôt attestés dans le domaine ital. :
ambascia au sens de « service rendu » (
viie-
xies.,
Leg. Langobardorum, p. 659, 18 ds
Mittellat. W. s.v., 541, 10),
ambasciata au sens de « mission d'un envoyé dûment mandaté » (anno 1243,
Chartae Italicae, Ficker, 387,
ibid., 541, 17);
ambassee, forme solidement implantée puisqu'empruntée par l'angl.
ambassy (NED). L'ital.
ambasciata est emprunté à l'a. prov.
ambayssada (attesté dep. 1380-1400, au sens de « message »
Chron. des Albigeois, col. 35 ds
Rayn.;
cf. aussi a. prov.
ambaissat « message » 1155-1180,
Girart de Roussillon, éd. Hachette, II, 3891) dér. d'un plus ancien
ambaissa, correspondant au lat. médiév.
ambactia, attesté sous la forme
ambascia dans les lois barbares au sens de « service » (
Leg. Burgundionum. const., I, 104 ds
Mittellat. W. s.v., 541, 6,
Lex. Salica, Merov., 1, 4,
ibid., 541, 7 d'où le dér.
ambasciare « porter un message »,
Hincmar ann. 845-868,
ibid., 541, 55) et d'orig. germ. :
cf. got
andbahti « fonction », dér. du got.
and-bahts « serviteur », lui-même empr. au gaul. *
ambactos (formé de
amb- « autour » et de la racine verbale i.-e.
aĝ- « pousser, conduire ») « celui qui est conduit, envoyé autour » (
cf. kymr.
amaeth « servus arans », Pokorny, 4) latinisé en
ambactus, demeuré mot étranger synon. de « servus » (
cf. Paul. Fest., 4 ds
TLL s.v., 1833, 39 : ambactus apud Ennium lingua gallica servus appellatur; et
César,
Gall., 6, 15, 2,
ibid., 1833, 44 : [il s'agit des nobles gaulois] ut quisque est genere copiisque amplissimus, ita plurimos circum se ambactos clientesque habet). Le got.
andbahti, andbaths, est obtenu par assimilation de
am- au préf.
and-, tandis que l'a. haut all.
ambaht « serviteur »,
ambahti « service » (all.
Amt) reflète la forme celt.,
E. Schwarz,
Goten, Nordgermanen, Angelsachsen, Berlin, 1951, p. 19 voir aussi
Gam. Rom. t. 1 1934-36, p. 379. Pour des raisons phonét., l'ital.
ambasciata ne peut dériver directement du got.
andbahti ou du lat. médiév.*
ambactia, ces 2 formes ayant dû régulièrement se résoudre en
-zz- ou
-cci- (lat.
tractiare > ital.
tracciare;
directiare > ital.
dirizzare),
Cor.,
s.v. embajadá, d'où l'intermédiaire prov. où le mot a connu un remarquable provignement.
L'hyp. d'
Alinei (
Origin and history of the italian word ambasciata «
embassy », La Haye, 1963) : ital.
ambasciata, forme osco-ombrienne du lat.
in-bassare (<
bassus) signifiant à l'orig. « service, course, faits de la montagne vers la plaine » ne semble pas reposer sur des bases solides : voir la critique de Ruggero Stefanini ds
Rom. Philol., t. 18, pp. 469-475.