ACCUEILLIR, verbe trans.
Étymol. ET HIST.
I.− Trans. 1. Ca 1100
acoillir « pousser » (
Roland, éd. Bédier, 3968 : Quatre serjanz les
acoeillent devant Devers un' ewe ki est en mi un camp); fin
xiieid. « rassembler en poussant devant soi (des animaux) » (
Garin le Loherain, éd. G. Paris, I, 166 ds T.-L. : Parmi les chans veïssiez gens füir, Les pastoriaus lor bestes
accoillir); d'où mil.
xiieacueillir son chemin « se mettre en route » (
Cour. Louis, éd. Langlois, 1485 : Vait s'en Guillelmes, s'
acueille son chemin);
xiie-déb.
xiiies.
aqueldre a + inf. « commencer à + inf. » (
Renart, éd. Méon, 26.9 ds T.-L. : Quant Ysengrin le vit sevrer, Lors
aquelt a esperoner);
2. ca 1100
aquallir « assaillir » (suj. inanimé) (
Roland, éd. Bédier, 689 : Einz qu'il oüssent .IIII. lieues siglet, Sis
aquillit e tempeste e ored);
ca 1170
acuillir «
id. » (suj. animé) (
Rois, éd. Curtius, XIX, 9 : A une feiz li malignes esperiz
acuillid é traveillad Saül); d'où 1165-70
acoillir « atteindre, saisir » (
B. de Ste Maure,
Troie, éd. Constans, 21 094 ds T.-L. : Tot autresi com sueut li lous Entre les aigneaus fameillos... cui ne chaut qui que le veie, Quant il vueut
acoillir sa preie...);
3. apr. 1174
acuillir « recevoir (qq'un) » (
B. de Ste Maure,
Chron. d. Norm., éd. C. Fahlin, 3939 : Docement te requert e mande, Jusque li forz iver s'espande, Qu'en ceste terre nos
acuilles).
II.− Réfl. 1. mil.
xiies'acueldre a + inf. « se mettre à + inf. » (
Cour. Louis, éd. Langlois, 2687 : Donc
s'acuelt il
as granz barres colper);
ca 1170
s'aquiaudre « se mettre en route » (
Cligés, éd. Micha, 4178 : Devant l'empereor
s'aquialt);
2. 1195-1200
s'aquiaudre a « se joindre à » (
Renard, éd. Roques, VII b, 6368 : Chascuns se viaut
as bons
aquiaudre).
Du lat. vulg. *
accolligĕre, formé de
ad- et
colligĕre. Sont dominés par le sémantisme du préverbe les sens « pousser » et « attaquer » et leurs dér. (I 1 et 2; II 1, l'interprétation des ex. d'a. fr. corresp. paraît certaine, en dépit des rem. formulées par Gamillscheg ds
Z. rom. Philol., XLIII, p. 516; voir nombreux ex. fournis par Cohn ds
Arch. St. n. Spr., CXL, p. 84,
s.v. acoillir); les sens de « recueillir, recevoir » et « réunir » (I 3; II 2) émanent de
colligere, cueillir*
; à remarquer que
colligĕre n'est pas attesté au sens de « recevoir » av. l'
Itala (
Judith, 19, 15 ds
TLL s.v., 1611, 48 : non erat vir qui colligeret eos in domum refrigerare eos) où il traduit gr. σ
υ
ν
α
́
γ
ε
ι
ν, littéralement « mener avec (soi) »;
colligere au sens « admettre chez soi, recevoir » est donc un calque du gr. introd. de la Bible dans la lang. des clercs, dans celle des juristes (
cf. Grég. Tours,
Hist. Franc., II, 32 et
Loi salique, 56 ds
TLL, ibid., 1611, 63 et 65; G. Brereton ds
Medium Aevum, XI, p. 85-89), puis dans lang. vulg. (a. fr.
coillir, esp.
coger « recevoir »); le composé *
accolligĕre ayant hérité de ce sens, s'y est spécialisé puis l'a retiré au verbe simple. Pour l'explication du rad. et de la finale de l'inf.
(ac)cueill-ir et pour celle du type
accueudre, voir
cueillir (a. fr.
coillir et
cueudre).