AIRE, subst. fém.
Étymol. ET HIST. − 1
reattest.,
Rol., voir
infra II 3.
I.− Subst. masc. et
fém. 1. Mil.
xiies. hortic. fém. « planche de jardin, plate-bande » (
Psautier Cambridge, éd. F. Michel, 41, 1 ds T.-L. : Si cume la petite
aire [areola] est aparaille[e] as arusemenz des ewes);
2. 1160-70 « partie de la salle commune non occupée par le mobilier » (
Wace,
Rou, III, 3130, éd. Andresen cité par
Keller,
Vocab. de Wace, 210 a : Fist l'enperere el paleis faire Bancs e sieges envirun l'
eire);
3. fin
xiies. « surface dure ou l'on bat le blé » (
Dialogue Gregoire, éd. Foerster, 219, 23 ds T.-L. : la meisson cui il avoit semmeie de sa main, jus trencïe ot ameneit a l'
aire);
4. xiiies. géom. « surface (d'une figure géométrique) » (
Comput, f
o16 ds
Littré : Se tu veus trouver l'
aire du triangle equilatere).
II.− 1. 1086 « surface de rocher où l'aigle bâtit son nid » (
Exchequer-Domesday Book, Liber censualis Willelmi I Angliae, 1
repart., 256 et 265 d'apr. F. Hildebrand, ds
Z. rom. Philol. t. 8, p. 324); 1155 «
id. » (
Wace,
Brut, éd. Le Roux de Lincy, 9672 ds T.-L. : En chascune isle a un rochier, Iluec suelent aigle nigier, Faire lor niz et tenir
haire); 1393 masc. «
id. » (
Ménagier, éd. Soc. Bibliophiles, II, 284 et II, 285,
ibid.);
2. début
xiiies. masc. « origine, souche » (
Perceval, éd. Potvin, 13813,
ibid. : ne set encore noiant Ne dont il est ne de quel
ere Qui fu son pere ne sa mere); 1342 fém.
de bonne aire (
J. Bruyant,
Chemin de Povreté et de Richesse ds
Le Ménagier, éd.
qua supra, 11 b,
ibid. : Soies courtois et
debonnaire Comme uns homs estrait
de bonne aire); d'où
3. ca 1100 masc. « sorte, espèce » (
Rol., éd. Bédier, 763 : malvais hom de put
aire [trad. ,,de vile espece`` par G. Moignet, éd. Bordas, 1969]). −
xvies.,
Hug.
I du lat.
area, au sens 1 dep. Caton (
Agr., 151, 3 ds
TLL s.v., 499, 22 : areas facito pedes latas quaternos ... herbas de areis purgare ... ubi areae factae erunt, semen serito crebrum), au sens 3 aussi dep. Caton (
ibid., 129,
ibid., 498, 24 : aream, ubi frumentum teratur, sic facito); à rapprocher de 2 :
Fest., 13,
ibid., 497, 65 : atrium proprie est genus aedificii ante aedem continens mediam aream, in quam collecta [...] pluvia descendit; au sens 4 dep. Vitruve (
Vitr., 3, 1, 3,
ibid., 499, 35 : invenietur eadem latitudo uti altitudo, quemadmodum areae, quae ad normam sunt quadratae); II prob. du lat.
agru « fonds de terre » par un développement phonét. semi-sav.,
Fouché t. 2 1958, p. 502; l'a. prov.
agre « nid d'oiseau »,
xiies. Arnaud Daniel ds
Rayn., et « famille, extraction »,
xiiies.,
Breviari d'amor ds
R. Lang. rom. t. 15, p. 180, ne peut en effet remonter à l'étymon lat.
area, voir
REW3s.v. ager.
L'hyp. qui consiste à faire remonter I et II au lat.
area (
FEW, s.v. area, Bl.-W.4,
Dauzat 1968) oblige à dissocier de l'a. fr., l'a. prov., de sens identique à II, et à reconnaître néanmoins l'influence de l'a. prov.
agre (< lat.
agru) de genre masc. sur les formes de l'a. fr. (
Bl.-W.4). Dans tous les cas il faut admettre des interférences entre les représentants de
agru et ceux de
area comme en témoigne visiblement l'hésitation entre le masc. et le fém.