| * Dans l'article "VÉGÉTER,, verbe intrans." VÉGÉTER, verbe intrans. A. − 1. [Le suj. désigne un végét.] Pousser; produire des organes végétatifs. La campagne végète avec recueillement. Les plantes, peu à peu, sûres d'avoir le temps, Réalisent leur forme (Romains, Vie unan., 1908, p. 57).Le poirier est plus exposé [au gel] que le pommier car il végète plus tôt (Boulay, Arboric. et prod. fruit., 1961, p. 73).V. animation ex. 2, arbrisseau ex. 1, grener ex. 1. − P. anal., vx. [Le suj. désigne un humain] S'épanouir physiquement. Je me sentais vivre et végéter avec la nature dans une espèce de panthéisme (Chateaubr., Mém., t. 1, 1848, p. 336). − Vx, p. métaph. ou au fig. Se former, prendre de l'extension. Les fables végètent, croissent, s'entremêlent et fleurissent dans les lacunes de l'histoire écroulée, comme les aubépines (...) dans les crevasses d'un palais (Hugo, Rhin, 1842, p. 116).V. alarme ex. 28. 2. Vx. [Le suj. désigne un animal ou un élément organique] Synon. se développer, grandir.Mon polype qui grossit, s'étend, végète (Toepffer, Nouv. genev., 1839, p. 262).Poursuis, comme l'astérie (...) qui végète au fond de l'Océan, ton obscur travail de vie (Renan, Souv. enfance, 1883, p. XXI). B. − 1. [Le suj. désigne un végét.] Avoir, présenter une vitalité amoindrie (taille plus petite, couleurs plus pâles) sous l'effet de mauvaises conditions de terrain, de lumière, etc. Synon. languir.La végétation silvestre est mal à l'aise. Dès que les cimes dépassent environ 1 200 mètres, la forêt, si robuste dans les parties inférieures, végète, se change en taillis buissonneux de hêtres tordus (Vidal de La Bl., Tabl. géogr. Fr.1908, p. 192).V. étioler ex. − [Le suj. désigne un microorganisme] Vivre d'une manière latente, ralentie. La spore tétanique peut végéter longtemps en conservant tout son pouvoir pathogène (Garcin, Guide vétér., 1944, p. 207). 2. P. anal., rare. [Le suj. désigne une chose concr.] Manifester une certaine faiblesse. Quelques vieillards sans joie autour d'une lumière Qui végète (...); Faible lueur, clarté triste (Rodenbach, Règne sil., 1891, p. 81). 3. P. anal. ou au fig. [Le suj. désigne gén. une pers.] a) Vivre d'une manière purement organique, avec des facultés intellectuelles très diminuées ou complètement anéanties. Il est condamné par les médecins (...) à végéter toujours à l'état d'enfance ou d'idiotisme (Mérimée, Lettres à Mmede Beaulaincourt, 1867, p. 48).Des créatures qui ont souffert toute leur vie, dont l'enfance rachitique a été sans soleil et sans jeux, qui ont tout le temps végété dans des logis sombres (Loti, Chât. Belle-au-bois-dorm., 1910, p. 255). b) Être réduit à l'inaction, à l'oisiveté; mener une existence monotone, dépourvue d'intérêt. Le repos des hommes (...) qui savent végéter de longues heures dans les cafés (...), sans conversation et sans pensées, occupés uniquement à achever chaque jour le cercle étroit de leurs habitudes (Bonstetten, Homme Midi, 1824, p. 64).Triste et morne, il végétait entre son père au désespoir qui attribuait à une maladie de langueur l'état où il voyait son fils, et sa tante dévorée de chagrin (Balzac, Cabinet ant., 1839, p. 166). c) Être privé des moyens matériels nécessaires pour subsister ou se développer normalement; vivre dans la gêne, la misère. Synon. vivoter; anton. s'enrichir, faire fortune.Mon cousin (...) vient d'hériter (...). Ô fortune! Voilà de tes coups! et tu laisses un grand artiste comme moi végéter dans une médiocrité imbécile (Flaub., Corresp., 1841, p. 87).Là végètent des populations qui, (...) sur une terre en grande partie inculte et dépourvue de mines (...), sont pour les trois quarts plongées dans une misère qui est comme leur nature (De Gaulle, 1959ds Doc. hist. contemp., p. 217). − [Le suj. désigne une entreprise] Pol Neveux (...) écrivait, en 1929 (...): « Les bibliothèques françaises (...) traversent (...) une crise (...); à une époque où la production mondiale s'accroît (...), la plupart, avec leurs budgets d'avant guerre, végètent et déclinent » (Civilis. écr., 1939, p. 52-10). d) Être cantonné dans une situation (surtout professionnelle) médiocre, ne correspondant pas à ses aptitudes réelles et ne permettant pas de s'élever dans la hiérarchie sociale. Anton. réussir.Les fils des gens honnêtes, intelligents, sérieux, qui n'ont pas eu de chance dans leur carrière (...) ou ont végété toute leur vie dans des situations inférieures (Carrel, L'Homme, 1935, p. 360).V. bonnetier ex. 1, gâcher ex. e) Ne pas progresser sur le plan intellectuel, artistique, moral. Autrefois sa pensée active (...) donnait (...) la vie à tous les objets extérieurs; maintenant Sténio végétait (...) dans un voluptueux et funeste abrutissement. Il semblait dédaigner de faire emploi de son intelligence (Sand, Lélia, 1839, p. 413). − [P. méton.; le suj. désigne une forme d'expr.] Être à l'abandon, dépérir. Le genre [des Églogues] végète et se meurt; pour le vivifier, le recréer, il faut la verve de Boucher, l'éclat de son coloris, son imagination chaude et joyeuse (Nolhac, Boucher, 1907, p. 56).Duval releva le violon de l'état d'abaissement dans lequel il végétait (La Laurencie, Éc. fr. violon, 1922, p. 107). REM. 1. Végétateur, -trice, adj.,rare. [Corresp. à supra A] Qui fait végéter. La verdure ou la neige, l'éveil de la puissance végétatrice, la connaissance de la petite herbe qui attend son humble moment de fleurir (Claudel, Art poét., 1907, p. 139).Force végétatrice. Force qui, selon la théorie de Needham, créerait des organismes vivants. Needham (...) continue d'affirmer l'existence d'une force plastique ou végétatrice, capable d'engendrer la vie dans les infusions et de tirer des animalcules d'une plante morte. Cette force (...) ne doit pas être confondue avec celle qui fait végéter les plantes quand elles sont en vie (J. Rostand, Genèse vie, 1943, p. 57). 2. Végétement, subst. masc.,rare. [Corresp. à supra B 3 a et c] Action de végéter; résultat de cette action. Abandonnée par les maîtres qui lui insufflèrent la vie, la cité retourne à son lent végétement (Morand, Londres, 1933, p. 4). Prononc. et Orth.: [veʒete], (il) végète [-ʒ
εt]. Ac. 1694, 1718: vegeter, dep. 1740: végé-. Étymol. et Hist. 1. 1531 [date de l'éd.] « se développer (d'un être vivant) » (Raoul de Presles, Cité de Dieu, XXII, 4 ds Delb. Notes mss); 2. 1530 « accomplir les fonctions communes au végétal et à l'animal » (Palsgr., p. 705); 3. a) 1655 « croître, se développer (d'un végétal) » (Cyrano de Bergerac, Estats et Empire de la lune, p. 190); b) 1813 spéc. « pousser, croître difficilement » (Jouy, Hermite, t. 3, p. 186); 4. 1718 fig. « ne plus avoir ses facultés intellectuelles » (Ac.); 5. 1783 « se trouver dans une situation médiocre » (Loaisel de Treogate, Dolbreuse ou l'homme du siècle, p. 86). Empr. au lat. tardifvegetare « animer, vivifier, faire croître », « fortifier, vivifier (dans le domaine spirituel) », « vivre, grandir » (Blaise Lat. chrét.); dér. de vegetus « bien vivant, vif, dispos », dér. de vegere « être vif ». Fréq. abs. littér.: 335. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 826, b) 435, xxes.: a) 339, b) 280. Bbg. Gohin 1903, p. 366. − Quem. DDL t. 25, 28 (s.v. végétement). |