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VRAISEMBLABLE, adj. et subst. masc.
I. − Adjectif
A. − [En parlant d'une chose]
1.
a) Qui semble vrai, possible, envisageable au regard de ce qui est communément admis. Synon. crédible, plausible, probable.But, résultat vraisemblable; scène vraisemblable. [Cette coiffure des femmes de Granville] passe pour avoir été apportée chez nous par la Fée aux Miettes, de ses voyages d'outre-mer, et nos antiquaires conviennent qu'ils seraient fort embarrassés de lui assigner une origine plus vraisemblable (Nodier, Fée Miettes, 1831, p. 78).Bien que peu vraisemblable, le fait [le grand pouvoir de convaincre propre à Saint-Cyran] est certain (Bremond, Hist. sent. relig., t. 4, 1920, p. 39).
En partic., usuel. [S'agissant de paroles ou d'un discours, d'un raisonnement] Synon. crédible.Accusation, anecdote, calcul, conception, conclusion, conjecture, description, diagnostic, excuse, explication, histoire, hypothèse, idée, interprétation, mensonge, opinion, prétexte, raison, réponse, solution, supposition, théorie vraisemblable. Quand elle mentait, son récit péchait soit par insuffisance, omission, invraisemblance, soit par excès, au contraire, de petits faits destinés à le rendre vraisemblable (Proust, Prisonn., 1922, p. 179).V. admissible ex. 9.
P. ext. [En parlant d'un objet concr., de son aspect] Synon. de acceptable, plausible.Une paire de chaussettes, enfin! et un chapeau vraisemblable ne feraient pas mal dans ce paysage triste (Verlaine, Corresp., t. 2, 1887, p. 71).Par places, dans les replis de ces formes rondes [des rochers], des plantes ont poussé, qui n'ont pas l'air vraisemblable, tant elles sont nettes et éclatantes sur ces fonds couleur de vieux cuir (Loti, Inde sans Angl., 1903, p. 23).
b) [En parlant d'un événement] Incertain, mais qui a de fortes chances de se produire. Synon. possible, prévisible, probable.L'issue, hélas! trop vraisemblable de cet incroyable procès, pénètre mon ame d'horreur (Sénac de Meilhan, Émigré, 1797, p. 1768).L'étude du rôle présumé de la région fortifiée Metz-Thionville nous conduisait à considérer comme vraisemblable la violation de la Belgique (Joffre, Mém., t. 1, 1931, p. 116).
2. Domaine de la création littér. et artist.Qui ressemble à la réalité ou à l'idée qu'on s'en fait. Un arc de triomphe est à la fois un motif très idéal et très italien; une modeste fenêtre serait plus vraisemblable [dans les fresques de Ghirlandajo], toutefois la loggia où se tiennent la Vierge et le chancelier Rolin n'a rien de modeste et l'on peut douter qu'elle soit plus réelle (P. Lavedan, Urban., 1926, p. 207).[Racine] apportait un univers presque entièrement créé, ou plutôt transposé, un univers non pas uniquement vraisemblable, car cela c'est la copie de la réalité et non pas l'art, mais à la fois vraisemblable et merveilleux (Brasillach, Corneille, 1938, p. 487).
[P. allus. littér. à Boileau, L'Art poétique, III, 48: Le vrai peut quelquefois n'être pas vraisemblable (le vrai étant ici entendu dans le sens « vérité historique, vivante mais qu'on peut difficilement croire »)] En poésie il faut suivre la règle: le vrai peut quelquefois n'être pas vraisemblable (Chateaubr., Martyrs, t. 1, 1810, p. 71).V. semblance A ex. de Jankélévitch.
3. [Dans une tournure impers.]
a) [En incise, à l'intérieur ou à la fin d'une subordonnée cond.] Comme il/cela/la chose est vraisemblable. Comme on peut raisonnablement (le) supposer. Il est très possible que le soleil paraisse plus grand que Jupiter ou Vénus sur l'horizon d'Herschell, si cette planète est environnée d'une grande atmosphère, comme il est vraisemblable (Bern. de St-P., Harm. nat., 1814, p. 361).Comme il/cela/la chose est vraisemblable. Comme cela est probable. Si, comme la chose est vraisemblable, elle me gourmande, je suis résolu à ne rien lui cacher de ce que je pense (Duhamel, Confess. min., 1920, p. 31).
b) Il est/paraît/devient vraisemblable de + inf.Il est raisonnable, logique, normal de (faire quelque chose). Si les événements accomplis ont laissé des traces, il est vraisemblable d'imaginer que les événements à venir ont leurs racines (Balzac, Cous. Pons, 1847, p. 122).
c) Il est/paraît/devient (très, assez, infiniment, tout à fait) vraisemblable que
[Suivi de l'ind., le plus souvent à la forme affirm., quand on considère le fait dans sa certitude ou dans sa très forte probabilité] Il faut croire que, il est probable que. S'il n'avait pas fumé depuis longtemps, il me parut vraisemblable qu'il n'avait pas mangé depuis quarante-huit heures au moins (Mérimée, Carmen, 1845, p. 8).La pensée casse; la pensée choque et offense. La pensée inquiète aussi le pensant. Composez un tribunal d'hommes; peut-être ils choisiront le singe. Mais que dis-je là? N'est-il pas vraisemblable que les singes l'ont emporté depuis longtemps sur les hommes, en ce droit érudit et accumulant, où les textes font pensée? (Alain, Propos, 1923, p. 506).
[Suivi du subj.]
[Dans un énoncé affirm., quand on veut nuancer l'affirm.] Vingt fois je fus sur le point de renvoyer chercher cette lettre (...). Plus l'heure à laquelle il était vraisemblable qu'elle me répondît approchait, plus je regrettais d'avoir écrit (Dumas fils, Dame Cam., 1848, p. 151).Pour des mots vides, sa conscience avait été déformée, son avenir détruit! Pour des mots encore, il avait souffert, expié. Il devenait vraisemblable qu'il n'y eût rien au delà [de l'existence], comme il n'y avait rien eu en-deçà (Estaunié, Empreinte, 1896, p. 234).
[Dans un énoncé interr. ou nég., quand le fait n'est envisagé que dans la pensée] Était-il vraisemblable qu'une si enivrante beauté eût traversé le monde et fût arrivée jusqu'à cette maturité (...) sans avoir embrasé sur son passage un de ceux sur qui ses regards s'étaient posés? (Lamart., Raphaël, 1849, p. 146).Il n'avait jamais été, cependant, vraisemblable que la flotte française entamât d'elle-même des hostilités contre les Britanniques [la flotte britannique venait d'attaquer l'escadre française au mouillage à Mers-el-Kébir] (De Gaulle, Mém. guerre, 1954, p. 77).V. admissible ex. 16.
[Suivi du cond., pour exprimer la probabilité plus ou moins grande, l'éventualité du fait] Le lendemain fut attendu avec d'autant plus d'impatience, qu'il étoit vraisemblable que les plaidoiries auroient lieu, et que dans la nuit le jury prononceroit son arrêt (Balzac, Annette, t. 4, 1824, p. 37).Si un financier annonce à sa famille: « J'ai perdu un million en spéculant sur le Rio Tinto; je suis ruiné, je vais me suicider », il est vraisemblable que de telles paroles ne sauraient s'entendre sans émotion (Bally, Lang. et vie, 1952, p. 75).
B. − [En parlant d'une pers.]
1. Domaine de la création littér. et artist.
a) Dont le propos ou l'œuvre satisfait à l'idée qu'on se fait de la réalité. On a deviné que le matelas étalé par terre, dont il fut parlé plus haut, appartenait à Clotilde. Il serait facile de passer pour un narrateur infiniment vraisemblable en supposant une couche moins romantique et plus douce. Mais telles sont les mœurs d'un certain monde populaire et cette histoire douloureuse n'est que trop véridique en ses détails (Bloy, Femme pauvre, 1897, p. 30).L'artiste ne sera plus soumis au scrupule contraignant, limitatif de rester véridique [dans un art où l'imagination est prépondérante] ; il lui suffira d'être vraisemblable (Huyghe, Dialog. avec visible, 1955, p. 255).
b) [En parlant d'un personnage] Qui, dans une fiction, a toutes les apparences d'un personnage réel. L'adorablement romanesque et pourtant vraisemblable Tess (Alain-Fournier, Corresp.[avec Rivière], 1906, p. 243).L'histoire [La Bossue courageuse de Balzac] commence par faire peur en évoquant des brigands vraisemblables; après quoi l'imagination développe des horreurs par la parole et le geste (Alain, Propos, 1932, p. 1105).
2. Rare. Qui présente des caractères compatibles avec sa dénomination. Voyons, reprit-il avec bonhomie, ne cherchez pas. Cette personne est ma tante, une tante vraisemblable, une femme, une vieille (Balzac, Splend. et mis., 1847, p. 612).Synon. de possible.Tout le monde a peur de ce vieux renard de Duputel [candidat à la présidence de la Chambre]. Mais je vous mets au défi de me nommer un outsider vraisemblable (Vogüé, Morts, 1899, p. 338).
II. − Subst. masc.
A. − Ce qui ressemble le plus à la réalité, à la vérité. Elle me raconta mille choses à peu près sincères (...) sur sa vie de New-York, sur ses petites amies de là-bas. Je n'arrivai pas à démêler tout à fait le vraisemblable, dans cette trame compliquée de dollars, de fiançailles, de divorces, d'achats de robes et de bijoux dont son existence me paraissait comblée (Céline, Voyage, 1932, p. 70).
B. − LOG., lang. cour. Ce qui est possible au regard du sens commun. (Fixer) les limites du vraisemblable; (n')atteindre (que) le vraisemblable. L'enfant est crédule, comme tout primitif; le sens du vraisemblable n'existe pas en lui; le miracle ne le surprend pas (Martin du G., J. Barois, 1913, p. 448).Aristote a établi la technique de la parole feinte sur l'existence d'un certain vraisemblable, déposé dans l'esprit des hommes par la tradition, les Sages, la majorité, l'opinion courante, etc. Le vraisemblable, c'est ce qui, dans une œuvre ou dans un discours, ne contredit aucune de ces autorités (R. Barthes, Crit. et vérité, 1966, p. 14).V. irréfutable A ex. de Arnoux, Rêv. policier amat., 1945, p. 63.
Rare. Le vraisemblable est que. Combien deux ou trois ans sont un long espace de temps, quand l'effroi et la douleur en marquent tous les instans! voilà le possible; le vraisemblable est que le monstre, qui gouverne, ne pourra échapper au fer d'un assassin ou à la hâche qui ne peut s'émousser dans ses mains (Sénac de Meilhan, Émigré, 1797, p. 1689).
C. − LITT. [Souvent opposé à vrai, quand vrai signifie « vérité, réalité particulière »] Vérité générale, admise par tous; ce qui est reconnu par tous comme étant conforme à la réalité. Hugo a bâti tout son livre [Les Misérables] avec du vraisemblable et non avec du vrai, avec ce vrai qui achève toutes choses et tout homme dans un roman par l'imprévu qui les complète. Là est le défaut et la misère profonde de l'œuvre (Goncourt, Journal, 1862, p. 1067).
[À l'époque class.] Conformité aux lois du genre. Chez les classiques français, (...) la comédie a son propre vraisemblable, différent de celui de la tragédie; il y a autant de vraisemblables que de genres, et les deux notions tendent à se confondre (T. Todorov dsCommunications, 1968, no11, p. 2).
Ensemble des conventions qui font croire au lecteur qu'une œuvre, un discours ressemble à la réalité, à la vérité. Le vraisemblable est le masque dont s'affublent les lois du texte, et que nous devons prendre pour une relation avec la réalité (T. Todorov dsCommunications, 1968, p. 3).
REM. 1.
Vraisemblabilité, subst. fém.,rare. a) Qualité d'une œuvre qui fait constamment référence au vraisemblable notamment dans la description des mœurs. La « vraisemblabilité » (...) chez Bourget, est parfaite. Émule de Balzac, il est profondément enfoncé dans la réalité. Il ne s'y empêtre jamais (Gide, Journal, 1930, p. 992).b) Conformité à la logique du sens commun, à une époque donnée. Le problème majeur d'un casse est, en fait, celui des preuves. Selon la cour d'appel de Paris, deux éléments entrent en jeu: la crédibilité des déclarations, toutes pièces justificatives à l'appui, mais aussi leur « vraisemblabilité » (Le Point, 29 oct. 1984, p. 49, col. 1).
2.
Vraisemblant, -ante, adj.,rare. Qui est dans les limites du sens commun, de la pensée raisonnable. Il reprenait enfin confiance, tandis que tout, autour de lui, reprenait poids rassurant, mesure, position naturelle et vraisemblante réalité (Gide, Caves, 1914, p. 811).
Prononc. et Orth.: [vʀ εsɑ ̃blabl̥]. S intervocalique sourd, la composition demeure sentie. Ac. 1694, 1718: vray-semblable; 1740: vrai-semblable; dep. 1762: vraisemblable. Étymol. et Hist. 1. Adj. a) 1346 vraisemblables conjectures (Lettre du roi Philippe de Valois ds A. Thierry, Rec. de monuments inédits de l'histoire du Tiers État, t. 4, p. 137); b) 1370 comme il est vraisemblable [en incise], il est vraisemblable que (Oresme, Ethiques, éd. A. D. Menut, p. 99 et p. 489); c) 1660 spéc. art littér. (Corneille, Discours du poëme dramatique ds Œuvres, éd. Ch. Marty-Laveaux, t. 1, p. 14: Il n'est pas vraisemblable que Médée tue ses enfants); 2. 1610 subst. art littér. (Deimier, L'Académie de l'art poét., p. 273). De vrai* et semblable* (sur le modèle du lat. verisimilis « vraisemblable », de verus « vrai » et similis « semblable »); cf. ca 1265 raisons voirsamblables (Brunet Latin, Tresor, éd. F. J. Carmody, p. 177) forme att. jusqu'au xvies. (1530 veoirsemblable, v. Gdf.), comp. à partir de ver, veir, voir « vrai » (lat. verus, v. FEW t. 14, p. 329). Fréq. abs. littér.: 658. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 1 365, b) 468; xxes.: a) 607, b) 1 016. Bbg. Rech. sémiologiques. Le vraisemblable. Communications. 1968, no11, 168 p.