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VACHE, subst. fém. et adj.
I. − Subst. fém.
A. − ZOOL., ZOOTECHNIE
1.
a) [Désigne un genre] Bovidé domestique à cornes, femelle du taureau élevée principalement pour ses qualités de reproductrice et de laitière. Quelques vergers entourés de haies de pruniers sauvages, sous lesquelles ruminent de belles vaches tigrées de noir et de blanc, dont on entend les mugissements mélancoliques (Lamart., Tailleur pierre, 1851, p. 396):
1. C'est ainsi que j'ai cru, pendant des années, que les vaches avaient du lait et les bœufs du bouillon, parce que, quand le lait n'était pas bon, grand'mère disait: « C'est une mauvaise vache! » et que, quand le bouillon ne sentait rien, elle disait également: « C'est que le bœuf était mauvais!... » Gyp, Souv. pte fille, 1927, p. 10.
SYNT. Vache blanche, brune, noire, pie, rousse, tachetée; vache cornue, grasse, grosse, petite, pleine; vache beurrière, laitière, à lait; vache ardennaise, bretonne, hollandaise, normande; belle, bonne, énorme, grande, grosse, large, pauvre, petite vache; dos, écusson, flanc, mamelle, mufle, peau, pis, poil, queue, sabot de vache; bouse de vache; lait, fromage de vache; cloche de vache; troupeau de vaches; meuglement, mugissement de la vache; écurie, étable à vaches; gardien, marchand de vaches; la vache et son veau; la vache beugle, meugle, mugit; la vache broute, paît, rumine; la vache vêle, fait son veau; le petit de la vache; mener les vaches aux champs, en pâture; tuer, vendre une vache; mener la vache au taureau; acheter, avoir une vache; conduire, faire paître, garder, traire les vaches; s'occuper des vaches.
Vache landaise*. Vache taurelière*.
Vache douairière. Vache ayant déjà eu plusieurs veaux. (Dict. xixeet xxes.).
Vache sacrée. Animal vénéré dans différentes civilisations, notamment en Inde où il est le symbole de la terre nourricière et de la fertilité. Les anciens Égyptiens promenaient la vache sacrée, sept fois autour du temple, au solstice d'hiver (Dupuis, Orig. cultes, 1796, p. 43).
Le Ranz des Vaches. Air célèbre du folklore suisse. Là retentissent les accens du ranz des vaches, et s'élèvent les chalets hospitaliers (Senancour, Rêveries, 1799, p. 230).
b) P. ext. Femelle d'un bovidé autre que le taureau (aurochs, bison, zèbre). Avant le déjeuner il nous mène (...) voir l'important troupeau de vaches zébus qu'il a fait venir de N'Gaoundéré (Gide, Voy. Congo, 1927, p. 771).
Vache orignal. Femelle de l'orignal. Une question se posait brutalement d'elle-même quand une vache orignal (...) sortait du bois (Richesses Québec1982, p. 2391).
Vache de Tartarie. Synon. de yak.
c) P. anal. Vache marine [N. vulg. du morse et du dugong] On le donne cependant aussi [le nom d'ivoire] aux défenses de l'hippopotame, des vaches marines et autres amphibies (Nosban, Manuel menuisier, t. 2, 1857, p. 137).
2. P. compar., souvent péj., pop. ou fam.
a) Souvent péj. [Avec le physique de la vache] Être gras, gros(se) comme une vache; meugler comme une vache; avoir tout de la vache. Je reconnais qu'elle n'a pas l'air d'une vache, car elle a l'air de plusieurs, s'écria Mmede Guermantes (Proust, Guermantes 1, 1920, p. 232).Qu'est-ce que vous avez à me rouler des yeux de vache qui fait sa première communion? (Fombeure, Soldat, 1935, p. 19).
Sans nuance péj. [En parlant des yeux d'une pers.] Elle n'était pas mal, avec de beaux yeux de vache et des lèvres charnues (Queneau, Loin Rueil, 1944, p. 72).
(Couleur) queue* de vache. V. queue1I A 1.Poil (de queue) de vache. Poil roux. (Dict. xixeet xxes.).
b) [Avec les habitudes et le caractère prêtés à la vache] Paresse de vache; être rond, saoul comme une vache. Dix femmes panachées (...) couchées, vautrées, affalées sur le divan avec des coquetteries de vaches et de petits trémolos de leurs petits patins rouges (Goncourt, Journal, 1857, p. 429).
Pleurer* comme une vache.
Pleuvoir* comme vache (qui pisse). C'est un sale temps, dit Maillard, il pleut comme vache (Aymé, Puits, 1932, p. 161).
Faire la vache. Paresser, fainéanter. Sans doute, il s'y remettrait [au travail], il le fallait bien; mais ce serait le plus tard possible (...). Puis, ça lui semblait si bon de faire un peu la vache! (Zola, Assommoir, 1877, p. 489).
(Jouer) un tour de vache (à qqn). (Lui jouer) un mauvais tour. Synon. (jouer) un tour de cochon*.L'âge ça c'est le plein tour de vache... Les enfants c'est comme les années, on les revoit jamais (Céline, Mort à crédit, 1936, p. 647).
3. Locutions
a) À vaches, loc. adj. Montagne* à vaches. ALPIN. Chemin, sentier, voie à vaches. Chemin, sentier, voie facile à suivre. Montagne à vaches. Montagne dont l'ascension ne présente pas de difficultés. Une famille de mathieus, du genre saucissonneur, sème l'émoi chez les campeurs, tandis que glaciéristes ou rochassiers dédaignent la montagne à vaches, bonne au plus pour les philistins (Comment parlent sportifsds Vie Lang.1954, p. 176).V. montagne ex. de Gautrat.
b) En vache
α) Loc. adj. Coup (de pied) en vache
Coup de pied de côté, imprévisible, à la manière des vaches. Donner des coups de pied en vache. (Dict. xixeet xxes.).
Au fig., fam. ,,Manœuvre, procédé déloyal`` (Dubois 1980).
β) Loc. adv.
Fam. Dans une direction oblique. L'arme saisie à la poignée et à la grenadière, levée à la hauteur de l'oreille, et le coup qui part oblique, en vache, défonce, fait sauter les dents sous la plaque de couche! (Vercel, Cap. Conan, 1934, p. 239).
Au fig. D'une manière sournoise, déloyale. Tu en veux aux gens de leur soi-disant indifférence, alors de temps en temps tu leur mens ou tu leur fais un coup en vache, par représailles (Beauvoir, Mandarins, 1954, p. 568).
HIPP. Ruer en vache. Ruer du pied de derrière en le jetant en avant ou sur le côté. (Ds Lar. encyclop.). Se coucher en vache. ,,Se coucher en s'appuyant sur les coudes et en repliant les membres postérieurs sous le corps`` (Lar. encyclop.).
4. Expr., loc. fig., proverbes
a) Ça lui va comme un tablier à une vache. Ça ne lui va pas du tout. On leur mit [à ces deux drôles] (...) un bel habit galonné qui leur allait comme un tablier à une vache (Vidal, Delmart, Caserne, 1833, p. 250).
b) Parler français comme une vache espagnole*.
c) Une vache n'y retrouverait son veau. Il règne à cet endroit un désordre indescriptible. (Dict. xixeet xxes.).
d) Le plancher des vaches. V. plancher1I B 2 c.
Arg. de l'aviat. Aller aux vaches. Faire un atterrissage forcé, hors aérodrome. Synon. se vacher (infra dér.).Des trous d'air descendant (...) contraignent le planeur à l'atterrissage de fortune dans un champ. Mésaventure qui s'appelle joliment « aller aux vaches » (Le Nouvel Observateur, 3 juin 1983, p. 71, col. 1).
5. [P. réf. à une œuvre littér. ou à la Bible]
a) Adieu veau, vache, cochon, couvée. [P. réf. à La Fontaine, Fables, La Laitière et le pot au lait, 7, X] Adieu, belles promesses! Une silhouette intéressante de malade, une promesse d'attendrissement, et puis rien que des accents de cornemuse aggravés de mots repoussants. (...) Adieu, veau, vache, cochon, couvée (Barrès, Cahiers, t. 11, 1917, p. 310).
b) Chacun son métier, les vaches seront bien gardées. [P. réf. à Florian, Fables, Le Vacher et le garde-chasse, 1792, p. 52] Tout va bien lorsque chacun ne s'occupe que de ce qui le concerne. Un proverbe dit, riche de sens en sa bonhomie: « Chacun son métier, et les vaches seront bien gardées » (Pesquidoux, Livre raison, 1928, p. 252).
c) Les sept vaches grasses et les sept vaches maigres. [P. réf. au Songe de Pharaon, Genèse, 41] Période d'abondance à laquelle succède une période de disette, et, p. ext., période faste ou période néfaste. Il faudrait, pour me renverser, que trois gouvernements croulassent.Dame! Cela s'est vu.Que la terre manquât de récoltes.Rappelez-vous les sept vaches grasses et les sept vaches maigres (Dumas père, Monte-Cristo, t. 2, 1846, p. 100).Après les années de vaches grasses, Millaud connut celles des vaches maigres. Ses difficultés furent telles qu'au bord d'une liquidation lamentable, il dut céder Le Petit Journal à Émile de Girardin (Coston, A.B.C. journ., 1952, p. 24).
d) La vache à Colas (vx). Le protestantisme. C'est ainsi que le roi Soleil convertit ceux de la Vache à Colas, ou les jeta aux Allemands pour la gloire de la France unifiée (Clemenceau, Vers réparation, 1899, p. 391).
6. Empl. techn.
a) BOUCH., souvent péj. Viande de cet animal, vendue en boucherie sous l'appellation bœuf. Nous sommes assis (...) au bord d'une rivière, à manger un morceau de vache (Erckm.-Chatr., Conscrit 1813, 1864, p. 97).
Loc. fig. Manger de la vache enragée*.
b) HÉRALD. Animal représenté de profil, le museau allongé et la queue sur le flanc. Vache accornée, colletée, clarinée, passante, de gueule. Il s'appelait D'Urand ou Du Ranz (noblesse suisse, vaches sur azur) (Taine, Notes Paris, 1867, p. 167).
c) TANN. Peau tannée et corroyée donnant un cuir souple plus connu sous le nom de cuir lissé ou vachette. C'est avec cette peau (...) qu'on prépare: la vache lisse naturelle, fine ou forte, la vache d'Angleterre préparée à la manière anglaise avec des peaux de premier choix (Closset, Trav. artist. cuir, 1930, p. 5).Trousse toilette (...) Modèle en vache grainée (Catal. de jouets (B.H.V.), 1936).
P. méton., vx. Malle en cuir de vache que l'on plaçait autrefois à l'arrière d'une impériale; p. ext., valise de voyage en cuir. En descendant de voiture, il s'aperçoit que la vache qui contenait ses effets a été enlevée (Vidocq, Mém., t. 3, 1828-29, p. 12).Par les portes ouvertes don Luis apercevait partout des généraux dorés comme des reliures, ou des conseillers d'État qui s'affairaient parmi des malles béantes, dans l'embarras de ces grands paniers de diligence recouverts de cuir que l'on nomme des vaches (Morand, Flagell. Séville, 1951, p. 138).
B. − [Dénom. de différentes choses dans des domaines techn. divers]
1. ARCHITECTURE
a) Corne* de vache.
b) Côte de vache. Synon. de fenton (Chabat t. 2 1876).On ne trouve rien de plus ingénieux généralement, que de monter une armature en fer avec courbes, entre-toises, carillons, côtes de vaches, puis on hourde le tout en poteries ou en briques creuses (Viollet-Le-Duc, Archit., 1872, p. 68).
2. BOTANIQUE
a) Arbre à vaches. Synon. de arbre à lait*.V. lait II C 3 ex. de B. Delessert.
b) Herbe à (la) vache. Synon. de trèfle.P. anal. [Dans un jeu de cartes] Cependant, Mes-Bottes, qui regardait son jeu, donnait un coup de poing triomphant sur la table. Il faisait quatre-vingt-treize.J'ai la révolution, cria-t-il. Quinte mangeuse, portant son point dans l'herbe à la vache... Vingt, n'est-ce pas? (Zola, Assommoir, 1877, p. 627).
c) Blé* des vaches.
3. CAMPING. Vache à eau. Récipient en toile imperméable muni d'un robinet et destiné à stocker l'eau. Vache à eau, entièrement en toile de lin, forme jerrican. Ouverture bague en matière plastique avec gobelet formant bouton étanche (Catal. Manufrance, 1954, p. 201).
4. CHASSE. Vache artificielle. Simulacre de vache sous lequel les chasseurs se dissimulaient naguère pour surprendre les oiseaux et le gibier. Il y a une vache artificielle dont l'ingénieuse composition nous est venue de l'étranger; elle se porte sur les épaules avec des bretelles, comme une hotte (Baudr.Chasses1834).
5. ÉN. NUCL. Vache à radioéléments. Synon. de générateur de radionucléides. (Ds Nucl. 1975, Industries 1986).
6. IMPR. Partie de l'ancienne presse à bras composée de deux cordes fixées au rouleau permettant d'actionner le train de la presse. (Dict. xixeet xxes.).
7. MARINE
a) Joues de vache ou demi-joues. Demi-caisses de poulie (Dict. xixeet xxes.).
b) Nœud de vache. Nœud réunissant deux cordages, mais susceptible de se dénouer, contrairement au nœud plat (d'apr. Le Clère 1960).
8. MÉTALL. Branloire d'un soufflet de forge. (Ds Jossier 1881).
C. − P. anal. V. supra I A 2.
1. Pop., fam.
a) [P. réf. aux qualités laitières et reproductrices de la vache] Femme féconde et bonne nourrice. J'ai eu l'idée qu'on ne s'enrichissait guère à être nourrice. Alors, j'ai préféré amener les autres. Elle eut un faible sourire de femme intelligente, qui disait combien ce métier de vache laitière, au service des bourgeois, lui semblait une duperie (Zola, Fécondité, 1899, p. 133).Quand on voit Ragotte, avec ses seins énormes, près de son garçon grand, gros et gras, on lui dirait avec tendresse: « Vous êtes une bonne vache et vous avez fait un bon veau » (Renard, Journal, 1903, p. 840).
Vache à lait*.
Loc. Prendre la vache et le veau. Épouser une femme enceinte d'un autre homme. (Dict. xixeet xxes.).
b) Femme bien en chair, à forte poitrine. Dès le matin, la bataille commençait.Tiens! la grosse vache est levée! criait la belle Normande (Zola, Ventre Paris, 1873, p. 741).
c) Vache (laitière). Femme ou fille de mœurs légères. Oui, toutes les deux, des vaches, des salopes!... Voulez-vous savoir? Je couche avec les deux! (Zola, Terre, 1887, p. 284).
d) [P. réf. au caractère paresseux prêté à la vache] Personne sans courage, molle, avachie. Synon. vachard (v. ce mot A).Je suis devenu très timide, très paresseux, une vache stérile, une brute (Flaub., Corresp., 1875, p. 214).
2. Pop., arg.
a) [P. réf. au caractère hypocrite attribué à la vache] Personne très méchante ou d'une sévérité excessive. Synon. salaud.C'est une vache, cette femme là une vache! Elle a été toujours jalouse de me voir réussir (Aymé, Vaurien, 1931, p. 110).Le fameux copain dont je parle est en réalité le plus beau salaud que la terre ait jamais porté: la vache finie, voleur, menteur, égoïste, la saloperie incarnée (Giono, Gds chemins, 1951, p. 64).
Peau* de vache.
b) Agent de la sûreté. Le verbalisme, c'est toujours la pensée des autres. L'on appelle mots les idées dont on veut pas, comme on appelle vaches les sergents de ville, et vautour son propriétaire (Paulhan, Fleurs Tarbes, 1941, p. 120).
Mort aux vaches! [Insulte grave proférée contre les forces de l'ordre et passible de poursuites] Pour lui, toute insulte revêtait nécessairement la forme traditionnelle, régulière, consacrée, rituelle et pour ainsi dire liturgique de « morts aux vaches! » (...) Ah? Vous avez dit: « Mort aux vaches! » C'est bon. Suivez-moi (A. France, Crainquebille, 1904, p. 19).
Vache à roulettes. Agent de police se déplaçant à bicyclette. Des agents cyclistes arrivaient par pelotons. Pluche brailla:Voilà les vaches à roulettes: Louise le fit taire (Dabit, Hôtel Nord, 1929, p. 196).
c) Gardien de prison. Synon. maton2(arg.).C'est si bon d'être son maître de ne plus voir les vaches (Moreau, Monde prisons, 1887, p. 69).
d) Dénonciateur, mouchard. J'pouvais l'piquer (...) avec mon charlemagne (couteau); hein? Eh bien, croirais-tu qu'la vache s'est mise à table (le délateur m'a dénoncé)? (Brissac, Souv. prison, 1880, p. 44).
Croix* des vaches.
P. méton. Système de dénonciation dans une collectivité. Les instituteurs ont cessé d'infliger l'infamante corvée du « symbole » ou de « la vache », système de dénonciation en chaîne (L'Express, 27 janv.-2 févr. 1969, p. 31, col. 1).
3. Pop., fam. [En interj., juron exprimant l'aversion, la colère, l'hostilité envers qqn] Sale vache; bande, tas de vaches! Où as-tu gagné ça, vache! Tu viens de la retape, chameau! Attends un peu que je t'arrange! (Zola, Assommoir, 1877, p. 792).Ah vache! de saligaud de vache! Ah! Il m'étripe le voyou (Céline, Mort à crédit, 1936, p. 547).
(Ah!) la vache. [Exclam. exprimant le dépit, la réprobation] Ah les salauds, s'écrie Zazie, ah les vaches. Me faire ça à moi (Queneau, Zazie, 1959, p. 14).
[Dans des expr. où figure une partie du corps de la vache] Gueule de vache, poil de vache. Attends, fiel de corbeau! Attends, poil de queue de vache! (Claudel, Violaine, 1892, i, p. 501).Sale crevure. Je te tiens pourtant! Tête de vache, te voilà muselé (Aymé, Mais. basse, 1934, p. 137).
4. P. antiphr., pop., fam.
a) [Terme d'affection] Ma petite vache. À toi, vieille branche, vieille vache, vieux copain (Cendrars, Bourlinguer, 1948, p. 301).
b) [Exclam. exprimant l'admiration] Ah! La vache! Il était terrible!... Il me recavalait en mémoire!... (Céline, Mort à crédit, 1936, p. 682).
5. [Avec valeur d'épith.; suivi d'un subst. apposé] Pop., fam.
a) [À propos de qqn dont on a à se plaindre] Si seulement les Russes ou nos vaches de compatriotes se décidaient à nous en refiler [des mitrailleuses] (Malraux, Espoir, 1937, p. 523).[À propos de qqc. de pénible, de désagréable] Je dois couver une grippe, dit-il. Avec cette vache de temps (Nizan, Conspir., 1938, p. 206).
b) P. antiphr. [Comme intensif; à propos de qqc. de sensationnel, hors du commun] Un, une vache de...Il s'est payé une vache de moto. On s'est tapé un vache de gueuleton (Lar. Lang. fr.). Une vache de petite maison (Dubois 1980).
En exclam. Vache de temps, de boulot!
II. − Adjectif
A. − [En parlant d'une pers., de sa manière d'être]
1. Souvent péj., fam. Qui a un aspect bovin, inexpressif, sans intelligence. J'ai bien cru qu'il ferait un scandale à force de faire des remarques sur l'air vache des vieilles filles (Magnane, Bête à concours, 1941, p. 205).Il y a des chances pour qu'on ne les revoie pas demain matin, faisait Félicien exalté et en suçotant son mégot, l'œil vache (Cendrars, Bourlinguer, 1948, p. 284).
Vieilli. Qui est mou, sans ressort, sans énergie. Je me sens si molle... si molle..., sans volonté, sans courage, et si vache... Ah! oui... si vache! (Mirbeau, Journal femme ch., 1900, p. 246).
2. Pop., fam. Très méchant, sévère, sans pitié. Être vache avec/pour qqn; avoir un côté vache; qu'il est vache! Tu comprends, le truc, c'est de ne rien leur faire fiche, mais en ayant l'air vache! (Vercel, Cap. Conan, 1934, p. 93).Ne sois pas vache, mon amour, ne me fais jamais de mal; tu es tout ce qui me reste (Sartre, Âge de raison, 1945, p. 41).
L'amour vache. Amour violent, où s'échangent plus de coups que de caresses. C'est y qu' t'aimerais l'amour vache? Avec mézigue tu seras servi (Lacassagne, Arg. « milieu », 1928, p. 6).
B. − [En parlant d'une action, d'une chose] Pop. ou fam.
1.
a) Qui est mené à des fins méchantes et perfides. Coup, critique vache. Il venait de lui surgir dans la tête [au proviseur] une idée vache (Queneau, Enf. du limon, 1938, p. 20).
b) C'est vache (de). C'est méchant, cruel, injuste (de). C'est vache ce qui lui arrive:
2. Ce n'était pas un peu vache? Vous lui faisiez perdre sa journée? − Bien sûr. Et même une fois, on l'a arrêté pour de bon. Sans le patron qui est venu expliquer le cas, il passait en correctionnelle. C'était d'autant plus vache, que pendant ce temps-là, nous faisions venir du Vouvray de chez le bistrot, et que nous buvions l'argent de la couronne. Romains, Hommes bonne vol., 1932, p. 286.
2. Difficile à comprendre, ardu. Le sujet de l'épreuve était très vache (Lar. Lang. fr.).
3. [Toujours antéposé]
a) [Comme intensif] Une vache bagarre. Coincés qu'on s'est trouvés alors, entre les battants de la porte (...) ça nous foutait une vache terreur (Céline, Mort à crédit, 1936, p. 107).La dabe à Tonio arborait un vache coquard sur l'œil droit (Le Breton, Rififi, 1953, p. 170).
b) P. antiphr. Synon. bath, chouette2, épatant, super3.Une vache petite salle avec le ring attaché par des cordes, pour qu'il ne s'envole pas; avec des cuvettes, des brocs, des éponges, des serviettes, un matelas (Montherl., Olymp., 1924, p. 342).
Rem. Peut s'employer également à propos des personnes: une vache pépée (Rob. 1985).
Prononc. et Orth.: [vaʃ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. I. A. 1. Ca 1130 « femelle reproductrice de l'espèce bovine » (Lois de Guillaume le Conquérant, éd. J. E. Matzke, p. 6,5); ca 1290 vake laitiere, v. laitier; 1606 au fig. vaches a laict (Du Villars, Mém., II, an 1551 ds Gdf. Compl.); d'où a) loc. α) xves. pleurer comme une vache (Le Grant garde derriere, X, 3 ds IGLF); 1610 manger de la vache enragée (Béroalde de Verville, Le Moyen de parvenir, éd. H. Moreau et A. Tournon, p. 186); 1640 parler François comme une Vache Espagnolle (Oudin Curiositez); id. sorcier comme une vache, v. sorcier [cf. 1736, Marivaux, Le Télémaque travesti, p. 344: il n'y a point d'autres sorciers au monde que les vaches espagnoles]; 1690 quand chacun se mesle de son mestier, les vaches sont bien gardees (Fur.); 1833 aller comme un tablier à une vache (Vidal, Delmart, Caserne, p. 250); 1876 il pleut comme vache qui pisse, v. pisser; id. une vache n'y retrouverait pas son veau (Lar. 19e); β) 1690 allusion biblique (Fur.: le songe de Joseph fut la vision de sept vaches grasses, et de sept vaches maigres); 1897 connaître les sept vaches maigres et les sept vaches grasses (France, Mannequin, p. 236); b) 1534 poil de vache « couleur rousse » (Rabelais, Gargantua, XI, éd. R. Calder, p. 83); 1694 roux comme une vache, roux de vache (Ac.); c) 1548 plancher des vaches, v. plancher; 1902 montagne à vache (Écho des Alpes, no1, p. 38 ds Quem. DDL t. 27); d'où 1928 à vache « ridiculement facile (en parlant d'une course en montagne) » (La Montagne, no212, mai, p. 166, ibid.); d) α) bot. 1557 blé de vache (L'Escluse d'apr. Roll. Flore t. 8, p. 161); 1732 herbe aux vaches (Nouv. maison rustique t. 1, p. 309); 1801 chou-vache (Annales de l'agriculture fr., IX, p. 96 ds Quem. DDL t. 21); 1840 arbre-vache (A. Joanne et Old Nick, trad.: Cooley, Hist. gén. des voy., p. 225, ibid., t. 15); β ) zool. 1558 vache de mer (L. Joubert, trad. de G. Rondelet, Histoire entière des poissons d'apr. FEW t. 14, p. 102a); 1615 vache marine (A. de Montchrestien, Traicté Œconomie politique, p. 325); 2. a) 1285 « cuir fait avec la peau de la vache » (Rutebeuf, Les Plaies du monde ds Œuvres, éd. E. Faral et J. Bastin, t. 1, p. 380, 72: vint paire de sollers de vache); b) 1781 « panier revêtu de cuir, qu'on plaçait sur les voitures de voyage » (Carmontelle, L'Uniforme de campagne, in Recueil gén. des proverbes dramatiques, VI, p. 250 ds Quem. DDL t. 25); 3. empl. techn. a) 1491 vacque « sorte de grue » (Compte des fortifications, 16eSomme de mises, Arch. Tournai ds Gdf.); 1590 « nom d'une pièce du canon » (Brantôme, Cap. fr., 144 [éd. 1666] ds La Curne); 1690 terme d'imprimeur « cordes qui arrêtent le train de la presse » (Fur.); 1751 terme de chasse vache artificielle « machine de la forme d'une vache qui sert à la chasse aux perdrix » (Dict. universel d'agriculture et de jardinage d'apr. FEW t. 14, p. 102b); 1872 terme de métall. « branloire d'un soufflet » (Littré); d'où 1878 tirer la vache (Rigaud, Dict. jargon paris., p. 340); 1933 « déchet provenant d'un morceau de bois » (Lar. 20e); b) 1859 terme de mar. joues ou demi-joues de vache « demi-caisses de poulies » (Bonn.-Paris); id. nœuds de vache « nœud plat que l'on utilise pour réunir deux filins qui doivent être facilement dénoués » (ibid.); 1867 côtes de vache « travaux que l'on place sous les entretoises pour faciliter le hourdis du plancher » (Ch. Garnier, Monit. univ., 10 août, p. 1093, 2ecol. ds Littré); 1881 corne de vache « voussure employée pour évaser l'ouverture d'un tunnel ou d'une arche de pont » (Chabat); 4. a) 1589 terme de danse ru de vache (Tabourot, Orchesographie, fo46c ds Gdf., s.v. ru); b) 1694 terme de manège ruer en vache (Ac.); 5. 1605 vache à colas « protestant » (L'Estoile, Journal, éd. A. Martin, sept., p. 172). B. 1. a) 1619 « femme grasse et laide » (Claude d'Esternod, L'Espadon satyrique, p. 73); b) 1866 « femme ou fille de mauvaises mœurs » (Delvau, p. 391); 2. a) 1690 « personne lâche, fainéante, poltronne » (Fur.); b) 1866 « homme sans courage, avachi » (Delvau, p. 391); 1877 faire la vache « paresser » (Zola, Assommoir, p. 489); 3. 1844 « agent de police » mort aux vaches (Documents litt., II, 203 d'apr. Sain. Sources Arg. t. 2, p. 464); 4. 1891 exclam. la vache (Méténier, Lutte pour amour, p. 187); 5. 1900 « personne méchante » (Mirbeau, Journal femme ch., p. 90); 1901 agir en vache (Bruant, p. 312). II. Empl. adj. 1. 1866 « mou, sans consistance » (Flaub., Corresp., p. 231); d'où 1887 faire vache « faire chaud » (Hogier-Grison, Monde où l'on vole, p. 296); 2. 1880 « méchant, sévère » (d'apr. Esn. 1966); 1881 (Méténier, op. cit., p. 92); 3. 1925 « admirable » (Arts d'apr. Esn. 1966). Du lat. vacca « vache ». Pour l'orig. de I A 5 c vache à colas, on se réfère habituellement à l'anecdote rapportée par L'Estoile dans son Journal, loc. cit., selon laquelle les Huguenots avaient tué et mangé une vache d'un nommé Colas Panier, égarée dans un temple protestant; ce qui donna naissance à la Chanson de Colas, et au sobriquet vache à Colas que catholiques et protestants s'appliquèrent mutuellement, mais qui, en définitive qualifia ces derniers (v. Littré, s.v. vache; FEW t. 7, p. 111, s.v. Nicolaus). La loc. parler comme une vache espagnole est peut-être favorisée par le bétacisme gasc. et esp. (b et v sont prononcés v entre voy. et b à l'init. après cons.) d'où corruption de basque* (du lat. vasco): le fait que les Basques se partagent entre l'Espagne et la France et la présence à Paris au xviies. de valets basques aurait entraîné la loc. parler français comme un ou une Basque espagnol(e) (v. Littré, s.v. vache; FEW t. 14, p. 105, note 4; K. Baldinger, Influence de la langue sur la pensée ds R. Ling. rom. t. 37, p. 251). Fréq. abs. littér.: 2 084. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 1 529, b) 2 572; xxes.: a) 4 410, b) 3 526.
DÉR.
Vacher (se), verbe,fam. a) Empl. intrans., vx. Paresser, flemmarder, fainéanter, se coucher comme une vache. Dans la forêt, on le voyait étendu, étalé (...) Il « vachait »,comme il disaitavec l'expression crapuleuse qui peint ces félicités retournant à la brute (Goncourt, Man. Salomon, 1867, p. 29).Part. passé d'un verbe trans. non att. dans la docum. Les soirées passées au théâtre, les matinées vachées au lit à lire des romans (Richepin, Flamboche, 1895, p. 73).b) Empl. pronom., aéron. [Le suj. désigne un planeur, un ULM] Faire un atterrissage forcé en pleine nature. P. anal. [Le suj. désigne un parachutiste] [Hubert de Chevigny] a tenu par -40oune visibilité quasi nulle et s'est « vaché » en souplesse sur des bouts de tôle ondulée pris dans la glace (Le Figaro Magazine, 17 oct. 1987, p. 232). [vaʃe]. (Il) (se) vache [vaʃ]. 1resattest. a) 1859 « être sans énergie » (Goncourt, Journal, p. 629), b) 1987 aéron. (Le Figaro Magazine, loc. cit.); dér. sav. dés. -er a) de vache B 2, b) prob. formé à partir de l'expr. faire une vache, aller aux vaches « atterrir dans la nature » (Touring Plein Air, 15 janv. 1972 ds Petiot 1982).
BBG.Brinkmann (Fr.). Metapherstudien Das Rind. Arch. St. n. Spr. 1876, t. 55, pp. 350-352. − Gebhardt (K.). Les Francoprovençalismes de la lang. fr. R. Ling. rom. 1974, t. 38, p. 187. − Guill. Orig. gourmande 1986, p. 265. − Ménage Fr. mod. 1934, t. 2, pp. 71-73. − Quem. DDL t. 18 (s.v. vache à lait), 27, 38. − Spitzer (L.). À propos de vache type. Fr. mod. 1934, t. 2, pp. 161-162.