| TUTELLE, subst. fém. A. − DROIT 1. DR. CIVIL a) Régime de protection prévu par la loi, conférant à un tuteur assisté d'un conseil de famille et d'un subrogé tuteur, le pouvoir de prendre soin de la personne et des biens d'un mineur ou d'un interdit qu'il importe de représenter d'une manière continue dans les actes de la vie civile. Ouverture, durée de la tutelle; privilège de tutelle; fonctionnement, organes de la tutelle; mineur, incapable majeur en tutelle; rendre compte d'une tutelle; se faire décharger d'une tutelle; être déchu de tutelle; être en tutelle, hors de tutelle. Il faudra te montrer bien respectueux envers ta tante... Son mari, ce pauvre Cavrois, avait la tutelle de tes biens. Hélas, il est mort aussi! Maintenant Caroline et le comte de Praxi-Blassans gouvernent ton patrimoine (Adam, Enf. Aust., 1902, p. 60). b) En partic. ♦ Comptes de tutelle. Comptes que le tuteur doit fournir à la fin de la tutelle. Bien que Françoise fût majeure depuis un mois, les comptes de tutelle n'étaient pas rendus encore, ce qui compliquait les choses; et il devenait nécessaire de s'en débarrasser, pour dégager la responsabilité du vieux (Zola, Terre, 1887, p. 388). ♦ Conseil de tutelle. ,,Conseil spécial que le père mourant peut nommer à la mère survivante et tutrice sans l'avis duquel elle ne pourra agir comme tutrice`` (Nouv. Lar. ill.). Le père peut limiter la tutelle de la mère en lui donnant un conseil de tutelle dont elle sera obligée de prendre l'avis (Réau-Rond.1951). ♦ Tutelle dative. Tutelle déférée par le conseil de famille (d'apr. Barr. 1974). ♦ Tutelle légale. ,,Tutelle qui est déférée par la loi à l'ascendant le plus proche en cas de décès des père et mère`` (Barr. 1974). ♦ Tutelle testamentaire. ,,Tutelle qui est déférée à un parent ou à un étranger par le testament du survivant des père et mère`` (Barr. 1974). 2. a) DR. ADMIN. Tutelle (administrative). Ensemble des moyens de contrôle réglementaires dont dispose le pouvoir central sur les collectivités publiques et les établissement privés d'intérêt public en vue de les maintenir dans le respect de la loi et de faire prévaloir un intérêt public supérieur. Tutelle des collectivités; Ministère de tutelle; pouvoir de tutelle; autorité de tutelle. La tutelle administrative est une institution de l'ancien régime. En France, la liberté municipale a survécu à la féodalité (Tocqueville, Anc. Rég. et Révol., 1856, p. 110): Depuis la loi de décentralisation du 2 mars 1982, la tutelle « a priori » sur les collectivités locales a été supprimée, le représentant de l'État n'ayant, en principe, que la possibilité, au titre de la tutelle « a posteriori », de saisir le juge administratif des illégalités qu'il croit déceler dans l'action de ces collectivités.
GDEL. − Sous la tutelle de. Dans les questions relatives à la liberté d'exprimer sa pensée, il ne faut pas seulement considérer le droit qu'a celui qui parle (...) mais encore la position de celui qui écoute, lequel n'ayant pas toujours le discernement nécessaire est comme placé sous la tutelle de l'État (Renan, Avenir sc., 1890, p. 357). b) DR. SOC.
α) Tutelle aux allocations et prestations familiales. ,,Institution originale propre au Droit français qui consiste à contrôler ou confier à un tiers appelé tuteur la gestion des allocations attribuées à une famille`` (Lafon 1963). Une tutelle aux allocations familiales peut être ordonnée lorsque « les enfants sont élevés dans des conditions d'alimentation, de logement et d'hygiène manifestement défectueuses et que le montant des allocations n'est pas employé dans l'intérêt des enfants. » La Loi prévoit la nomination par le juge des enfants d'un tuteur aux allocations familiales (Les Enfants et les adolescents socialement inadaptés, Paris, Cujas, 1958, p. 261).
β) Tutelle aux prestations sociales. ,,Institution de la législation de Sécurité Sociale permettant à une tierce personne de percevoir aux lieu et place de la personne à qui elles sont dues, lorsque celle-ci ne les utilise pas normalement, non seulement les allocations familiales mais également toutes les allocations d'aide sociale et les allocations de vieillesse`` (Barr. Suppl. 1974). 3. DR. PÉNAL. Tutelle pénale. Jusqu'en 1981 ,,mesure de sûreté d'une durée maximale de 10 ans applicable aux multirécidivistes et qui s'exécute, soit dans l'établissement pénitentiaire spécialement aménagé, soit sous le régime de la liberté conditionnelle`` (cida 1973). Introduite par la loi du 17 juillet 1970 en remplacement de la relégation, la tutelle pénale est exécutoire à l'expiration de la peine ou le cas échéant, au cours de l'exécution de celle-ci dans un établissement aménagé à cet effet (Barr.1974). 4. DR. INTERNAT. (Régime de) tutelle. ,,Régime existant depuis 1945, en remplacement du régime du mandat sous l'autorité de l'O.N.U. par lequel les pays jugés incapables de se gouverner par eux-mêmes voient leur administration exercée par une puissance tutrice dans le but de les promouvoir à l'indépendance`` (Barr. 1974). Conseil de tutelle des Nations Unies. L'accord de tutelle comprend, dans chaque cas, les conditions dans lesquelles le territoire sous tutelle sera administré et désigne l'autorité qui en assurera l'administration (Charte Nations Unies, 1946, p. 95). ♦ Autorité de tutelle. ,,Un ou plusieurs États ou les Nations Unies chargés d'administrer les territoires sous tutelles`` (Sand-Béa Pol. 1976). B. − Courant 1. a) Protection vigilante, sauvegarde exercée à l'égard de quelqu'un ou d'une collectivité. Accorder sa tutelle; se placer, se mettre sous la tutelle de qqn; prendre sous sa tutelle. Elle-même [la mère du poète] prépare au fond de la Géhenne Les bûchers consacrés aux crimes maternels. Pourtant, sous la tutelle invisible d'un Ange, L'Enfant déshérité s'enivre de soleil (Baudel., Fl. du Mal, 1857, p. 12).Le cheik Abdullah, chef actuel du Cachemire, avait offert ses services au Pakistan en proposant que ce pays reconnaisse « l'indépendance » du Cachemire sous la tutelle de Karachi (Combat, 19-20 janv. 1952, p. 4, col. 1). b) MAR. Tutelle de navire. ,,Symbole du saint, patron de ce navire, sculpté à l'arrière`` (DG). 2. État de dépendance d'une personne soumise à une surveillance contraignante. Tutelle étroite, pénible, pesante, tracassière; s'affranchir d'une tutelle; se libérer de la tutelle de qqn; secouer la tutelle de qqn; être soumis à la tutelle de qqn; tenir qqn sous sa tutelle, en tutelle; être, tomber sous la tutelle de qqn. Quelle force de libération générale pourra émaner un jour de la France républicaine affranchie des castes du passé et de la tutelle d'Église (...)? (Jaurès, Paix menacée, 1914, p. 258).S'il avait dû retourner en Amérique − à Albany, puis à New-York ou à Newport − ce n'avait été que par nécessité ou par piété filiale, quand il s'était senti maître de ses actions, émancipé de la tutelle familiale (Blanche, Modèles, 1928, p. 148). − P. plaisant. Le vin avait réduit mon ancien tuteur au silence, et il fallait le mettre en tutelle pour qu'il ne lui arrivât aucun malheur en retournant chez lui (Balzac, Aub. rouge, 1831, p. 313). Prononc. et Orth.: [tytεl]. Ac. 1694: tutelle; 1718: tutele; 1740: tutèle; dep. 1762: tutelle. (Pour è ou doublement de la cons. v. jeter). Étymol. et Hist. 1. 1332 dr. civil (Regist. de l'échevin. de Saint-Jean-d'Angély, I, 79 ds Gdf. Compl.); 2. 1355 « protection, sauvegarde » (Bersuire, Tit. Liv., ms. Ste-Genev., fol. 353 ro); 3. 1513 « état de dépendance » tenir gens d'esglise en tutelle (Gringore, St Loys, 1. III [II, 94] ds Hug.). Empr. au lat.tutella « action de veiller sur; protection, garde; [terme de dr.] tutelle ». Fréq. abs. littér.: 356. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 847, b) 420; xxes.: a) 473, b) 280. |