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TRUFFER, verbe trans.
A. −
1. Truffer qqc.Garnir de truffes. Truffer un pâté, une volaille. Truffer le faisan, le brider et le tenir 2 jours au frais (Pellaprat, L'Art culin. mod., Lausanne, R. Kramer, 1972, p. 471).
2. P. anal. Truffer qqc. de qqc.Parsemer en abondance, remplir. Synon. farcir.L'ensemble de la position était truffé de pièges, farci de chevaux de frise et les réseaux de nos barbelés, touffus à souhait, s'étendaient sur une vaste profondeur (Cendrars, Homme foudr., 1945, p. 21).Avant l'apparition du tourisme, les voyages sont dotés d'un important coefficient d'insécurité. Ils sont truffés d'aléas, lents et coûteux, même dans les meilleures conditions (Defert, Pol. tour. Fr., 1960, p. 30).Au part. passé. Ses lèvres tremblaient au-dessous d'un nez truffé de points noirs (Camus, Étranger, 1942, p. 1133).
En partic. [Le compl. désigne un texte ou un discours] Truffer un discours de citations. Je ne sais quelle idée me prit, de lui parler de ma prostituée à la jambe coupée, et, entraînée, je lui rapportai quelques-unes des anecdotes dont elle truffait sa conversation (Daniel-Rops, Mort, 1934, p. 293).Au part. passé. Une langue technique truffée de néologismes (Marrou, Connaiss. hist., 1954, p. 93).
B. −
1. Truffer qqn
a) Pop. Tromper, prendre quelqu'un pour une truffe. Je récompense si on me sert, mais je suis sans pitié si l'on veut me truffer (Druon, Lis et lion, 1960, p. 140).
Empl. pronom. Se truffer de qqn.Se moquer de quelqu'un. Voilà bien longtemps que je n'ai bouté le pied à Saint-Xist (...) Mais au moins, Fumet, tu ne te truffes pas de moi (Fabre, Courbezon, 1862, p. 160).
b) Battre, donner de nombreux coups. On s'est tortillé tous ensemble avec la femme du costaud... Ils me tiraillent férocement... Pour m'éloigner de son étreinte, il me truffe le cul à grands coups de grolles (Céline, Mort à crédit, 1936, p. 148).
c) Arg. ,,Blesser avec une arme à feu`` (Le Breton 1960). Empl. pronom. réciproque. Voulant pas céder le trottoir, trois Corses et deux Ratons s'étaient truffés à bout portant rue Pigalle (Le Breton1960).
2. Truffer qqn de qqc.
a) Fam. Couvrir en abondance de quelque chose. Et elle avait trouvé cela, cette Grecque, de se jeter à la tête de ce pauvre Forie, et de le câliner (...) et de le truffer de baisers et de caresses en ma présence (Lorrain, Phocas, 1901, p. 55).Au part. passé. Pour blanchir et poudrer mes épaules, mes genoux truffés de « bleus » (...) je ferme la porte (Colette, Vagab., 1910, p. 45).
b) Arg. Remplir, farcir. Au part. passé. Il se refroidissait dans le brouillard de l'aube, truffé réglementairement de six balles de revolver (Queneau, Loin Rueil, 1944, p. 217).
Prononc. et Orth.: [tʀyfe], (il) truffe [tʀyf]. Att. ds Ac. dep. 1798. Étymol. et Hist. A. Ca 1223 trans. « se moquer de » (Gautier de Coinci, Miracles, éd. V. Fr. Koenig, II Pr 1, 362: truffer truffes et faintes), rare dans la lang. littér. apr. le xvies. (Hug.); devenu pop. B. 1. a) 1829 part. passé adj. empl. fig. « qui a mangé beaucoup de truffes, bourré de truffes » (Béranger, Chans., t. 2, p. 140: Car dans ce ventre étoffé [le parti ministériel de la Chambre] Je suis entré tout truffé); b) 1825 dinde truffée (Brillat-Sav., Physiol. goût, p. 97); 1832 « garnir de truffes » (Raymond); 2. « garnir, remplir de quelque chose » a) 1835 un écrit (Gautier, Mllede Maupin, p. 20: ce grand flandrin de substantif dont ils truffent... le vide de leurs colonnes); 1936 (Colette, Apprent., p. 117); b) av. 1896 (Arène, Veine argile, p. 190: ces clous... qu'aujourd'hui les anarchistes emploient ... à truffer leurs bombes); c) 1932 (L. Daudet, Rech. Beau, p. 143: [Descartes] est truffé d'inanités); 3. part. passé adj. « parsemé de taches comme la peau d'une volaille truffée » 1881 (Goncourt, Mais. artiste, t. 2, p. 214: chiens truffés de grandes taches noires); 1896 (Nocard, Leclainche, Mal. microb. animaux, p. 459: la région [d'un muscle lésé] prend ... un aspect truffé); 4. 1933 « bourrer de coups » (Lar. 20e); 1936 (Céline, loc. cit.). Dér. de truffe*; dés. -er.
DÉR.
Truffage, subst. masc.,art culin. Garnissage aux truffes (d'un plat, d'une préparation, d'un mets). Truffage d'un pâté, d'une volaille. P. métaph. La maison était de pierre de Caen comme les logis abbatiaux qui n'utilisaient presque jamais la construction en bois apparents et fourrures de briques, ces truffages si pittoresques (La Varende, Cœur pensif, 1957, p. 39). [tʀyfa:ʒ]. 1resattest. a) 1938 d'une volaille (Mont.-Gottschalk), b) 1949 fig. « intercalation d'un élément » (Ricœur, Philos. volonté, p. 48); de truffer, suff. -age*.
2.
Trufferie, subst. fém.,fam. Tromperie. Fontanet, qui avait le profil du renard, en avait aussi les mœurs. Et, sans son goût pour la trufferie, sans sa perpétuelle démangeaison d'engeigner autrui, je crois qu'il aurait recherché un compagnon moins candide que moi (A. France, Vie fleur, 1922, p. 398). [tʀyfʀi]. 1reattest. ca 1223 « moquerie, tromperie » (Gautier de Coinci, Miracles, éd. V. Fr. Koenig, 2Pr 1, 146), rare dans la lang. littér. apr. le xvies. (Hug.), devenu pop.; de truffer « se moquer de », suff. -erie*.
3.
Truffeur, -euse, subst.,fam. Personne qui trompe. Les affectations nous agacent autant que les fourberies. Les donneurs de baie nous ennuient tout comme les truffeurs, et les ficelles nous fatiguent à l'égard des balançoires. Le faux sous toutes ses formes, dans la vie et dans l'art, dans la parole et dans les choses, devient notre bête noire comme la fausseté (Amiel, Journal, 1866, p. 435). [tʀyfœ:ʀ], fém. [-ø:z]. 1reattest. ca 1175 trufflere cas suj. « trompeur, menteur » (Horn, éd. M. K. Pope, 804), rare apr. le xvies. (Hug.), devenu pop.; de truffer « tromper », suff. -eur2*.
BBG.Gary-Prieur (M.-N.). Contribution à l'ét. de qq. règles sémantiques... Thèse, Paris, 1979, pp. 496-497.